Dave,
J'ai rêvé de toi cette nuit. Tu m'apparaissais comme dans les années 90. Comme si tu étais une image figée dans mon esprit. Figée dans le temps.
À cette époque sombre où tu n'étais même plus toi-même. Tu étais dans le trip de ce mélange de coke, d'héroïne et de sexe avec des partenaires d'un jour. J'ai rêvé que je suivais la caravane du Devotional Tour et que toutes nos nuits se ressemblaient. Il est venu le temps où il te fallait deux filles dans ton lit. J'étais là, à portée de la main, et puis tu choisissais parmi les groupies. Je n'avais pas droit au chapitre. Tu les aimais très minces, brunes avec un air perdu au fond des yeux. Mon opposé exact. C'était à se demander pourquoi tu m'avais embarquée pour la première fois dans cette chambre grand standing à Berlin, ce à quoi tu m'as répondu qu'il fallait tout essayer dans la vie et que compte tenu du fait que j'avais été présente pour toi alors même que tu avais failli mourir cent fois dans cette suite berlinoise, j'avais le privilège d'être ta favorite. En bref, tu étais persuadé que je te portais chance. Tu m'appelais "ma blondinette" en français.
Il fallait que je sois nue, à t'attendre après tes concerts. Je me préparais avec un soin tout particulier. Douche, épilation, manucure. Je voulais être parfaite à tes yeux. Chaque soir je découvrais la fille que tu avais choisie. Effectivement, elles avaient toutes l'air un peu paumé, ajouté au fait qu'elles étaient trop heureuses de partager une nuit avec le célèbre Dave Gahan. Le beau brun ténébreux capable de mettre une salle entière de fan en transe. Elles marquaient cependant toujours un petit temps d'adaptation dès qu'elles me voyaient. Elles prenaient alors conscience qu'elles n'auraient pas l'exclusivité.
Tu t'allongeais sur le lit, en bon observateur. Ou bien, tu t’installais confortablement sur un fauteuil, en parfait spectateur. Il fallait que je sois entreprenante avec la fille. Je devais l'effeuiller, lentement. Puis, je devais la sentir, comme le ferait une louve envers ses petits. D'abord les cheveux, puis le cou, les aisselles, les mains pour descendre lentement vers son ventre puis son sexe. Et, si l'odeur me convenait, je la léchais. Sinon, je devais la laver dans la salle de bains. Je ne sais pas si c'était du fait de ta présence, mais j'arrivais toujours à les faire jouir. Avec ma langue, je fouillais leur vulve, leur anus. Ça avait le don de te rendre dingue. Après, elles étaient toutes à toi. Elles m’apparaissaient comme des poupées de chiffons, toutes molles entre tes bras. Je les avais rendues ivres de plaisir. Tu les pénétrais à pile ou face, tantôt en missionnaire, tantôt en levrette. Tu sodomisais les moins farouches.
Enfin, tu renvoyais la fille le plus courtoisement possible et tu t'occupais de moi. Plus tendrement alors. Et puis tu te piquais, encore et encore. J'aurais volontiers balancé tes doses dans les toilettes si j'y avais eu accès mais je ne savais jamais où tu les cachais. D'ailleurs, tu te séparais rarement de ton héroïne ou de ta coke. Quand tu te jetais dans l'arène, porté à bout de bras par les fans, tu finissais toujours torse nu et je gardais secrètement l'espoir que la drogue glisse de ton pantalon mais non, ça n'est jamais arrivé. À moins que tu la conservais dans un sac ? Je n'ai jamais su. C'est bien simple, tu étais tout le temps camé. Sauf au petit matin, où tu te levais d'un bond, hyper stressé par le manque. Il fallait alors que tu te réapprovisionnes au plus vite. De mon côté, je profitais de ces instants furtifs de lucidité pour te demander comment tu allais, je me faisais un sang d'encre pour toi. Je te demandais si tu avais le souvenir de la nuit passée et tu me répondais : "Of course ! I really enjoyed the last night and was hoping we could do it again soon" que l'on pourrait traduire par "Bien sûr ! C'était sympa la nuit dernière. On pourrait remettre ça bientôt". Puis, tu me prenais par le menton, et déposais un baiser délicat sur mes lèvres. "I think you did great". "Tu as été parfaite".
Et puis, bizarrement, l'alarme incendie s'est déclenchée. J'ai tenté de détecter une odeur de brûlé. Il s'agissait en fait de mon réveil qui sonnait.
À demi éveillée, je me rappelle comme dans un rêve les baisers que me donnaient Dave Gahan lors de nos adieux à la gare d'Austerlitz. Il me disait : "Est-ce que tu nous vois, toi et moi construire quelque chose ? Je ne suis qu'un pauvre camé, ma blondinette. Avec moi, tu n'as aucun avenir. Et puis je sais que je te fais souffrir. J'ai adoré cette folle parenthèse mais tu as fugué depuis trop longtemps, il est grand temps que tu rentres chez toi à présent".
