Oh, putain, la série bien pou...
Mais pardon, d’abord politesse et salutations :
Justificatrices et justificateurs de textes invétérés, bonsoir !
N’ayant que très rarement accès à Internet, j’ai retrouvé une connexion ce week-end pour m’infliger le visionnage de cette série en entier.
Et puis, j’ai vomi et je me suis dit :
« Té ! allons voir sur Psychoactif ce que les gens qui s’y connaissent vraiment en défonce en pensent. »
Vous êtes sérieux, les gars ?!
Déjà, le format série est une catastrophe de ces quinze dernières années. Question forme, on tutoie les pâquerettes : pas de plan séquence, que des champs-contrechamps, des
cuts dans tous les sens, etc.
Plus formaté, tu deviens végétarien.
Sans parler de son aspect addictif et chronophage. Se taper douze saisons de douze épisodes d’une heure chacun, rien de tel pour transformer ton cerveau en confit de canard (du Gers, le confit). Après, ta capacité d’attention s’en trouve annihilée : tu m’étonnes que plus grand-monde ne lise de bouquins.
Les séries n’ont rien à envier à l’oxycodone à libération prolongé.
Mais là, ouf ! ils nous ont épargné :
seulement huit épisodes à se farcir.
Bref, moi qui ai suivi de près
this so-called « opioid epidemic » depuis quelques années, j’ai regardé cette série avec attention. Et patatras, ce qui devait arriver arriva.
Déjà, je passe gentiment sur les incohérences (le bon
doc de campagne qui s’accroche à l’oxycodone en deux prises et trois jours, etc.)
Après, pour ceux qui ignoraient l’histoire de la famille Sackler, cette série aurait pu être fascinante. Mais là, paye ton manichéisme. On se croirait dans Massacre à la Tronçonneuse et sa famille consanguine complètement dégénérée.
À mon avis, la vérité est bien pire et beaucoup plus intéressante : pour être de véritables « cyniques » modernes, encore faut-il être intelligent.
Pour les autres, c’est toujours la même rengaine :
« Bouh ! méchant, très méchant Big Pharma, entreprise inhumaine, mercenaire et sans vergogne, responsable de tous les maux sur Terre. »
Les labos pharmaceutiques, je suis loin, très loin de les porter dans mon cœur, il m’arrive même d’être complotiste (bouh ! le vilain mot) à mes heures perdues : je suis un anti-vax vacciné, la pire des races. Mais encore une fois, on mélange ici cause et conséquence : ces labos sont une conséquence, pas une cause.
Évidemment, Purdue détient une grande part de responsabilité dans l’ampleur de cette crise sanitaire. Mais selon moi, les causes sont ailleurs et bien plus profondes. Si Purdue est responsable de l’inondation des USA par le
Fentanyl et de la zombification du quartier de Kensington à Philadelphie, je me
coupe un bras et ne mangerai plus jamais de confit de canard, gersois ou pas.
Imaginons une « société saine » (ce qui en soi est déjà un paradoxe) où d’un coup on te filerait 120 mg d’oxycodone gratuitement à la boucherie pour deux confits de canard achetés. Eh ben, étant saine et dépourvue de problèmes majeurs, je suis pas certain qu’il y aurait autant de dégât dans cettedite société (hormis pour les canards dans un premier temps).
Bref, la bonne vieille histoire de l’expérience de Rat Park, quoi.
À travailler comme des connards dans les mines de Virginie pour trois drachmes de l’heure dans des conditions inhumaines, pas étonnant que cet État fût le premier dévasté.
À travailler comme des connards tout court, pas étonnant que certains cherchent une porte de sortie.
Mais non, tout ça, c’est juste la faute d’un grand malade à la tête d’une société pharmaceutique tentaculaire, souffrant d’un bon vieux complexe d’Œdipe.
Simpliste, c’est peu de le dire.
Encore un moyen de soulager la ménagère, se dédouaner et trouver un bouc émissaire au lieu de regarder en face nos problèmes sociétaux.
Et puis, ils nous vendent encore le
Suboxone prescrit à tire-larigot comme la panacée. À ce rythme-là, tous les toxicos (non, pardon, pas les
toxicos, mais les
pédalos) occidentaux finiront enchaînés à un
TSO.
Pour info, Purdue, Pfizer et compagnie ont eux aussi mis leur propre «
buprénorphine haut dosage » sur le marché ; qu’on se le dise.
Sur le sujet, je propose plutôt « Dreamland » de Sam Quinones : bouquin un peu plus mesuré qui recherche réellement les causes de cette crise au
Mexique et dans la souffrance de nos chers concitoyens. Et encore, ce livre reste aussi assez simpliste.
Oh, et on me souffle dans l’oreillette que cette série fut diffusée sur la plateforme Disney +.
Oui, je répète : Disney !
Question confit de canard, Disney, c’est pas mal non plus.
Permettez-moi de pousser un peu le bouchon, mais c’est cette série elle-même et tout ce qu’elle représente (bêtise, apathie, stérile divertissement, propagande, addiction télévisuelle, ressentiment, etc.) qui est en fait une des raisons premières de cette crise.
Pour conclure, je finirai sur cette maxime d’un obscur penseur albanais du 16e siècle avant Jean-Christophe, qui résume tout :
« C’est la demande qui fait l’offre, jamais le contraire. »
Sur ce, je m’en vais re-mater The Wire et pêcher le poulpe à la dynamite.
PS – Je me demande l’intérêt de ce long commentaire ? En fait, je me demande l’intérêt de tout commentaire. Ah si, pardon, j’avais oublié : c’est pour prouver que je suis trop fort et que j’ai toujours raison.