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COMMUNIQUÉ
Paris le 27 novembre 2016
Loi Égalité et Citoyenneté : les familles de trafiquants, mais aussi de consommateurs de stupéfiant, s’ils ont été condamnés, pourront être expulsées sur décision de leur bailleur
(Amendement 666-2 adopté dans la nuit du 23 au 24 novembre à l’assemblée)
Droit Au logement fait part de sa très vive inquiétude après l’adoption de l’amendement 666-2[i] lors de la 2e lecture de la loi Egalité et Citoyenneté à l’Assemblée nationale, dans la nuit de mercredi à jeudi 24 novembre, prévoyant que “le contrat de location est résilié de plein droit à la demande du bailleur, lorsque le locataire ou l’un des occupants du logement a fait l’objet d’une condamnation passée en force de chose jugée” pour trafic, vente, achat ou usage de drogue, en vertu des article 222-34 à 222-39 du code pénal.
Le juge n’aura plus alors d’autre choix que de prononcer l’expulsion, si le locataire se maintient dans les lieux après la résiliation du bail.
Or il s’avère que :
– cette expulsion concerne non seulement l’auteur du “délit”, mais aussi sa famille, ou ceux qui l’hébergent, c’est à dire les parents et les enfants qui n’ont pas été condamnés et n’ont donc pas à voir avec le trafic ou la consommation, mais qui subiront de plein fouet la sanction de l’expulsion. Des locataires pourront subir cette sanction sans même savoir qu’un des occupants a été condamné !
– L’article 222-37 du code pénal[ii], visé par l’amendement, sanctionne aussi les acheteurs et les consommateurs à travers “… l’acquisition ou l’emploi illicite de stupéfiants …”, ouvrant ainsi un champ d’application excessivement large. En effet, plus de 4 millions de personnes environ consomment des stupéfiants en France (même s’ils ne sont pas tous condamnés, ni locataires, ni hébergés par un locataire).
Outre son caractère disproportionné, cette disposition est donc contraire à des principes fondamentaux du droit, car elle s’appliquerait à des innocents, hors l’autorité du juge.
L’expulsion est une sanction très grave dans le contexte de crise du logement que nous traversons, et ne peut être laissée à l’appréciation d’un bailleur privé ou social.
Accessoirement, elle est inéquitable car elle ne concerne pas les propriétaires occupants, ni les propriétaires bailleurs. Par exemple les riches dealers ou consommateurs propriétaires de biens immobiliers ou les parents riches de jeunes dealers ou consommateurs échappent à cette double peine …
Droit Au Logement, considère qu’il y a d’autres solutions pour lutter contre le climat de peur que font régner les trafiquants dans certains quartiers, comme par exemple une politique de prévention et de lutte contre les inégalités sociales, la pauvreté et les discriminations, principaux vecteurs des trafics et des mafias, ainsi que des mesures alternatives.
Cet article de loi ouvre la porte à la sanction de « l’expulsion représailles » pour d’autre délits …
Droit Au Logement demande le retrait de cette disposition disproportionnée et inique car elle sanctionne des innocents, y compris des enfants et des personnes vulnérables, elle menace de sanction des dizaines de milliers de locataires (consommateurs, acheteurs …), et ouvre la voie à des pratiques expéditives en matière d’expulsion locative.
DAL dénonce aussi le rejet d’amendements qui visaient à limiter :
les abus dans le cadre d’opérations ANRU,
la radiation à vie de prioritaires DALO qui refusent une proposition de relogement,
les excès que pourraient entrainer la régionalisation du DALO en Ile-de-France,
la durée des procédures d’insalubrité et les pressions que peuvent exercer les marchands de sommeil et les bailleurs indélicats,
les excès qui pourraient subvenir de la création d’un statut d’occupant intercalaire, hyper précarisé et en dehors de toute norme d’habitation (article 32 bis E).
…
La ministre du Logement s’est elle-même opposée à ces propositions d’amendement.
Droit Au Logement s’inquiète vivement du renforcement de la dérégulation des loyers en HLM prévu dans le texte, qui devrait notamment favoriser l’accès des demandeurs HLM les plus aisés car les bailleurs pourront augmenter les loyers en fonction des revenus, au détriment des demandeurs HLM des 2e et 3e quartiles en terme de revenus (SMIC, petits salariés, artisans, auto entrepreneurs …).
Certaines avancées obtenues en 1ère lecture ont été maintenues ou rétablies (point détaillé ultérieurement).
