Aujourd'hui je vais mettre à plat quelques réflexions qui me turlupinent depuis un bon moment. Ces réflexions concernent le lien important entre la prise de drogue et les troubles psychiatrique.
Attention je ne veux en aucune manière dire que les UD ont tous ce genre de trouble, ni que l'usage déclenche nécessairement à terme des troubles! C'est plutôt la démarche inverse qui m'intéresse à savoir la prise de drogue pour rendre supportable certains problèmes psy.
Le cas de l'
alcool et de la fréquence de l'alcoolisme chez les personnes ayant des troubles anxieux importants ou des troubles dépressifs est probablement le mieux documenté. Il semble que le paradigme médical actuel considère que les personnes anxieuses ou depressives utilisent l'
alcool comme un "médicament" permettant de faire taire pour un moment leur angoisses.
http://search.proquest.com/openview/b61 … 5840480e5/http://archpsyc.jamanetwork.com/article … eid=483005Dans ce paradigme, s'il est évidemment important de traiter la dépendance alcoolique (en raison des risques avérés d'une surconsommation), il est également primordial de traiter la raison qui à poussée la personne à utiliser ce "médicament". Si on ne traite pas de manière adéquate la dépression il y à évidemment un risque important de rechute.
Ce type de raisonnement est globalement très bien admis, comme le prouve la littérature scientifique importante sur ces questions. Il ne viendrait pas à l'idée des praticiens (ni de personne de sensé à mon avis) de reprocher ou condamner l'utilisation faite de l'
alcool dans ces conditions. Il s'agit simplement du seul levier que les personnes dépressives ou très anxieuses avaient sous la main, facile à se procurer et jusqu'à un certain point socialement admis.
Passons maintenant à un autre type de drogue, les stimulants. Je suis personnellement consommateur régulier de stimulant (café,
kratom et
RC stim). Voyant un psychiatre pour des troubles bipolaires, je lui ai confessé cette utilisation. Elle ne m'a bien entendue pas félicité mais m'a clairement dis que ces usages étaient pour le moins courant dans les cas de bipolarité à tendance dépressive. Ce qui m'a interloqué suffisamment pour chercher des références scientifiques à ce sujet.
J'ai en effet trouvé de nombreux articles de revues établissant un lien net entre l'abus de stimulant et la bipolarité. Je donne ici les titres car ces articles ne sont malheuresement pas encore dans le domaine public et je ne peux pas les partager sans enfreindre le droit d'auteur.
The impact of mood symptomatology on pattern of substance use among homeless. Maremmani AG, Bacciardi S, Gehring ND, Cambioli L, Sch¼tz C, Akiskal HS, Jang K, Krausz M
Randomized controlled trial of contingency management for stimulant use in community mental health patients with serious mental illness. McDonell MG, Srebnik D, Angelo F, McPherson S, Lowe JM, Sugar A, Short RA, Roll JM, Ries RK
Malgré les titres ces articles sont plutôt centré sur le syndrome bipolaire spécifiquement.
Ceci amène une question éthique importante : si comme le suggère ces lectures, l'utilisation de stimulants (et d'autres drogues par ailleurs), est un moyen pour ces personnes de diminuer leur souffrances psychiques, quel est le sens d'une condamnation pénale pour usage?
Bien évidemment l'usage de drogues amène quantité d'autres risques et ce n'est certainement pas une solution pérenne. Mais devant l'impossibilité réelle ou supposé d'obtenir un traitement psychiatrique (ex. personnes très précaires, personnes en situation irrégulières...) il semble logique de leur point de vue de se tourner vers quelque chose qui semble avoir un effet bénéfique. Comment peut on condamner moralement, et à plus forte raison pénalement, ces personnes?
Enfin, pour finir je vais peut être vous paraÎtre un peu démagogique, mais la France est renommée pour avoir la première place pour la consommation d'antidépresseur. Je ne sais pas si c'est toujours le cas mais je suppose qu'elle est toujours bien placé dans le top ten. N'y à t'il pas un coté "médecine de riche", "médecine de pauvre" dans ce classement?
Les personnes isolées et fragiles auront à mon sens plus de facilité à ce tourner vers le monde des drogues illégales ou personne ne pose de question, les personnes intégrée socialement auront plus facilement accès à un suivi psychiatrique admis par la loi et la société.
Attention encore, je ne nie pas que des personnes ayant un revenu même confortable et étant bien intégrées (avec un emploi, une famille...) puisse souffrir de trouble psychiatrique. D'ailleurs un bon nombre d'entre elle font également appel aux drogues illégales à un moment ou à un autre.
En conclusion, pour un petit rappel historique, notre société à enfermé les "fous" pendant très longtemps dans des conditions ignobles (à partir du XIII ème siècle jusqu'au milieu du XX ème). L'éthique et l'humanisme ont beaucoup aidé à améliorer leur conditions, plus que la science médicale.
Aujourd'hui nous enfermons des "drogués" qui consomment notamment pour réduire leurs souffrances, leurs "folies". A quand une évolution de la loi correspondant à l'éthique moderne?
Si vous avez des troubles psychiatriques et avez utilisés la drogue comme auto-médication, avec succès ou avec un échec important, n'hésitez pas à témoigner en commentaire. Je pense que nous avons encore beaucoup à apprendre sur ce sujet.
Peace and live long guys!