La France a des résultats médiocres dans la lutte contre les risques infectieux (sida, hépatites...) dans ses prisons, selon une étude montrant qu'en dépit de certains progrès, elle n'atteint même pas la moitié des objectifs qu'elle s'est elle-même assignés.
Parmi les failles de cette prévention, la grande majorité des détenus ignorent la possibilité d'avoir un traitement après une exposition à risque (sang/drogue injectable, sexe...) pour le virus du sida (VIH), relève le Dr Laurent Michel, coauteur de l'étude, parue dans la revue BMC Public Health.
Avec une note qui n'atteint pas la moyenne (4,5 sur 10), la France ne remplit pas ses objectifs - encadrés par une circulaire de décembre 1996 -, pourtant déjà en retrait par rapport à ceux de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
En regard des recommandations de l'OMS, sa note est encore plus mauvaise (2,5 sur 9). La France n'a ainsi pas prévu de fournir du matériel stérile d'injection aux toxicomanes en prison pour diminuer les risques de contamination, comme le préconise l'OMS.
L'étude, réalisée avec le soutien de l'ANRS (Agence nationale de recherche sida-hépatites) et du Sidaction, a porté sur 103 établissements, accueillant 43.365 détenus (69% de la population carcérale), dont les médecins ont été interrogés.
Dans 47% des établissements, les détenus ne sont pas informés de la possibilité d'avoir recours à un traitement après exposition (TPE) à risque pour le VIH, et dans 31% des cas, les médecins ne sont pas en mesure de répondre à la question.
Ainsi très majoritairement (78% des prisons), les détenus ignorent l'existence de cette possibilité. Ce que confirme le fait que seulement trois TPE ont été prescrits au cours des 12 mois précédant l'enquête, dont aucun lié à la drogue, note le Dr Michel.
Si les préservatifs masculins sont le plus souvent accessibles (95% des établissements), les lubrifiants le sont moins souvent (51%) et les préservatifs féminins encore moins (seulement 21% des prisons détenant des femmes).
Autre point noir : 13% des établissements n'initient aucun traitement de
substitution aux
opiacés (héroïne). Au moment de l'étude, 9% des détenus en bénéficiaient : 6% par
buprénorphine et 3% par
méthadone.
Seuls 22% des responsables d'unités sanitaires estiment que l'information fournie aux détenus sur l'utilisation de l'eau de javel (stérilisation du matériel d'injection en particulier) est accessible et intelligible.
Un tiers des prisons prennent des mesures pour prévenir les risques infectieux liés au coiffage (tondeuse), pourtant prévu dans les mesures sanitaires françaises. Un très petit nombre (6%) prend des dispositions destinées à prévenir les risques liés au tatouage-piercing.
Le dépistage du VIH, et des hépatites C et B (VHC et VHB) est par contre systématiquement proposé dans la grande majorité des établissements, mais les résultats négatifs ne sont pas toujours communiqués au détenu.
Au total, 22% des responsables médicaux interrogés déclarent que des MST contractées lors de la détention ont été traitées dans leur unité.
En revanche, la vaccination contre l'hépatite B est proposée aux détenus non immunisés dans 83% des établissements.
Contrairement à la loi de 1994 et aux recommandations de l'OMS, les détenus ne bénéficient pas d'une prévention et de soins comparables à ceux disponibles en ville.
Manque de moyens, de personnels et de formation expliquent en partie ces déficiences, selon le Dr Michel qui plaide pour une réelle politique de prévention et une mise à jour de la circulaire en vigueur prenant mieux en compte le risque d'hépatite C.
Source :
http://www.romandie.com/news/n/_Sida_he … 111106.asp