Drogues : comment les trafiquants se sont adaptés à la crise sanitaire

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pierre
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Drogues : comment les trafiquants se sont adaptés à la crise sanitaire

« Le Monde » a eu accès à une note confidentielle de l’Office français antistupéfiants qui retrace de quelle manière les narcotrafiquants ont fait face au premier confinement et comment ils ont anticipé le deuxième.
Par Antoine Albertini et Simon Piel
Publié hier à 02h38, mis à jour hier à 05h46


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Ce document de cinq pages, précis, circonstancié, illustre de manière frappante de quelle manière les narcotrafiquants ont fait face à la première période de confinement, du 17 mars au 10 mai 2020, en réorganisant leurs réseaux d’approvisionnement et de distribution et comment, avec un sens consommé de l’organisation, ils ont anticipé le reconfinement de novembre. Il montre surtout l’impressionnante capacité d’adaptation de réseaux agiles, structurés, réactifs. L’enjeu n’était pas mineur, pour un secteur qui génère, en France, d’après l’Insee, un chiffre d’affaires de 2,7 milliards d’euros, soit 0,1 % du produit intérieur brut (PIB).

Pénurie
D’abord surpris par la pandémie, les trafiquants ont commencé par accuser de lourdes pertes peu après la mise en place des mesures de restriction de circulation, un déficit encore accru par la crainte des contrôles alors que le pays se trouvait pratiquement à l’arrêt et les déplacements rendus particulièrement visibles.

En dix jours à peine, signe que l’économie de la drogue fonctionne encore pour une large part en flux tendu, la pénurie frappe la plupart des produits, de la résine de cannabis à l’herbe, de l’ecstasy à la cocaïne et l’héroïne. En atteste l’indicateur fourni par le nombre et le volume des saisies : 2,6 tonnes de shit arraisonné par les forces de l’ordre en mars 2020, soit 75 % de moins qu’en février (10,1 tonnes) ; ? 93 % de cocaïne et ? 92 % d’héroïne pour avril par rapport aux résultats enregistrés un an plus tôt.

Asséchés, les réseaux se sont trouvés contraints de se réorganiser à la hâte dans un contexte de très forte concurrence – une éminente question de survie mais, également, d’image auprès de leur clientèle comme de leurs rivaux.

Aussi, lors du premier confinement, les groupes criminels spécialisés dans l’approvisionnement de gros ne tardent-ils pas à réarticuler leurs modes de transport en préférant les camions de marchandises, autorisés à circuler, aux véhicules légers, davantage susceptibles d’attirer l’attention des policiers, gendarmes et douaniers. Leur position de force sur le marché, leur implantation dans les agglomérations importantes leur permet également d’imposer leurs conditions de vente aux réseaux de distribution comme aux trafiquants de moindre envergure, établis dans les villes moyennes.

Cannabis 40 % à 60 % plus cher qu’à l’ordinaire
Cette situation leur garantit le maintien d’un niveau de profit élevé : le trafic a beau accuser une baisse générale de 30 % à 40 % sur l’ensemble du territoire national, le cannabis se négocie 40 % à 60 % plus cher qu’à l’ordinaire, les prix moyens de la cocaïne et de l’héroïne augmentent de 30 % en moyenne.

La levée du confinement et la « forte reprise des trafics dans une logique de rattrapage » vont en outre entraîner un rebond sensible du marché, dont les saisies donnent la mesure : pour le seul mois de mai 2020, cinq fois plus d’herbe (7,4 tonnes) est appréhendée qu’un an auparavant. Après la fermeture des frontières extérieures de l’Union européenne dès le 17 mars, cette hausse considérable témoigne aussi du recentrage opéré par les trafiquants sur une marchandise essentiellement produite en Espagne au détriment de la résine de cannabis, en provenance du Maroc et plus difficile d’importation.

La stratégie mise en œuvre lors du premier confinement va encore être affinée quelques mois plus tard, à l’occasion du deuxième. « Pour surmonter les difficultés de circulation et désinvestir l’espace public », les trafiquants complètent leur réajustement logistique par des menées commerciales agressives grâce à l’utilisation de réseaux sociaux et de messageries cryptées, où sont détaillés le type, le prix et la disponibilité du produit, les lieux et horaires de rendez-vous, notamment près des lieux de restauration à emporter ou de centres commerciaux, où la présence physique peut être justifiée. Une présence peu visible et une meilleure gestion des flux de clientèle : le modèle économique se révèle viable, fiable et garantit une sécurité accrue des échanges, qui compense la relative baisse du volume écoulé.

