https://www.lemonde.fr/international/ar … _3210.htmlL’Allemagne devient le plus grand pays de l’UE à légaliser le
cannabis pour une usage récréatif
Depuis lundi 1ᵉʳ avril à minuit, la consommation de
cannabis est autorisée pour les adultes outre-Rhin du fait d’une réforme qui suscite autant d’attentes que de craintes. Une approche diamétralement opposée à celle de la France.
Le Monde avec AFP
Publié aujourd’hui à 04h59, modifié à 09h02
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A minuit, ils ont fait tournoyer dans les airs leurs premières volutes de fumée de
cannabis légales, devant l’emblématique porte de Brandebourg, au cœur de Berlin. Plusieurs centaines de personnes ont célébré, dans la nuit du dimanche 31 mars au lundi 1er avril, le changement de loi autorisant en Allemagne l’usage récréatif du
cannabis.
Après Malte, en 2021, et le Luxembourg, en 2023, l’Allemagne devient ainsi le plus grand pays de l’Union européenne (UE) à s’engager dans cette voie. La possession de 25 grammes de
cannabis séché est désormais autorisée dans les lieux publics, ainsi que la culture à domicile, jusqu’à 50 grammes et trois plants par adulte.
Une approche diamétralement opposée à celle de la France et différente de celle des Pays-Bas, où la consommation de
haschich n’est pas légale, mais tolérée, notamment dans les «
coffee shops ».
Période de transition
Paradoxalement, il faudra attendre encore trois mois en Allemagne pour acheter légalement de la drogue et ce par l’intermédiaire d’un «
Cannabis Social Club ». D’où la mise en garde dans l’intervalle de Georg Wurth, représentant de la Fédération allemande du chanvre : malgré la
légalisation « il ne faut pas que le consommateur dise au policier où il a acheté son
cannabis » en cas de contrôle dans la rue. « Car à partir du 1er avril, on ne peut en principe que se procurer de la drogue illégalement », a-t-il dit dans un entretien à l’Agence France-Presse.
La donne changera vraiment au 1er juillet avec les clubs. Ces associations à but non lucratif pourront vendre à leurs membres un maximum de 25 grammes par jour et pas plus de 50 grammes par mois.
Ces clubs, sortes de jardins partagés du
cannabis, pourront cultiver la drogue sur un terrain à l’extérieur, dans une serre, dans un bâtiment non habité. Contrôlée au minimum une fois par an par les autorités, chaque association pourra accueillir, moyennant une cotisation, au maximum 500 personnes qui résident depuis au moins six mois en Allemagne.
Selon le gouvernement, la nouvelle législation, ardemment voulue par les écologistes et les libéraux de la coalition du chancelier social-démocrate, Olaf Scholz, devrait permettre de lutter plus efficacement contre les trafics. Estimant que la politique d’interdiction a échoué, le ministre de la santé, Karl Lauterbach, fait régulièrement valoir que des pays comme le Canada, qui ont mis en œuvre la
légalisation, ont pu réduire le marché noir.
Mais nombre d’associations médicales craignent une augmentation de la consommation, particulièrement chez les jeunes. Jusqu’à 25 ans, la consommation de
cannabis comporte des risques accrus pour le cerveau encore en formation, selon les experts, qui pointent notamment le danger de développer des troubles psychotiques comme la schizophrénie. Pour Katja Seidel, spécialisée dans la prévention des addictions au Centre Tannenhof à Berlin, la nouvelle loi est « une catastrophe ».
Sensibiliser les jeunes
Le ministre de la santé allemand a promis des moyens renforcés pour sensibiliser les jeunes aux dangers du
cannabis, sans pour autant annoncer de montants précis. Les autorités font valoir que, pour les moins de 18 ans, le
cannabis reste interdit. Sa consommation l’est aussi dans un rayon de 100 mètres autour des écoles, des crèches, des terrains de jeux.
Les policiers sont également vent debout contre ce qu’ils considèrent comme un « monstre bureaucratique avec beaucoup de réglementations parcellaires », selon le président du syndicat de branche (DPolG), Rainer Wendt. « A partir du 1er avril, nos collègues vont se retrouver dans des situations de conflit avec les citoyens, car l’incertitude règne de part et d’autre », explique le vice-président du syndicat de la police (GdP), Alexander Poitz.
De son côté, la Fédération des juges allemands (DRB) anticipe un surcroît de travail : en raison des amnisties découlant de la loi pour les délits liés au
cannabis, il va falloir réexaminer plus de 200 000 dossiers. Cela va empêcher la justice pénale « de se consacrer à d’autres tâches pendant des semaines et des mois », avertit Sven Rebehn, de la DRB.
Le Monde avec AFP