Morphine et traitement de
substitution !!, voilà ce qui se dit à l'ANSM sur un sujet où les intervenants de terrain ont peu d'infos....C'est long mais ça termine plutôt bien avec l'éventualité d'une RTU sous certaines conditions...
Présentation de l’enquête officielle d’addictovigilance des spécialités à
base de sulfate de
morphine1. Introduction
Depuis le début des années 2000, le réseau d’Addictovigilance (CEIP-A) est régulièrement alerté sur le mésusage des spécialités à
base de sulfate de
morphine, et en particulier
Skénan®, commercialisé en France depuis 1992. Il s'agit d'une forme gélule à libération prolongée indiquée dans les douleurs persistantes, intenses ou rebelles aux autres analgésiques, en particulier les douleurs d’origine cancéreuse. Par ailleurs, bien que ne disposant pas d’AMM dans cette indication, les présentations à action prolongée sont parfois utilisées comme traitement substitutif des pharmacodépendances majeures aux
opiacés (TSO) s’appuyant sur une note d’information de la DGS de juin 1996. En 2009, le centre d'addictovigilance de Montpellier a réalisé une mise à jour du suivi d'addictovigilance sur le détournement et l'abus des spécialités à
base de sulfate de morphinecommercialisées en France. Cette enquête a permis de confirmer le mésusage du
Skénan dans la
majorité des cas d’abus, principalement par voie intraveineuse (estimé à 80% au travers des différents outils).
Par ailleurs, en septembre 2012, le CEIP-A de Montpellier a réalisé une étude auprès des usagers de
Skénan® vus dans les structures de prise en charge des toxicomanes (CSAPA-CAARUD1 ). Cette enquête a permis de préciser le profil des usagers. Il s’agit majoritairement d’hommes (79,3%), d’âge médian de 37,5 ans, injecteur de
Skénan® dans 93,7% des cas, obtenu illégalement dans 79% des cas.
2. Méthode
Les spécialités concernées par ce suivi national sont : Moscontin® (AMM en 1986 pour les comprimés à 10, 30, 60 et 100 mg, en 1994 pour le 200 mg)Sevredol® (AMM en 1992),
Skénan® (AMM en 1990
pour les gélules à 10, 30, 60 et 100 mg et 1996 pour le 200 mg pour les gélules à 10, 30, 60 et 100 mg et 1996 pour le 200 mg), Actiskénan® (AMM en 1999), Kapanol® (arrêt de commercialisation en 2009), Oramorph® (AMM en 1994 pour le flacon de 20 ml, 20 mg/1 ml et 1997 pour les unidoses .La période de ce suivi s’étend entre 1996 et fin juin 2013. L’analyse a porté sur les chiffres de vente et d’exposition, les notifications rapportées au réseau d’addictovigilance et aux laboratoires, les outils épidémiologiques du réseau d’addictovigilance, et les données de la littérature.
3. Résultats
3.1. Cas notifiés au réseau d’addictovigilance
Sur la période de l’enquête, 867 notifications spontanées (NotS) ont été rapportées au réseau des CEIP, incluant 774 observations d'abus (89,8%) et 88 observations d'utilisation du sulfate de
morphine comme traitement de
substitution aux
opiacés (10,2%). Une comparaison des données de ces deux populations (abuseurs du sulfate de
morphine et patients le consommant comme
TSO) a été réalisée.
La population totale était composée de 75,6% d'hommes et 24,4% de femmes. La médiane des âges était de 34 ans. Les patients utilisant le sulfate de
morphine comme
TSO étaient légèrement plus âgés que les abuseurs (37 ans versus 34 ans). La majorité des observations concernait le
Skénan® (90,5%). Depuis 1998, le
Skénan® est la
spécialité contenant du sulfate de
morphine la plus représentée dans les NotS, avec une augmentation depuis 2011. Une augmentation du nombre de NotS impliquant l'Actiskénan® est également observée
en 2012.A la date de notification, la durée médiane de consommation du sulfate de
morphine était de 3 ans, avec une dose médiane quotidienne de 400 mg et maximale de 3500 mg. La dose quotidienne médiane n'était pas statistiquement différente entre les deux groupes de
consommateurs mais était significativement plus élevée chez ceux s’administrant le sulfate de
morphine par injection intraveineuse (500 mg versus 200 mg). Lorsque l’information était disponible, la voie intraveineuse était rapportée par 70% des consommateurs de sulfate de
morphine (n=506 /722), 62,8 % de ceux prenant le
Skenan®, et
34,1% de ceux prenant le Moscontin®. Le pourcentage de patients utilisant du sulfate de
morphine par voie intraveineuse était significativement plus élevé chez les abuseurs par rapport aux patients l’utilisant comme
TSO (72,3% versus 48,5 %).
