Tu évoques des épisodes de manie, tu as été diagnostiquée bipolaire ?
Je suis moi-même bipoaire, donc les épisodes maniaques, les conso compulsives, j’en ai connues.
J’ai la « chance » d’être de type 2, ce qui signifie que je ne pars théoriquement pas dans des états maniaques sévères mais d’hypo-manie, donc plus modérés
(A la différence d’une pathologie de type 1 par exemple, pouvant amener des états maniaco-dépressifs aux pics d’une intensité beaucoup plus forts, pouvant rapidement avoir des conséquences graves)
Certains de ces épisodes étaient seulement composés des symptômes « positifs » (euphorie, déshinibition légère et contrôlable, motivation..)
Mais certains m’ont fait complètement dérapé, et adopter un comportement de consommation qui me fait beaucoup penser au tien.
Durant ces derniers, il m’est arrivé de
COMPLÈTEMENT perdre le contrôle, et avec le recul une fois un état stabilisé et une lucidité partielle retrouvée, ça m’a flanqué un sacré coup de flippe.
Se rendre compte qu’on était plus maître de soi-même, pour ma part ça m’a fait un choc.
Je me suis demandé ce qu’il se serait passé si la deshinibition ou l’euphorie ainsi que mes conduites compulsives m’avaient conduit à me mettre réellement moi ou quelqu’un d’autre en danger.
Perdre le contrôle de soi, c’est personnellement une des choses qui me terrifient le plus.
J’ai essayé de me rassurer me disant que mon subconscient m’empêcherait de commettre des actes trop graves, mais les faits sont que certaines crises de manie font perdre toute limite, même morale.
C’est d’ailleurs cet épisode qui m’a poussé à reprendre mon traitement que j’avais stoppé étant stabilisé.
Heureusement, au niveau de mon entourage et mon contact avec les autres, je n’ai eu qu’un comportement deshinibé/survolté, qui s’est remarqué certes, mais dans la limite du raisonnable et n’a pas posé problème (excessivement enjoué, logorrhée constante, sociabilité exacerbée) qui n’a fait que « surprendre » ou même « amuser » certains (mon entourage proche était au courant de ces possibles phases, pour ceux qui ne l’étaient pas, le changement de comportement pendant ces phases suscite parfois l’incompréhension, une grande partie me pense dans ces cas là drogué, c’est compréhensible ahah)
A la limite on me reprochait de trop parler donc rien de bien méchant (la facette sociale « positive » de ces épisodes.)
Mais sur le plan perso, c’est là où j’ai eu des moments passagers de perte de contrôle.
Il m’est arrivé à certains moments, de perdre l’emprise totale de mes actions et décisions, je n’étais plus là, n’avait plus de pouvoir sur ce que je faisais.
Mes pensées étaient désorganisées et n’avaient aucun sens, tout se mélangeait et défilait dans ma tête, et pendant ce temps, j’agissais comme de manière « robotique », en « pilote automatique » avec ces pensées n’ayant aucune cohérence avec mes gestes.
Là, j’ai adopté une consommation qui ne me ressemblait pas, compulsive et excessive, qui même pour moi qui était habitué à des sessions prods non-raisonnables, m’a stupéfait et effrayé une fois un état de lucidité retrouvé, de par son inconscience : mélange de produits avec interactions à risques, prises de traces à la taille démesurée, à intervalles dangereusement rapprochés sans m’arrêter et sans avoir conscience des risques que je connais pourtant si bien depuis des années.
Etant pourtant consommateur aguerri et réguliers, qui bien qu’ayant l’habitude de consommer fréquemment et des hauts dosages parfois déraisonnés, j’ai TOUJOURS mis un point d’honneur à respecter sans exception certaines règles fondamentales de RdR, que je prône autour de moi depuis des années.Enfin bref, ce n’était clairement plus moi, c’est comme si mon subconscient cherchait à repousser mes limites, me mettant en danger et me contraignant à adopter une conduite auto-destructice.
Par « chance » je suppose, ma grosse tolérance aux produits que j’ai consommé a du m’éviter de me taper de sales effets secondaires, voir même l’OD.
Mais clairement c’était déraisonné et, le résultat aurait pu être bien plus dramatique si je n’avais pas cette résistance.
(Outre ça, j’ai claqué plus de la moitié d’un SMIC en moins d’une semaine, disons que c’est « moins grave » n’étant que du matériel, mais c’était une fois de plus un comportement inconscient, incontrôlé et dénué de toute conscience des conséquences de mes actes.)
Enfin bref, et tout ça je le rappelle, en épisode
HYPO-MANIAQUE.
Alors j’ai peur ne serait-ce que d’imaginer un épisode/virage maniaque sévère.
Je ne te raconte pas tout cela pour simplement déblatérer ma vie, mais pour te faire prendre conscience que ces états ont le potentiel de conduire à de lourdes conséquences.
Et pour te dire que je peux me mettre à ta place.
La manie est difficile à gérer, surtout lors des premières crises, quand on ne sait pas réellement ce qui se passe.
Elle a ses bons cotés en apparence, mais elle peut vite devenir aussi malsaine que dangereuse.
Et de surcroît d’une part, dans la majeure partie des cas, qui dit pic d’euphorie dit pic mélancolique/dépressif par la suite (Plus ou moins intense selon la pathologie, le contexte personnel/social... entres autres facteurs.)
Mais surtout et c’est je pense le point le plus important, que beaucoup ignorent : en episodes/accès de manie, on est, dans la grande partie des cas, incapable de prendre du recul sur la situation, et même d’être conscient d’être en crise.
