La
GBL, un solvant industriel détourné en drogue qui fait des ravages
PARIS - Le dernier
psychotrope à la mode dans les milieux festifs, la
GBL, est une substance non prohibée, utilisée comme solvant dans l'industrie, mais son usage détourné peut avoir des effets ravageurs, ont averti récemment les autorités publiques sans envisager son interdiction.
"C'est un produit de défonce cool car il est moins cher que l'
alcool, il est facile de s'en procurer puisque c'est en vente libre, on peut en trouver au garage du coin, et on ne risque pas de problème avec la police", explique à l'AFP Stanislas V., 22 ans, jeune "traveller" désargenté adepte des soirées techno.
Le jeune homme, qui revendique l'anonymat, reconnaît que la Gamma-butyrolacton, généralement diluée dans un sirop, est "difficile à doser": "0,1 ml de trop et c'est le coma!". Mais il s'enthousiasme pour la désinhibition, l'euphorie et la stimulation du désir sexuel que cette "ecstasy liquide" peut engendrer.
"Pour les néophytes, ça peut être mortel, surtout s'ils consomment de l'
alcool, des
benzodiazépines, des
opiacés ou des sédatifs en même temps", avoue Edouard G., 26 ans, un consommateur régulier qui parle aussi d'une "très forte dépendance" et de "vomissements croissants".
L'organisme transforme automatiquement la
GBL en
GHB (gamma-hydroxybutyrate), un anesthésique qui possède une double action - euphorisante puis sédative et amnésiante - qui lui a valu le surnom de "drogue du violeur" car ses effets ont facilité des agressions sexuelles.
Mais si la
GHB est classée comme stupéfiant en France depuis 2001, la
GBL, un liquide corrosif, est en vente libre et entre notamment dans la composition de décapants pour meubles, jantes de voiture ou graffitis. Pour un particulier ou un dealer, le prix moyen d'une dose de 1 gramme achetée en gros sur internet oscille entre 0,09 et 2 euros.
Consommée dès les années 1990 dans les milieux festifs homosexuels à Londres, Paris, Barcelone, New York ou Sydney, la
GBL s'est ensuite répandue dans les soirées techno et les discothèques et a touché récemment un public assez jeune et peu informé et parfois des SDF très marginalisés, notent les autorités publiques et les associations de
réduction des risques (RDR).
Agnès Cadet-Taïrou et Michel Candilhon, auteurs en mai dernier d'une étude sur la consommation de
GBL/GHB pour l'Observatoire français des drogues et toxicomanie (OFDT), notent "une prévalence (pourcentage de personnes consommatrices) d'usage très faible" mais en augmentation depuis 2003 (0,27% en 2005 pour des jeunes de 17 à 18 ans et 0,44% en 2008).
La plupart des usagers "ignorent la faible marge de manoeuvre entre un usage relativement sans risque et un usage susceptible d'entraîner un coma", s'inquiètent-ils.
Le 24 septembre, après la multiplication d'intoxications graves et de comas, - notamment sept adolescent mi-avril dans l'Hérault-, les autorités publiques dont la Direction générale de la santé, ont mis en garde contre les dangers de la
GBL, sans pour autant envisager d'interdiction.
Alors que policiers et gendarmes mettent en avant la difficulté à lutter contre la propagation de ce produit, du côté de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt), on souligne la difficulté pratique d'interdire un solvant utilisé dans l'industrie, rappelant que l'éther est parfois également détourné.
"Dans le cas de ce produit très à la mode dans les free-parties et les boîtes, les pouvoirs publics n'ont pas de réflexe prohibitif parce que c'est utilisé dans l'industrie", assure Pierre Chappard, de l'association Auto-support des usagers de drogues. "Ils ont tendance à minimiser l'affaire alors qu'il faudrait mettre en place une vraie campagne d'information et de
réduction des risques".
(©AFP / 18 octobre 2009 12h17)