Catégorie : Tranche de vie - 28 septembre 2024 à 11:05
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Gastox a écrit
Est-ce qu'il y a pas quelque chose de l'ordre de la beauté dans le fait de s auto détruire
Salut,
Pourquoi tu dis s'autodetruire ??
C'est la morale, la stigmatisation etc qui font croire que prendre de la came c'est s'auto-detruire.
En te lisant, je ne vois pas quoi ferait référence à l'autodestruction.
Et perso, quand je consomme de la came ça n'a rien d'autodestruction.
Au contraire !! Pour moi c'est adoucir la vie, pouvoir prendre le recul nécessaire pour dépasser les problèmes... À un moment c'était juste histoire de pouvoir respirer, être comme en vacances de mes pensée s noires, avoir la force de faire face aux choses, pouvoir réussir dans le travail, partager des moments de douceur. Jamais j'ai associé ça à une volonté négative.
L'autodestruction c'est se faire du mal, parfois le travail pour certaines personnes ça rentre bien plus dans la description d'autodestruction que de prendre de la came...
La dualité que tu mets en avant me semble venir du poids de ce que la société pense des consos en général et de la came en particulier plus de ce que tu décris...
Gastox a écrit
Le plaisir instantané, facile d'accès, tant que le plaisir est disponible rien d'autre ne compte.
Excuse moi, mais c'est encore un préjugé sur les utilisateurs d'héroïne, ... Des jouisseurs invétérés qui ne pourraient faire que cela.... les addictologues appellent cela "ne pas résister à la frustration"...
perso, avec les centaines d'usagers d'héroïne que j'ai fréquenté, je n'ai jamais vu aucun se comporter comme cela. Et puis déja, trouver du produit, c'est tout un poème, qui prouvent que ce n'est pas que du plaisir/jouissance...
a écrit
Bien sur que preendre de la came, ce n'est pas s'autodetruire !
En fait tout dépend de l'utilisateur et de sa gestion du produit et comment ça prend forme dans sa vie. On peut dire que c'est auto destructeur pour moi mais peut être que pour cependant, dans son expérience il en tire de bonnes choses. Il y a vraiment trop d éléments qui entrent en compte dans l'expérience de chacun qui va influer sur le rapport avec le produit. Mais bon, est-ce quil y a tant de personnes qui arrivent à gérer avec les opiacés que ça ?
Sur le court terme c'est du plaisir, donc ce n'est pas sauto détruire, mais sur le long terme ? Dans mon expérience j'ai plus vu des vies gâchées malheureusement que de fins heureuses.
Et sur le plaisir instantané facile d'accès, bien sûr que ça peut être une énorme galère de s'en procurer mais ça sera toujours plus rapide que d'un plaisir reçu avec beaucoup d efforts pour un réel accomplissement dans la vie. C'est avec cette perspective que je parlais.
Dans mon discours sur la dualité je voulais mettre en avant la différence entre l accès au plaisir par rapport à l'effort demandé. Les choses prennent du temps dans la vie pour maturer, grandir, évoluer, c'est la vie qui est comme ça. On ne reçoit rien aussi rapidement qu'avec une prise d'héroïne et avec une telle intensité! et c'est aussi ça qui fait perdre pieds aux utilisateurs...
Gastox a écrit
En fait si je mettais tout de côté, tout le côté drama et l implication que ça a à chaque fois que ça vient dans ma vie je pourrais aussi dire que ce n'est pas de l'auto destruction. Ce serait facile pour moi de parler de ça avec légèreté. En vérité je serais plus heureux de pouvoir me dire que je peux profiter de ce que j'aime le plus au monde mais c'est complètement fantaisiste. La réalité est toujours là pour me rattraper. Et je veux plus m'infliger toute cette souffrance.
Salut,
en effet, je te rejoins sur le fait qu'on a pas la même vision de la chose.
Moi, je veux pouvoir me dire que je suis heureuse de pouvoir profiter de "ce que j'aime le plus au monde" ! Hein ce n'est pas fantaisiste, je veux que ce soit ma réalité...
