Interdite depuis 2012, la molécule 4-MEC se diffuse à ParisLE MONDE | 11.06.2013 à 10h47 • Mis à jour le 11.06.2013 à 11h54
Par Laetitia Clavreul
Elle était arrivée sur le marché après l'interdiction de la
méphédrone en 2010. Comme toutes les
cathinones (stimulants), la molécule de synthèse
4-MEC a été interdite en France à l'été 2012. Durant l'hiver, selon les analyses des seringues collectées dans des récupérateurs en Ile-de-France par l'association
Safe, on l'a vue cependant apparaître dans des zones dont elle était jusque-là absente. Elle ne disparaît pas, elle se diffuse. Plutôt classique.
Ce qui surprend l'association, c'est plutôt la place qu'a prise la
4-MEC en peu de temps. Selon une étude en cours de publication scientifique, réalisée avec la faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine), elle est présente dans 25 % des 3 244 seringues analysées en 2012. 15 sites sont concernés sur les 17 où des prélèvements ont été effectués.
L'
héroïne était présente dans 45,1 % des seringues, la
cocaïne dans 43,8 %, la
MDMA (ecstasy) dans 2,5 %. Ce qui montre que des mélanges sont faits dans les seringues, et contrairement aux bonnes pratiques, que les seringues sont réutilisées, voire partagées.
Scruter la présence de
4-MEC quartier par quartier est très instructif. D'abord, on trouve de la
4-MEC dans tous les récupérateurs à Paris, mais aussi, dans une moindre mesure depuis décembre et janvier, à Colombes, Cergy ou encore Mantes-la-Jolie.
On en trouve peu autour de la Gare du Nord (14,10 %), quartier surtout fréquenté par des toxicomanes précaires, mais davantage aux Halles (41,29 %) et à Bastille (57,38 %). Ce qui n'est pas étonnant, car la molécule est prisée des homosexuels, qui la consomment dans un contexte sexuel. Mais l'étude montre qu'elle n'est plus circonscrite à cette communauté.
PUBLIC QUI SOUHAITE RESTER DISCRET
C'est dans le 16e arrondissement de Paris que sa présence est la plus spectaculaire : 81 % dans les seringues prélevées dans le récupérateur proche de la station de RER Kennedy. Dans le quartier, elle y aurait remplacé, auprès d'un public à la recherche de stimulants, pour des raisons festives ou professionnelles, la
cocaïne, dont la présence dans les seringues est passée de 100 % à 37 % entre 2010 et 2012. "On peut penser que le profil des usagers reste le même, mais qu'ils ont changé leur façon de consommer en préférant des produits accessibles sur Internet", affirme Catherine Duplessy, la directrice de
Safe.
Un public bien inséré dans la société et souhaitant rester discret, qui préfère déposer ses seringues dans les récupérateurs dans la rue plutôt que de les apporter en pharmacie ou dans les centres d'accueil pour toxicomanes. "Ils ne se voient pas comme des junkies", explique Mme Duplessy, qui juge que cette population a peu conscience des risques.
La
4-MEC serait-elle une exception ? Dans 7 % des seringues prélevées, aucun produit n'a été détecté. Leur contenu a pu se dégrader ou l'instrument a pu être rincé. Il y a une autre hypothèse : qu'elles aient contenu de nouveaux produits de synthèse, non recherchés par l'étude.
Source :
http://abonnes.lemonde.fr/societe/artic … _3224.html