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Les overdoses par opiacé
Le terme d’overdose est une expression anglaise signifiant littéralement "surdose " excessive. Elle désigne en fait la prise d'une dose excessive de drogue. Une overdose peut être mortelle. Après une période d'excitation brève (du fait de l'abondance des récepteurs opiacés dans le système limbique), le toxicomane devient somnolent puis s'installent stupeur et coma. Toutes les fonctions vitales peuvent être déprimées. Le coma, la dépression respiratoire et le myosis forment la triade classique de l'intoxication aiguë aux opiacés.
- Le coma : Il peut résulter d'une anoxie intense, de la prise concomitante de psychotropes ou de la puissance hypnogène de certains opiacés synthétiques. Il s'agit alors de l'évaluer au moyen de l'échelle de Glasgow.
- La dépression respiratoire: Les opiacés agissent par réduction de la sensibilité des centres respiratoires du tronc cérébral à une augmentation de la PaCO2. A forte dose, ils dépriment la respiration ® bradypnée ( < 8 resp./min.), avec risque d'apparition du rythme de Cheyne-Stokes. A dose toxique, ils entraînent un arrêt respiratoire ® apnée. Dans ces deux cas, on peut noter la survenue d'une cyanose périphérique qui traduit de l'intensité de l'hypoxémie.
- Le myosis : Le diamètre pupillaire est sous la dépendance de diverses structures du tronc cérébral, riches en récepteurs opiacés. Dans tous les cas, on note un myosis serré, punctiforme, symétrique, à l'exception d'une intoxication mixte à l'atropine, à la péthidine, ou en cas d'hypoxie cérébrale prolongée
On peut également relever un encombrement bronchique, une hypothermie, des vomissements, une tachycardie initiale suivie d'une bradycardie et d'une hypotension artérielle favorisée par l'hypoxie, susceptible d'évoluer vers l'état de choc. La sensibilité individuelle (indépendamment d'un terrain pathologique), l’insuffisance rénale et l'insuffisance hépatique peuvent influencer considérablement la pharmacocinétique des opiacés.
Fait relativement nouveau dans le milieu toxicomane, il est des plus en plus fréquent de se trouver face à une polyintoxication, conduisant à des troubles combinés et qui ne répondent pas toujours au traitement conventionnel de l'overdose par opiacés pures. Cette polyintoxication (benzodiazépines, antidépresseurs, antalgiques non-opiacés, barbituriques, alcool, etc ... ) vise à renforcer les effets psychodysleptiques des substances consommées et d'en augmenter aussi bien l'effet immédiat que la durée d'action.
Circonstances de l'overdose
Elles sont importantes pour évaluer la gravité de l'OD mais surtout pour dépister les situations à risque et, ainsi, mieux les prévenir. La première circonstance en importance est la perte de tolérance aux opiacés. Cette perte de tolérance peut survenir après une incarcération ou une hospitalisation ou après un arrêt de la consommation d'opiacés. Ainsi une étude anglaise a montré que la mortalité après arrêt des TSO (Subutex ou Méthadone) était multipliée par 8 (800 %!!) dans les 2 mois suivant cet arrêt. La tolérance aux opiacés baisse très vite en cas d'arrêt des prises et peut mener à une OD en cas de reprise après seulement une semaine d'arrêt. Dans tous ces cas, une reprise progressive avec des doses tests est essentielle.
La deuxième circonstance est la voie d'administration. La voie IV est d'effet rapide et peut entraîner une OD pour des doses bien tolérées par les autres voies. Les injecteurs sont donc exposés de façon plus importante aux OD . D'autres circonstances peuvent aussi être difficiles à prévenir comme l'augmentation de l'absorption des patchs de fentanyl en cas de fièvre.
La troisième circonstance est la variabilité de la pureté du produit acheté illégalement, ainsi que la présence, parfois, de produits de coupe toxiques. Ainsi, la vente d’héroïne de grande pureté a souvent amené des « épidémies » d'OD. Là encore l'augmentation prudente des doses quand le produit est mal connu et la pratique de tests avant consommation sont indispensables.
Le traitement des overdoses
L'overdose reste la seule urgence vitale chez l'individu assujetti à une toxicomanie aux opioïdes.
