Cannabis et addiction (Morel-Chappard)

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Échec Scolaire homme
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J'espère que Pierre ne m’en voudra pas d’avoir posté une partie de son bouquin.
Les usagers confirmés peuvent passer directement à la deuxième partie.



Cannabis et addiction [1/2] : Produit, usagers et détection

**Ce texte est issu de l'ouvrage d'Alain Morel et de Pierre Chappard, Addictologie, paru en 2019, et plus précisément du chapitre 14 intitulé "Cannabis et addiction"**

Le cannabis fait partie de la classe des perturbateurs *(cf. chapitre 4, « Drogues : définition et classifications »)*. En France, durant les années 1990 à 2000, le cannabis est devenu le premier produit illicite consommé par les jeunes. À 17 ans, un jeune sur deux a essayé de fumer au moins une fois dans sa vie. Cette forte prévalence place la France en tête du tableau européen, loin devant la République tchèque *(n° 2)* et les Pays-Bas *(n° 3)*, où les niveaux d’usage *(une fois au cours du dernier mois)* à 15-16 ans ne dépassent pas 15 % *(Spilka, 2015)*. Problème majeur chez les adolescents, l’usage de cannabis s’installe chez les adultes, alimentant le débat sur sa régulation nécessaire. La question de sa dépénalisation est régulièrement posée et des États de plus en plus nombreux reconsidèrent leurs politiques prohibitionnistes. Quant à la légalisation, elle fait l’objet d’un débat et plusieurs expériences ont été menées, allant de la légalisation pure et simple à une délivrance sous contrôle. Les évaluations sont en cours, identifiant plusieurs questions : les modes d’accès, la création d’un lobby économique, etc.

Des informations contradictoires circulent sur ses effets sur la santé, souvent déformées selon la position prise au regard du statut légal du produit. Pour être utile, le discours du professionnel doit être le plus proche possible de la réalité vécue par l’usager tout en tenant compte des connaissances scientifiques acquises *(INSERM, Expertise collective, 2014 ; Julienne, 2013)*. Il semble cependant y avoir un consensus sur l’importance primordiale de l’âge dans la dangerosité du produit.

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##L’approvisionnement

Les sources d’approvisionnement sont très diverses, rendant la répression du trafic complexe. La majorité du cannabis trouvé en France provient du Rif marocain pour la résine ou des Pays-Bas pour l’herbe, mais la production locale augmente et prend de plus en plus d’importance : 46 % de l’herbe consommée est d’origine française. Certains sites Internet, les *« grow shop »*, proposent un matériel comprenant armoire étanche avec système d’aération, lampe à sodium etc. pour faire de la culture de cannabis hors sol, il ne reste plus qu’à se procurer les graines… Malgré son illégalité, cette autoproduction au domicile se développe, de même que l’achat sur Internet et l’apparition de consommation de cannabinoïdes de synthèse, tel le spice dont des données de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies soulignent la place croissante *(OEDT, 2009)*.

Parmi les conséquences que génère son caractère illicite, le statut d’usager-revendeur est particulièrement problématique : les usagers réguliers financent leur consommation par la revente d’une partie de ce qu’ils ont acheté. Ainsi se créent des micro-réseaux, y compris au sein des structures scolaires, dont les *« gérants »* sont des adolescents, pas forcément issus du milieu *« traditionnel »* de la délinquance, bien que se plaçant en situation délictueuse au regard de la loi. Les débats rejaillissent régulièrement sur ce marché illégal du cannabis, notamment au regard des violences et des risques qu’il génère, et de nouvelles pistes sont proposées pour une production régulée *(Obradovic et al., 2013)* notamment sous la forme de coopérative de production, comme les Cannabis Social Club, ou la dépénalisation, c’est-à-dire la non-pénalisation de l’usage, sur le modèle portugais ou bien la régulation stricte par l’état comme c’est le cas aux Pays-Bas. La France a opté pour maintenir la pénalisation, par le biais d’une amende forfaitaire.

##La culture du cannabis

Le cannabis est le nom latin du chanvre. Selon le mode de culture, on obtiendra deux types de produits différents. Cultivé en terrain humide, le cannabis est riche en fibres et devient le chanvre qui sert à la fabrication des tissus et des cordages. Cultivé dans des milieux chauds et secs, le cannabis va produire une résine pour lutter contre la sécheresse. Cette résine, présente en abondance dans les feuilles et les sommités florales, est particulièrement riche en substances psychoactives, notamment le THC ou tetrahydroxycannabinol.

Pour augmenter la concentration en THC, certains producteurs utilisent la technique du sinse milla *(en espagnol « sans graine »)* en séparant les plants femelles des plants mâles avant la pollinisation. Les plants femelles produisent plus de THC, surtout lorsqu’ils sont non pollinisés. D’autres se lancent dans la culture de véritables OGM, obtenant des produits qui à l’état brut, contiennent jusqu’à 15 %, voire 20 % de THC. Désormais, on peut trouver sur le marché des herbes dénommées skunk *(abréviation de l’anglais skunk weed : « mauvaise herbe de salaud »)* ou bien super-skunk obtenue à partir de cultures sous serre, hydroponiques, avec des conditions de luminosité et de température optimales. Des techniques de génie génétique produisent des plants si riches en THC que des cristaux apparaissent à la surface des feuilles, les consommateurs les appellent cristal skunk. Ces cristaux peuvent ensuite être recueillis à froid pour former l’ice skunk. Enfin, on peut obtenir le produit brut par raffinage : *« l’huile rouge ou brune »*.

