[ Bad trip ]

25gr sec de Mc Kennaii - Bad trip ultime

Bonjour à tous,

C'est la première fois que je poste une expérience ici et je pense que ce que j'ai vécu pourrait vous intéresser et être un bon moyen de prévention en ce qui concerne le surdosage. Ce trip report va être très long mais très riche, je vous préviens !

Je suis une jeune femme de 26 ans. C'est mon 3ème trip sous psilocybine. Les deux 1ers trips se sont extrêmement bien passés (3gr sec de champis Mc Kennaii, une des variété les plus concentrée en psilocybine), beaux visuels et idées très spirituelles. Donc envie de recommencer, mais cette fois-là avec un objectif assez précis.

Set and sitting
Je suis à jeun, il est 9h du matin. Je veux profiter de cette belle journée ensoleillée afin d'aller dans le jardin, dans le but de communiquer avec les plantes et ce que je cultive en permaculture, des fois qu'elles aient des choses à me raconter, sait-on jamais !
Mon copain est à la maison toute la journée mais il est assez occupé en télétravail, il est prévenu et garde un oeil sur moi quand même, zocaw' comme on dit.
J'ai de l'Alprazolam au cas où. Je me sens bien, très détendue, prête.

Prise
Je commence par prendre 2gr de champignons séchés, il est 9h. J'attends une heure et toujours aucun effet. Je décide donc de reprendre 1gr, et attend encore une heure. Bon, toujours rien. Je me dis qu'il doit y avoir un problème avec cette récolte là, que j'ai du faire sécher un peu trop fort au four et que ça a bien grillé la psilo contenue dedans. Je suis frustrée, tous les voyants étaient au vert et j'étais vraiment prête pour un trip, aujourd'hui même. A ce moment-là, je me dis que tant qu'on y est, autant finir le paquet, qui visiblement n'a pas l'air actif; c'est toujours mieux que de le jeter. En plus je trouve ça très bon les champs séchés... Avec du recul je me rends compte que les effets de ma première prise étaient déjà sûrement déjà en train de monter et ça a pu avoir un effet désinhibant sur cette prise complètement immodérée.. Après calcul, je pense avoir ingéré en tout l'équivalent de plus ou moins 25 gr de champignons secs. De variété Mc Kennai qui plus est... Ce qui explose donc la dose standard haute qui équivaut grosso merdo à 3 gr pour une personne de ma corpulence (1m70 pour 63 kg). Donc pas besoin d'épiloguer mais extrêmement mauvaise idée, je suis un contre-exemple absolu et j'espère que la suite vous dissuadera de faire la même chose que moi...


Montée et plateau
Au bout d'une demi-heure, je commence à me sentir un peu... Bon, ça y est, je sens que quelque chose est en train de changer dans ma perception. A ce moment-là, je me dis que pour tout ce que j'ai pris cela doit correspondre à une sorte d'effet "résiduel" de mes champi que je crois alors inactifs. Je suis bien loin d'être préparée à ce qui m'attends. Soudain, j'ai très faim. Avec du recul, c'est juste une énorme nausée mais je ne capte pas vraiment la différence sur le coup. Je me prépare de la pâte à cookie crue (ma madeleine de Proust) et je n'arrive pas à me concentrer sur les dosages, je renverse la moitié des ingrédients par terre mais étant ultra maladroite en temps normal rien n'inquiète mon copain outre mesure. J'ai l'impression d'être redevenue une petite fille de 4 ans qui essaie de faire la tambouille, toute seule, et forcément qui fait un peu n'importe quoi. Je m'assois par terre devant la baie vitrée et commence à manger la pâte crue, un peu sèche. Je m'aperçois vite que la cuillère est totalement inutile et me sers de mes doigts. Je perçois des sorte de chiots d'une race de chien pleine de plis couleur crème, genre Shar-Pei. Tous s'agglutinent entre eux et je me dis que clairement, là, je commence à vriller un peu. Ca m'amuse, mais plus trop envie de manger ces pauvres bêtes qui couinent quand je les remuent avec la main. Je regarde ensuite le carrelage et je vois des visages amérindiens collés les uns contre les autres, leur peau est faite de fractales, de choux romanesco qui tournent sur eux-mêmes et de pas de vis infinis. Les couleurs sont saturées, métalliques, vibrantes. Quand je me concentre sur un détail, j'ai accès à l'infiniment petit du détail, et donc de la fractale dont je parle plus haut. Tout est très beau mais me donne un peu le tournis. Je commence à avoir sérieusement envie de vomir. Soudain, j'ai envie d'aller dehors prendre un peu l'air.
Et là, j'ai juste l'impression de me prendre un ENORME coup de massue dans le cerveau. Je sens littéralement les molécules de psilocybine se décharger d'un seul coup, comme un barrage qui rompt, à travers mes neurones. Je suis comme balayée. Je me dis que c'est trop pour moi. Que j'ai fait une énorme, énorme bêtise. Que je n'aurais jamais dû me risquer à prendre tout cela. Que c'est trop tard, car je suis seulement au début de la montée et déjà tout est trop intense et les événements me dépassent ! Je perds le contrôle de mes pensées. Je commence à pleurer, et je ne sais pas si c'est parce que j'ai peur, parce que je pleure de bonheur ou que je pleure de tristesse. Les émotions sont toutes mélangées et ce trop-plein émotif doit absolument être évacué, en l'occurrence ici ce sont des larmes de survie devant un cerveau dépassé. Mon copain voit que ça ne va pas et arrête immédiatement de bosser et restera avec moi jusqu'à ce que je redescende, bien heureusement d'ailleurs...

