Parce qu'elle a le "même âge que moi", je vous avais dit qu'un jour je vous en parlerais de la fameuse AZT (3”²-azido-2”²,3”²-deoxythymidine)... Alors pour faire sérieux, je vais commencer par un plat de... résistance, justement... agrémenté d'une jolie photo (si, si...)
La résistance du virus du Sida à l'AZT est enfin élucidée© futura-sciences.com | 23.09.10
http://www.futura-sciences.com/fr/news/ … nf#connexeLe mécanisme de résistance du virus du Sida face à une des molécules de la trithérapie, l´AZT, vient d'être comprise. De quoi envisager des traitements plus efficaces.
Pour lutter contre le virus du Sida, les trithérapies sont plutôt efficaces. C´est notamment grâce à des molécules comme l´AZT (aussi appelée zidovudine ou azidothymidine), que l´espérance de vie des personnes contaminées par le VIH a augmenté depuis la découverte du virus.
L´AZT est un inhibiteur de la transcriptase inverse du virus. Celle-ci est une enzyme virale qui a pour but de rétro-transcrire l´ARN génomique viral en ADN. Cette étape du cycle viral, qui se produit dans la capside, est cruciale puisque c´est elle qui lui permet ensuite de s´insérer dans le génome des cellules infectées et de se multiplier. L´inhibition de l´action de l´enzyme est donc délétère pour le virus et bénéfique pour le patient. L´AZT est notamment très efficace pour réduire la transmission du virus entre une mère et son enfant.
D´un point de vue moléculaire, l´AZT ressemble à un nucléotide (elle dérive de la thymidine). Elle est de ce fait insérée dans la chaîne d´ADN en formation par la transcriptase inverse qui la confond avec un vrai nucléotide. Cette erreur induit l´arrêt de la synthèse d´ADN car elle ne possède pas le groupement hydroxyle (OH) sur le carbone 3´ qui sert d´hameçon pour accrocher le nucléotide suivant.
Malheureusement, comme tous les virus à ARN, le VIH est capable d´acquérir des mutations et de devenir résistant aux molécules thérapeutiques, un peu comme le font les bactéries. Ainsi, il existe des souches de VIH devenues résistantes à l´AZT.

La molécule d'AZT ressemble beaucoup à un nucléotide. Ici, les atomes de carbone sont en noir, l'oxygène en rouge, l'azote en bleu et l'hydrogène en blanc. Crédits DR
Mais le mécanisme de résistance était encore mystérieux. Il y a une dizaine d'années, des recherches avaient montré que la molécule d´ATP (la réserve d´énergie de la cellule) était impliquée dans le phénomène. Un nouvel article paru dans le journal Nature Structural & Molecular Biology apporte aujourd'hui un éclairage supplémentaire.
Les chercheurs de l´université Rutgers (New Jersey) ont réussi l´exploit de déterminer par cristallographie la structure moléculaire de cinq complexes différents. Ces complexes impliquent l´enzyme virale de la transcriptase inverse (sensible ou résistante à l´AZT), l´ADN, la molécule d´AZT et l´ATP.
En analysant les différentes structures obtenues, les chercheurs ont réalisé que l´AZT se fixait de la même façon aux enzymes sensibles et résistantes. La transcriptase inverse n´est donc pas dotée d´un mécanisme qui l´empêche de le confondre avec un vrai nucléotide. En fait, les mutations de l´enzyme résistante induisent une augmentation de l´affinité de l´enzyme pour l´ATP.
Plus précisément, la venue de l´ATP sur l´enzyme virale induit l´excision de l´AZT de la chaîne d´ADN en formation, sous la forme d´une molécule AZT-ATP particulière (avec quatre groupements phosphate : AZTppppA). L´ATP est donc capable d´éliminer l´AZT incorporée dans l´ADN, ce qui permet à la transcriptase inverse de reprendre la synthèse de l´ADN viral.
Cette compréhension du phénomène de résistance est importante d´un point de vue médical. Elle permet d´imaginer des traitements qui pourront inhiber la fixation de l´ATP sur la transcriptase inverse, ou d´améliorer la molécule d´AZT pour que cette excision ne puisse pas avoir lieu.