Usager de Drogues depuis plus de trente ans, séropositif Co infecté VIH/VHC depuis 25 ans, substitué aux
opiacés depuis 15 ans (Méthadone,
Subutex, Sulfates de
morphine) je viens d’arrêter le
Skenan au profit du
fentanyl, explications :
J’ai commencé à vouloir me substituer des
opiacés à cause de la mauvaise qualité de l’héroïne de rue et du « danger » que sa consommation représentait pour moi, aussi bien en terme de prise de produit qu’en ce qui concerne ma vie de citoyen usager de drogues qui revendique et, sa citoyenneté et, son usage de
psychotrope, l’un et l’autre n’ayant rien à voir….
La
méthadone je l’ai eu tout au début en 1994, il a fallut très vite que j’arrête cette
substitution à cause de dérèglements hormonaux sévères et d’autres complications liées à la molécule. Il n’y avait pas, à l’époque, d’autre possibilités légales le
Subutex n’avait pas encore eu son autorisation, je suis donc retourné à l’héroïne de rue et à la débrouille jusqu’à ce que le
Subutex obtienne son AMM en 1996 (à l’époque je ne connaissais pas de toubibs susceptibles de me prescrire des sulfates de
morphine et le temgesic c’était « trop compliqué », complètement illégal et donc trop peu de médecins acceptaient de prendre le risque, j’en connaissais bien quelques un mais pour une
substitution au long cour c’était trop difficile d’être sur du suivi de cette conso).
Au début du traitement
Subutex, je ne peux pas vraiment dire que la
buprenorphine ne me convenais pas, je ne prenais pas ce médicament pour arrêter ma consommation d’héroïne mais pour la gérer… très vite, j’ai commencé à injecter les cachets plutôt que de les prendre en sublinguale, je n’y prenais aucun plaisir, je n’ai jamais ressentis d’effet opiacé avec cette molécule, mais le rituel de l’injection était la, rassurant…. Ça a duré comme ça pendant 4 ans, 16 mg en deux injections quotidiennes intercalées de prise d’héroïne régulière voire journalière.
Le
Subutex n’avait plus aucuns effets sur moi, que je prenne de l’héroïne avec ne m’empêchait pas de sentir l’opiacé… j’ai donc, sur les conseil d’un médecin, été voir un toxicologue qui m’a longuement parlé, écouté, ausculté et finalement m’a dit que j’avais développé une « tolérance» au
Subutex et qu’en prendre ou pas n’avais plus aucuns sens, c’est lui qui m’a fait la primo prescription de sulfates de
morphine, j’étais dans le cadre de la « fameuse circulaire » et il ne prenait aucun risques niveau sécu ou conseil de l’ordre. Je n’imaginais même pas que ça puisse marcher, c’était une
substitution de plus, une molécule de plus…
Oui mais, celle la était mieux adapté à ce que je cherchais, à ce que je voulais ressentir….
Les sulfates ont été pour moi, l’occasion de vraiment reprendre pied dans la vie telle que je l’imaginais :
« avec les
opiacés, sans le coté « illégale » qui devient « pesant » au fur et à mesure des années tout en menant une vie qualifiée de « normale » par le commun des mortels….. »
Mais les sulfates ont aussi leurs petits défauts, comme avec tous les
opiacés, l’augmentation des doses est un vrais problème si on arrive pas à gérer le « plaisir », encore très loin de ce qu’on cherche, mais tellement proche quand même…. Malgré ça on peu se stabiliser, je l’ai fait d’autres que je connais continuent à le faire.
