La FFA s'inquiète de la vente d'un dispositif médical

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mikykeupon homme
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Le président de la Fédération française d'addictologie (FFA), le Dr Alain Rigaud, s'est inquiété, dans un entretien accordé fin janvier à  l'APM, de la commercialisation d'un dispositif médical destiné à  réduire l'alcoolémie qui viserait principalement, selon lui, les buveurs excessifs.

Zéocal* (Mineralpharma) a été lancé vendredi dans environ 200 pharmacies, selon des informations transmises à  l'APM par le laboratoire le jour de son lancement. Cette solution buvable à  base de zéolite (ou zéolithe) naturelle, réduirait "jusqu'à  41% l'absorption de l'alcool par l'organisme", affirme Mineralpharma sur la base d'une étude menée sur 12 personnes. Zéocal*, enregistré comme dispositif médical, aurait une action exclusivement mécanique et "ne traverser[ait] pas la paroi intestinale". Le laboratoire positionne son produit sur le marché de l'amaigrissement: en limitant l'élévation de l'alcoolémie, Zéocal* réduirait l'apport calorique lié à  la consommation d'alcool.

"Périodiquement" sortent "des produits destinés à  éviter la gueule de bois ou réduire l'alcoolémie, boissons ou compléments alimentaires vendus en pharmacie ou en grandes surfaces", a rappelé à  l'APM le Dr Alain Rigaud. Il cite notamment la boisson Outox* (Outox International), commercialisée comme "anti-gueule de bois" et le complément alimentaire "After-Effect* lendemains difficiles" (Deenox) présenté comme "spécialement formulé pour les consommateurs occasionnels d'alcool".

"Les alcoologues se sont mobilisés contre ces produits qui visaient directement les buveurs excessifs", souligne le Dr Rigaud. A la sortie d'Outox* en 2010, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait fait modifier certains de ses messages publicitaires.

"Là , on a l'impression que le laboratoire a anticipé" en s'adressant à  des gens "clean" qui veulent maigrir, estime le président de la FFA. "Pourra-t-on agir sur une communication ainsi réglée au millimètre?", s'inquiète-t-il. Selon lui, rectifier le message marketing présente au moins l'intérêt de "semer le doute au sein de la population".

L'alcoologue indique que l'homéostasie du corps conduit la plupart des personnes qui consomment un ou deux verres d'alcool à  manger naturellement moins. De plus, selon lui, les personnes en surpoids ou obèses savent que ce ne sont pas un ou deux verres d'alcool qui "font la différence".

"On a donc l'impression que ce sont en fait les buveurs excessifs qui sont visés: ceux-là  vont retenir que le produit réduit l'alcoolémie et risquent d'être leurrés", déplore le Dr Rigaud. Pour lui, le produit ne présente "aucune efficacité prouvée". Elle est seulement "alléguée", juge-t-il, parce que le laboratoire s'appuie sur une étude "sur 12 patients, non publiée et sans méthodologie scientifique".

Interviewé par l'APM fin janvier (cf APM VIRAT002), Christian Serre, chimiste spécialiste des zéolites (Institut Lavoisier, Versailles) avait mis en doute le fait que Zéocal* capte seulement l'éthanol et pas l'eau, comme l'avait affirmé un représentant du laboratoire lors de la conférence de lancement du produit, pour écarter le risque de déshydratation.

"L'eau n'est pas adsorbée parce que le minéral a déjà  été abondamment traité avec de l'eau (en millions d'années)", a écrit à  l'APM Alfredo Guerrato, pharmacien chimiste responsable de la recherche et développement de Blue Zmed, société qui détient le brevet de Zéocal*. "Cela n'a rien à  voir!", rétorque Joà«l Patarin, chimiste spécialiste des zéolites, directeur de recherche du CNRS au laboratoire de matériaux à  porosité contrôlée de Mulhouse. Après séchage, un matériau hydrophile comme Zéocal* "n'aura qu'un objectif: adsorber l'eau". La zéolite a "sans aucun doute" déjà  adsorbé de l'eau dans la solution buvable, mais il reste à  démontrer qu'une fois dans le corps, la zéolite devient très sélective vis-à -vis de l'éthanol, ajoute-t-il.

L'éthanol ayant un poids moléculaire plus important que l'eau, il devrait rentrer plus difficilement que les petites molécules d'eau dans les pores de la zéolite, avait expliqué Christian Serre à  l'APM.

Pour exposer les propriétés de Zéocal*, le pharmacien responsable de Blue Zmed avance également qu'en solution, "l'éthanol est adsorbée, dans des conditions normales, à  raison de 5 grammes par gramme de clinoptilolite [la zéolite contenue dans Zéocal*]". Or, selon Joà«l Patarin, "5g/g c'est du 500%" et les capacités d'adsorption des zéolites "sont au maximum de l'ordre de 25% à  40% en masse". Il qualifie en conséquence le produit de "miraculeux".

L'ANSM S'INTERROGE SUR LE STATUT DE DISPOSITIF MEDICAL DE ZEOCAL*

"Il faudrait que les autorités sanitaires fassent leur travail!", a commenté à  l'APM le président de la FFA, qui considère que ce produit "risque de leurrer les gens qui l'achèteront".

L'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a indiqué lundi à  l'APM qu'elle s'interrogeait sur le statut de dispositif médical de cette solution buvable. Un dispositif médical doit avoir une finalité médicale. Or l'agence juge "douteuses" les revendications médicales de Mineralpharma. "L'objectif affiché est l'amaigrissement, mais le produit ne s'adresse pas spécifiquement aux personnes en surpoids ou obèses", a précisé un porte-parole de l'ANSM.

Celle-ci a indiqué qu'elle comptait, dans un premier temps, "engager des démarches" auprès des agences sanitaires suisse et norvégienne. Elle cible ces deux agences parce que le fabricant est suisse et l'organisme notifié qui a délivré le marquage CE, norvégien.

Selon la Commission européenne, contactée par l'APM, la décision de qualification est de la compétence des Etats membres et plus précisément du pays dans lequel le dispositif médical a été mis sur le marché, en l'occurrence la France.

Un porte-parole de la Commission européenne a aussi rappelé que la législation sur les dispositifs médicaux était en cours de révision. La commission a proposé que "les dispositifs composés de substances destinées à  être ingérées, inhalées [...] et absorbées ou dispersées dans le corps soient regroupés dans la classe III". Cela viserait à  "renforcer les règles encadrant ces produits", selon ce porte-parole.

Actuellement, Zéocal* appartient à  la classe IIa. Les dispositifs médicaux se répartissent en quatre classes (I, IIa, IIb et III) correspondant à  des niveaux de risque croissants. Les règles de classification ont été instituées notamment sur la base du caractère invasif ou non du dispositif, note-t-on.


Source : Revue le flyer

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