Dans le jardin, il se passe le moment le plus intense, grave et important de mon trip.
Je regarde le ciel. Un ciel de mars très particulier, il pleut au loin et à la fois il fait beau, c'est très impressionnant. Et je devine, à un endroit du ciel, un vaisseau extraterrestre ! Il est transparent, mais je le ressens très clairement. Et je ressens aussi l'intention des êtres qui sont à l'intérieur, à savoir un doute sur le moment adéquat pour apparaître enfin aux yeux de tous, à l'humanité, quoi. Ils se tâtaient, comme on dit ! Et là j'étais persuadée que c'était aujourd'hui qu'ils allaient le faire. J'ai demandé à mon mec s'il était prêt à une telle annonce, à un tel choc.

J'ai ensuite baissé les yeux et j'ai regardé toutes ces fleurs dans ce jardin. Il y en avait tellement ! Et là, énorme prise de conscience. L'information à laquelle j'ai eu accès m'est toujours très dérangeante. Mais peu importe, j'ai besoin de l'exprimer, de partager cela, car c'est trop important. Les fleurs m'ont parlé par télépathie. Elles m'ont dit de regarder tout autour de moi. Que tout n'est qu'une création de mon esprit, de mon âme, de l'Âme universelle. Qu'en fait, tout ce que je vois, ce que je sens et ressens, les gens, les personnes que j'aime, les animaux, la nature, la matière, TOUT en fait, TOUT n'est qu'une illusion. Rien n'existe. C'est une matrice. Pour vous donner un ordre d'idée, essayez d'imaginer un espace blanc, sans aucune délimitation, donc infini, dans lequel on se sentait tellement seul et triste et où l'ennui était si terrible que on a décidé de créer un univers de matérialité, qu'on appelle "3ème dimension". Donc dans ce néant blanc infini, sans aucun contraste et où RIEN n'existe à part la CONSCIENCE d'Etre, de la Source, de Dieu si on préfère, on a mis une sorte de casque de réalité virtuelle. La comparaison est nulle mais je ne trouve pas vraiment d'autre exemple plus parlant. Et les fleurs étaient ma boussole. C'étaient des flèches pointées droit vers le ciel, qui me rappelait d'où je venais et qu'il était temps d'ouvrir les yeux, de se réveiller. Que toute cette expérience était un fait d'une tristesse infinie car non réelle. Que la vie était tout et n'était rien à la fois. Tout ce que je connaissais était en fait de simples constructions d'un égo construit également par moi pour me guider dans cette 3ème dimension. Et surtout, surtout, nous étions, nous tous humains, qu'une seule et même âme si seule dans son néant qu'elle a voulu expérimenter la dualité sur Terre et dans la 3D pour avoir l'impression d'avoir de la compagnie. J'ai donc compris à ce moment-là le concept d'éternité, de cycle, d'unité et de disparition de l'égo. J'en avais déjà entendu parler dans d'autres trips report mais ce sont des choses qui dépassent tellement l'entendement qu'il m'était impossible de les appréhender avant de les avoir vécues. Et étrangement, j'étais très loin de cet état d'extase et de paix infinie lors d'une expérience où l'égo disparait et où on se sent relié à tout ce qui nous entoure. Moi, ça m'a rendu juste extrêmement triste et j'ai ressenti l'incroyable inutilité de la Vie, finalement... Alors que je suis une fille plutôt heureuse dans ma vie, bien que très sensible, j'imaginais la vie plus belle, l'après-vie aussi. A moins que ce soit mon égo qui a eu tellement peur de disparaitre et de perdre le contrôle que je me suis dit toutes ces choses-là. Je ne sais toujours pas. Toujours est-il qu'à vivre, c'est extrêmement dérangeant de sentir sauter toutes les croyances ancrées en nous d'un simple coup de pichenette, en 3 min chrono. "Tout ce que je sais c'est que je ne sais rien" disait l'autre. Effectivement, cher Socrate, effectivement.
Alors je pleure à chaudes larmes, je hurle de douleur. Je n'en ai plus rien à faire des voisins, de toute façon tout n'est qu'illusion, ils sont moi et moi je suis eux, aucune distinction. Alors pourquoi avoir honte ?
Puis un malaise m'envahit. A ce moment-là j'ai l'intime conviction qu'une terrible annonce est imminente, qu'à cet instant précis une de mes parent va m'appeler pour m'annoncer le décès de l'autre. L'horreur.  J'ai froid maintenant, je grelote, et toujours des nausées affreuses mais je ne vomis toujours pas. Mon copain me propose d'aller prendre une douche. Je sais pourtant que je peux décider d'avoir chaud ou froid, que tout n'est qu'intention dans l'univers. Quand je regarde son visage, je le vois vieillir à vue d'œil et il se transforme en vieillard puis commence à partir en poussière et à s'hétérer pour ensuite redevenir le jeune homme que je connais. En boucle...

