[ Expériences ]

RT - Coincée dans le rôle de Soldat de l'armée de Gaïa

Rentrer dans une dance transcendée presque chamanique au service de Gaïa la source, l’unique…

Me sentir soldat sans violence, combattant pacifique, donneur et receveur d’énergie, partager à l’union avec une foule inconnue. Et devenir tout simplement heureux. Heureux et con, riant comme des enfants.

Le voyage n’est pas tant visuel, tout est dans le ressenti et au cœur de la foule qui vibre je m’amuse à me priver des miens, de sens. Privée des sens physiques pour être plus à l’écoute des sens psychiques.

La vue pour commencer, voir sous mes paupières ce que l’esprit a de plus beau à me révéler. Des fractales, ces losanges encore et toujours qui replissent des formes arrondies, des serpentins qui serpentent, des traits qui se tracent et des images qui s’imposent. Rouvrir les yeux.

Fermer les oreilles, le son résonne, résonne fort au-dedans. Se renfermer pour mieux apprécier le filtre de ma peau sur le son. Déboucher les tympans.

Les basses transpercent et les corps bougent sans raisonnement ni logique. Parfois en boucles répétitives de quelques mouvements saccadés, parfois en mouvement bas, plus animal, presque tribal, souvent en éclair de doigts qui vrillent tout autour du visage.

Réduire l’amplitude du mouvement, les vibrations massent de l’intérieur en frissons de plaisir diffus. Le sourire s’affiche et s’étire, je vibre à l’unisson avec un moment présent devenu extraordinaire et hors de toute réalité.

Ouvrir tous ses sens physiques… essayant au maximum de capter l’intensité de l’influence extérieure, la positivité des ondes échangées. Je m’ouvre de tout mon être tentant de fusionner avec un tout, de ressentir ma place de maillon dans l’armée de Gaïa…


Taper du pied pour envoyer de l’énergie à la mère nourricière, taper la terre de toute la force de mes talons pour donner l’amour inconditionnel à cette matrice qui sort notre réalité du conditionnement, pour lui donner l’envie de nous accueillir un peu plus longtemps encore, de nous donner l’opportunité de la servir un peu plus souvent de cette manière tribale, instinctive et tellement libératrice.

S’envoyer en terre, laisser pousser ses racines, devenir un avec le tout en rentrant physiquement dans la musique. Mouvement de brasse, je nage et me noie en me délectant du boom qui assourdit mon air et me reconnecte avec l’écho de mon cœur d’enfant.

Et là, à m’enjailler comme une perchée, je sens avec certitude que, maintenant la gosse que j’étais est fier de l’adulte en devenir que je reste. Dans cette délicieuse parenthèse de volupté presque aérienne malgré l’ancrage au sol devenu boueux et glissant, malgré la salle plongée dans l’obscurité, je me sens scintiller de la plus jolie des énergies.

Et quand les yeux se ferment un peu, le pas se ralentit et la jambe pèse plus, je viens récupérer de la force, tout n’est qu’histoire de connexion, d’énergie. Pour relancer la machine, je viens me charger directement à la source : le son…

Parfois c’est un autre piétinant qui va vous donner le coup de clé du démarrage, le coup de turbo pour y retourner, parfois c’est vous qui le mettez, parfois c’est personne, juste l’énergie pure du son. Alors je m’aligne avec les autres et entre dans des boucles répétitives de mouvements transcendés, alignés, sautillés, ancrés, à côté des autres dans un synchronisme que, de mon point de vue perché, je trouve alors parfait.


L’acide donne des supers pouvoirs, notamment celui de laisser la force de l’esprit prendre le contrôle total, finit les envies primaires, le pipi, la faim, la fatigue, le mal de jambe… seule l’hydratation demande un effort de mémoire récurent que je suis prête à concéder. On oublie tout, je cherche tout mais l’eau c’est la vie et vue les litres transpirés, il ne faut pas oublier de s’hydrater si l’on ne veut pas éviter la vie.

Transpirer à se vider de sueur, à avoir le pore vide, à tremper le tee-shirt qui s’essor en goutte de fou rire. A rentrer dans la musique avec une envie et un amour dévorant. La toile d’araignée, la masse gluante et bulleuse du son s’accroche à la peau comme recouverte d’une fine couche poudreuse.

Voilà, je me sens un peu comme l’intérieur d’un gant en latex, tout devient cette fine poudre, même l’eau prend le gout poussiéreux de cette matière. Un gant latex attaché à un sèche-cheveux lancé à fond et agitant les cinq doigts gonflés dans des mouvements vides de sens et pourtant si connecté au souffle de vie.

L’attraction est si forte, comme une gravité verticale nous maintenant à distance courte de la source du son. Il devient difficile voir presque psychologiquement douloureux de s’extirper tant l’intensité du moment redescend dès que l’on s’éloigne du mur. L’appel de la matrice à venir taper sur son rythme enchainé se fait de plus en plus fort alors on reste…

Parfois l’intensité devient trop présente et il faut sortir pour respirer, je sens le corps douter, l’énergie mentale est si forte, la puissance du trip si résonnant, l’envie de travailler si présente que le cœur bat vite, trop ? Ralentir le rythme et sortir.

Le dehors ennuie vite, alors on ballade autour, et là c’est essentiel d’avoir de bons amis et un bon mental… on passe alors en mode centre aéré, on trouve des jeux, des copains poissons dessinés en 3D accrochés sur les murs, des vrais humains que je propose de rajouter à ma collection s’ils sont gentils et que j’évite s’ils sont bien plus perchés que moi… bref on vague et l’on vogue… c’est joli et marrant mais le son revient toujours, taper plus fort… Alors on retourne dans l’antre encore et toujours.

Transcendée, totalement ailleurs et pourtant si connectée avec le moment, la foule, le son, le présent… Je retourne aligner ma perche avec celle des autres, prendre et donner de l’énergie au nom de Pachamama. Une fois que la boucle est une centaine de fois bouclée, je me tourne vers le monde du dehors, essayant alors d’envoyer toutes ces bonnes vibrations accumulées… La plante des pieds pour l’ancrer dans Gaïa, le langage de l’instinct pour le diffuser aux autres sautilleurs.

Parfois c’est l’autre qui renvoie et qui recharge… Moi, j’ai la chance d’avoir un ami lutin joyeux qui d’un regard malicieux, deux trois tours de mains et puis tournoient me fait repartir à chaque fois…  on tourne autour de l’aura de l’acide partagé, le Californien, nous fait rire en grimaçant, on se tort de joie et de transe, on ressort sur nos pieds et l’on repart dans nos boucles individuelles se retrouvant de temps en temps, échangeant énergie et sourires d’enfants, jamais trop prudent, jamais trop sage, on défile la soirée sur de beaux paysages…