Les participants à la conférence sur la réduction des risques, organisée à Vilnius avec le soutien de la Fondation Elton John, ont dénoncé (11 juin) une répression accrue subie par les personnes consommatrices de drogues en Europe de l'Est et en particulier en Russie."Il y a un renforcement de plus en plus marqué des politiques répressives. Des gens sont condamnés à des peines de prison extrêmement longues, non pas pour le trafic, mais pour la possession de très faibles quantités de drogue", a expliqué à l'AFP Michel Kazatchkine, envoyé spécial de l’ONUSIDA en Europe de l'Est. Une situation qu'a confirmée Larissa ancienne consommatrice d'une cinquantaine d'années, militante venue de l'enclave russe de Kaliningrad, lors d'une intervention publique : "Pour les médecins, les toxicomanes sont synonymes de criminels. J'ai été traitée comme une personne de seconde classe. J'ai été privée de mes droits, comment aurais-je pu violer les lois ?" Selon Michel Kazatchkine, les traitements de
substitution sont toujours illégaux en Russie et les programmes d'échange de seringues quasiment inexistants. L’ancien directeur du Fonds mondial de lutte contre le sida dénonce "la férocité judiciaire", encouragée par "des facteurs sociaux, culturels, religieux et maintenant économiques".
L'Europe de l'Est connaît une recrudescence des cas de sida ; dans la zone, 1,5 million de personnes ont été concernées en 2011, avec 33 % des cas associés à une pratique d’injection de drogues, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). "L'exclusion sociale est le moteur de l'épidémie de VIH en Europe. Il s'agit d'un cercle vicieux : la marginalisation sociale augmente le risque d'être victime du VIH et le VIH exacerbe la marginalisation sociale, ajoutant un nouveau facteur de
stigmatisation", a relevé Martin Donoghoe du bureau européen de l'OMS chargé des programmes pour le sida et les hépatites virales, cité par l’AFP. A l'ouverture dimanche de la conférence de Vilnius, l'ex-président polonais Aleksander Kwasniewski a appelé à décriminaliser la possession de drogues. Il rejoint des anciens chefs d’Etat comme Ruth Dreifuss (Suisse), Fernando Henrique Cardoso (Brésil), Ernesto Zedillo (Mexique), Ricardo Lagos (Chili), etc. engagés dans ce même combat. "Pendant mon mandat [de président de la Pologne, ndlr], sur le conseil de nombreux groupes, j'ai signé une loi criminalisant la possession personnelle de drogues. Je sais que c'était une erreur. La
dépénalisation, c'est la bonne manière d'agir", a déclaré Aleksander Kwasniewski, aujourd'hui membre de la Commission globale en matière de drogue (Global commission on Drug Policy). Par ailleurs, comme l’a expliqué Michel Kazatchkine : l'assemblée générale extraordinaire de l'ONU qui aura lieu début 2016 sera, sur cette question, une échéance importante. "Ce sera la première fois depuis 18 ans que se déroulera une assemblée générale sur les stupéfiants et ces deux ans qui nous séparent de cette assemblée seront consacrés au plaidoyer, au travail de conviction, de dialogue, mais dans un climat difficile", indique-t-il.
[small]Source :
seronet[/small]