Elo : "Cette "philosophie de vie" a été pendant très longtemps mon letmotiv"
C'est drôle que tu dises ça parce que dans ce que tu décris on dirait au contraire que tu as fait tout l'opposé!
Quand je parle de l'attitude d'être heureux, je parle bien d'une attitude intérieure d'acceptation, pas d'une attitude extérieure de sourire et d'avoir
l'air heureux... C'est toute la confusion apparemment en lisant ta réaction. Tant qu'on accorde de l'importance à notre apparence et qu'on tient à avoir l'air heureux, on fait exactement ce que je dis de ne pas faire : on fait dépendre notre bonheur de choses qui ne dépendent pas de nous. Donc on programme soigneusement et de façon irrémé
diable notre malheur. En plus j'ai justement précisé que je ne veux pas parler de
philosophie, parce que ce mot même introduit en général la confusion. On adopte une philosophie comme un style de musique, c'est identitaire, et si demain on se sent rejeté de cette identité que se passe-t-il? On devient malheureux, très malheureux. Donc
EXIT la "philosophie" de toujours sourire. Personnellement quand je souffre, je fais la gueule, je pleure etc. Et je le cache pas.
Personne ne te demande d'avoir l'air heureuse, ça c'est effectivement une "philosophie de vie", qui vaut ce qu'elle vaut, j'apprécie tes efforts, mais comme tu dis, c'est une pression que tu te mets et la méthode Coué ne marche qu'un temps. Si tu échoues, tu te retrouves encore plus mal. Ce dont moi je parle c'est au contraire d'abandonner cette maîtrise des apparences, je parle d'accepter, je parle d'être heureux quelles que soient les apparences. Si je peux sourire, je le fais volontiers, le sourire est contagieux. Si je peux pas, je peux pas. J'ai des douleurs affreuses, certains jours je peux pas sourire. Je le dis : désolé, aujourd'hui ça va pas.
Ce n'est donc pas la méthode Coué que je recommande, j'ai jamais dit qu'on sera heureux en se répétant "je suis heureux", on ne sera heureux que lorsqu'on sera indifférent aux circonstances, bonnes ou mauvaises. Pas seulement en
faisant semblant.
Elo : "Reprendre ma posture positive face au bonheur en essayant d'occulter mes difficultés ?"
Et je recommande
encore moins d'occulter les difficultés! J'ai parlé exactement du contraire Elo : d'accepter nos difficultés. Et toi tu parles de les maquiller, de les cacher, de les enfouir en espérant qu'elles vont ainsi disparaître?!
Donc encore une fois je ne te demande pas d'avoir l'air heureuse, c'est bien gentil de sourire à tout le monde quand on est malheureux et d'essayer quand même (il y a de la bonne volonté dans ce que tu fais je ne te blâme pas Elo), mais à un moment il faut s'occuper de ses problèmes.
Elo : "c'est d'ailleurs le fait de ne plus y arriver, comme avant, qui est si culpabilisant..."
Et là aussi j'ai bien parlé d'abandonner toute culpabilité comme d'une des formulations des philosophies pour dire la même chose. C'est parce que tu essayes de maitriser
quelque chose qui ne dépend pas de toi (ton apparence de bonheur) que tu te sens coupable. La culpabilité je le répète sans cesse est
l'imposture même : elle se fait passer pour la solution au malheur, celle qui va nous faire changer, alors qu'elle est la cause. Pourquoi veux-tu changer? Pourquoi veux-tu sourire? Pourquoi tiens-tu tant à être libre de toute dépendance? Pourquoi faut-il vivre sans
oxycontin? Pourquoi veux-tu être parfaite Elo? Et
si tu arrives à être parfaite, combien de temps penses-tu que ça va
durer? Comment vas-tu accepter la vieillesse, la maladie et la mort? Dans la vie ceux qui veulent être parfaits, avec leur philosophie de vie et tout le bordel, ne peuvent connaître que des bonheurs éphémères, des
bips de lumière dus au hasard ou à la chance au milieu d'une longue vie de
ténèbres. Ceux qui sont heureux durablement sont ceux qui s'aiment tels qu'ils sont avec les circonstances telles qu'elles sont. Il faut se rendre à l'évidence, la plupart d'entre nous sommes médiocres, avec un peu de chance on parvient à réaliser une toute petite partie de nos rêves avant d'être rattrapés par la maladie, la vieillesse et la mort. Il est impossible d'être heureux si on n'est pas foutu d'accepter ça.
Et pendant qu'on y est, tu sais la chance que tu as d'avoir ton
oxycontin? Remboursé par la sécu? De pas être forcée de bosser dans une mine pour la survie de ta famille malgré la maladie? Tu veux que je te parle de ce que j'ai vu comme misère en Inde dans des villages où un cachet de ton
oxycontin coute un mois d'économies? Des familles entières bouffées par la maladie, l'empoisonnement environnemental, la mafia violente, les jeunes filles qui disparaissent à 14 ans pour être prostituées de force et supprimées à 19 ans (trop vieilles)??? Je dis pas ça pour te faire sentir coupable (oh combien j'aimerais t'alléger de cette culpabilité stérile!) mais pour te dire putain Elo,
profites-en! Défonce toi avec l'
oxy si tu veux ou bien simplement prend ce dont tu as besoin pour pouvoir faire des choses simples et agréables quoi! J'en sais rien, mais
jouis putain de cette vie elle est courte et on a aucune garantie d'en avoir une autre bientôt! Au lieu de chercher à avoir l'air heureuse, prend ton pied avec ce que tu as parce que c'est juste énorme ce que tu as - au lieu de vouloir toujours mieux! Parce que quand on voit ce qu'on a à côté du reste du monde, être heureux, c'est (en plus d'être une bonne idée égoïstement) aussi carrément un
devoir.
Dernière modification par Syam (03 décembre 2016 à 23:52)