Catégorie : Poèmes - 21 janvier 2018 à 18:36
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Elrewen a écrit
Chère cocaïne,
Si je t’écris aujourd’hui c’est pour te dire à quel point tu me manques. Quelques traces ont suffi à me rendre accro à toi, à ton odeur, à ton aspect, à l’effet que tu me fais quand je te vois, et quand je te respire.
Ta robe blanche, matte ou brillante, pâteuse ou poudreuse m’excite et m’apaise. Dès que je t’aperçois je te dévore du regard, savourant chaque instant qui précède le moment où enfin, je vais te sentir.
Ton parfum est au début très déroutant, il change de temps en temps, mais on retrouve toujours cette senteur feutrée et noire. Fidèle à toi-même, tu commences déjà à te faufiler parmi mes narines.
Mais je prends mon temps. Alors il s’agit de te préparer. Je prends deux cartes de fidélité, n’importes lesquelles –ou plutôt, toujours les mêmes- et je commence minutieusement à te réduire en poudre de plus en plus fine. De l’état de cailloux tu te transforme petit à petit en sable pur. Rien que ce geste me procure déjà un plaisir infini. Puis arrive le moment où je prends l’agenda précieusement gardé au fond du placard, je déchire une page, la coupe en petits morceaux et me fabrique avec ce papier une paille. Correctement enroulée, pas trop épaisse, assez longue.
Enfin, voilà ce que j’attendais tant. Je place la paille au fond de mon nez, et je commence à te respirer, en plusieurs fois. Ce qui m’atteint en premier c’est ton odeur, que je sens encore plus forte. Ensuite c’est le dépôt sableux que tu laisses dans ma narine. Cinq minutes passent et puis d’un coup, c’est la montée.
Excitation, euphorie, joie, je me sens en pleine forme. Je pourrai gravir des montagnes, j’ai l’impression d’ailleurs de monter au paradis. Les sensations que tu me procures sont indéfinissables. J’en profite alors pour faire tout un tas de choses. Films, séries, jeux vidéo… tout ou presque, y passe.
Je me remémore ces moments où j’ai tant profité de toi, où tu m’as tant donné, où tu m’as tant fait me sentir vivante.
Chère cocaïne,
Si je t’écris aujourd’hui, c’est aussi pour te dire à quel point tu m’as fait du mal. Saignements de nez, craving, manque, descentes interminables. Chute d’humeur, dépression, insomnie, mal de tête. Manque. Sevrage. Manque.
J’aurais dû voir que sous ta robe blanche et si pure tu cachais plusieurs épines, prêtes à défoncer ma flore nasale et mes vaisseaux sanguins. J’aurai dû sentir sous ton parfum que tu dissimulais les ténèbres vers lesquelles tu m’as entraînée. Le paradis que j’avais vu si excitant, si plein de vie est vite devenu un enfer où je rampais pour te posséder encore et encore. L’illusion que tu me donnais était trop belle, j’ai plongé et où suis-je aujourd’hui ?
Je remonte, ou je creuse ? Je ne sais pas. Cocaïne, que tu es manipulatrice. Je vois bien que tu essaies encore de m’attirer vers toi, au détriment de mon porte-monnaie qui vomit billet sur billet. Je vois bien ce que tu essaies de faire, en revenant me hanter, jour et nuit. Mais je ne te connais que trop bien maintenant. Je sais tes défauts, je reconnais tes piètres qualités. Je détecte tes mensonges et tes fausses promesses.
L’amour que je te porte est torturé, car il est à sens unique. J’ai bien compris que tu ne m’aimais pas, que tu prenais un plaisir vicieux à me détruire la santé. Longtemps tu m’as fait miroiter joie et extase, et je n’ai récolté que pleurs et culpabilité.
Vas-tu réussir cependant à me faire revenir vers toi ? Saches qu’aucun jour ne passe sans que je ne pense à toi. Aucune heure ne s’écoule sans que j’essaie de me remémorer chaque geste compulsif que j’avais envers toi.
Te voir, te sentir, te respirer. Excitation, euphorie, joie. Détresse, dépression, tristesse.
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