En cas d'arrêt cardio-respiratoire, entreprendre une réanimation cardio-pulmonaire en fonction des réelles chances de survie. A ce stade, l'efficacité de l'administration d'un antagoniste (naloxone) n'a pas été clairement démontrée. Cependant, l'American Heart Association recommande l'injection de naloxone par bolus de 2 mg IV, 'répétée " à court intervalle " jusqu'à une dose totale de 10 mg.
En Cas de troubles de la fonction respiratoire : la dépression respiratoire peut être corrigée par des moyens pharmacologiques (nalorphine, naltrexone, naloxone) ou mécaniques (ventilation au masque et intubation).
La naloxone
La naloxone (Narcan), antagoniste pur des morphiniques, est l'antidote de choix dans le traitement des overdoses par opiacés. Elle est synthétisée à partir de la thébaïne, alcaloïde présent en grande quantité dans la Papaver Bratectum.
Elle agit par antagonisme compétitif, en déplaçant très rapidement de leurs récepteurs toutes les molécules de l'opiacé. Elle lève la dépression respiratoire - par voie de conséquence le coma - , corrige le myosis et indirectement le solde des effets secondaires induits par les narcotiques opiacés.
La naloxone se présente sous forme d'ampoule de 1 ml contenant 0,4 mg de chlorhydrate de naloxone. Elle est administrée par voie parentérale (IV, IM, SC). Elle est totalement dénuée d'effet pharmacologique chez le sujet qui n'a pas reçu d'opiacés.
Très liposoluble, elle traverse extrêmement vite la barrière hémato-encéphalique. Le délai d'action est très court : 1 minute après injection IV et 5 minutes en IM. Son métabolisme est hépatique. Son effet antagoniste est court : 30-45 minutes en IV et 120-150 minutes en IM.
L'absence de réponse, la persistance du coma avec reprise d'une ventilation spontanée après administration appropriée de naloxone, permet de penser que le coma n'est pas essentiellement dû à un surdosage pharmacologique opioïde (intoxication mixte, coma post-anoxique, hypothermie profonde, hypoglycémie, etc...). Soulignons qu'une intoxication massive à la méthadone peut être rebelle à une posologie standard de naloxone.
Exemple de protocole hospitalier d'utilisation au groupe sanitaire de Lausanne
- Si Coma avec fréquence respiratoire > 8/minute.
- Inhalation d'02 6 I./minute.
- Voie veineuse NACI 0,9 % 60 gttes/minute.
- Préparation 1 ampoule de Narcan 0,4 mg.
- Surveiller la fréquence respiratoire.
- Si Coma avec fréquence respiratoire < 8/minute.
- Inhalation d'02 6 I./minute ou ventilation au masque si présence de cyanose ou volume courant insuffisant.
- Voie veineuse NACI 0,9 % 60 gttes/minute.
- Injection Narcan 0,2 mg IV.
- Répéter 0,2 mg IV si fréquence respiratoire toujours < 8/minute après 5 minutes.
- Répéter l'opération jusqu'au maintien d'une fréquence respiratoire à 8/minute.
- Puis injection de 0,4 mg IM de Narcan.
- Coma avec arrêt respiratoire.
- Ventilation assistée à 100 % d'02.
- Voie veineuse NACI 0,9 % 60 gttes/minutes.
- Injection Narcan : 0,4 mg IV.
- Répéter si une fréquence respiratoire > 8/minute pas obtenue après 2 minutes.
- Prise en charge dans l'ambulance.
- Répéter 0,4 mg par 5 minutes en cas d'insuccès.
- Puis injection de 0,4 mg IM de Narcan : Dose maximale : 1,6 mg IV (4 ampoules).
En raison d'un risque de réveil "explosif" avec fuite du patient, il est recommandé d'injecter d'abord la dose "dépôt" IM et d'éviter l'injection IV "flash". Dans certaines situation, il peut être préférable de maintenir une somnolence superficielle, à condition de surveiller attentivement la fonction respiratoire (rythme + volume courant). IMPORTANT: l'antagonisme de la naloxone est de courte durée. Ceci impose une surveillance rigoureuse de plusieurs heures en milieu hospitalier pour prévenir le risque de remorphinisation secondaire, sachant que l'action dépressive de l'héroïne dure de 6 à 8 heures.