Bon, faut dire qu'en vrai ce n'est pas que la came ce que j'aime le plus au monde, même si bien évidement ça en fait partie et c'est dans le top de la top ten
En tout cas, pour moi ça serait juste inconcevable de me dire que je dois y renoncer...et c'est bien pour cela que finalement je me suis rendu compte que je mets en place toute une série de stratégies pour arriver à faire en sorte de toujours en profiter...et que finalement je "gère" bien mieux plutôt que si je vivais dans la frustration de m'en priver !!
Quelle "réalité" te rattrape ?
Moi perso, j'ai un traitement pour gérer au quotidien le manque (que je ne veux pas vivre, et je me rends compte -- je croise fort les doigts certes -- que je n'ai jamais vécu, si ce n'est des rares instants où j'ai compris aussi que ça venait d'une maladie, bref) et gérer financièrement, pour m'assurer une tranquillité quotidienne. Mais au-delà de ça, je me prévois de ressourçantes sessions, en fonction de mes finances et mes envies.
Mais c'est vrai aussi que, comme je disais, bien que ça fasse partie des choses que j'aime le plus au monde, ce n'est pas la seule ! J'ai d'autres passions et kiffs et j'ai appris que j'ai tout à y gagner à ne pas les mettre en contraposition à la conso, mais les voir comme complémentaires !
Ce n'est pas parce que je consomme que je ne peux pas me faire plaisir aussi autrement, au contraire, souvent ça se marie bien ensemble. Que ce soit le plaisir d'un taf que j'aime (bien que un peu trop prenant parfois), d'amitiés et relations profondes, de découverte et émerveillement, de me nourrir à y avoir du plaisir, à sentir le vent m'ébouriffer les cheveux en pédalant, etc etc.
Bon, ce n'est pas tout rose, je te rassure, il y a bien de merdes dans ma vie aussi et je ne me débrouille pas toujours bien pour y faire face. Mais encore une fois, la came m'accompagne et me donne le moyen à la fois de le rendre plus supportable et de prendre le recul nécessaire pour y faire face et tenter de les résoudre. Même pour les choses qu'on ne peut pas "résoudre", ni changer c'est question d'y vivre avec (ou sans, de vivre avec une absence)...
Quelles sont les implications dont tu parles qui reviennent à chaque fois ?
Mais ce n'est qu'en gagnant la légèreté dont tu sembles affirmer que tu n'es pas légitime que j'arrive à m'alléger. À déconstruire la culpabilité qui me hante pour assumer et profiter de ma conso. Pourquoi se priver ? Pourquoi s'alourdir de la culpabilité pour laquelle consommer "ce n'est pas bien", la prophétie auto-réalisatrice qui voudrait qu'on est des merdes parce qu'on consomme ? Certes c'est ancré en nous, c'est partout dans les regards des autres, c'est profondément immiscé à notre société.
Mais je veux pouvoir me sentir légitime de trouver le bonheur là où j'ai envie. Me sentir déjà légitime à pouvoir être heureuse. Ce qui ne veut pas dire qu'automatiquement je le suis, hein, mais si je m'en donne même pas la possibilité, bah ça risque pas d'arriver.
Bon, là je pique un peu trop du nez et il faudrait que je me prépare un repas pour demain midi. Je vais m'en arrêter là, mais ta vision m'intéresse fortement, car j'ai vraiment l'impression qu'on a tellement intégré le fait qu'il n'y avait pas d'issues, qu'on s'en donne ni on en prend et on bouche toutes les possibles sorties, comme les narines après une session C en sniff
a écrit
Moi, je veux pouvoir me dire que je suis heureuse de pouvoir profiter de "ce que j'aime le plus au monde" ! Hein ce n'est pas fantaisiste, je veux que ce soit ma réalité...
=> C'est complètement interdit pour moi. Pourquoi ? Ca comprend beaucoup de choses. J'ai des désirs profonds de liberté, de m'épanouir dans la vie, de réussir à construire des choses comme un humain """normal""".