La voie postale est également privilégiée, moins pour limiter tout contact physique qu’en raison de l’augmentation du nombre de colis expédiés, qui rend plus difficile la détection des emballages suspects. « Les services douaniers, observe l’Ofast, ont découvert de plus en plus fréquemment des produits stupéfiants de tout type dans les centres de tri postaux, de fret express ou lors de livraisons surveillées. » Ainsi, 29,6 kg d’herbe de cannabis sont découverts à Lesquin (Nord), à l’intérieur d’un colis en provenance d’Espagne, et 17 kg expédiés d’Uruguay sont mis au jour à Lyon. Plus astucieux, certains trafiquants ont recours à des équipes de livreurs portant l’uniforme d’enseignes de livraisons à domicile, dont la présence dans le paysage est devenue habituelle.

Diversifier les sources de profit
Une fois de plus, le volume des saisies est révélateur : 15 tonnes de cannabis en novembre 2020, trois fois le volume de l’année précédente pour la même période. Cette fois, la marchandise ne manque pas. Aux réserves de produit à écouler, renouvelées au cours de l’été, viennent s’ajouter des stocks constitués en prévision d’un nouvel épisode de confinement et ceux issus de la récolte de l’année, qui a lieu en octobre et dont l’acheminement vers la France est à peine freiné par l’intensification des contrôles à la frontière espagnole après l’attentat de Nice, le 29 octobre 2020.

L’utilisation des poids lourds, qui a fait la preuve de son efficacité sept mois plus tôt, est doublée par le recours à des véhicules légers, « pour transporter de petites quantités sur des trajets plus courts et segmentés, afin de répartir les risques en cas d’interception ». Les trafiquants du nord et de l’est de la France, qui entendent limiter le risque d’une traversée du pays depuis l’Espagne, diversifient leurs sources d’approvisionnement en se fournissant aux Pays-Bas, où la marchandise est plus coûteuse mais le danger lié à de longs trajets considérablement réduit.

Les réseaux savent aussi diversifier leurs sources de profit, créer de nouveaux débouchés. « Alors que cette tendance n’avait pas été révélée lors du premier », le deuxième confinement les voit ainsi s’impliquer dans l’organisation de fêtes ou la location d’appartement pour y écouler du produit. « A Ajaccio, par exemple, des locations de villas ont servi pour donner rendez-vous plus facilement à la clientèle tout en échappant aux contrôles de police. » Ailleurs, à Paris ou Marseille, certains professionnels de l’événementiel louent des appartements via des plates-formes spécialisées ou investissent des lieux désertés en raison de la pandémie. Parfois associés, les trafiquants ne manquent pas d’y fournir leur produit.

Parce que le trafic de stupéfiants demeure un secteur illégal hautement concurrentiel et violent, les épisodes de pénurie ont aussi entraîné « une hausse des rivalités entre groupes criminels sur l’ensemble du territoire ».

Armes lourdes
Exacerbé lors de la reprise du trafic, à la fin du premier confinement, ce phénomène est illustré par la hausse des saisies d’armes dans des affaires de drogue, passées de 8 % en novembre 2019 à 22 % un an plus tard.

Fin octobre 2020, les gendarmes ont mis la main sur des armes lourdes en démantelant un trafic dans la région de Paulhac (Haute-Garonne), près de Toulouse. Quinze jours plus tard, une opération dirigée par le service régional de police judiciaire de Nancy et associant les PJ de Metz, Besançon, Angers et Dijon conduit à l’interpellation de vingt et un individus. Bilan : 17 kg de cannabis, 6 kg d’héroïne, près de 150 000 euros saisis et trois armes de poing.

« La tendance n’est pas nouvelle mais elle devient systématique, note le patron d’un service de PJ en province. Auparavant, seuls les trafiquants d’envergure se protégeaient. Désormais, de plus en plus de revendeurs, voire de guetteurs, s’équipent aussi. »

Dernière modification par pierre (11 mars 2021 à  19:07)

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Mister No homme
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Merci du partage Pierre.

une note confidentielle

C'est assez amusant d'apprendre qu'un journal montre que les autorité réaliseraient tout juste que le traffic de stups est pour sa grande majorité dans les mains d'organisations structurées comme des grandes enseignes ou des grands groupes œuvrant à l'international. lol
Même le marketing se développe.
Logistique, compta, import, blanchiment, fichier client, franchises, service d'ordre, service de renseignement via des fonctionnaires qui en croquent etc... Tout y est. Ils doivent même avoir un service R et D. lol
J'espère que dans cette note, il est décrit de quelle manière les mannes financières sont recyclées dans notre économie ou dans l'économie mondiale, en bourse, permettant projets immobiliers Malaga style, finançant des partis politiques prohibitionnistes bien entendu, permettant la corruption de manière générale.
Si l'OCTRIS a fondu, c'est uniquement pasque des douaniers ont mis les pieds dans le plat et que deux ministères se sont certainement affrontés backstage.
Cet article permet de valider ce que nous savons depuis des lustres.

Dernière modification par Mister No (09 mars 2021 à  20:23)


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