Le mode d’obtention du sulfate de
morphine n’était renseigné que dans 333 cas (sur 867). Le sulfate de
morphine a été obtenu par prescription médicale (44,4%), acheté dans la rue (47,4%), des deux façons (7,8%) et par vol (0,3%, n=1). Dans 62 cas (7,2%), l’abus de sulfate de
morphine faisait suite à une prescription dans la douleur. La
répartition des spécialités impliquées était la suivante :
Skénan® 53,2%, Actiskénan® 17,7%, Moscontin 11,3%, Actiskenan® en association avec
Skénan® 12,9%,
Skénan® en association avec
Sévredol® 1,6%. Parmi ces patients, 17 avaient des antécédents de consommation d'
héroïne.Proportionnellement au nombre de cas notifiés, l'Actiskenan® était plus représenté chez les sujets
ayant eu une prescription comme antalgique. Une substance consommée en association a été signalée chez 309 patients. Chez 199 patients, au moins 2 substances concomitantes au sulfate de
morphine ont été rapportées. L'utilisation concomitante de
benzodiazépines a été rapportée chez 142 patients [le clonazépam (44 cas), le flunitrazépam (30 cas), et le bromazépam (20 cas)]. Cent-onze patients (16,8%) ont rapporté la consommation de
cannabis et 97 (14,3%) de
cocaïne.
Cent-quatre-vingts patients (180, 21,2%) ont consommé du sulfate de
morphine de façon concomitante à la
méthadone (113 patients) ou à la
buprénorphine (67 patients) prescrite comme
TSO. La fréquence de consommation de
cannabis,
benzodiazépines et psychostimulants était
significativement plus élevée chez les abuseurs du sulfate de
morphine que chez les patients l’utilisant comme
TSO.
Dans 45 cas, des complications liées à l'usage de sulfate de
morphine ont été observées : complications infectieuses en relation avec une injection intraveineuse (endocardite, fasciite nécrosante), signes de manque, troubles psychiques (agressivité, malaise, trouble de la conscience), troubles digestifs, perte de poids.
Vingt overdoses ont également été signalées (hommes, d'âge médian 36 ans) : la voie d'administration était intraveineuse (12 cas), orale (5 cas), nasale (1 cas) et intra-artérielle (1 cas). L'évolution a été fatale dans 13 cas (7 administrations par voie intraveineuse, 1 par voie nasale et 4 par voie orale ces cas ne sont pas inclus dans l’enquête DRAMES. Les
benzodiazépines ont été associées dans 6 cas, la
méthadone dans 4 cas, la
cocaïne dans 3 cas, et cyamémazine,
cannabis,
codéine et les barbituriques, dans un cas chacun.
Cinquante-huit patients ont été inclus dans un programme
méthadone et 12 dans un programme
buprénorphine. Pour un patient, la posologie de
méthadone a été augmentée. Quatre-vingt huit patients (10,2%) ont rapporté la consommation de sulfate de
morphine comme
TSO. Lorsque cette donnée était disponible (36 cas), le sulfate de
morphine a été principalement obtenue sur prescription médicale (28 cas). Les raisons pour lesquelles les patients ont reçu du sulfate de
morphine comme
TSO ont été renseignées dans 27 cas : inefficacité de la
méthadone (2 cas), échec de la
buprénorphine (8 cas) ou les deux (8 cas), mésusage intraveineux de la
buprénorphine (4 cas), et intolérance à la
méthadone (5 cas).
3.2. Données issues des outils du réseau d’addictovigilance :
Les analyses globales de l’enquête ASOS (Antalgiques Stupéfiants et Ordonnances Sécurisées) de 2012 montraient que 203 patients étaient traités par le sulfate de
morphine, soit 32,8% des sujets inclus dans l’enquête. L’âge moyen était de 62 ans. Il s’agissait de 48,2% d’hommes, 49,3% de femmes et 2,5% non précisés. Les nouveaux traitements représentaient 23,2% des prescriptions. Les spécialités les plus utilisées étaient le
Skénan® (53,4%) et l’Actiskénan® (42,8%).
