Article de La Tribune du 5/01/2017
L'observatoire européen des drogues veut embaucher des hackers pour pénétrer les réseaux de drogues sur le net. Cette stratégie offensive contre les substances illicites doit permettre de renforcer les connaissances sur ce marché en ligne parfois utilisé par les trafiquants.
La lutte contre le commerce illicite s'accélère sur le net. L'observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) a dévoilé sa nouvelle stratégie pour 2025 afin de lutter contre les trafics de drogue opérés sur le numérique. Le quotidien belge Le Soir a dévoilé les grands principes de cette offensive.
L'expertise des hackers au centre de l'offensive
Pour renforcer cette lutte contre le trafic en ligne, l'agence européenne des drogues prévoit entre autres de s'appuyer sur des hackers et des repentis du commerce illicite. Le directeur belge de l'organisme Alexis Goosdeel a ainsi déclaré qu' "il faut évidemment s'appuyer sur d'anciens braconniers assagis ou repentis".
Les agences publiques et administrations procèdent régulièrement à des campagnes de recrutement qui ciblent ce type de profil. En janvier 2016, l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) en France avait posté un clip de recrutement sur les réseaux sociaux qui avaient suscité de nombreuses réactions et moqueries.
Enfin, la nouvelle stratégie de l'agence veut intensifier sa lutte contre les nouvelles drogues de synthèse en apportant "une réponse plus rapide et plus efficace". D'après le journal belge, les nouvelles molécules qui ne figurent pas sur "la liste d'interdiction se trouve de facto autorisée." L'observatoire souhaite donc être plus rapide face à l'existence de nouvelles substances et "développer les outils d'information et d'analyse nécessaires pour identifier les nouveaux développements" explique Alexis Goosdeel.
Selon le rapport 2016 de l'observatoire européen, si l'offre de drogues en ligne semble en augmentation, les auteurs du document parlent "de chiffres très faibles" concernant ce marché illégal. Ils soulignent néanmoins "un potentiel d'expansion considérable" dans ce domaine.
"À l'heure actuelle, ces marchés (ndlr : en ligne) représenteraient une petite part du commerce des drogues illicites et bon nombre des transactions se dérouleraient au niveau des consommateurs. Cependant, le commerce des drogues en ligne peut encore s'étendre."
Les produits les plus fréquemment rencontrés sur les marchés en ligne seraient le
cannabis sous toutes ses formes et la
MDMA (ecstasy) aux côtés de divers médicaments.
Des estimations complexes à mesurer
Les estimations existantes sur le marché de la drogue en ligne sont disparates et doivent être prises avec des pincettes. Selon une étude du think-tank Rand réalisée pour le ministère de la Santé des Pays-Bas, ces marchés pourraient générer entre 10,5 millions et 18 millions d'euros par mois. Ce qui se révèle très faible au regard de l'ensemble des transactions en Europe qui sont estimées à 2 milliards d'euros par mois. Rien qu'en France, le marché de la drogue était évalué à 2,3 milliards d'euros en 2015 par l'institut national des hautes études de la sécurité et de la justice.
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Par ailleurs, l'arrivée de nouvelles molécules et drogues de synthèse complique l'analyse des chercheurs comme le rappelle le rapport public "L'argent de la drogue en France" publié en octobre dernier :
"Cette évolution croissante de l'innovation moléculaire via Internet rend l'analyse du marché des drogues de synthèse particulièrement complexe. Cette difficulté s'accroît d'autant plus que de nouvelles molécules, ou classes de molécules, sont accessibles via Internet et que l'offre est donc mondiale."