Dans la salle de bain les carreaux me semblent immenses, et j'ai l'impression qu'elle fait 100m², alors que dans la réalité elle est minuscule ! Toutes les lignes sont tordues et déformées. C'est le moment le plus visuel de mon trip, trip qui finalement aura surtout été philosophiquement dérangeant à l'extrême.
Sous la douche, j'ai l'impression d'être une hobbit et d'avoir le corps en forme de H. Une voix me dit au fond de moi que j'ai le choix de changer d'étage de pensées. Concrètement, si les prises de consciences lors de mon trip sont vraiment trop grandes pour mon petit cerveau d'humaine, alors j'ai toujours le choix de redescendre vers plus de matérialité, vers des choses plus concrètes mais donc "banales", à savoir ma petite vie de jeune femme de 26 ans etc. J'ai donc le choix ! Et dès que je me sentirai prête pour de bon, je pourrai enfin remonter tous ces étages et aller vers des états de pensées extrêmement hauts, des énergies très très très hautes en quelque sorte. Difficile à expliquer avec des mots en fait. A cet endroit même où on est l'observateur et à la fois la personne qui fait l'action. Mais je pense vraiment, avec du recul, qu'il y a des choses pour lesquelles nos synapses ne sont pas faites. Il y a des concepts qui nous dépassent et qu'on ne peux vraiment comprendre, ou du moins juste un aperçu. C'est un peu comme aller faire comprendre la 3D à un héro de bande dessinée, qui lui évolue en 2D ! Nous sommes les observateurs, mais lui ne peut jamais ô grand jamais se douter qu'il existe autre chose en dehors de sa simple case de BD. Et pourtant... Alors qu'en est-il des dimensions supérieures à la notre ?