Par rapport à la liberté : Je souffre lorsque je dépends de quelque chose, quelque chose qui m'emprisonne, qui me vole mon énergie. Ma relation malsaine avec les opiacés ou même prendre un tso sur le long terme c'est exclu. Pourquoi ? Parce que tant que je dépends de quelque chose je ne suis pas libre, et dans le cas des opiacés/tso ca implique beaucoup trop de choses pour moi.
M'épanouir dans la vie : J'ai commencé à prendre des opiacés en étant bien dans ma vie, d'ailleurs pendant plusieurs mois/années, même si cette expérience était extraordinaire, je n'avais pas envie d'en prendre plus, mes sessions certains weekend me suffisaient. Puis en fait, à tous les épisodes où j'ai commencé à être mal dans ma vie, une lente descente, jusqu'à ce que les opiacés deviennent la solution. Je suis conscient que ce n'est pas la faute des opiacés ultimement, mais dans mon expérience ils jouent le mauvais rôle quand même. Car aux moments où je suis au plus mal, ca ne fait que m'enfoncer encore plus.
Je vais détaillé quelque chose en plus pour nuancer encore mon discours:
Je crois qu'on ne vit pas du tout tous pareil les remous causés par l'héroïne et ses effets secondaires, encore une fois y'a énormément de choses qui entrent en jeu là dedans. Mais si tu veux, puisque ca vient dans ma vie lorsque je suis au plus mal, je vis très bien mes conso, mais ce que ca engendre derrière, en mésestime de soi, en mal être physique/emotionnel/mental, en perte de repère +, en gros j'ajoute du brouillard aux moments où j'ai le plus besoin de clarté. Puis faut encaisser tout ça, lorsque t'es déjà pas bien, en gros je m'envoyais en enfer clairement.
En fait je viens de détaillé un point super important c'est que si je prenais des opiacés, comme toi, en étant stable, sans besoin de combler quelque chose, ca n'impliquerait pas tout ce que ca implique derrière.
J'ai passé deux ans sans prendre d'opiacé après le pire épisode que j'ai eu avec eux, à vivre une vie plutôt épanouissante. Je me croyais vraiment "guéri" à pouvoir reprendre une vie normale, sans avoir à me méfier de quoi que ce soit. Sauf que ce qui m'a drainé vers le fond à l'époque n'était jamais vraiment parti, j'avais avancé certes mais une fois que je me suis retrouvé face aux difficultés, c'est revenu. la lente descente. bref y'aurait bcp à détaillé ici aussi.
Réussir à construire des choses : Eh bien ca aussi c'est quelque chose qui a beaucoup d'importance. Car ce que j'ai compris avec le temps c'est qu'avec ces épisodes sombres, je me sabotais inconsciemment. Cette pulsion de vouloir se couper de sa souffrance, de son mal être et de prendre de la drogue, comme j'ai dit je rajoutais du poids sur ce qui me pesait déjà. Est-ce que l'héroine fait partie de mes besoins fondamentaux pour réussir à me construire, dépasser ce mal qui m'habite ? Non. Ca ne m'a jamais pousser vers le haut à moyen/long terme. (sauf si on parle que tout ce que ca m'a fait traversé et qui m'a aidé à grandir)
Alors j'ai commencé à me tourner vers les choses qui m'aidaient réellement. Et c'est ça ma clé, ce qui fait qu'aujourd'hui je peux commencer le réel travail. J'ai éloigné la drogue, c'était primordial, plus d'artifice, plus de pollutions pour l'esprit. En changeant de lieu de vie, et en faisant de gros efforts sur mes habitudes de vie, j'ai réussi à trouver la clarté et l'énergie pour aller au fond de moi et combattre mon mal être.
Tu vois le cheminement que ca me demande, dans mon expérience de vie, je parlais que les opiacés avaient le mauvais rôle, mais c'est seulement avec toutes ces interactions que c'est le cas. Pour schématiser, la drogue entrait dans un cercle vicieux qu'était ma vie avec toutes mes mauvaises habitudes, alors que je ne désirai qu'aller bien, être en paix avec moi même. Je cherchais cette paix à travers des artifices. Maintenant (avec beaucoup beaucoup de temps) si on s'imagine que ma vie est un cercle vertueux, comme as l'air d'être la tienne avec tout ce que tu as nommé, la drogue & les opiacés pourrait prendre leur place avec un risque beaucoup moins important que tout parte en vrille.
