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« Il peut arriver que l’addiction soit positive », estime le Pr Laurent Karila, psychiatre spécialisé dans les addictions, auteur de l’ouvrage « Docteur : addict ou pas ? ». Si, dans ce livre, il propose de faire le point sur les comportements quotidiens qui peuvent devenir excessifs, addictifs, voire potentiellement dangereux, il souligne les points de divergence avec le concept d’addiction positive : à la différence de la « pathologie », dans l’addiction positive, la personne ne souffrira pas si elle est séparée de son centre d’intérêt et ne perd pas contrôle quelle que soit la situation. La personne « peut s’autoriser des excès de temps à autre, précise le spécialiste, mais elle reste mesurée. Il n’y a aucune complication particulière liée à cette addiction positive. »
La passion pour la musique, un art, ou d’autres activités telles que le jardinage et la cuisine peut parfois conduire à une forme d’addiction. Certains artistes expriment une profonde passion pour leur instrument, tandis que d’autres sont véritablement accros à des moments de méditation en pleine conscience, de relaxation, de yoga, etc.
Reconnaître une addiction positive : l’acronyme PPRE
Une addiction positive combine Passion, Plaisir, Récompense et Emotions positives, résumées sous l’acronyme PPRE. Dans le détail :
la passion est une expérience quotidienne pour beaucoup d’entre nous. Elle se caractérise par un goût intense, voire irrésistible, pour diverses activités telles que le cinéma, la musique, la collection de timbres, le football, le basket-ball, et bien d’autres encore. Les objets de passion sont infinis.Le plaisir, quant à lui, constitue une sensation agréable, recherchée et de courte durée, essentielle au fonctionnement de notre cerveau et de notre organisme en général.Pour sa part, la récompense se définit comme l’avantage découlant d’une action ou d’un comportement.Enfin, les émotions positives agissent comme des super pouvoirs, nous rendant plus efficaces, attentifs, créatifs, actifs, sociaux, flexibles, réceptifs à notre environnement, mais aussi sensibles aux changements.
J'appelle aux temoignages des forumers. Peuvent ils dire que leur consommation est une addiction positive, au sens de l'article ? Pour l'edification du Pr Karila !
Amicalement
Dernière modification par prescripteur (05 mars 2024 à 08:39)
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prescripteur a écrit
J'appelle aux temoignages des forumers. Peuvent ils dire que leur consommation est une addiction positive, au sens de l'article ? Pour l'edification du Pr Karila !
Amicalement
Perso, non, pas du tout !
Ma consommation actuelle est ponctuelle et principalement psychédélique. Je m'autorise un peu d'alcool de temps en temps mais sans jamais tomber dans la régularité.
Cela n'a pas été le cas dans d'autres circonstances, où j'utilisais la codéine pour gérer des périodes de vie difficiles, avec fragilité psychologique, santé mentale en berne, et donc où, forcément, l'arrêt de la conso provoquait un rebond de l'anxiété, de la dépression, du mal-être en général. Ce qui ne correspond pas non plus à la définition du docteur.
Mais, si on l'examine, on se rend compte assez rapidement que celle donnée par le journal est très restrictive et ne peut pas vraiment s'appliquer aux passions ni aux plaisirs.
"La personne ne souffrira pas si elle est séparée de son centre d'intérêt", proclame l'article. Or dans la majorité des cas, la séparation d'avec un plaisir anticipé est bien une souffrance (qui peut être légère et surmontable, mais tout de même présente). Et, si l'activité est utilisée pour se distraire de ses problèmes ou pour améliorer sa capacité à leur faire face, en être empêché se traduira par un malaise difficilement évitable.
Cette notion d'"addiction positive" (développée ensuite par le docteur d'une façon* qui amha s'éloigne de celle dépeinte par le/la journaliste) me paraît surtout être un argument de communication (s'appuyant sur la perte progressive d'intensité des mots, phénomène constaté en linguistique, et qui fait écho aux expressions populaires utilisant le terme "addiction" au quotidien d'une façon détachée de la réalité clinique), qui partage avec celle d'addiction pathologique la régularité du comportement et son caractère (immédiatement) positif sur l'humeur, mais s'en éloigne par à peu près tous les autres aspects.
Après, je suis d'accord que ce serait intéressant de faire jouer l'ironie en démontrant, mettons, qu'une consommation régulière de LSD (ou autre) rentre dans le cadre d'une addiction positive telle que développée ici.
*Elle se rapproche surtout de la définition d'une passion (bien + que de l'addiction) au sens classique, qui implique aussi un plaisir, et (souvent) une récompense au sens d'externalité positive (les conséquences décrites des émotions positives en font partie). Sans même faire intervenir dans le conflit les facteurs neurobiologiques (delta-Fos-B, altérations de la VTA, dérégulation de la transmission dopaminergique, etc.), je trouve qu'elle ne fait qu'accentuer la confusion.
Dernière modification par Mychkine (05 mars 2024 à 10:34)
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Dernière modification par prescripteur (05 mars 2024 à 14:31)
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Dernière modification par prescripteur (05 mars 2024 à 21:58)
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prescripteur a écrit
Pour repondre à Mychkine il me parait important de defendre qu'une consommation contrôlée (par la personne) d'alcool ou de psychotropes peut etre une addiction positive.
Et la notion d'addiction positive defendue par "la medecine" me parait negliger la reponse à des éléments de vie difficiles. Il y a aussi les addictions positivantes et les addictions complexes au bilan plus ou moins positif ou negatif.
Merci pour les articles.
Oui, le phénomène addictif est bien sûr complexe et ne peut se réduire à une simple opposition entre addictions positives et négatives. D'ailleurs, l'addiction repose sur des mécanismes adaptatifs qui permettent normalement de fixer un comportement reconnu comme positif - à tort ou à raison - par l'organisme.
L'addiction, pour moi (et dans sa définition clinique), représente justement le moment où le contrôle se réduit de façon problématique. Cet élément est crucial pour le sens du mot, donc une addiction contrôlée me paraît être un oxymore, une astuce rhétorique pour dédramatiser un comportement, lui donner une valence moins inquiétante que celle qu'on lui associerait initialement.
Une consommation peut être contrôlée et positive, j'ai plus de mal à voir l'intérêt d'ajouter le terme "addiction" dans l'équation. Le problème me semble être, au départ, l'image dévoyée que la société se fait tant de l'addiction que de la consommation contrôlée, donc adjoindre la première notion à une nouvelle description de la seconde me paraît totalement contre-productif. À moins de s'en tenir à utiliser le parallèle auprès d'un public bien précis (celui qui est déjà familier du concept).
Dernière modification par Mychkine (06 mars 2024 à 18:46)
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[ Forum ] Addictions : vingt ans en arrière ?
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