La Naloxone sur les lieux de consommation ?
Actuellement La Naloxone n'est pas disponible en prescription aux usagers. De nombreuses institutions (dont l'OMS) ont fait valoir que la mise à disposition de naloxone aux usagers et à leurs proches permettraient probablement de sauver des milliers de vie tous les ans.
La Naloxone a peu de toxicité propre (notamment aucune chez la personne n'ayant pas pris d'opiacés). Le seul inconvénient potentiel sévère serait le déclenchement d'une crise de manque aiguë chez une personne n'étant pas en OD ou si la dose employée est excessive par rapport à l'OD.
Cette mise à disposition est déjà effective dans de nombreux pays et dans plusieurs états des USA. Voir par exemple au Canada [1]
Toutefois la mise à disposition « communautaire » pose un certain nombre d'interrogations sur les aspects pratiques , la sécurité d'emploi, l'optimisation de l'efficacité, la place des autres interventions, la formation des usagers et surtout une gestion globale de la RdR (Réduction des Risques) au service de la prévention des OD.
La Dose
Chez une personne ne prenant pas d'opiacés, c'est une question sans intérêt. La naloxone n'a pratiquement pas de toxicité. Par contre, chez une personne sous influence des opiacés la naloxone entraîne un antagonisme aigu des opiacés et un syndrome de manque aigu, qui peut être sérieux. La Naloxone est donc formellement contre indiquée chez l'usager d'opiacés , en dehors de l'OD. Et en cas d'OD « mineure » une dose excessive peut être pire que le surdosage. C'est pourquoi il est important de réserver son emploi aux OD comportant un risque réel. Dans le protocole médical décrit plus haut concernant un patient comateux (Protocole de Lausanne) la Naloxone n'est injectée que si le rythme respiratoire est en dessous de 8/mn !! ( Il est d'ailleurs important de signaler que la naloxone n'est pas là pour réveiller (d'un coma) mais pour faire respirer. ) Et la naloxone est injectée par voie IV à doses incrémentales.
Le problème d'un protocole « à domicile » est qu'il ne peut pas reprendre ce protocole pour professionnels, munis de matériel de réanimation. Il faut donc trouver une dose qui soit « en moyenne » suffisante pour sauver le patient de l'OD sans entraîner de crise de manque excessive.
La fourchette indiquée par les différents articles va en général de 2 à 5 ampoules (0 ,8 à 2 mg) en IM (Intra-musculaire), SC (Sous-cutané) ou IN (Intra-nasal), qui peut être répétée si besoin soit dans les 10 mn suivantes si l'effet est inefficace (mais le plus probable est qu'il y a d'autres produits en cause) , soit 30 à 90 mn plus tard s'il y a récidive et que les secours ne sont pas encore arrivés.
Il faut toutefois remarquer que les OD d'opiacés ne demandent pas tous la même dose. Ainsi si une dose forte peut être utile chez des usagers de drogue illégale utilisant a priori de fortes doses, les usagers de dose a priori plus « raisonnables » ne demandent pas forcément des doses massives de naloxone. Par exemple des cancéreux douloureux traités par opiacés (patchs de Fentanyl, Skenan) risquent de faire une crise de manque aiguë et douloureuse si la dose de naloxone est excessive. Une formulation nasale moins dosée (mais à répéter si besoin) pourrait être utile dans ces cas.
La Voie d'administration
La voie veineuse est la plus utilisée en intervention médicalisée mais clairement elle demande une certaine expertise et peut demander du temps pour être disponible. En urgence les voies IM, SC et IN sont donc préconisées. Alors que l'effet demande quelques secondes par voie IV (à condition qu'il y ait une circulation) la voie SC agite en 6 mn environ et la voie IN en 8 mn.
Il est donc évident qu'un malade en apnée (absence de respiration) doit être ventilé au moins quelques minutes en attendant l'effet de la naloxone. L'injection IM ou SC se fait avec les ampoules injectables « standard ». Par contre l'emploi IN de ces ampoules n'est pas optimal , puisqu'environ 5 ml doivent être instillés, ce qui conduit à une perte d'efficacité par perte de liquide. Il semble qu'une quantité de 1 ml par narine soit un maximum pour une bonne efficacité. Il sera donc nécessaire (mais prévu) d'avoir une forme nasale spécifique , plus concentrée.