Mes soucis sont arrivé avec les traitements VIH, comme je m’y attendais, je ne ressentais plus la
morphine comme avant la thérapie. Je savais que certains traitements VIH la faisaient métaboliser plus rapidement, c’est quelque chose de connu, j’ai donc vérifié que mes TTT étaient du lot pour confirmer ce que nous pensions mon médecin et moi afin de réfléchir à une solution, mon toubib à toujours été à l’écoute aussi bien pour ce qui concerne le VIH que l’addiction, c’est important de savoir que le professionnel n’est pas juste la pour ramasser.… Les derniers temps sous sulfates ont été particulièrement contraignants, J’avais des plages de manques régulièrement et la stabilisation que j’avais mis des années à trouver n’était plus qu’un souvenir. Le
Skenan m’a permis d’avancer pendant la petite dizaine d’année ou il m’a été prescrit, mais au point ou j’en été arrivé, 1320 mg par jour et ne même pas être stabilisé correctement, devenait pour moi et mon entourage proche difficile à gérer, et puis surtout je ne voulais pas augmenter encore les doses et ma tolérance avec…
Ma vie avec mes traitements divers et variés devenait de plus en plus compliquée, mon emploi du temps journalier commençait à 6 heure du matin, 4 gélules de sulfates de
morphine (3 de 200 mg, 1 de 60 mg), à midi, 4 gros medics (2 Invirase, 2 Kaletra), à 18 heure même dosage de sulfates de
morphine que le matin et, au diner, rebelote Invirase et Kaletra plus 1 comprimé de zelitrex (prévention de l’herpes)…. Une fois par semaine 1 gélule de Triflucan 200 pour la prévention des
champis et autres « joyeusetés », plus au coup par coup quelques traitements supplémentaires en cas de problèmes plus 2 fois par mois les aérosol de pentacarinat (je ne supporte pas le bactrim, (prévention de la pneumocystose))
Depuis un moment déjà les sulfates me posaient des problèmes, remontées acides constantes, voie biliaire trop ouverte (à l’échographie), et puis niveau digestif et constipation, no comment, malgré le dosage très haut je devais subir des périodes de manque deux fois par jour, vers 4h30 le matin je me réveillais grâce aux crampes dans les jambes et le soir vers 16h30, la même en couleurs… Et puis par moment j’ai des nausées qui durent jusqu’à deux ou trois jours, dans ces moments la, le moindre verre de flotte je le gerbe, je ne garde donc pas ma
morphine et me retrouve en manque pendant la durée de ces nausées.
C’est pour ces différentes raisons que nous avons décidé avec mon médecin de passer des sulfates de
morphine (Skenan) aux durogésic (fentanyl), un autre
opioïde beaucoup plus fort que la
morphine mais qui se présente sous forme de patchs. Ça n’a pas été simple d’en arriver la, mais elle a bien vu que ça devenait impossible pour moi, je devenais agressif à cause des phases de manques, moins réceptif aussi aux propositions de soins liés au VIH, et puis les périodes ou pendant deux voir trois jours tout ce que j’avale fini au fond des chiottes ont fini par la convaincre que le
fentanyl pouvait êtres une solution.
Nous avons commencé avec des échantillons qu’elle avait reçu, elle m’a donné de quoi trouver mon dosage et le maintenir pendant une petite dizaine de jours. Je n’avais aucunes expérience de cette molécule, j’en avais entendu parlé par une amie qui en prend depuis des années en détournant l’usage (elle mâche les patchs.) mais d’une maintenant en
substitution, rien… (L’amie en question prend ces patchs pour un problème médical n’ayant rien à voir avec la dépendance (enfin, quoi que…).) Je ne savais même pas comment ni au bout de combien ce temps le
fentanyl allait agir, c’est d’ailleurs pour ça que je m’y suis mal pris lors de mon premier Switch et il a fallut que je compense avec de l’actiskenan pendant les deux premiers jours.
1ER Jour : Je me suis "patché" le matin (6 Heure) 100 microns pour commencer normalement c’est l’heure ou je prends mes
Skenan... 18 heure, 300 mg d'actiskenan plus tard et un patch (75 Microns) ajouté, je savais que je commençais trop bas....
2ème Jour : Sale nuit, j'ai dormir un peu ce matin (avec 150 mg d'acti), je rajoute 50 micron, ça fait 225 micron, je verrais ce soir à 18 heure comment ça se danse.... Le soir grosse crise de manque putain combien de patchs il va falloir que je me colle????? Vu l'état dans lequel je suis, je pense que je n’ai pas fini et que bientôt je vais ressembler à un panneau d'affichage en période électorale...... 50 mg de plus….
3ème Jour : ça y est ce matin pas besoin d'actiskenan, j'ai 275 microns collé à divers endroits, apparemment ça doit être mon « dosage de croisière »...