L’indication était précisée dans 162 cas et était rhumatologique (42,6%), cancérologique (23,5%), neurologique (11,1%) et « autres » (22,8%). La douleur était chronique dans 59,6% des cas, aigüe
dans 28,1% des cas et à la fois aigüe et chronique dans 3,4% des cas.
Sur la période de 2001 à 2012, 271 ordonnances correspondant à 299 citations ont été prises en compte dans l’enquête OSIAP (Ordonnances Suspectes, Indicateur d’Abus Possible). La part d’ « OSIAP
morphine » par rapport au nombre total d’ « OSIAP » était de 5,51% en 2012.
Ces ordonnances concernaient 173 hommes (63,8%), 65 femmes ou 33 cas non documentés. La médiane d'âge des patients étaient de 37,4 ± 13,4 ans (18-92). Le patient était connu de la pharmacie dans 55 cas (20,3%), cette donnée était manquante dans 181 cas.
L’observation des critères de suspicion montre une forte augmentation de la « falsification », critère le plus représenté depuis 2011, et une diminution des critères « vol » et « chevauchement ».
Sur les données globales (2001-2012), le
Skénan® était la spécialité la plus représentée (79.3% versus Actiskénan® 8%). Lors de l'enquête 2012, le
Skénan® représentait 81,8% des citations et l'Actiskénan® 13,6%.
Sur la période de l'étude (1996-2012), 57 440 patients ont été inclus dans l'enquête OPPIDUM (Observation des Produits
Psychotropes Illicites ou Détournés de leur Utilisation Médicamenteuse).
Parmi eux, 1032 patients ont rapporté la consommation de sulfate de
morphine (1,76%). Ce pourcentage varie de 1 à 3% suivant les années.
Concernant les dérivés de la
morphine cités, la part des fiches Moscontin® a diminué [15 (79%) en 1996 et 4 (4%) en 2012], et la part de fiches
Skénan® a augmenté [3 en 1996 (16%) et 103 (91%) en 2012].
La médiane des moyennes d'âge des consommateurs de
morphine au cours des 10 années de l'étude était de 33,9 ± 8,4 ans ; 43% des sujets avaient entre 26 et 35 ans et 30% entre 36 et 45 ans. Les
hommes représentaient 72% des sujets. La dose médiane quotidienne était de 330 mg (150-660 mg). 74% des sujets étaient sous protocole de
substitution dont 38% sous
méthadone et 9% sous
buprénorphine.
Plus de la moitié (63%) des sujets consommateurs de morphiniques étaient des usagers de drogue par voie
IV. La voie nasale représentait 14% des cas. Les patients consommateurs de morphiniques
avaient une dépendance alcoolique dans 24% des cas et au
tabac dans 94% des cas.
Concernant la consommation de
psychotropes, 61% des usagers de
morphine rapportaient la consommation de
méthadone, 31% de
benzodiazépines, 12% de
buprénorphine, 6% d’antidépresseurs, 6% d’antipsychotiques et 1% de produits codéinés. Concernant les substances illicites, 31% des sujets consommaient du
cannabis, 21% de la
cocaïne et 14% de l'
héroïne. Sur les 4 enquêtes OPEMA (Observation des Pharmacodépendances en Médecine Ambulatoire) (2008- 2012), 55 patients ont répondu avoir consommé une spécialité contenant du sulfate de
morphine (33 hommes, 61%). Le
Skénan® représentait 83,6% des spécialités mentionnées. Quatre-vingt pour cent
(80%, n=44) des patients étaient sous
TSO. Le principal
TSO rapporté était un traitement par
Skénan® (26 patients, 59% des patients sous
TSO). La moyenne d'âge des patients était de 36,6 ans en 2010 et de 42,6 ans en 2012 [écart : 21-54]. Dans 8,5% des cas, une dépendance à l’alcool était associée. Les critères de dépendance ou de détournement étaient des signes de souffrance à l’arrêt (62%), une augmentation des doses (13,7%) et une prise d’alcool concomitante (13,5%). L’usage était simple (31,4%), un abus (13,7%), une
dépendance (54,9%). Une consommation quotidienne était rapportée dans 83% des cas. La voie d’administration étaient orale (79,2%), intraveineuse (22,6%), nasale (3,8%). Le nombre de décès rapportés dans DRAMES impliquant la
morphine a augmenté ces dernières
années : 3,1% en 2007, 6,3% en 2008, 6,61% en 2009, 8,69% en 2010, et 7,4% en 2012.
