Bonjour,
ben tout d'abord merci de votre intérêt :) ca me fait franchement extrêmement plaisir, preuve que je suis en manque de reconnaissance :).
je constate que j'ai été assez évasif sur bien des points... je ne pensais même pas être aussi long quand j'ai commencé a écrire...
Il faut tout d'abord savoir qu'au faîte de ma dependance, je n'ai jamais tout perdu. J'ai continué a aller au taf (souvent dans des états impossibles, certes), m'occupais de ma fille, faisait ma part (le minimum, j'avoue) dans la baraque et suis toujours parvenu a jouer de la musique sans etre un frein pour mon groupe. Comme je ne pouvait pas fumer au travail, je sniffais souvent un gramme dans le courant de l'apres-midi aux toilettes. Ce que je veux dire, c'est que cultiver le secret m'a permis de garder a l'esprit qu'une certaine limite ne devait pas etre franchie. Il ne fallait pas que ca se voie.
de ce fait, j'ai toujours eu des
cravings forts, meme quand je consommais, que je gérais assez betement en grignotant, et pourtant je pense que les crackheads qui ont prit 15 ans kilos en 2 ans ne sont pas légions:)
Au bout de cette deuxieme année (la plus rude question consommation), mon etat de santé s'est fort dégradé, je m'endormais aux réunions de travail, arrivais systematiquement en retard le matin et le midi (fumette oblige), étais dans l'incapacité d'avoir une relation sexuelle non objectivante qui se terminait la plupart du temps par une "culture solo" interminable. Et surtout je commencais a m'endetter serieusement (je ne regardais jamais mes finances en face)
J'avais entrepris entre-temps, une thérapie orientée addiction, qui au bout d'un an, n'avait pas franchement comblé mes attentes, j'avais avancé certes mais j'étais toujours accro et je me mentais toujours quant a ma consommation. J'ai donc commencé une nouvelle thérapie de type EMTE (qui marche donc bien avec les menteurs :)) et la, petit a petit, j'ai commencé a décortiquer les raisons pour lesquelles j'utilisais la drogue. Ce qui faisait que depuis que je suis petit j'ai une fascination pour ca, et que je suis passé d'une drogue a l'autre depuis, j'ai 37 ans. Pour la petite anecdote, j'ai gardé mes 2 tutes en caoutchouc jusqu'a 5 ans car j'en utilisais une pour bien la renifler apres l'avoir longuement frotté contre ma main, la brulant legerement.
J'ai pu donc commencer a espacer mes prises, en ne gardant que celles "qui en valaient vraiment la peine", celles ou j'étais seul, celles qui ne me mettaient pas en danger (surtout en famille, au taf, c'etait moins important). virer la prise ou j'ai 1m30 pour faire ma prepa sinon je me ferait capté, ce genre de choses....
Sans parvenir a arreter totalement, j'ai pu gerer les
cravings liés a ma diminution en faisant quelquechose comme me poser la question : "c'est vraiment le bon moment maintenant?". C'etait d'autant plus facile que toute ces dernieres années mes prises devenait de plus en plus angoissantes. a chaque prise, je pensais mourir. Je ressentais de grosses douleurs dans la poitrine et j'etais tiraillé d'angoisses, que je chassais avec de grandes quantités de vodka. Et pas seulement pour gerer les
descentes, mais aussi les montées. Je me souvient meme que je préférais ne pas consommer si je n'avais pas la possibilité de me procurer de l'
alcool.
C'est a ce moment la que j'ai découvert le
DW et que je me suis mis a commander d'autres choses, pour espacer mes prises.
