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Psychedelight, épisode 2 : Dieu, l'éco-anxiété et mon brumisateur. 





Flux...et reflux...
Ouais vas-y branche le ventilateur...Pure idée, ça.
Il fait une chaleur insensée.

M., un des deux gars qui m'hébergent, est dans le même état que moi. On est en nage sur le canapé du salon. Je nous asperge régulièrement avec mon brumisateur (et ça mec, un brumisateur sous LSD quand c'est la canicule, c'est le Graal, c'est tout). Son mec n'a pas pris d'acide, il se retrouve donc à faire le sitter un peu malgré lui, on devine que la situation l'amuse mais que ça l'agace aussi un peu.
Bon, c'est un sitting à la cool pour lui, on a pas pris de grosses doses, entre le quart de buvard de la veille et le demi de 1P au petit matin, si j'ai 80µg d'acide lysergique dans le cornet c'est le max. Peu de risque de partir en couille, peu de risque de me prendre pour une mésange et de faire le saut de l'ange...

Mais enfin bon, quand-même.
C'est toujours un peu comme ça avec l'acide, même les petits dosages, c'est quand même aussi une expérience. Surtout que, chez-moi, les grandes questions métaphysiques et remises en question du sens de la vie surviennent toujours bien avant les grosses hallucinations que procurent les dosages importants. Il m'en faut très peu pour faire face au cosmos.

Là, concrètement c'est gérable. Les murs semblent respirer légèrement. Les couleurs sont très vives, pas loin du fluo. un peu comme un filtre psychédélique appliqué sur les yeux, et poussé à une intensité modérée. Ça c'est pour le côté visuel.

Intérieurement c'est une autre histoire. Vu qu'il n'est pas question de sortir en ville dans notre état alors qu'il fait 45°C dehors, et comme on a pris l'acide sur un coup de tête et qu'on a rien préparé pour pimper notre set & setting, on se retrouve en mode semi-comateux (pas oublier que la bière a aussi coulé à flots la veille), semi-halluciné, Tool et Popol Vuh sur les platines, à phaser sur les documentaires géo/animaliers de Netflix. Et là c'est le drame. Déjà, je suis complètement hypnotisé par les vues satellites et autres drone-shootings. Toutes les merveilleuses fractales composant notre gentille planète explosent à mes yeux lavés par l'acide. Et, bien entendu, les fractales je les ressens aussi à l'intérieur de moi-même, comme un écho, comme un langage que je parlerais presque, comme porteuses d'un sens, d'une vérité immense, là, à portée de compréhension mais toujours insaisissable...

Et puis, surtout, les docus de Netflix mettent tellement l'accent sur le fait que toute cette splendeur animale, végétale, minérale, est en train de disparaître...Du coup le trip se teinte de tristesse et d'une certaine angoisse, accentuée par la chaleur qui nous rappelle impitoyablement la réalité incontestable de ce changement climatique qui nous conduit tous vers le gouffre...Et ça mes amis, sous acide, c'est pas des pensées qui réconfortent. Au point d'ailleurs, que je me demande si je vais pouvoir continuer à prendre des psychédéliques, simplement parce que l'inquiétude sourde générée par cette ambiance de bientôt-la-fin-du-monde me semble incompatible avec les voyages sur Hofmann Airlines...
Bref, ce n'est pas vraiment un bad, mais entre la légère gueule de bois de la veille, le high de LSD, la température et l'éco-anxiété rampante, c'est pas non plus strawberry fields forever.

J'aimerais bien rentrer chez moi mais pour ça, je dois sortir dans la rue, marcher en plein cagnard, aller à la gare, y attendre un train pour ma ville...Et comme j'alterne les phases où je me dis que c'est bon, je suis suffisamment redescendu pour pouvoir le faire, et les replongées subites dans la contemplation de l'espace lysergique, je préfère pour le moment rester sur le canapé à me brumiser en regardant des fractales en voie d'extinction.

Un sentiment très fort domine l'ensemble du trip, et je ne sais pas comment trouver les mots pour le définir. C'est la présence, au delà des hauts et des bas, au delà des contingences et des drames, de quelque-chose comme un Vecteur de sens. Quelque chose qui traverse la réalité, qui nous traverse tous, et qui s'accomplit entièrement dans ce qui est beau, dans ce qui est vrai, dans ce qui est bien et dans ce qui est juste. Je suis bien conscient en le ressentant, et bien conscient en essayant de le retranscrire, qu'il s'agit de ce que les religions appellent Dieu. Mais ça ne ressemble en rien aux clichés et stéréotypes divins. C'est presque impossible à verbaliser. Disons, comme une lumière qui traverse et soutient le réel, une bonté essentielle, fondamentale. Face aux documentaires déprimants de Netflix cette présence est un très grand réconfort...Elle sera d'ailleurs ce que je ramènerai précieusement de ce trip.

Finalement mes cycles up and down semblent s'espacer et s'aplanir. J'ai envie d'être chez moi, j'ai envie de mon lit, de ma couette, de mon mec, de mes chats. Je prends mon courage à deux mains et je m'y jette, allez les gars, c'est le moment, je vais choper mon train, t'es sûr ? ouais ouais, sinon je vais jamais décoller, merci à vous c'était vraiment cool, bises bises, hop hop je suis parti. Evidemment les copains me regardent d'un air un peu inquiet parce qu'en réalité je suis encore bien deep in acid, mais l'heure a sonné, je rassemble péniblement mes affaires et je file. La cage d'escalier est un délire interminable, tous les gens qui ont déjà gravi des marches sous LSD connaissent ce sentiment que ça ne s'arrêtera jamais, comme si l'immeuble descendait jusqu'au centre de la terre...Et puis la rue...le soleil...les gens normaux du monde normal en train de faire des trucs normaux...et moi, enfin dehors, très légèrement parano.

Allez, direction la gare.

À SUIVRE...


Catégorie : Trip Report - 13 septembre 2019 à  14:18

Reputation de ce commentaire
 
Mec, tu postes pas souvent, mais qu'est ce que c est bien quand tu te décides! O
 
Beau trip..



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