Le premier « cannabis club » du Mexique ouvre le débat

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Le premier « cannabis club » du Mexique ouvre le débat sur la légalisation


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A man takes part in a rally supporting the legalization of marijuana in front of the Supreme Court of Justice in Mexico City on November 4, 2015. Mexico's Supreme Court opened the door to the recreational use of marijuana on Wednesday, giving a group of activists permission to grow and smoke their own pot in a historic ruling. AFP PHOTO / ALFREDO ESTRELLA
Un luchador pensif. AFP PHOTO / ALFREDO ESTRELLA
Quatre personnes ont désormais le droit de planter et de consommer librement du cannabis au Mexique. Dans une décision qualifiée "d'historique" par la presse, la Cour suprême a autorisé la création du premier "cannabis club" du pays. Une victoire pour ce groupe qui veut surtout ouvrir le débat sur la légalisation de la marijuana.

S'il était déjà  légal de posséder jusqu'à  cinq grammes de cannabis, les quatre membres du club seront les seuls à  pouvoir en faire pousser une quantité illimitée. Ils n'auront pas le droit de le vendre mais pourront en consommer autant qu'ils en veulent "tant qu'ils ne le font pas devant des mineurs et qu'ils n'importunent pas d'autres personnes".

La démarche du groupe, baptisé Société mexicaine de consommation personnelle responsable et tolérante (Smart), n'était pas commerciale ni même personnelle. De leur propre aveu, aucun d'entre eux ne fume du cannabis. Leur intention est de forcer le gouvernement fédéral et le Parlement du Mexique - l'un des plus gros producteurs de la région - à  ouvrir le débat sur la légalisation du cannabis, dont l'exportation, essentiellement vers les Etats-Unis, est contrôlée par les narcotrafiquants.

"Un adulte doit pouvoir décider"

A man smokes marijuana during a rally in front of the Supreme Court of Justice in Mexico City on November 4, 2015. Mexico's Supreme Court opened the door to the recreational use of marijuana on Wednesday, giving a group of activists permission to grow and smoke their own pot in a historic ruling.  AFP PHOTO / ALFREDO ESTRELLA
Célébrations devant la Cour suprême. AFP PHOTO / ALFREDO ESTRELLA
Après l'annonce de la décision de la Cour suprême, l'une des membres du groupe, Josefina Ricaà±o Nava, fondatrice de l'ONG Le Mexique uni contre la délinquance, s'est empressée de préciser que son collectif "ne fait pas la promotion du cannabis".

"Je ne vais pas en faire pousser, je ne vais pas en fumer. Nous ne voulons pas que les enfants en consomment. Mais un adulte doit pouvoir décider et ses droits doivent être respectés".

Josefina Ricaà±o Nava, dont le fils a été tué après un enlèvement, a fait partie des organisateurs des premières grandes manifestations contre l'insécurité au Mexique. Elle voit dans la légalisation du cannabis un moyen de mettre un terme à  "la destruction, la mort, la violence et l'injustice" qu'a engendré son interdiction.

L'avocat Juan Francisco Torres Landa, autre membre du collectif, a ajouté que leur objectif n'était pas "que la drogue soit vendue comme des bonbons au supermarché".

"Nous proposons que l'on informe les citoyens de ses risques et qu'ils puissent ensuite décider.

Un message aux législateurs

En remportant cette décision de justice au plus haut niveau, les quatre plaignants espèrent qu'elle fera jurisprudence et obligera, à  terme, le Parlement à  débattre sérieusement du sujet. Pour El Universal, qui a interrogé plusieurs experts, cette décision de justice doit être comprise comme "un premier pas, à  peine, un appel au gouvernement fédéral et aux législateurs". Selon Sergio Mendez Silva, un avocat cité par le quotidien , on pourrait bientôt assister à  "un effet d'accumulation". Fabian Aguinaco, l'un des avocats du collectif Smart, explique :

"Si aujourd'hui seuls les quatre plaignants sont protégés par la décision de la Cour suprême, cela ouvre la porte à  ce que d'autres personnes fassent les mêmes demandes et obtiennent les mêmes droits".

Selon la Constitution mexicaine, la Cour suprême doit statuer de façon similaire à  cinq reprises pour que sa décision ait force de loi. Mais avant d'en arriver là , les juges devraient renvoyer le problème aux parlementaires.

People demonstrate against the decriminalization of marijuana with a banner reading "Enough of laws which are detrimental to people" in front of the Supreme Court of Justice in Mexico City on November 4, 2015. Mexico's Supreme Court on Wednesday began discussing the possibility of decriminalizing marijuana for recreational use after an appeal of the Mexican Society of Responsible and Tolerant Self-Consume (Smart). AFP PHOTO / ALFREDO ESTRELLA
Une manifestation anti-légalisation devant la Cour suprême à  Mexico, le 4 novembre : " Assez de lois qui sont préjudiciables à  la personne". AFP PHOTO / ALFREDO ESTRELLA
"La marijuana n'est pas légalisée"

La légalisation n'est donc pas pour demain. Immédiatement après l'annonce de la Cour suprême, Eduardo Sanchez, porte-parole du gouvernement, a pris la parole pour rappeler à  tous que :

"La marijuana n'est pas légalisée. Ce verdict ne veut pas dire que n'importe quel citoyen peut faire pousser de la marijuana pour sa propre consommation".

Le président Enrique Peà±a Nieto, qui n'a jamais été partisan d'une légalisation des drogues douces, a reconnu que la décision de la Cour suprême pourrait permettre à  un débat de voir le jour. Tout en assurant que "la politique du gouvernement en la matière ne changera pas". 

Une politique, lancée en 2006 sous son prédécesseur Felipe Calderon, qui consiste à  attaquer frontalement les cartels et maintenir une tolérance zéro envers la consommation de drogues. Depuis cette date, entre 80 000 et 100 000 personnes ont été tuées et près de 50 000 autres sont portées disparues au Mexique à  cause, directement ou indirectement, du trafic de drogues.

Étrangement, le poids des cartels mexicains dans le business du cannabis était quasiment absent, à  la fois du discours gouvernemental et des arguments de la Cour suprême. Tout comme la politique de légalisation de cannabis à  l'étranger (Uruguay et bientôt Chili), et notamment aux Etats-Unis où quatre Etats l'ont fait ces trois dernières années. La Californie, où l'usage médicinal est autorisé, pourrait également bientôt franchir le pas. Seul El Universal a relevé "la violente contradiction" qui pourrait alors exister entre "la permissivité d'un côté de la frontière et la prohibition de l'autre".

Luc Vinogradoff
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