Disons que cette mise en contexte essaye de faire comprendre que j'ai toujours essayé de gerer ma conso, que je ne l'aie jamais laissé s'emballer au point de tout perdre. et que du coup, j'ai toujours plus ou moins souffert de
craving (j'ai essayer d'arrêter tant de fois
)
Apres l'OD, j'etais tellement estomaqué de ce qui m'etait arrivé et tellement degouté de moi-même d'avoir fait souffrir autant tout ceux qui me sont chers, que la premiere semaine, la question ne s'est pas posé. J'avais juré de ne plus rien prendre. j'ai fumé quelques
cigarettes, 3-4, quand je me sentais en manque (j'ai arreté de fumer il y a 6 ans plus ou moins et je n'avais plus jamais fumé ni un
joint ni une cloppe depuis)
Le premier mois, j'ai repris ma place a la maison en promettant de suivre un programme externe d'aide au toxicomanes (conseillé par l'hosto), assistante sociale pour les finances, psy pour la dependances et médecin pour la
substitution. Je vois toujours le psy pour l'instant car il est malin et me fait avancer, meme si ce n'est pas tellement autours de la dependance que nos séances tournent.
Le
cravings etaient nombreux, tres nombreux, plusieures fois par jours mais d'une intensité relativement faibles. du moins je l'ai ressenti comme cela. J'etais encore fortement traumatisé (pas tellement par l'OD dont je ne me souviens que tres peu) mais surtout par le boum que ca a créé autours de moi, mes pires consommateurs d'amis ont pleuré et ont stoppé leur consommation au moins trois semaines (c'est dire ^^), ma femme me battait froid, m'a tapé dessus en me demandant comment elle allait continuer avec un type qui lui a menti pendant trois ans.
Il faut s'avoir que nous nous aimons sincèrement et probablement de plus en plus depuis ces 13 dernières années. On a eu toute les galères, dependances en commun (speed notamment), extreme difficulté a avoir un enfant et j'en passe. Bref, je ne voulais absolument ni la perdre ni lui offrir la vie de co-habitante de toxico.
Ca plus ma petite fille en tete a chaque appel toxicomaniaque, j'ai commencé a développer une methode, grandement inspirée par celle d'Allen Carr que j'ai connue en arrêtant la cloppe, dans la joie et la bonne humeur. Je l'ai appliquée sciemment a la
coke.
Diaboliser le produit et ses derivés au maximum ("c'est la derniere bentley que je paie a ces fils de putes de narcos"), valoriser la vie liberée des prods (respirer, marche en pleine conscience,
meditation active, etre attentif a l'equilibre qui se reconstruit et l'energie qui afflue dans le corps), se tenir loin des possibilités de se fournir (changement de numero pour eviter d'etre a nouveau hameconné, effacement de tous les numéros de dealers), mettre quelqu'un entre moi et le dealeur (un psy, SOS drogue, un parrain NA ou que sais je), se tenir pour un temps loin des soirée a risque. Autant dire que pour le nouvel an, la liste de mes amis non consommateurs etait de deux. Réactiver des modeles de vertus (exit Kurt Cobain, bienvenue Henry Rollins), désactiver le romantisme lié a la drogue. Restait le
DW, mais le simple fait de savoir qu'il faudra au moins 3 jours pour etre fourni me semble suffisamment rédhibitoire, quand je veux c'est maintenant, pas la peine de chercher des plans pour dans une semaine.
Je ne voulais galerer pour arreter sous aucun pretexte. Je n'ai aucune volonté, si je devais le faire a la dure, je n'y serais jamais parvenu.
Une fois que les
cravings arrivaient, j'avais donc une série de petites reponses toutes faites, liées a ce conditionnement, qui court-circuitent directement, d'abord consciemment, mais au fur et a mesure de plus en plus inconsciemment, la mise en branle du mental. Quand un coup dur se pointait et qui risquait de me faire replonger, meme combat, je me disais que si je passais ce coup dur sans en reprendre, les galeres suivantes seraient plus faciles (ce qui est en partie vrai, d'ailleurs, j'ai arreté la cloppe au pire moment, resultat : quand des moments durs se sont pointés, je n'ai meme pas pensé a rechutter).
J'avais promis aussi.
Le deuxieme mois, les
cravings se sont espacés, mes petites mecaniques etaient moins souvent mises en branle. Mais par contre, ils étaient plus forts, plus puissants, je prenais un peu plus longtemps a me defaire de ces pensees, a calmer mon mental.