””””””””””-
[i] AMENDEMENT No 666 présenté par : Mme Linkenheld, …
ARTICLE 33 BIS AA :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
« L’article 6-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrat de location est résilié de plein droit à la demande du bailleur, lorsque le locataire ou l’un des occupants du logement a fait l’objet d’une condamnation passée en force de chose jugée au titre d’une infraction sanctionnée à la section 4 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal et concernant des faits qui se sont produits dans le logement, l’immeuble ou le groupe d’immeubles. »
[ii] ARTICLE 222-37 du code pénal :
Modifié par Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 – art. 3 (V) JORF 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002
Le transport, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition ou l’emploi illicites de stupéfiants sont punis de dix ans d’emprisonnement et de 7 500 000 euros d’amende.
Est puni des mêmes peines le fait de faciliter, par quelque moyen que ce soit, l’usage illicite de stupéfiants, de se faire délivrer des stupéfiants au moyen d’ordonnances fictives ou de complaisance, ou de délivrer des stupéfiants sur la présentation de telles ordonnances en connaissant leur caractère fictif ou complaisant.
Les deux premiers alinéas de l’article 132-23 relatifs à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.
Source : droitaulogement.org
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Mascarpone a écrit
Salut Leaf
Content de te relire
Tetris68 a écrit
Leaf smiley-gen013 bleu-trompette
Salut les gars, ca fait du bien de vous relire aussi, mine de rien. J'aimerais dire "retour en force" malheureusement c'est pas exactement le cas, j'écrirai un truc sur tout ca prochainement et je pense que vos conseils me seront d'une grande utilité...
Sinon concernant le sujet en question, comme tu le dis Tetris, du coup meme les consommateurs peuvent être touchés par cet amendement??? Ce serait un truc de fou quand même... Mais en effet, ce truc me semble être un genre d'outil qui peut être utilisé n'importe comment et à n'importe quelle fin, et surtout faciliter des abus pour réprimer encore plus les gens des tiékars... On a l'impression que le gouvernement fait tout pour foutre le feu aux poudres.
Ce qui est saoûlant c'est que le "problème" du deal dans les tess est toujours abordé sous le même angle, et les solutions apportées toutes plus ridicules et inefficaces les unes que les autres, toujours cette volonté de régler le problème de la "manière forte", avec de la répression, avec des formules qui sonnent bien autoritaires et efficaces mais qui dans la pratique sont soit inappliquables soit carrément aggravantes et punissent toute une partie de la population juste parce qu'elle habite à tel ou tel endroit. Il serait peut-être temps d'essayer de comprendre ce qui fait que le deal de tess est si prospère et pourquoi il est inarrêtable?
Peut-être est-il temps d'arrêter de le diaboliser constamment et de le voir sous l'angle humain. Comprendre ce qui rend le truc si attractif pour les minots de 10ans, comprendre les situations familiales, comprendre que grandir dans ces endroits, en cotoyant quotidiennement certaines choses, fait que l'on développe une perspective sur la vie et des valeurs toutes autres que celle d'un mec qui grandit dans un quartier de classe moyenne.
Comprendre que les mecs dans les halls ne sont pas tous des gros enfoirés qui terrorisent tout le monde, ne veulent que du blé et sont en mode "nique la france"; ce sont aussi des êtres humains, des mecs avec des familles, avec des problèmes persos ou des situations hyper difficiles parfois, qui font ce boulot pour des raisons variées; il y a l'esprit de "crew" en grandissant qui fait que tu fais ce que tes potes font, l'envie de réussir malgré des perspectives professionelles très limitées alors que la télé te montre constamment des gens riches et des trucs que tu peux pas t'offrir, et que tu vois ta mère travailler comme une esclave pour gagner une misère.
Comprendre aussi le phénomène généré par la ghettoisation, et la fierté et la revendication de son tiekar, et la compétition entre différents tiékars, ce qui au fur et à mesure des décennies a carrément créé une "culture" du ter-ter dans laquelle les mecs grandissent et à laquelle certains, pas tous, adhèrent. Comprendre que la situation dans certains quartiers s'est en fait amélioré depuis que les jeunes font du business, tant en terme de sécurité que de sous qui rentrent; et que de ce fait les habitants ne sont pas tous contre les dealers, ou n'ont pas une opinion foncièrement négative d'eux. Voir l'organisation et la dédication des mecs à leur business, qui même s'il est illégal, est parfaitement géré et démontre des talents de management, marketing, vente, etc... Tellement d'aspects différents à ce "problème" qui sont ignorés et qui mériteraient d'être analysés plus en profondeur... Mais j'en demande peut-être trop de la part de ces politiques qui sont carrément déconnectés de tous ces problèmes là .
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Dernière modification par Anonyme9404 (30 novembre 2016 à 15:07)
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groovie a écrit
On dirait le baroud d'honneur d'une société qui s'enfonce dans sa décrépitude nauséabonde. Ça sent la fin.
Hélas, je suis assez d'accord avec toi...
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Dernière modification par coluche (08 décembre 2016 à 21:22)
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