C'est les yeux embués de larmes que j'ai pris ce train qui devait me ramener à Albi. Tu as posé sur mes oreilles un walkman qui hurlait "Just One Caress" qui reprenait les thèmes chers à Depeche Mode comme l'ennui, le sexe ou encore la religion.
Ce walkman, je l'ai encore chez moi, c'est tout ou presque ce qui me reste de toi, si ce n'est cette chemise que tu as portée et que j'ai volée dans tes bagages pour garder ton odeur. Ça me fait penser au linge que j'ai hérité de mon papa décédé, qui a été longtemps stocké dans l'armoire de mon petit frère et dont la douce odeur m'avait sauté au nez et qui avait déclenché chez moi une crise de larmes.
Tu es resté sur le quai jusqu'à ce que le train soit loin, mais avant, alors que je pleurais et que je posais mes mains sur la vitre, tu as posé les tiennes au même endroit. Seul le plexiglas nous séparait. J'ai lu sur tes lèvres un "I love you" prononcé lentement, ce qui m'a mis le cœur en miettes.
Tu avais l'air épuisé par cette tournée qui avait duré un an et seule la drogue te maintenait, te laissait encore debout. J'avais vu les disputes avec Alan Wilder lequel ne jugeait pas son travail estimé à sa juste valeur et en raison d'un conflit récurrent avec Andrew Fletcher menaçait de quitter le groupe. On saura que plus tard, alors que tu t'étais installé seul aux États-Unis, son départ t'avait mis un tel coup au moral que tu avais cumulé les overdoses. À tel point qu'au service réanimation, ayant frôlé la mort par quatre fois, on t'avait surnommé "le chat". Chaque fois, j'ai tremblé pour toi.
J'aimerais pouvoir te recontacter aujourd'hui, seulement, je ne sais pas comment m'y prendre. Si j'écris au fan club, je recevrai sûrement une lettre-type avec peut-être une photo dédicacée comme je l'avais fait alors que j'avais onze ans au fan club de Tom Cruise. Aujourd'hui, je me fous de Tom Cruise. Certes, je lui reconnais des qualités indéniables d'acteur mais ça s'arrête là. Je n'ai jamais vécu à ses côtés, je ne sais pas qui il est. Et puis il faut dire que tu as tellement changé. Qui sait si tu te rappelles encore de la petite Bettina ?
Alors, je fais la chasse aux concours radios qui me permettraient d'assister à un nouveau concert aujourd'hui avec l'espoir d'un after. Mais je ne gagne jamais.
J'aimerais tant discuter avec toi l'espace d'un petit quart d'heure, je ne demande pas grand chose. Tu sais, j'ai changé aussi. J'ai grandi, muri, j'ai vécu.
How about we have a glass of beer like in the old days ?
Et si nous buvions une bière comme au bon vieux temps ?
Catégorie : Tranche de vie - 26 novembre 2019 à 00:55
#Dave Gahan #Depeche Mode #saudade #sexe
1
Anonyme813 a écrit
Bettina
Salut bettina,
Excuse moi mais il y a un truc que je comprend pas
Tu le connais personnellement ou tu nous fais une romance écrite ? Très bien écrit au passage et très agréable à lire!
J avoue que je m y perds un peu
Ocram
Anonyme813 a écrit
Je m'attendais à ce que quelqu'un pose la question.
Bon et bien c est chose faites alors... Merci de ta réponse en tout cas!
Ocram
Bettina a écrit
Merci Marla. Tu sais, ton spoiler est loin d'être inutile. Si j'avais à poster d'autres textes de ce type, je le signalerai toujours désormais.
Bon, super, contente que ça ait été pris dans ce sens.
Et sache que ce n'est pas que la sexualité me choque ou m'offense. J'ai parfois un parlé cru, et suis habituée a aborder ces thèmes.
Mais on ne reçoit pas tous les mots de la mm manière, on a pas tous le mm parcours, ni les mm réactions face à un événement.
Et voyant que moi - qui considère avoir un seuil de tolérance conséquent - je realise que selon le genre littéraire / le but du texte, je ne reagit pas pareil.
J'aime faire de la RdR, nottament en sexo, car on manque cruellement d'éducation sexuelle et sur les rapports «amoureux».
Mais c'est que le registre et la visée informative me permettent un certain recul et une forme de neutralité.
En revanche, qd on est dans une optique plus hédoniste / érotique, ça n'a rien a voir pour moi, pas le mm impact. Me plonger en détail dans la sexualité des autres, l'esthetisation du désir, de certaines pratiques, la volonté de rendre ça «excitant»... c'est pas mon trip, le côté voyeuriste me met mal à l'aise.... Ca ne resonne pas vraiment en moi.
Mais bon chacun ses gouts, ses sensibilités ...
Seulement si certains textes «explicites» me rebutent, j'imaginais que d'autres pouvaient aussi le vivre «mal».
Bref, donc perso je conseillerai de signaler ou mettre sous spoiler, SURTT qd le post n'a rien a voir a la base avc des sujets dits «subversif».
Merci pour ta compréhension et ton retour, je ne voulais pas faire ma grincheuse ou te pointer du doigt.
Bonne nuit a toi :)