Je le rappelle toujours mais c'est important vous ne bossez pas avec nous en ambulatoire, vous n'êtes ni Addictologue ni Neuropsychologue et la plupart d'entre vous ne sont pas former à la pharmacologie médicale
donc le premier geste c'est d'appeler le 15 (samu)Cependant, on en parle peu de ce type d'overdose et il est important de pas être démuni à une situation comme celle-ci. Vous risqueriez de paniquer et de faire les mauvaises actions. Donc un peu d'information et de prévention sur comment on gère un syndrome sérotinergique ou au moins le caractériser savoir approximativement si le patient est dans un état très grave ou autre, etc.
Petite définition : potentiel mortel est la conséquence d'un excès d'activité de la
sérotonine au niveau central et périphérique. Il peut survenir tant à dose thérapeutique qu'en cas de surdosage, mais il est le plus souvent la conséquence d'une interaction entre plusieurs médicaments sérotoninergiques. Le syndrome survient le plus souvent dans les 24 heures et même dans les 6 heures qui suivent le début, le changement, l'ajout ou même l'arrêt d'un médicament. Le
syndrome sérotoninergique a également été observé au début d'un traitement par un médicament sérotoninergique suivant de trop près l'arrêt d'un autre médicament sérotoninergique. Il est conseillé de respecter un intervalle de 1 à 2 semaines en fonction de la demi-vie de la molécule (5 semaines pour la fluoxétine).
Le syndrome se présente comme une
triade:
modification de l'état mental (angoisse, agitation, confusion, fébrilité, désorientation, délirium, convulsions, coma) symptômes neuromusculaires (rigidité, tremblements, nystagmus, myoclonies, ataxie, hyperréflexie, hypertonie (des membres inférieurs surtout)) instabilité du système nerveux autonome : hypertension, hypotension, tachycardie, tachypnée, hyperthermie, mydriase, transpiration abondante, diarrhéeCette triade n'est pas toujours présente : en pratique clinique, l'apparition de clonies et d'hyperréflexie chez un patient traité par un médicament sérotoninergique doit faire penser au diagnostic.
La plupart des patients ayant présenté le syndrome étaient traités par un antidépresseur inhibiteur de la monoamine-oxydase ou par un inhibiteur spécifique de la recapture de la
sérotonine en combinaison avec au moins un autre agent sérotoninergique.
Une étude française portant sur 125 patients présentant un
syndrome sérotoninergique a montré que 40 % d'entre eux ont développé le syndrome au cours d'un traitement avec un seul médicament sérotoninergique, principalement un inhibiteur spécifique de la recapture de la
sérotonine (ISRS) ou la
venlafaxine et que dans 60% des cas il s'agissait d'une interaction médicamenteuse, essentiellement entre le
tramadol et un
ISRS. [1]
Physiopathologie
La
sérotonine ou 5-hydroxytryptamine est un neurotransmetteur doué de nombreuses fonctions. La
sérotonine ne passe pas la barrière hémato- méningée et est synthétisée au niveau central et périphérique par décarboxylation et hydroxylation d'un acide aminé, le tryptophane. Une fois produite, la
sérotonine est stockée ou rapidement inactivée par la monoamine-oxydase (MAO).
La
sérotonine est l'un des 3 neurotransmetteurs le plus souvent associé à des symptômes dépressifs.
Toutefois il y a également dans l'organisme 7 sous-types de récepteurs situés en dehors du système nerveux central.
La
sérotonine agit comme neurotransmetteur au niveau du système nerveux central, et influence l'humeur, la personnalité, le sommeil, la sexualité, le comportement affectif, la perception de la douleur, la régulation hormonale et thermique, l'état d'éveil, le comportement alimentaire, les nausées et vomissements... Au niveau du système nerveux périphérique, la
sérotonine agit sur la régulation de la motilité intestinale et la vasomotricité.
Une concentration optimale de
sérotonine influence favorablement la qualité de vie mais des quantité excessives ont des conséquences néfastes qui se manifestent par un
syndrome sérotoninergique. Le
syndrome sérotoninergique peut survenir tant chez l'homme que chez l'animal.
On distingue
4 mécanismes principaux par lesquels un médicament peut provoquer un syndrome sérotoninergique:
Diminution de l'inactivation de la sérotonine (c'est le cas par exemple des inhibiteurs de la monoamine-oxydase ou du linezolid) Diminution de la recapture de la sérotonine (par exemple ISRS, inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, antidépresseurs tricycliques, amphétamines, cocaïne, MDMA, tramadol) Augmentation de la libération de la sérotonine (amphétamines, MDMA, lithium) Augmentation de la concentration des précurseurs de la sérotonine (L-tryptophane)Diagnostic
La gravité du tableau clinique est très variable et peut échapper au diagnostic lorsque les symptômes se limitent par exemple à des tremblements et de l'anxiété. Les cas graves associent hyperthermie, rhabdomyolyse, insuffisance rénale, acidose métabolique coagulation intravasculaire disséminée, difficultés respiratoires, convulsions et coma. L'évolution peut être fatale par défaillance multiviscérale due à une hyperthermie non contrôlée.