Après ce « Switch », je suis resté 1 semaine avec les « patchs tests » et puis il a fallut reprendre les sulfates, j’avais une ordonnance en cours et vu les circonstances, mon médecin préférait me voir finir les sulfates avant de commencer vraiment le
fentanyl, de plus j’étais d’accord avec ça, pas la peine de « provoquer » une petite guéguerre avec la sécurité sociale et son représentant.
Résultats : de nouveau la salives épaisses, des remontées acides, de la bile dans la bouche au réveil 1 matin sur 2, et puis ces putains de 8 gélules à me retaper en plus de mes autres traitements….. Quand tu sais que ces 8 gélules ne sont même pas la moitié de ce que je dois m ‘envoyer tous les jours….
Je veux pas faire pleurer dans les chaumières, Cosette c’est pas moi, mais merde, s’il y a moyen, un peu de confort ne fait de mal à personne.
Quinze jours de sulfates à attendre la « délivrance », et puis nouvelle visite chez mon toubib et cette fois, elle me fait la prescription de
fentanyl pour une semaine. Pour s’assurer du dosage et du bienfondé de la démarche.
Comme un homme averti en vaut deux, j’ai collé les patchs au moment de ma dernière prise de
Skenan, le calcul est simple, le
Skenan va agir pendant les douze prochaines heures et dans douze heures le
fentanyl prendra naturellement le relais….. Un Switch aussi cool que celui la…. Jamais vu…. Non sérieux, je n’ai rien senti du tout, à peine quelque gouttes de sueurs et encore, en cherchant la petite bête….
Je ressens maintenant tous les bienfait du
fentanyl, je suis stabilisé à 300 micron, après avoir regardé les équivalences, ce changement d’opioïdes me permet de descendre ma tolérance aux
opiacés, 8 gélules en moins par jour, plus ou en tout cas, beaucoup moins de remontées acide, plus de bile dans la bouche et dans la gorge le matin au réveil, et pour finir une stabilisation comme je la souhaite depuis des années, pas de manque toute les douze heures, ni pique ni dents de scies dans la journée, que du bénef……
Quand aux effets «
opiacés » ou de défonce pour parler clair, je n’y pense pas, pas avec le
fentanyl, j’imagine que comme je me sens bien je n’éprouve pas l’envie qui jusqu’à maintenant me « tiraillait » les veines…. Cependant, c’est vrais que si un bon produit, une bonne
héroïne me passe sous le nez je ne dirais pas non, mais ça c’est tout moi…. Que dire de plus, je voudrais que tout ceux qui galère puisse trouver la solution à leurs problèmes.
Le seul bémol de l’histoire, c’est que je suis tellement bien que j’oublis les jours de changement et qu’il m’a fallu me réorganiser complètement, je me suis fais un petit calendrier pour ne plus risquer de me retrouver sans
opiacés dans le corps, heureusement quand ça m’est arrivé j’avais encore quelque
Skenan dans un tiroir, ça m’a sauvé le coup….
Le médecin conseil n’a à ce jours pas donné signe de vie, je suppose qu’au cas ou il sait très bien que ça finira en « baston » entre experts et que dans ma situation le risque c’est qu’on me donne raison…..
Je ne peux que conseiller aux usagers qui ont un très fort dosage en sulfates et qui ressentent plus les effets indésirables que le bénef, de parler avec leurs médecins de l’éventualité de passer sous
fentanyl ou de changer d’opiacés, il n’y a pas que la
méthadone et le
Subutex, et si ces deux molécules conviennent à bon nombre d’usagers, reste ceux qui galère parce qu’il n’y a pas la possibilité actuellement d’avoir autre chose légalement, ou très difficilement, j’ai connus le hors cadre des sulfates de
morphine pendant des années, et aujourd’hui ?? Quel cadre maintenant ?? Détournement d’une substance psycho active à des fins de
substitution??.... Quand les pouvoirs publique vont ils se rendre compte qu’un éventail plus important de produits de
substitution permettrait une meilleur prise en charge des usagers de drogues et qu’il est plus que temps de sortir de cette position ou le
Subutex et la
méthadone restent les deux seules possibilités pour la majeure partie des UD’s, même le
sevrage devient de plus en plus compliqué, pas de lits, pas de services spécialisés, peu de professionnels vraiment formés, le résultat, on le connais, on le voit régulièrement dans les pages justice de nos quotidiens…..
B.R.