Le temps a eu l'air de passer une éternité. J'ai l'impression d'avoir vécu plusieurs jours, voire mois, durant ces 8 heures de trip. Cela a eu la particularité de m'angoisser encore plus car je me suis demandée si je n'allais pas rester coincée dans cet état hyper intense pour le reste de ma vie. L'effet de distorsion du temps peut être très dur à gérer, surtout si on veut que tout s'arrête. Et je continuais (hélas) à monter, je n'étais même pas arrivée au plateau ! J'ai donc demandé un Alprazolam à mon copain car je sentais que j'étais à deux doigts de partir en attaque de panique. Je le prend et j'attends les effets en essayant de me calmer, toujours assise dans la cabine de douche. Mon cœur bas très fort, trop fort dans ma poitrine et le temps est arrêté. Je lui demande apparemment toutes les minutes depuis combien de temps j'ai pris le Xanax, car moi je suis persuadée que ça fait plusieurs heures et que ce n'est pas normal que je ne me sente toujours pas mieux. Sauf qu'à un moment, mes idées deviennent encore plus incontrôlables et je commence à ne plus reconnaitre les lieux où je me trouve. Le visage de mon copain n'a plus rien de familier et je me demande qui est cette personne. J'entends qu'il me dit des choses mais impossible pour moi à ce moment-là de comprendre quoi que ce soit, comme pour une langue étrangère. Je ne sais plus ce que je fais là, comment je m'appelle, qui suis-je. Je ne suis plus qu'une terrible angoisse et je hurle de peur. J'ai les yeux exorbités et je commence à hyperventiler. Tout tourne autour de moi et à ce moment-là je veux juste m'endormir, je veux juste ne plus être là, en train de vivre cela. La seule chose que je sais c'est que quoi que je fasse, je vais rester bloquer dans ma tête, dans cet état d'une confusion absolue et d'une peur pas croyable, seule au monde. Pour l'éternité même, car j'ai aussi la nette impression que si je meurs, là, tout de suite, rien de va s'arrêter. Que je n'ai pas seulement grillé mes neurones, mais aussi ma conscience et mon âme... Et que donc tout est foutu en fait. Et que l'enfer... et bien le voici, c'est cela. L'enfer c'est soi-même qui part en couille en milieu fermé, en l'occurrence ici dans ma boite crânienne, et cela pour toujours, pour l'éternité. Donc terrible, terrible bad trip. Je ne sais toujours pas comment j'en suis revenue. Je me suis vue devenir folle et vriller. Même mes pires angoisses ne pourraient se résumer à tout cela.

Descente
J'ai donc passé le reste de mon trip à croire que j'étais une folle condamnée et qu'on allait devoir m'interner. Mon copain essayait de me rassurer mais ça ne marchait pas. J'ai donc attendu, la peur au ventre, allongée sur le lit, que l'éternité s'arrête.
C'est l'épouvante. Vous connaissez le tableau de Munch, "Le cri" ? Voilà un maigre aperçu d'une terreur incomparable, celle qui m'a broyée durant ces longues heures.
Plus que la peur de la mort, la peur de la souffrance éternelle. Tomber dans un puit sans fond. Un escape-game sans escape. Et un sourire sardonique diffus vous entourant de tout ce qu'il y a de plus maléfique pour se moquer de votre détresse. A mon pire ennemi je ne lui souhaite pas cela. Et puis les effets se sont peu à peu dissipés, j'ai retrouvé un soupçon de lucidité et puis les choses n'ont fait que s'améliorer jusqu'à ce que je me retrouve à nouveau bien présente, les idées à nouveau claires. J'ai dormi non-stop plusieurs jours de suite à cela.

Il est possible que ce soit l'effet de l'anxiolytique qui ait accentué l'effet d'esprit embrouillé et de perte de repères. Je ne sais pas. Mais toujours est-il que je suis montée très très haut pour enfin tomber très très bas, dans les limbes de mon esprit. Je pensais être une personne plus forte que je ne le suis réellement. Que je pensais savoir des choses alors qu'il n'en est rien. C'était il y a un mois. Et depuis je ne sais toujours pas comment appréhender la vie, quel est le sens de l'existence en somme. Je ne suis pas malheureuse, je n'ai pas d'idées noires ou quoi que ce soit dans le genre. Mais je me pose encore plus de questions qu'avant ce trip, alors que mon but était justement de découvrir des choses et comprendre leur sens profond. La nuit parfois il m'arrive encore de me réveiller en sursauts et de ne plus du tout savoir où je suis pendant quelques secondes, de micro attaques de paniques donc.

Bref, en conclusion mon cerveau n'a finalement pas été grillé comme je le redoutait, mais l'expérience m'a bien traumatisée même si c'était une expérience riche. Je ne reprendrai plus jamais de doses pareilles. Pour moi, ça été comme un suicide psychique et à la fois comme un catharsis de tout ce qui était inconscient et qui me faisait le plus peur au monde. Et nous ne sommes pas tous prêts à affronter nos démons les plus enfouis et les plus glauques. Et que même avec un bon gardien de trip, avec un super set-and-sitting et des anxios à portée de main, quand on bad et bien on est SEUL. D'où l'importance de tout cela et surtout de ne pas faire de folies avec des doses inconsidérées car quand c'est parti, c'est parti...

Merci de m'avoir lu jusqu'au bout, j'espère que vous avez pris plaisir à me lire et que j'ai été assez claire dans certains des concepts abordés.

N'hésitez pas à témoigner ici si vous avez aussi eu de genre de prise de conscience durant vos trips et que vous ne voyez plus la "réalité" de la même manière !

Ninka