On savait la consommation de drogue bien enracinée en prison, mais, jusqu´à présent, rien n´était venu étayer ce constat. Pour la première fois, une étude menée par le docteur Olivier Sannier, médecin au centre pénitentiaire de Liancourt, révèle l´ampleur du phénomène et pointe du doigt la faillite des politiques sanitaires.
Un peu plus de la moitié des détenus de la prison de Liancourt ont répondu anonymement au questionnaire. Ainsi 381 détenus sur les 700 que compte l´établissement de Liancourt ont participé à l´enquête. Le docteur Sannier constate que « la prison concentre les usagers de drogue et ne constitue pas un outil répressif efficace pour réduire les risques ». Et il souligne que « les stratégies mises en place à l´unité de consultations et de soins ambulatoires (Ucsa) du centre pénitentiaire de Liancourt nécessitent des adaptations. Il faudrait qu´on ait les mêmes moyens qu´à l´extérieur ». Et il regrette l´absence d´addictologue en prison, « alors que je suis 80 personnes en traitement de
substitution ».
Ceux qui se droguaient avant continuent pendant leur incarcération. Les chiffres sont éloquents : 60,1% des détenus qui ont répondu consommaient au moins une drogue avant leur incarcération, 43,6%, ont fait usage d´au moins un stupéfiant durant leur séjour en prison et 16,2% s´y adonnaient quotidiennement. Le
cannabis reste la substance la plus répandue. Mais les drogues dures passent aussi le mur d´enceinte. L´héroïne était ainsi consommée par 31 personnes (8,1%) et 27 (7,1%) prenaient de la
cocaïne.
Certains ont même été initiés en prison. Parmi les 152 détenus qui ne s´étaient jamais drogués avant leur incarcération, 13 (3,2%) ont testé au moins une nouvelle drogue, derrière les barreaux. A cela s´ajoute l´état sanitaire déplorable des détenus : « A peine la moitié des répondants déclaraient connaître leur statut sérologique concernant le VIH et les hépatites B et C », selon l´étude, et « plus de 10% […] déclaraient être intéressés par la mise en place de programmes d´échanges de seringues ou kits
sniff ». A travers cet état des lieux, l´étude pointe l´inadaptation des mesures sanitaires pour endiguer ce fléau. « Le cadre répressif carcéral ne paraît pas dissuasif. »
« C´est un fléau contre lequel on n´arrive pas à lutter », confirme l´Ufap, syndicat majoritaire chez les personnels pénitentiaires. Les surveillants en profitent pour dénoncer la technique des parloirs sauvages et le manque criant de personnel. « Un week-end, lors d´une promenade, il nous est arrivé de compter 60 colis qui avaient été balancés par-dessus le grillage. » Parmi ces paquets,
cannabis et autres produits stupéfiants se fraient aisément un chemin.
Source :
http://www.leparisien.fr/oise-60/drogue … 929628.php