La plupart des experts penchent plutôt sur la mise à disposition de dispositifs d'instillation nasale, plus pratiques d'emploi que la forme injectable et n'exposant pas au risque associé aux aiguilles.
Formation à l'usage et au secourisme associé
L'administration de Naloxone demande quelques minutes pour agir et donc, en cas d'apnée sans arrêt circulatoire, la survie dépendra essentiellement de la possibilité d'assurer une ventilation artificielle. Or, de plus en plus, dans l'enseignement du secourisme de l'arrêt cardio-respiratoire, le bouche à bouche est plutôt évité, pour des raisons d'hygiène (risque infectieux chez le secouriste). Certains matériels, parfois assez simples, permettent de ventiler sans recourir au strict bouche à bouche, (canule, masque, soufflet) mais ils ne sont pas disponibles en routine.
Pourtant, spécifiquement dans la réanimation de l'OD des opiacés (et aussi des psychotropes) la respiration est une cible prioritaire et la pratique du bouche à bouche peut être salvatrice. Évidemment cette pratique demande une formation certaine.
Si la personne en OD est en arrêt cardio-respiratoire, clairement, la Naloxone n'a aucun intérêt immédiat et la survie dépendra entièrement de la qualité du secourisme.
C'est pourquoi une formation au secourisme des intervenants éventuels paraît incontournable. Toutefois on peut remarquer, qu'en l'absence de formation de l'entourage, l'administration de Naloxone ne sera pas utilisée de façon optimale mais peut encore constituer une chance supplémentaire. Dans le même ordre d'idée, une formation non optimale par exemple par des cours sur Internet peut être préférable à une absence totale de formation, mais tout le monde ne sera pas d'accord sur ce point.
Enfin, une formation à l'usage de la naloxone est indispensable pour son efficacité optimale, mais là,encore même problème. Faut il réserver la délivrance de naloxone aux seules personnes bien formées ou allons nous la distribuer largement, sans nécessairement de formation avancée, étant donné que, même mal utilisée, dans les vraies OD, son usage est préférable à rien du tout .
Problème de la courte durée d'action de la Naloxone
L'un des problèmes de l'usage de la Naloxone est sa relativement courte durée d'action, 30 à 90 mn en SC ou IN, plus courte que la durée d'action de la plupart des opiacés.
L'usage raisonnable de la Naloxone comporte donc la nécessité d'appeler les secours, dès les gestes de première urgence réalisés, et de prévoir une période d'observation d'environ 24 heures, le plus souvent aux Urgences.
Or, très souvent, par peur de la police, les usagers de drogues illégales n'appellent pas les secours et tentent de résoudre les problèmes par eux même. Il y a donc un risque théorique que l'usage de Naloxone ne soit pas accompagné d'un appel au SAMU et même pire que des usagers qui auraient appelé le SAMU ne le fassent pas parce qu'ils disposent de naloxone. Pour réduire ce risque les USA ont mis en place des lois dites « du Bon Samaritain » qui protègent de poursuites éventuelles toute personne qui a porté secours à une personne en détresse, même si leur intervention a été malheureuse ou que leur présence sur les lieux est une preuve de délit. Il serait donc essentiel que la délivrance de la Naloxone s'accompagne d'éclaircissements sur ce point, voire d'une évolution de la législation. Il faut toutefois noter qu'une étude réalisée aux USA a montré qu'il n'y avait pas eu de décès dans une population ayant reçu de la Naloxone après OD d'opiacés et ayant refusé l'hospitalisation.
Problème de l'encouragement à l'usage abusif des opiacés
Une des craintes évoquées par les opposants à la délivrance de naloxone est que cela encouragerait les usagers à prendre plus de risques, en se croyant « protégés » par la détention de naloxone. Des études ont montré que ces craintes n'étaient pas fondées sur les faits.
Le Diagnostic d'OD aux opiacés
Nous avons vu les signes principaux. Il est toujours utile de chercher, si possible, la nature, le timing, la dose de la prise d'opiacés. Si la personne peut etre sous patch de Fentanyl , il f aut les chercher attentivement. Parfois un patch est posé sans que l'autre soit retiré. Attention = L'OD à la Buprenorphine ne répond pas à la naloxone, du moins aux doses habituelles.
