Il faut que je sois terrifié pour venir ici, je me rends compte.
Le 24 de ce mois, je rencontre un addictologue.
Oui, parce que j'ai bien imprimé que j'ai une addiction : à l'heure actuelle, je ne peux pas retirer le
cannabis de ma vie. C'est absolument impossible.
Il y a quelques années, j'ai commencé à avoir mal, régulièrement, sans qu'on ne sache expliquer pourquoi. De médecin en médecin, de traitement en traitement, rien n'y faisait, la douleur revenait, et a fini par devenir constante.
De "star" dans de nombreux domaines, je suis, au fil des années, devenu invalide et difficilement capable de vivre une vie normale.
Avant cela, il m'arrivait, fréquentant différents milieux de saltimbanques, de tirer une late ou deux sur le
joint qui passe entre deux bières (les buveurs de Cognac étant beaucoup moins portés sur la chose dans mon expérience).
Une mauvaise première expérience avec une plante hyper sativa mal travaillée (beurre, première fois que j'ingérais etc) m'a refroidi pendant près de deux ans :
bad trip avec focalisation sur la douleur qui se retrouvait du coup accrue (je peux vous faire cours pendant des heures sur la douleur, là je vais à l'essentiel).
Spoiler Ma dernière prise arrive à effet à l'instant où j'écris ce spoiler, je ne remonterai pas au dessusEt puis un jour j'ai réessayé un
joint... Et la douleur a disparu.
Depuis, je me "soigne" avec du
cannabis.
Cela signifie :
1) Je ne fume pas le cannabisC'était une erreur.
Pour moi, comprenez. Vous faites ce que vous voulez.
Le principal avantage de fumer le
cannabis était la possibilité d'avoir l'effet immédiat, même avec du
shit.
C'est le seul, et les inconvénients sont pour moi insupportables :
- Cout du
tabac- Toxicité
- Syndromes respiratoires
- Ingérable sur le plan dopaminergique ( deux addictions simultanées dont une avec dépendance forte dans mon cas ) --> Addiction "ingérable"
Majoritairement, j'ingère une solution de
shit dans de l'huile portée à première vapeur sur flamme bleue (voir point 3) que je "coupe" avec un yaourt.
Je dispose aussi d'une poignée d'inhalateurs, en particulier un à ballon (Arizer, pas
Volcano)
2) J'ai une "posologie"Nos amis pharmaciens vont me dire "ça n'a aucun sens". C'est aussi ce que je répète aux médecins qui me demandent "combien vous consommez ?"
Mais bref, je m'efforce, par discipline, de suivre un truc qui ressemble vaguement à une posologie. La majorité du temps (ma maladie demande des ajustements), c'est 600 à 800 mg en une prise autour de la pause déjeuner.
Les "avantages" à fonctionner comme cela sont que, même si l'addiction est présente, il est possible de considérer le syndrôme d'accoutumance comme celui qu'on a avec un anti dépresseur. Du coup, on n'augmente pas les doses, parce que l'intéret est justement de ne pas ressentir les effets secondaires (vertiges, euphorie, paranoia, etc).
Ca fait très "alcoolique fonctionnel", je sais, mais en réalité, l'objectif est d'être fonctionnel, ce qui signifie dans mon cas diminuer l'impact de la douleur sur ma vie.
[RED FLAG]
Quand on est invalide, tout qualificatif à côté de "fonctionnel" est souhaitable
[/RED FLAG]
3) "J'ingénierie" mon "traitement"Je lis énormément, probablement pas les bonnes choses.
J'applique énormément, probablement pas les bonnes choses.
Mon objectif c'est "le moins possible, le mieux possible". Hein ? Comme tout le monde ? Bon, on est d'accord là dessus...
Vous voyez tous les guillemets partout ? Parce que ce sont les "limites". C'est un narratif qui me va bien et dans lequel j'ai peur de m'enfermer.
Je ne suis pas idiot, je sais bien que ce n'est pas, en l'état, un médicament.
Mais en pratique, c'est tout ce que j'ai.
Parce que je ne me suis pas "arrêté" à la pseudo solution
cannabis. J'ai continué à voir médecin sur médecin, à prendre traitement sur traitement, certains me rendant extrêment malades (antidepresseurs à portée antalgique comme la duloxétine ou la
venlafaxine, d'autres trucs "sortis de nulle part" comme le Lamictal). Suivi pendant 2 ans toutes les semaines par une neuropsy algologue.
Je parlais honnêtement aux médecins du fait que le
cannabis semblait fonctionner sur la douleur là où meme la
morphine échouait, et on me répondait que non, ce n'était pas possible.
Et un jour on m'a dit que tout était lié à mon addiction. Enfin, il fallait que je voie un addictologue à propos de cette addiction. Mais que vraisemblablement tout était lié.
Alors j'ai commencé un
sevrage d'un mois.
Et j'ai appelé un service d'addictologie, celui qu'on m'avait indiqué. Ils m'ont dit que c'était pas à eux de s'occuper de mon cas. Et j'ai été renvoyé comme ça entre plusieurs services d'addictologie qui visiblement ne pouvaient pas s'occuper de moi, jusqu'à ce qu'on m'envoie sur un petit service de ZUP où une pauvre secrétaire affolée m'a dit "mais non monsieur, si ça soulage vos douleurs faut pas arrêter, mais on peut vous recevoir dans 3 mois".
Oui, désolée madame, mais visiblement je suis malade à cause de ça il dit le docteur.
Au bout d'un mois de ce régime, je me suis trouvé dans un état tel qu'un vigile à l'entrée du service m'a demandé si j'avais le droit de sortir.
A compter de ce jour, je n'ai plus jamais abordé la question du
cannabis devant un médecin.
Mais ça n'a jamais réglé mon problème.
Et il y a pas si longtemps, j'ai encore fini dans un état catastrophique, à vouloir parler de fin de vie.
Soyons clairs : on touche au sujet sensible de la volonté d'euthanasie, parce que, pour rappel, je souffre au quotidien sans que personne ne puisse m'aider.
Mon nouveau médecin a voulu prendre la balle au bond (je le soupçonne d'être encore trop jeune pour être blasé). Donc on en a parlé.
Et donc, lui a envie de se poser la question du
cannabis dans ma maladie. Problème ou solution ?
Alors, surtout depuis les essais paranormaux de Bial, et voyant le merdier du
Sativex, on s'est dit que solution, en France, dans l'immédiat c'était pas une piste facile à explorer.
Du coup, avant de partir à l'étranger, on réessaie "Problème".
Mais franchement, je suis terrifié.
Déjà de revoir un psychiatre. J'ai développé une véritable phobie envers les médecins, celle que j'ai développé envers les psychiatres me soigne quasiment de mon arachnophobie.
Et puis je suis terrifié parce que je sais que certains médecins ne connaissent pas de limites. Pour prouver qu'ils ont absolument raison certains tuent des patients (non, ce n'est pas un troll, l'erreur médicale pourrait être la troisième cause de mortalité en France)
Terrifié parce que si on recommence un
sevrage, et qu'on s'est plantés, je me condamne à une souffrance inutile et à des mois de convalescence alors que je suis au milieu de ma vie et que tout se passe en ce moment.
Bref, voila. Je crois que j'avais juste besoin de dire ces mots. Je ne sais même pas où cette discussion mènera, mais merci d'avoir pris le temps de me lire.