Voyages en psychédélie

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Des hippies en 1971, à Berkeley (Californie). Photo Robert Altman. AKG-Images. Interfoto

Cannabis, cocaïne, ecstasy… Pour les «psychonautes», la consommation de stupéfiants est d’abord un désir d’ailleurs. Fumeurs d’opium et hippies voulaient échapper à leur civilisation. Après eux, les raveurs atteignent l’extase collective au rythme de la musique électronique.

Tribune. Ibiza, Essaouira, Katmandou, Goa, mais aussi Barcelone, Amsterdam ou Berlin figurent parmi les rendez-vous mythiques des premiers beatniks, hippies et autres routards. Ces destinations se déclinent comme dans un catalogue d’agence de voyages… sauf que ce tourisme de masse est un peu particulier : c’est celui de la drogue. Les hauts lieux de ce circuit ont souvent fait sourire les initiés, car sous chaque nom de pays ou de ville se cachent un non-dit, un pied de nez pour la censure : la jamaïcaine, le libanais, le marocain ou l’Acapulco Gold sont toutes des variétés de cannabis.

L’imaginaire des drogues est forcément exotique pour les Occidentaux. Parce qu’étroitement lié à la colonisation. Au XIXe siècle, le cannabis d’abord, puis l’opium fumé gagnent l’Europe dans les valises des militaires. Ceux qui voient alors l’âme de l’Orient dans les fumeries d’opium ne semblent pas avoir conscience qu’il s’est diffusé massivement après que les Anglais et autres colonisateurs ont imposé cette marchandise les armes à la main au cours des guerres de l’opium, au nom de la liberté du commerce. Pour les Vietnamiens, l’opium fumé, puis l’héroïne sont bien des drogues de l’Occident. Et ils ne se trompent pas : licites ou illicites, les drogues ont voyagé sur des routes commerciales ouvertes par l’Occident.
La recherche d’un moi authentique

Les officiers, artistes, anthropologues qui s’entichent de l’opium au tournant du XXe siècle sont fascinés par les cultures orientales. Cette drogue est alors considérée comme une voie d’accès à la culture chinoise. La plupart des amateurs d’exotisme ne se voient pas comme des colonisateurs, bien au contraire, ils sont nombreux à vouloir échapper au monde occidental qui condamne ces cultures traditionnelles à l’agonie. Larguer les amarres, rompre avec un style de vie formaté de la société industrielle, retourner à la source de mythologies ancestrales avec un syncrétisme qui traverse aussi bien l’espace que le temps, en quête de l’extase qui mène vers la recherche d’un moi authentique, c’est ce qu’ont transmis, à partir des années 50, les premiers explorateurs de la génération «beat», avec Kerouac, Burroughs, Ginsberg et même, avant eux, les artistes et les philosophes, Rimbaud, Huxley, Hermann Hesse, Antonin Artaud…

Une décennie plus tard, le new age de Californie hérite de cette quête. Les croyances dans la métempsychose, le holisme nourri d’entités spirituelles qui associent étroitement le corps et l’esprit, le chamanisme sont en grande part un héritage de l’expérience des drogues psychédéliques. Le new age, lui, privilégie d’autres techniques pour accéder à d’autres niveaux de conscience telles que le yoga, l’hypnose ou la méditation. C’est dans cet esprit de rupture avec le positivisme que Starhawk, écrivaine et sorcière néopaïenne, réunit en 1999 à Seattle les militants du mouvement altermondialiste, face à la prophétie autoréalisatrice des grands dirigeants de la société industrielle qui, avec le fameux «Il n’y a pas d’alternative», a voulu nous réduire à l’impuissance et à la résignation.

