Le Bangladesh s’inspire de Duterte dans sa guerre contre la drogueLe pouvoir a ordonné l’arrestation de centaines de Rohingyas qui auraient été utilisé par les trafiquants pour passer les pilules de Ya ba. Photo : AFP
91 personnes auraient été tuées dans des exécutions extra-judiciaires. Cette campagne contre le trafic hors du cadre légal marque une nouvelle étape dans le durcissement du pouvoir bangladais.
Les méthodes de Rodrigo Duterte s’exportent au-delà des frontières philippines. Signe de la montée de nouvelles formes d’autoritarisme en Asie, le Bangladesh a lui-même engagé une lutte sanglante contre les trafiquants de drogue menant sans doute à des exécutions extra-judiciaires. Depuis le 15 mai, 91 personnes ont ainsi trouvé la mort sur un total de 2 300 arrestations. 2,5 millions de dollars de drogue auraient par ailleurs été saisis. Officiellement, la plupart sont décédés dans des fusillades mais, selon les témoignages de plusieurs familles, leurs proches seraient morts en détention sans que preuve ait été faite de leur implication dans le trafic. Selon Odhikar, une association de défense des droits de l’homme, la plupart des personnes exécutées se révéleraient être des toxicomanes et des convoyeurs de drogue tuées dans des villes reculées du pays.
4% de la population accroc
Cette guerre contre la drogue marque une nouvelle étape dans le durcissement du pouvoir bangladais sous la houlette de la Ligue Awami, le parti laïc héritier de la lutte pour l’indépendance contre le Pakistan. Cheffe du gouvernement depuis 2009, Sheikh Hasina réprime sévèrement les syndicalistes mais aussi les journalistes, les opposants politiques. Elle a également permis à la police de détenir, torturer et tuer des militants islamistes présumés. «Nous sauverons le pays des griffes de la drogue tout comme nous l'avons fait pour réprimer le militantisme (islamiste, ndr) », explique sans ambages Sheikh Hasina. Selon les autorités, 7 millions de Bangladais, soit environ 4% de la population, seraient des consommateurs réguliers de drogue et particulièrement de Ya ba, la pilule « des déments », un mélange de
méthamphétamine et de
caféine, le plus consommé en Asie et produit en Birmanie. L’équivalent de plus de 40 millions de dollars de cachets entrerait dans le pays annuellement.
« N’importe qui pourrait être ramassé demain »La lutte contre cette drogue s’est renforcée depuis l’été dernier et l’exil massif de Rohingyas fuyant les massacres en Birmanie. Le pouvoir a ainsi ordonné l’arrestation de centaines de réfugiés qui auraient été utilisé par les trafiquants pour passer les pilules de Ya ba. « Au lieu de prendre des mesures efficaces pour nettoyer les réseaux et renforcer la loi pour pourchasser les barons, les autorités ont soudainement commencé cette guerre contre les petits. N'importe qui pourrait être ramassé demain et étiqueté en tant que dealer. Personne n'est en sécurité hors du règne de la loi », dénonce Badiul Alam Majumdar, co-fondateur de l’association des Citoyens pour la bonne gouvernance (Shujan). Aux Philippines qui sert de modèle pour cette campagne contre la drogue, 4200 personnes ont trouvé la mort. Le trafic reste néanmoins présent.
Sources:
https://www.humanite.fr/le-bangladesh-s … gue-655930
Dernière modification par Mascarpone (29 mai 2018 à 08:58)