« La codéine, une soupape de sécurité » : différence entre les versions
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Version du 25 mai 2013 à 19:05
Dans les années 80, les usagers de drogues utilisaient massivement la codéine pour pallier le manque entre 2 prises d'héro, principalement sous la forme des célèbres petits cachetons verts de Néo-Codion®. Plus de dix ans après l'avènement de la substitution officielle, certains continuent à en consommer de manière non négligeable. Néo-codion®, Codoliprane®, Tussipax®..., petite enquête chez les UD sur ce qu'apporte aujourd'hui cette particularité française qu'est la vente libre de codéine.
Les années 80
Lila a 40 ans. Dans les années 80, elle utilisait les Néo entre 2 plans came, en les faisant «si besoin, monter avec une Pelforth brune». Quand elle a «voulu arrêter la came en 1991», elle s'est naturellement tournée vers les Néo-Codion®, «d'abord à 20 par jour, puis en diminuant progressivement jusqu'à 5 par jour en 2 prises depuis plus de dix ans». Lila fait partie de ces nombreux consommateurs de Néo-Codion® actuels. Plutôt la quarantaine, plutôt insérés, ils ont arrêté la came avec les Néo avant la mise en place des traitements de substitution. Et ne voient ni l'intérêt « d'en chier pour arrêter complètement », ni celui de passer aux traitements de substitution officiels, une «régression dans l'addiction», car ils ajoutent une dépendance au médecin prescripteur à celle du produit. Pouvoir acheter de la codéine en vente libre, c'est s'affranchir de cette dépendance institutionnelle. De plus, souvent loin de la consommation de produits illicites, ces consommateurs ne se reconnaissent pas dans l'image de «drogué» véhiculée par les TSO. La codéine leur permet de « banaliser » leur dépendance, de la rendre plus lisse, et de mettre de la distance par rapport à cette image.
Soupape de sécurité
L'utilité de la vente libre ne se limite pas aux anciens camés des 80's. Elle s'étend, en effet, aux personnes dépendantes aux opiacés, qui ne peuvent ou ne veulent pas s'intégrer dans le cadre de la substitution, et qui utilisent les codéinés comme produit d'appoint. Comme Stéphane, qui prend 120mg par jour de Skenan® LP par voie orale depuis deux ans. Depuis qu'il prend de la morphine, il a stoppé la consommation de toute autre drogue, mais confronté à l'ambiguïté et à l'arbitraire du système, il n'a pas pu trouver un médecin qui lui prescrive du Skénan®. Il est donc tributaire du marché noir et lorsque le dealer n'a plus de Skénan®, il «compense avec quelques boîtes de Tussipax® pour soulager le manque et retrouver des effets un peu similaires». Une relative stabilité psychique et physique, sans course à la consommation d'autres opiacés illicites. La codéine en vente libre constitue également une aide non négligeable pour les sevrages d'opiacés. Comme pour Djamel, qui a arrêté le Subutex® depuis quelques mois. La « déprime le bouffe », et son état est vraiment «en dents de scie». Refusant de recourir aux antidépresseurs et de s'installer dans une autre dépendance, il fait «une petite pause codéine» quand il veut se sentir bien. Ça lui permet de gérer son sevrage, de sortir un peu plus en douceur de la dépendance aux opiacés et du système de soin spécialisé, mais c'est surtout une soupape de sécurité qui lui évite de recourir au marché noir quand le mal-être, responsable de bien des rechutes, devient trop pressant.
Si, comme pour tout produits psychoactif, il y a autant d'usages que d'usagers, et si la codéine est loin d'être la panacée, au vu des exemples ci-dessus, sa vente libre reste donc un maillon important et complémentaire du dispositif. En permettant une autosubstitution et une autogestion de sa consommation d'opiacés ou de son sevrage, elle laisse, en effet, une marge de liberté et de sécurité aux usagers qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent pas, ne veulent pas, ou ne veulent plus voir un médecin.
Attention paracétamol !
Le paracétamol contenu dans l'Efferalgan® codéiné ou le Codoliprane® est très toxique pour le foie. À des doses supérieures à 4 g/jour, il peut, en effet, déclencher des dommages irréversibles. Les personnes fragilisées par une hépatite doivent donc éviter à tout prix la prise massive de ces médicaments. Quitte à prendre de la codéine, rabattez-vous plutôt sur des médicaments qui ne contiennent pas de paracétamol !