Le signe essentiel pour l'usage de la naloxone est la bradypnée (selon les auteurs définie comme inférieure à un seuil allant de 8 à 12 respirations par minute) ou bien sûr l'apnée (absence de respiration. En principe un patient conscient ne relève pas de l'usage de la naloxone, car il peut respirer sur commande, mais cette recommandation peut être adaptée aux circonstances..
Rappelons encore que le coma sans bradypnée n'est pas une indication de la naloxone.
Voir pour tous ces détails http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25642320 http://www.ofdt.fr/BDD/publications/docs/OEDT150126naloxone.pdf http://www.eurohrn.eu/images/stories/pdf/publications/study_report_euroHRN_II.pdf http://www.emcdda.europa.eu/publications/emcdda-papers/naloxone-effectiveness
A qui distribuer la naloxone ?
C'est un problème difficile. En effet, la logique veut que l'on donne la naloxone aux usagers. Or, s'ils sont en OD ils seront évidemment dans l'incapacité de s'en servir. L'utilisation de la naloxone sera donc réservée par nature à un entourage en capacité de s'en servir. Or, dans de nombreux cas l'usager est seul ou en groupe, mais les autres usagers eux même sont « dans les vapes ». Même quand ils ne le sont pas, l'expérience prouve qu'ils ont souvent des actions inappropriées (ils n'appellent pas les secours etc..). Enfin une difficulté « administrative » est qu'une ordonnance est rédigée au nom d'un patient et le médicament ne peut donc pas en principe être donné à un autre patient (en tous les cas, c'est une difficulté perçue au Canada). Remarquons toutefois que la mise à disposition de naloxone à toutes les personnes professionnellement en position potentielle de secours (policiers, pompiers, secouristes d'associations, associations de RdR, surveillants de prison) serait déjà un progrès.
A priori la solution serait de confier la naloxone à un usager « à risque » mais avec une formation à l'usager et/ou à son entourage, permettant de protocoliser un secours « domestique » adapté aux circonstances. Une combinaison de formations individualisées et de formations « publiques » (Internet, media) serait la réponse idéale.
Mais quels sont les usagers « à risque » ? Bien qu'il ne soit pas possible d'exclure une OD chez tous les usagers d'opiacés, certains usagers sont particulièrement à risques :
- Les injecteurs IV
- Les personnes ayant eu récemment un sevrage et pouvant rechuter (fin d'incarcération ou d'hospitalisation, fin de TSO, *sevrage récent).
- Les personnes prenant d'autres psychotropes
- Les personnes ayant fait déjà une OD ou une complication équivalente.
- Les personnes suicidaires
- Les personnes prenant de fortes doses d'opiacés (traitées pour la douleur par exemple)
- Les usagers ayant des pratiques d'achat « à risque »
Quel pourrait être leur nombre en France ?
Il est difficile de répondre. Les estimations suivantes sont « à la louche ». Pour les opiacés illégaux, environ 150 000 personnes prennent un TSO ce qui indiquerait environ 50 000 usagers hors TSO. Si l'on prend environ 10 % d'usagers problématiques on serait à environ 20 000 personnes. Pour( les demandeurs volontaires il est difficile d'extrapoler mais 10 000 personnes seraient déjà une estimation plutôt optimiste.
Pour les traitements de la douleur on peut estimer les « patchés » au Fentanyl à environ 300 000. En comptant la Morphine et les autres opiacés, on peut estimer le nombre « à risque » à au moins 50 000. Un nombre total de 80 000 à 100 000 personnes est donc une première estimation de travail, plus les « professionnels en position de secours potentiel » (policiers , ambulanciers etc..).
La naloxone pour sauver combien de vie ?
L'absence de données fiables ne permet pas un calcul précis.
L'étude suivante au Massachusets http://www.bmj.com/content/346/bmj.f174 montre une réduction de 37 % de la mortalité quand il y a moins de 1 « porteur de naloxone » pour 1000 habitants et de 46 % au-delà de 1 pour 1000. Pour la France cela ferait environ au moins 60 000 porteurs de naloxone. Notre estimation est donc plutôt large.
