Merci prescripteur
La dépendance au
néocodion et les restrictions quand à sa délivrance ont entraîné parfois des modes de vie complètement déjantés. Me rappelle ce couple d'amis. Ils habitaient un petit village en Lorraine. A eux deux, fin des années 80 - début des années 90, ils consommaient 7 à 8 boites par jour. Eh bien 2 ou 3 fois par semaine ils faisaient 100 à 200km, voire 300km,( ça leur faisait une journée quasi complète) en rayonnant dans toute la région pour trouver leur boîtes. Les pharmacies n'en délivraient qu'une à la fois. Et petit à petit certains refusaient d'en vendre, prétextant qu'ils en avaient pas ou qu'ils n'étaient pas là pour entretenir la dépendance aux drogues...
Eux non plus (je parle des potes) ne voulaient pas d'autres codeinés. Pourtant ils auraient pu combiner avec des efferalgans, antitussifs et autres.... Ils ont essayé de baisser en substituant une petite partie avec de la codethyline Houdé...
Quand la
methadone fut enfin disponible, ils y eurent accès tres vite , quasi en protocole compassionnel. LMais c'était trop tard. Le mec avait un cancer du pancréas. La nana ne pesait même plus 40 kg. Elle avait plein de problèmes graves au niveau des organes digestifs, poumons. Ils sont morts très rapidement. Eux attribuèrent le cancer et les affections digestives dues au
Neocodion (une bonne dizaine d'années de conso à fortes doses de Néo)...
Est-ce vrai? Nul ne saura le dire.. Toujours est-il qu'il peut y avoir une relation de cause à effet. Mais dans quelle mesure????
Sans doute ne sont ils pas les seul dans ce cas. Ce serait intéressant d'avoir les témoignages de rescapés pour qui les
Néocodions étaient devenus une drogue très dure....
Attention, ne tirons pas trop sur le fabricant, Bouchara. Ce labo voulait retirer le
Néocodion du marché où le vendre uniquement sur ordonnance dès les années 80 mais des médecins ( des "vrais") siégeant à la commission des stups ont insisté pour qu'ils le laissent en vente libre afin que les gens accro (mais pas trop) aient accès à une petite béquille.
Alors que d'autres, tout pétris de certitudes et animés des meilleures intentions du monde, qui voulaient à tout prix "sauver" les drogués, s'acharnaient à chercher à supprimer à tout prix la vente libre de
Néocodion...
Il faut savoir que le
Néocodion donnait une très mauvaise image de Bouchara , accusé de s'enrichir sur le dos des drogués. A l'époque c'était un tout petit labo et cette image de "dealer" qui lui collait à la peau dégradait son image.
Sur l'insistance de quelques pragmatiques, ls ont donc finalement continué à le diffuser en vente libre, mais un décret restreignit la délivrance à pas plus d'une boîte à la fois par personne et par jour...
A l'honneur de Bouchara il faut savoir que pendant très longtemps ils n'ont pas augmenté le prix.... justement pour qu'on ne puisse pas les accuser de s'enrichir "sur les dos des pôvres victimes de la drogue"... Ensuite le labo a été vendu, revendu... et les actionnaires demandèrent un max de rentabilité... sauf pour la
méthadone. Faut savoir que la metha non plus ne leur rapporte pas beaucoup... mais ne les plaignons pas, car, comme tous les labos, ils se rattrapent largement sur d'autres produits.
Faut savoir aussi que lorsque la dispensation de métha fut élargie vers 1994-1995, pas un labo ne voulait s'en occuper. Le brevet est dans le domaine public depuis longtemps et le produit est mal connoté. (Jusque là c'était la pharmacie centrale des hôpitaux qui fabriquait les doses dont bénéficiaient quelques dizaines de privilégiés sur le tout le territoire)... Ensuite ce fut le labo Mayoli Spindler... qui s'en chargea. La fabrication de metha ne fut pas directement rentable pour eux mais en échange le ministère accéléra et facilita l'obtention de quelques AMM (autorisation de Mises sur le Marché) d'autres médicaments qu'ils produisaient. Jusqu'à ce que Bouchara reprit la fabrication du sirop... puis vinrent les gélules....
Mais je digresse... et suis loin des effets spécifiques du
NéocodionRevenons à notre sujet. Je me rappelle cette phrase 'd'un mec, un truc du genre:
"Quand t'es accro au
Néocodion, tu veux du Néo... Les autres codeinés ça peut te soulager mais ça te fait pas exactement le même effet. Ca chauffe et ça speede pas pareil. Même si t'as pris de la codé, tu veux des
néocodions quand-même. C'est comme cette bière: la fameuse 8,6°. Quand t'es bien accro à ce truc c'est pas d'une bière dont t'as envie le matin, mais d'une 8,6. Une 8,6° exclusivement."
N'ayant jamais été accro au Néo et encore moins à la bière, je n'ai pas d'expertise perso mais je suis étonné qu'on n'ai pas plus approfondi cetter question... car en me remémorrant de façon un peu approfondie les souvenirs à propos de consommateurs de Néo, les différents aspects autour de leur conso donne parfois le vertige. Je dirais même que le Néo en France, fut pour un certain nombre un véritable "Life Style" comme disent les anglo saxons.
Me rappelle ce copain qui avait fait plusieurs sculptures avec les anciens tubes puis tapissé ses chiottes avec des centaines de couvercles de boites de Néo en carton....
et le circuit d'un autre pour s'en procurer tous les soirs. Eviter les pharmacies où il avait du crédit (et qui en délivraient plusieurs boites), trouver de nouvelles officines, se faire bien voir, apprivoiser le pharmacien pour avoir plusieurs boites, + un peu de crédit...+ encore du crédit...puis bye bye... mais c'est vrai qu'à Paris y en a plein des pharmacies
L'usage détourné du
néocodion a été étudié dans le cadre de plusieurs disciplines mais personne, à ma connaissance, ne jamais étudié les effets à long terme de l'abus d'extrait mou de marrube blanc, de sulfagaïacol....combiné à ce camphosulphonate de
codeine.... tout ça assimilé à de très hautes doses par des organismes souvent très fatigués, hépatiques, immunodéprimés, (VIH, VHC et affections diverses)
Ca concerne quand même des dizaines de milliers de personnes souvent déjà bien affectés par diverses pathologies, parfois très lourdes.
Pourtant les cohortes seraient faciles à constituer. Les Néo-afficionados sont souvent très compliants et sans doute nombre d'entre eux accepteraient de participer à des études.... La plupart des pharmaciens en connaissent pleins...
Mais il est vrai que, pour les "narcologistes" travailler sur des sujets comme le
Néocodion c'est moins prestigieux que "faire la
cocaïne" qui est plus "glamour" et "concerne surtout les jeunes". Les thunes pour le
Néocodion ne tomberaient peut-être pas aussi automatiquement.
Pourtant une consultation "Special
néocodion" répondrais sans doute à une réelle demande (bien qu'informulée) et serait certainement aussi utile que les innombrables "consultations
cannabis" qui sont fréquemment vides, souvent inefficaces et pompent les pépètes publiques.
Dernière modification par Gilac (09 juin 2010 à 17:41)