J'ai remis les priorité dans le bon sens afin que marche après marche, je construise mon cercle vertueux, ma vie, pour que je sois heureux et fier d'elle. Parce que sans ca je serais éternellement insatisfait et malheureux.
Donc pour résumer cette partie : tout à voir avec la relation qu'on a avec le produit. Le "drama", toute mon histoire depuis des années, mes galères sont étroitement liées aux opiacés. Parce que inconsciemment c'est la chose à laquelle je me suis raccroché, ne sachant pas comment dépasser mes peurs, mes insécurités, mon mal être. Comme je connaissais déjà ça, cette sensation, c'est apparu comme la solution. Les opiacés je veux bien les voir comme une aide passagère, comme un petit plaisir, mais pas comme quelque chose sur lequel se construire, ou du moins s'appuyer pour avancer.
Je vais pas faire un discours sur le développement personnel mais notre souffrance et mal être témoigne toujours de quelque chose. Donc le faire s'évaporer quelques heures c'est ok mais pendant des semaines entières c'est se couper complètement de soi, du réel.
Dans ton message, je ressens de l'équilibre lorsque tu parles de ta vie. Différentes sources de plaisir, pas dans les extrêmes, des désirs fondamentaux comblés (taff/épanouissement, amical/relationnel..) et c'est ça ton socle pour moi. Ce qui te donne suffisamment d'énergie pour avancer dans la vie et être tout simplement heureuse, bien avec ta vie. C'est vraiment chouette je suis content de lire ton témoignage. Et ca confirme aussi un peu ma compréhension des choses par rapport au cercle vertueux. Tant qu'on a une utilisation malsaine de la drogue (vis à vis de soi et de là où on en est) je crois qu'on est voué à faire de la merde si je peux résumer ça comme ça.
a écrit
Mais ce n'est qu'en gagnant la légèreté dont tu sembles affirmer que tu n'es pas légitime que j'arrive à m'alléger. À déconstruire la culpabilité qui me hante pour assumer et profiter de ma conso. Pourquoi se priver ? Pourquoi s'alourdir de la culpabilité pour laquelle consommer "ce n'est pas bien", la prophétie auto-réalisatrice qui voudrait qu'on est des merdes parce qu'on consomme ? Certes c'est ancré en nous, c'est partout dans les regards des autres, c'est profondément immiscé à notre société.
Mais je veux pouvoir me sentir légitime de trouver le bonheur là où j'ai envie. Me sentir déjà légitime à pouvoir être heureuse. Ce qui ne veut pas dire qu'automatiquement je le suis, hein, mais si je m'en donne même pas la possibilité, bah ça risque pas d'arriver.
Du coup par rapport à ce passage; comme je t'avais un peu dit, c'est pas un blocage vraiment lié à ma construction mentale. En fait je m'en fou de comment je peux être perçu entant que consommateur. Surtout que je suis assez "passe partout". Lorsque je pense à tout ça, ce n'est pas "une raison", une pensée qui interfère, je ne ressens pas non plus de culpabilité.
Quand je pense à consommer ce qui s'active en moi c'est "non pour ma survie", pour mon développement. le mot qui revient le plus c'est "implications". Je ressens au fond de moi, avec toute l'expérience que j'ai engrangé depuis des années, que je ne suis pas prêt, que si je me laissais tenter par les opiacés maintenant, ca me détruirait encore plus.
Et tout ça ça vient de mon vécu et de la connaissance que j'ai de moi. Peut être qu'un jour je ressentirai que c'est possible pour moi de reconsommer. Mais pas avant un moment.
Et moi mes stratégies actuellement c'est de faire en sorte de ne pas y être reconfronté. tu comprends, en lien avec les désirs que j'ai parlé au début du texte.
au plaisir de poursuivre cet échange constructif