Sternbach et Hunter ont tous deux proposé des critères de diagnostic du
syndrome sérotoninergique. Nous ne développerons pas ici les critères de Sternbach qui se sont révélés trop peu sensibles : les symptômes de coma, de crises convulsives, de modifications de la tension artérielle ou de rigidité musculaire ne figurant pas parmi ces critères, des cas graves peuvent échapper au diagnostic.
Les critères de Hunter sont simples à appliquer et présentent une sensibilité de 84% et une spécificité de 97%.
Critères de Hunter:
Prise d'un agent sérotoninergique à dose thérapeutique ou toxique associée à au moins un des 5 critères suivants :
Clonus spontané
Clonus inductible + agitation OU transpiration
Clonus oculaire ET agitation OU transpiration
Tremblements ET hyperréflexie
Hypertonie musculaire ET température > 38° Celsius ET clonus oculaire OU clonus inductibleLe diagnostic différentiel doit se faire avec d'autres tableaux cliniques tels que l'hyperthermie maligne, le syndrome anticholinergique, une encéphalite, un delirium tremens, une épilepsie non convulsive, une intoxication aux sympathomimétiques, un stiff man syndrome.
Traitement
Hospitalisation
Arrêt du ou des médicaments en cause : les symptômes disparaissent souvent en 24 à 72 heures.
Surveillance de la fonction rénale, des électrolytes, des créatine kinases et de l'équilibre hydrique
Agitation:
benzodiazépines (ex.
diazépam).
En cas de symptomatologie très importante, une sédation avec intubation et curarisation peut-être nécessaire.
Convulsions:
benzodiazépines (diazépam,
lorazepam ou
midazolam) et/ou barbituriques i.v.
Hypertension réfractaire à la sédation aux
benzodiazépines : choisir un médicament à courte durée d'action: esmolol ou nitroglycérine. Les médicaments à longue durée d'action comme le propranonol sont à éviter: l'instabilité du système nerveux autonome peut évoluer rapidement vers une hypotension importante.
Hypotension: hydratation par voie intraveineuse pour combattre l'hypotension et la perte de liquide provoquée par l'hyperthermie
Vasopresseurs: noradrénaline, adrénaline. Les vasopresseurs possédant une action dopaminergique peuvent en théorie aggraver le syndrome sérotoninergique Hyperthermie: hydratation par voie intraveineuse, refroidissement externe, contrôle de l'hyperactivité musculaire par
benzodiazépines et curarisants non dépolarisants.
Antagonistes de la
sérotonine :
La
cyproheptadine est un
antihistaminique et un antagoniste de la
sérotonine. La cyproheptadine n'accélère pas la guérison, elle constitue un traitement symptomatique qui améliore le confort du patient (recommandation de grade C). Elle peut être proposée lorsque la température dépasse 38,5 C° ou en cas de rigidité musculaire importante.
Posologie adulte : dose initiale de 12 mg suivie de 2 mg toutes les 2 heures si le patient reste symptomatique. Dose d'entretien : 8mg toutes les 6 h. Dose maximale : 32mg/24h.
Posologie enfants : 0.25 mg/kg /jour à répartir en administration toutes les 6 heures avec un maximum de 12 mg/jour
Ce médicament n'est plus sur le marché en Belgique, il est disponible en France. Les formulations disponibles sont à usage oral, la cyproheptadine s'administre par la sonde gastrique (comprimés écrasés ou sirop).
La chlorpromazine est un antagoniste des récepteurs 5-HT2A et un antagoniste de la
dopamine. Elle peut entraîner une hypotension et diminuer le seuil convulsivant. Une extrême prudence est de mise en cas d'utilisation.
Pour résumé pour les plus largués, l'antidote est la cyproheptadine à l'hôpital mais il y a des vérifications cruciales à faire avant, on parle de diagnostic différentiel, comme lu plus haut ce qui peut vous faire croire à un SS peut être un syndrome différent aux symptômes similaire mais je vous rassure ça ne vous concerne absolument pas et faites nous confiance quand vous arrivez à l'unité
Voilà voilà !
J'espère que ça en intéressera certain car j'ai eu l'idée de cette série sur les antidotes en discutant avec des parents en consultation qui me disait avoir un antidote mais ne saurait s'assurer que les symptômes correspondent à la molécule qui overdose et donc de savoir quand il faut utiliser l'antidote en question (c'était la
naloxone pour mes patients là) :)
Si cette conclusion n'est pas encore assez claire où que vous avez survoler l'article je vous donne au moins ce paragraphe qui récapitule la chose (libre à vous de s'y pencher bien sûr) :
The serotonin syndrome is the clinical manifestation of serotonin toxicity in patients taking one or more serotonergic agents. It is characterized by features of neuromuscular hyperactivity, autonomic instability and alteration of mental status. Management consists of discontinuation of the offending drug and supportive care. Cyproheptadine and chlorpromazine, which have 5-hydroxytryptamine type 2A receptor antagonistic properties, may be useful in severe cases.RéférencesMedicine, ISSN: 1357-3039, Vol: 44, Issue: 2, Page: 95-96
Publication 2016
http://doi.org/10.1016/j.mpmed.2015.11.009