Par définition, on est euphorique, tout est beau, tout est agréable, on se sent en confiance et capable de tout, et surtout sans avoir conscience des conséquences possibles de nos actions.
Qui voudrait qu’un tel état s’arrête ?
Et c’est là tout le vice, la personne en crise ne sera pas généralement pas consciente de potentiellement avoir un comportement à risque.
Bien sûr, l’intensité de la crise est extrêmement variable, et une certaine lucidité est possible, encore une fois les variations de symptômes sont tellement différents selon la personne.
Certaines, dont les pics sont étudiés depuis longtemps et avérés modérés/stabilisés peuvent parfaitement vivre une vie normale.
Tout dépendra encore une fois d’une multitude de facteurs que je ne connais pas tous.
Mais pour vulgariser, d’après MON avis, si la bipolarite n’est pas stabilisée, surveillée, et l’intensité des épisodes bien cernées, cela revient à jouer à la roulette russe en quelques sortes.
J’exagère, mais l’image sert à dire que s’en remettre à espérer ne pas perdre le contrôle et potentiellement adopter sans en être conscient une conduite à risque, au « petit bonheur la chance », c’est trop risqué.
C’est pour ça que JE pense que dès que l’état se stabilise et que l’on redevient lucide, si l’on se rend compte que l’on a vécu un épisode durant lequel on a senti une perte de contrôle, ou/et qui nous a conduit à se mettre soi-même (ou bien les autres) en danger.
Il est selon moi primordial de réagir rapidement et de consulter pour stabiliser ces phases.
(Ce n’est encore une fois que mon opinion/constat, qui n’est aucunement légitime médicalement) Comme l’a re-souligné Ocram, tu as eu un comportement aux antipodes de la
RdR, qui aurait pu avoir une issue dramatique.
Si de surcroît tu as une faible tolérance à ces prods, c’est une chance que tu ne te sois tapé que des effets secondaires légèrs.
Je ne sais pas si tu es informée sur certaines règles basiques de
Réduction des Risques, notamment les dosages et les interactions â risque.
Je t’encourage à te documenter sur les produits que tu es amenée à consommer.
Enfin bon, tu vas bien, et n’as eu aucune séquelles graves, mais à répéter cette prise de risque, sur le long terme tu as de grandes chances de perdre à ce jeu là, et les probabilités de mettre ta santé/vie en danger sont plus qu’élèves.
Et ce sans compter que le combo état maniaque + une altération du jugement par la prise de substances, peut conduire à perdre complètement pied, voir se taper une bouffée délirante, et tout simplement être dangereuse pour les autres et toi-même.
Si je te parle de mon expérience, et que l’on te tient des propos qui te sembleront peut être un peu secs et directs, ce n’est ni pour te faire peur, et surtout, ni pour te faire culpabiliser.
Mais en toute bienveillance.
C’est simplement qu’objectivement, tu décris un comportement alarmant, qu’il est je pense urgent de prendre en compte pour y remédier.
Et plus personnelllement, en connaissance de cause et de cet état pathologique dont tu souffres, état d’ailleurs souvent mal compris de beaucoup de personnes, je me sens d’autant plus obligé de te mettre en garde.
Je ne pouvais pas moralement simplement lire ce post et faire l’ignorer.
Pour conclure :Je tiens à préciser que tous ces conseils sont mon avis personnel, et que je ne suis aucunement qualifié médicalement pour en faire des affirmations.
Ils me semblent simplement être du bon sens.
Donc dans l’absolu, je t’encouragerai d’une manière générale à éviter un maximum la conso, qui constitue dans les faits à elle seule une interaction, du moins un facteur à risque dans le cas d’une bipolarité qui a des chances plus ou moins élevées d’aggraver certains symptômes.
Mais évidement je suis conscient que c’est un conseil utopique et si c’était aussi simple.. J’en suis le premier à ne pas l’appliquer
Alors je pense que le minimum est de respecter certaines règles lors de ces prises pour minimiser ces risques.
La bipolarité est une pathologie complexe, pas encore totalement cernée, et dont les symptômes peuvent varier du tout au tout d’une personne à l’autre, autant que la sensibilité de chacun face aux facteurs aggravants.
Et en deuxième lieu, je ne sais pas si tu as un suivi medical, mais je te conseille vivement de te référer à ton psychiatre si tu en as un, ou de prendre rendez-vous pour en voir un.
En toute bienveillance, encore une fois.
Si je devais conclure sur une morale à tout ça, c’est que je trouve qu’on a depuis des années la chance d’évoluer dans une ère qui connait des avancées scientifiques, d’une manière générale, mais notamment d’un point de vue
RdR, de plus en plus rapides et complètes, nous permettant chaque jour d’établir des règles et des précautions à prendre pour consommer avec toujours un peu plus de sûreté.
Ce serait dommage de s’en priver.
La psyché humaine et la chimie du cerveau sont fascinantes.
Elles peuvent époustoufler de par leur force et leur capacité à réaliser des merveilles, qu’aussi nquiétantes de par leur sensibilité à pouvoir se dérégler.
En tout cas, prends soin de toi, sincèrement.
Essaye dans la mesure de ton possible de faire le nécessaire pour ne plus te mettre en danger niveau conso.
C’est parfois jusqu’à ce qu’il nous arrive un pépin grave, que l’on se rend compte que jouer avec le feu de l’excès n’en valait peut-être pas la chandelle.
Et outre le fait de t’éviter des problèmes, tu pourras profiter pleinement des effets positifs et agréables de tes sessions.
A+
Dernière modification par Sociophrenic (29 juillet 2022 à 12:09)