En France il y a environ 400 décès par an par OD d'opiacés et approximativement 4000 OD graves non mortelles. 15 % seulement des OD mènent à une mort immédiate. Le potentiel de la naloxone est probablement proche de 50 % au mieux soit 200 décès évités.
Par contre, l'utilisation de la naloxone dans 4000 OD non mortelles pourrait amener environ 300 (7%) crises de manque, non mortelles et entre 20 et 40 complications graves (0,5 à 1 % mais ces chiffres sont assez approximatifs) . Le bilan reste donc très positif et « permettrait » même un usage plus fréquent encore de la naloxone avant que les inconvénients ne dépassent les avantages (égalité pour 20 000 utilisations annuelles environ).
Pour quel cout ?
Le coût d'une telle mesure est assez important puisque la probabilité d'utilisation annuelle d'une dose serait en théorie d'environ 1 par 20 ans (5 % par an) et la probabilité d'éviter un décès par cet usage d'une par 200 ans (0,5 % par an). (le coût d'une ampoule en France est d'environ 7 euros mais aux USA la forme nasale coûte environ 30 dollars). Mais les chiffres sont toujours très flous. Le calcul de NNT (Number Needed to Treat) dans la Massachussets montre qu'il faudrait distribuer 164 kits pour prévenir un décès par OD mais pour une catégorie à moindre risque on monte à 460 kits par OD prévenue.
Le drug Policy Alliance fait une analyse détaillée[2] du rapport coût efficacité de la délivrance de Naloxone aux usagers sur un modèle informatique et conclut à un coût par année de vie sauvée de 428 à 14 000 dollars. Mais une étude à Toronto fixe ce prix de 30 000 à 46 000 dollars par année de vie sauvée. En France, étant donné le nombre plus réduit d'overdoses, le coût serait plutot vers les 14 000 dollars par QALY (Quality Adjusted Life Years ou Années de Vie ajustées sur la Qualité).
Selon l'OMS, [3] les études actuelles ne permettent pas d'évaluation précise des résultats en terme d'efficacité, (c'est pourquoi les chiffres présentés ici sont un peu « décousus » !!) Elles permettent seulement de prévoir « une efficacité » de la mise à disposition de naloxone en communautés. Enfin, le coût de la formation serait aussi assez élevé mais, il serait important que la formation ne se cantonne pas à l'utilisation de la naloxone mais s'adresse à tous les facteurs d'OD et aussi aux autres facteurs de risque associés à l'usage d'opiacés, légaux et illégaux.
Il s'agit des OD aux opiacés déclarées comme telles dans le certificat de décès. Il peut donc y avoir une sous déclaration importante notamment quand les opiacés sont prescrits pour des maladies graves (douleurs cancéreuses par exemple). Toutefois l'ANSM donne des chiffres équivalents par une méthode différente (DRAMES). Notons qu'au moins 50 % sont liés aux TSO, Méthadone en premier mais aussi Subutex et le plus souvent, voire presque toujours, en association avec d'autres psychotropes (mais notons que, comme le montre le graphique, l'introduction des TSO vers 1995 a amené une diminution globale du nombre des OD par opiacés.). http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/4473fb6edabe70f675f8669550dae93f.pdf
nb= un nombre non négligeable d'OD (15 % des OD?) survient chez des patients traités pour des douleurs par des opiacés prescrits et donc non usagers de drogues illégales. Inversement la majorité des OD par « produit de TSO » (aux USA en tous cas) survient pour des TSO pris « au black ».
nb= Il s'agit des décès. Évidemment le nombre des OD ne conduisant pas à la mort, soit spontanément, soit par intervention des urgences est beaucoup plus élevé, probablement plusieurs milliers par an.
EN EUROPE Près de 8000 OD par an !! La France est donc parmi les pays plutôt « protégés » mais derrière le Portugal qui a poussé pourtant le plus loin la dépénalisation. http://www.emcdda.europa.eu/edr2015 (pages 56 et 57) www.emcdda.europa.eu/attachements.cfm/att_33743_FR_Dif13FR.pdf http://eurpub.oxfordjournals.org/content/16/2/19