J'avais commencé a soigner mes relations car je les avaient pas mal négligées ces derniers temps. J'etais donc a un concert qui s'est vu Sold Out a l'entrée avec un ami consommateur mais qui etait abstinent depuis 3 semaines. On a donc retrouvé des amis en ville dans un bar et tout a coup, j'ai vu mon pote me demander de tenir son gsm ou plusieures lignes etaient deja tracées. Je m'attendais pas spécialement a devoir me poser cette question a ce moment la bien que je m'etais un peu preparé a etre en contact avec du
speed a ce concert, nous devions retrouvé un groupe d'amis pour qui c'est une routine.
Sur le moment, je ne me suis pas posé de question car j'ai vu le désarroi dans ces yeux. Quelque part, je pense avoir capté qu'il se sentait mal en faisant cela (sa femme etait plus d'accord pour ca, il était censé attendre un mois et pas trois semaines, etc.) et de fait mon égo a joué : je suis capable de tomber dedans, on a pas tous la chance d'etre des enfants de coeur, mais s'il s'agit de ne pas se faire saigner par la
came, je suis encore capable d'etre ce type. ce type qui arrete la
came. Je reconnais que c'est pas la meilleure méthode mais pour les gens qui ont un bon ego (j'avoue avoir fantasmé ce fait longtemps avant d'arreter) ca marche ponctuellement.
Un peu plus tard, j'ai du trouvé une autre parade, car une fois que tous les copains étaient dans ma voiture, a se refiler ce gsm rempli de
cocaine, je me suis sincerement posé la question de comment j'allais faire pour pas prendre
. Alors j'ai de nouveau appliqué une variante de la méthode : Est ce que ma vie actuellement est satisfaisante : oui, grandement, j'ai retrouvé mes sens, je n'ai plus de sautes d'humeurs, je suis libéré de devoir toujours penser a la
came, mon argent ne fond plus comme neige au soleil, mon pere est fier de moi, j'ai enormement d'initiatives musicales, j'ai plein d'idées, je ne dilapide plus mon desir en fantasmes objectivant et deletaires. Est ce que cela vaut la peine de troquer ce bel equilibre que je suis en train de recreer pour 10 minutes (car soyons franc, a ce stade de consommation, on a juste droit a 10 minutes de bien-etre, apres c'est mal a la poitrine, conscience constante de ce qu'il reste encore dans le pacson, picole et companie.
La réponse en mon ame et conscience était que non. ca ne valait pas la peine. J'allais tout perdre pour 10 minutes de pseudo bien-etre? beuu ... non.
J'ai dis au revoir a tout le monde sans jugement et je suis rentré chez moi (deja un peu saoul), on m'a meme félicité de ne pas avoir craqué
C'est ironique venant de la part de quelqu'un dans la def, qui pense que moi j'ai un probleme avec la droque :). Ce quelqu'un qui a tenu trois semaines bec et ongle, a coup de volonté brute et qui me dit ca, l'oeil torve
Depuis, croyez le ou nom, mais je n'ai presque plus de
craving. Ils deviennent rares. Je n'ai juste pas envie la plupart du temps. En plus de ne pas me l'autoriser. Si je dois craquer, j'irai plutot fumer un
joint :)
Restaient les moments ou je suis seul a la maison, les plus delicats, typiques de ma conso. Et bien aussi con que cela puissent paraitre, j'ai repris wow en endgame. J'avais arreté pour cause de
came, impossible de jouer correctement a ce niveau sous
crack.
Je ne m'estime pas gueri. Je sais que les choses ont des cycles. Je me donne deux ans a ce regime, pour estimer m'en etre sorti.
Numéro 54
nb : je ne m'etais pas rendu compte de la tartine...; je devrais peut-être faire un blog ^^ Merci a ceux qui m'ont lu jusque'ici :)
Dernière modification par Numéro54 (10 mars 2015 à 13:23)