Dans les années 70, l’imaginaire autour des stupéfiants reste étroitement associé à l’évasion, mais en ces temps de démocratisation, ni les voyages ni les drogues n’ont les mêmes significations. Sur la route de Kerouac [publié en 1957, ndlr] était un vagabondage sans destination précise. Désormais, on ne s’égare plus en chemin, et on va directement au but, c’est-à-dire au lieu de consommation. A la fin des seventies, les stupéfiants sont consommés pour le plaisir, c’est-à-dire pour eux-mêmes. Les hippies, devenus des babas cool, font sourire la génération suivante d’usagers de drogues qui s’affichent plutôt «No Future» et écoutent Led Zeppelin, Iggy Pop, les Ramones ou les Sex Pistols, même si cette bande-son n’est nullement hégémonique. Dans les concerts, la musique circule d’un continent à l’autre, reggae, ska, salsa, rock, disco, rhythm and blues, swing gitan ou musique africaine, sans oublier le rock psychédélique, avec les envolées spatiales de l’electro-acoustique. Toutes les drogues sont expérimentées, le cannabis, bien sûr, de plus en plus banalisé, mais aussi les amphétamines et la cocaïne, le LSD comme les champignons magiques.

Des extases collectives

Mais c’est l’héroïne qui fait parler d’elle à Paris avant de gagner la banlieue. La poudre blanche est chic au Palace et aux Bains Douches, elle est aussi de plus en plus populaire, et les jeunes qui s’engouffrent dans ce voyage sont de plus en plus nombreux. En phase ascendante tout au long des années 80, elle invisibilise les autres drogues consommées dans les fêtes : le cannabis, mais aussi la cocaïne que l’on croit réservée aux élites et enfin les substances psychédéliques qui, à Ibiza, vont annoncer le mouvement techno.

Celui-ci s’implante en France au cours des années 90 en s’inspirant des premiers courants contre-culturels. Ainsi les flyers qui annoncent les rendez-vous des free partys évoquent la thématique du voyage, avec des illustrations qui s’inspirent du fantastique et de la science-fiction. Avec l’ecstasy, ces nouveaux psychonautes parviennent à des extases collectives au rythme de la musique électronique. Comme leurs prédécesseurs, ils veulent échapper à la société industrielle en explorant d’autres niveaux de conscience, mais ils n’espèrent plus bouleverser l’ordre établi, les espaces qu’ils investissent sont des TAZ, des zones autonomes temporaires, avant le retour dans le monde du travail. Les voyages ne sont pas seulement imaginaires : l’univers de la musique techno est international, des travellers, héritiers de la route, suivent les événements organisés dans les lieux les plus insolites, les bunkers, les forêts, ou encore les usines désaffectées, en région parisienne, en Bretagne, mais aussi dans l’Est berlinois comme dans les environs de Milan, et les pays de l’Est entrent dans la danse.

La fin des voyages n’est pas pour demain

Tous ces voyages vers de nouveaux états de conscience, individuels ou collectifs, restent très minoritaires, rappelle l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). Les usages de drogues sont plus souvent purement fonctionnels, qu’il s’agisse de stimulants ou au contraire de calmants, uppers and downers. Mais les psychonautes ont pourtant été suffisamment nombreux pour modifier la perception qu’en ont quelques chercheurs. A l’image du cannabis, la fonction thérapeutique de la mescaline ou du LSD a été redécouverte, et les recherches cliniques, abandonnées lorsque ce dernier est devenu illégal en 1966, ont repris d’abord en Suisse et au Royaume-Uni. Autre nouvelle inattendue : l’usage de la psilocybine, principe actif des champignons hallucinogènes, a été dépénalisé à Denver dans l’Etat du Colorado en mai. Comme pour le cannabis, on peut s’inquiéter d’une exploitation commerciale, déjà en cours sur Internet. Quoi qu’il en soit, la fin des voyages avec drogues n’est pas pour demain. Tel le phénix, celles-ci traversent le temps et l’espace, portées par des mythologies qui ne cessent de renaître de leurs cendres.

Anne Coppel sociologue, spécialiste des drogues

Source : liberation.fr
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Ocram homme
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Salut Fil,

Merci du partage, cool à lire... Ça me donne quand même bien envie de m'arracher boulet

Ciao,

Ocram

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Meumeuh homme
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Jolly Roger
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Merci filou pour le partage ,

je trouve la fille qui a.vait une petite ressemblance avec la Sœur de Manuel Valls notre ancien premier ministre ...  , donc sa sœur qui très jeune  et tomber dans l'H#4 ,
j'ai vu par hasard Hier sur YT , son passage sur le plateau tv de Frederic Lopez ou elle raconte son histoire....


MM

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Vivel homme
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Cool cet article, merci du ptg :)

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