En 2012, 24 cas de décès impliquant la
morphine (21 directs et 1 indirect) ont été recensés chez 21 hommes et 3 femmes, d'âge médian 40,5 ans [IQR : 32-45]. Pour la plupart des cas, en l’absence de données anamnestiques et cliniques suffisantes, on ne peut
pas écarter un décès associé à l’usage d’héroïne lorsque la 6-monoacétylmorphine n’a pas été détectée au cours d el’analyse toxicologique post-mortem (décès de survenue tardive). Des antécédents d'abus étaient mentionnés dans 10 cas (opiacés dans 4 cas,
cannabis/cocaïne dans 2 cas).
La
morphine a toujours été associée à d'autres substances (benzodiazépines, 16 cas ;
alcool, 5 cas ;
cannabis ,3 cas ; antidépresseurs, 3 cas ;
cocaïne, 3 cas ;
méthadone, 2 cas ; méprobamate, 2 cas ;
GHB ,1 cas).
Le décès était d’origine toxique sans autre cause dans 9 cas, un décès toxique avec une pathologie en lien dans 1 cas, des circonstances ou symptômes compatibles avec la
morphine dans 4 cas et avec la
cocaïne dans 1 cas. Des traces d'injection ont été retrouvées dans 2 cas, la présence de
morphine a été retrouvée dans l'écouvillon nasal dans 1 cas. Depuis le début de l’enquête nationale sur la soumission chimique (2003-2012), 4 cas ont été rapportés avec la
morphine.
3.3. Utilisation du sulfate de
morphine comme
TSOL’utilisation du sulfate de
morphine comme
TSO était rapportée dans 10,2% des NotS, dans 24,2% des cas dans l’enquête OPPIDUM, dans 59% des cas dans l’enquête OPEMA, dans 6,3% des cas dans
l’enquête ENa-CAARUD2 et dans 19,3% des cas dans une enquête conduite en Languedoc-Roussillon. L’âge médian des usagers était de 37 ans (versus 34 ans pour le total des usagers) dans les NotS et
38 ans (versus 33,9 ans) dans OPPIDUM. La principale voie d’administration utilisée par les patients consommant le sulfate de
morphine comme
TSO était la voie orale (56,7% dans les NotS et 68% dans OPPIDUM). La deuxième voie était la voie
IV (48,5% dans NotS et 40% dans OPPIDUM). A l’inverse, la principale voie d’administration chez les abuseurs était la voie
IV (72,3% dans NotS et 83,3% dans
OPPIDUM) puis la voie orale (28,4% dans NotS et 14,1% dans OPPIDUM). De plus chez les sujets utilisant le sulfate de
morphine comme
TSO, la consommation de substances associées était plus faible (héroïne, BHD,
méthadone,
cocaïne,
benzodiazépines,
cannabis) que chez les sujets abuseurs.
3.4. Cas notifiés aux laboratoires
Quarante-et-une observations ont été notifiées au laboratoire Bristol Myers Squibb du 01/01/2008 au 30/06/2013, dont 33 cas impliquant le
Skénan®, 5 cas l’Actiskénan® et 3 cas l’association des 2 spécialités. Il s’agissait de 31 hommes et 8 femmes, l’âge médian était de 37 ans. La notification était une dépendance dans 11 cas et un abus/mésusage dans 16 cas. Le sulfate de
morphine était administré par voie
IV dans 18 cas. Dans 10 cas, l’indication initiale était une prise en charge de la
douleur.
3.5. Données de la littérature
Dans la littérature, les publications consacrées exclusivement à l’abus de sulfate de
morphine sont rares. Les données issues de la littérature sur l’utilisation du sulfate de
morphine en tant que
TSO ont été analysées par l’équipe du CEIP de Toulouse4 en 2011, et récemment dans une revue Cochrane .
Ces analyses arrivaient à la même conclusion : les données cliniques sont insuffisantes pour évaluer l’efficacité du sulfate de
morphine dans le traitement de
substitution aux
opiacés.
3.6. Chiffres d’exposition
Le
Skénan® reste le sulfate de
morphine le plus utilisé. Depuis 2002, la part du
Skenan® LP 200 mg est en constante progression par rapport aux autres dosages.
3.7. Conclusion du rapporteur
Comme le montre l'analyse des chiffres de vente et d’exposition, des notifications rapportées au réseau d’addictovigilance et aux laboratoires, des outils épidémiologiques du réseau d’addictovigilance, et des données de la littérature, le mésusage des spécialités pharmaceutiques contenant du sulfate de
morphine est toujours observé et concerne essentiellement le
Skénan®. Les profils d'usagers sont les mêmes que précédemment : hommes, âgés d’environ 35 ans en moyenne, polyconsommateurs, avec une forte prévalence de l'injection et une obtention illégale fréquente souvent associée à une obtention par prescription médicale. Par ailleurs, des cas d'infections sévères à type d'endocardite, fasciite nécrosante ont été rapportés
après injection de
Skénan®. Dans l'enquête OPPIDUM 2012, 24,2% des consommateurs de
Skénan® l'utilisaient comme
TSO. Par
ailleurs, autant dans l'enquête OPPIDUM 2012 que dans l'analyse des NotS, les usagers de
Skénan® comme
TSO, l'injectaient moins et consommaient moins de substances en association pour réduire le
mésusage et l’abus de ces médicaments. Une discussion sur cette problématique doit être initiée afin de proposer des solutions (TSO injectable,restrictions de prescription du
Skénan®, modification de la galénique …) pour réduire le mésusage et l’abus de ces médicaments.
4. Avis du Comité technique
Il existe deux populations de consommateurs de sulfate de
morphine distinctes : les sujets abuseurs et ceux utilisant le sulfate de
morphine en tant que médicament de
substitution aux
opiacés (MSO).
L’abus du sulfate de
morphine est probablement sous-notifié. En effet, les informations concernant les usagers fréquentant les
CAARUD et les usagers plus précaires et moins insérés sont peu signalées au
réseau d’addictovigilance. Les salles de consommation à moindre risque permettraient d’avoir accès à cette population. Le réseau d’addictovigilance propose d’étendre l’enquête que le CEIP de Montpellier a réalisée auprès des
CAARUD en Languedoc-Roussillon, aux
CAARUD de toutes les régions, afin de mieux identifier et caractériser cette population, ainsi que les conséquences somatiques de ce mésusage.
Le Comité technique rappelle l’objectif de la note d’information de la Direction Générale de la Santé du 27 juin 1996 stipulant qu’à titre exceptionnel, en cas de nécessité thérapeutique (contre-indications,
inadaptation des traitements à la
méthadone et à la BHD aux besoins des patients), lorsque l’état du patient l’impose, la prescription de médicaments utilisant le sulfate de
morphine à des seules fins de
substitution, peut être poursuivie après concertation entre le médecin traitant et le médecin conseil, conformément aux dispositions de l’article L324-1 du code de la sécurité sociale (établissement d’un
protocole de soins).
Toutefois, cette note ancienne de la DGS fait l’objet d’une application hétérogène selon les régions.
Le Comité technique s’interroge sur le nombre de patients traités en France par un sulfate de
morphine comme MSO dans le cadre d’un protocole de soins et les raisons pour lesquelles les patients
traités par le sulfate de
morphine pour leur dépendance aux
opiacés ne sont pas substitués par
méthadone ou BHD. Il semblerait que les fortes doses de sulfate de
morphine n’aient pas d’équivalence avec la
méthadone. L’ANSM interrogera l’Assurance Maladie afin de connaitre le nombre de patients traités en France par sulfate de
morphine comme MSO dans le cadre d’un protocole de soins, le profil des prescripteurs de sulfate de
morphine et le nombre de patients traités depuis plus
de 10 ans par un sulfate de
morphine à une posologie supérieure à 300 mg par jour et sans traitement par
méthadone ou BHD associé.
Par ailleurs, les données de ventes régionales (GERS) et l’index de polyprescription seront utilisés pour identifier les régions les plus concernées par cette problématique et ainsi mener des actions
régionales. Par la suite, et selon le nombre estimé de patients stabilisés sous sulfate de
morphine en tant que MSO, l’ANSM pourrait évaluer les données d’efficacité et de sécurité d’emploi du sulfate de
morphine dans le traitement de la dépendance majeure aux
opiacés en cas de contre-indication ou d’échec de la BHD et de la
méthadone et ainsi entamer une réflexion sur la possibilité d’une Recommandation
Temporaire d’Utilisation (RTU). Par ailleurs, l’ANSM pourra également demander aux laboratoires de soumettre les mesures de
minimisation du risque qu’ils comptent mettre en place au regard de l’utilisation hors AMM de leurs médicaments.
L’avis du Comité technique a été rendu à l’unanimité.
Séance du 24 octobre 2013