##Formes consommées

Les feuilles et tiges de marihuana séchées forment une herbe *(la « beuh »)*. Il en existe de toutes les variétés et de tous les prix. Le plus souvent vendu pur, ce cannabis à l’état brut est roulé dans du papier à cigarettes pour être fumé. Par cette voie on obtient une intensité et une durée des effets optimaux puisque la moitié du principe actif va être absorbée. Les effets apparaissent ainsi en quelques minutes et durent plusieurs heures.

La résine gluante contient plus de THC. Elle est rassemblée et pressée en *« barrette »* ou en *« savonnette »*. Cette forme concentrée est appelée haschisch ou plus communément shit. Sa présentation compacte en facilite la contrebande et c’est donc elle qui est la plus disponible. Pour améliorer la *« rentabilité »*, ce haschisch, rarement vendu à l’état pur, est coupé avec d’autres substances comme le henné ou la paraffine. Il est fumé, soit mélangé avec du tabac sous forme de *« joint »*, soit dans des pipes spéciales appelées bongs ou hookahs. Ces pipes à eau refroidissent la fumée pour la rendre moins irritante et permettent d’absorber des quantités plus importantes de cannabis.

En utilisant des solvants, on peut extraire de la plante une huile *(« huile rouge »)* qui peut contenir plus de 40 % de THC. On s’en sert pour enduire le papier à rouler des cigarettes ou les feuilles de cannabis écrasées afin d’augmenter les effets psychoactifs des *« joints »*. Elle peut se consommer par voie orale, mélangée à de la nourriture, comme dans certaines pâtisseries appelées space cake. En raison du premier passage hépatique et de l’absorption lente, les effets sont plus lents à apparaître, peuvent durer de 8 à 24 heures et seront plus intenses.

L’accès au cannabis thérapeutique ou médical est en cours d’expérimentation et probablement prochainement légalisé en France. Il est prescrit en général sous forme de spray buccal *(tel le Sativex®)* contenant du THC, du cannabidiol *(CBD)* et autres cannabinoïdes. Utilisé dans un cadre thérapeutique, au même titre que la morphine, dans des pays de plus en plus nombreux, il est utilisé contre la spasticité dans la Sclérose en plaque, mais aussi contre certaines douleurs rebelles et d’autres indications pour lesquelles des recherches sont en cours. L’ANSM a réuni, fin 2018 et début 2019, un Comité Spécialité Scientifique Temporaire afin d’examiner un statut plus adapté du cannabis thérapeutique, plus en prise avec les attentes des usagers concernés. Ses recommandations vont maintenant être mises en œuvre.

Les cannabinoïdes synthétiques diffusés sur Internet *(tels le « Spice » ou le « K2 »)* sont des dérivés fabriqués en laboratoire censés agir sur les récepteurs CB1 et CB2 du cannabis, mais dont les compositions exactes et les risques sont très aléatoires.

##Le parcours des usagers de cannabis

La population des usagers de cannabis n’est pas homogène dans sa façon de consommer le produit. On distingue les prises occasionnelles, souvent festives, l’utilisation à titre utilitaire, par exemple pour s’endormir ou pour apaiser une mémoire devenue trop douloureuse, et enfin la défonce pour déconnecter pensées et émotions douloureuses. La période de la vie dans laquelle se fait l’initiation et/ou la consommation va aussi participer à diversifier les effets. L’adolescence est une période critique pour l’apprentissage de la gestion du stress et des émotions, le faire par la consommation de substances psychoactives laissera des traces à l’âge adulte *(Phan, Obradovic, 2014)*.

Les premières bouffées de cannabis se prennent souvent en groupe en faisant *« tourner le joint »*. L’initiation participe de la découverte des effets : fous rires, levée des inhibitions et amélioration de la convivialité. Les fumeurs décrivent une exacerbation des perceptions sensorielles et une impression de ressentir le monde qui les entoure avec une acuité plus grande. L’un appréciera mieux la musique, l’autre aura une meilleure communication avec son entourage. L’effet est variable d’un individu à l’autre et selon son état avant la consommation.

Pour certains, l’usage du cannabis restera festif et associé à la convivialité. Pour d’autres, la consommation deviendra *« utilitaire »*. Les effets relaxants et de régulations émotionnelles ressentis lors des premières prises seront mis à profit pour pallier les troubles de l’endormissement, atténuer un vécu trop douloureux ou encore rendre supportable une scolarité devenue non épanouissante. Progressivement, le cannabis va devenir indispensable par les bénéfices qu’il apporte, sans qu’il y ait toujours dépendance au sens propre du terme, même s’il n’est pas rare d’observer des signes de sevrage pendant les périodes d’abstinence.

Une consommation régulière peut être considérée comme une conduite addictive, la fréquence des prises est un bon facteur prédictif de l’installation d’un syndrome de dépendance avec perte du contrôle de la consommation. À quantité consommée égale, les adolescents développent plus volontiers une dépendance au cannabis que les adultes. Le syndrome de sevrage est bien défini : les symptômes débutent environ 24 heures après l’arrêt de la consommation, atteignent leur maximum au bout de 72 heures puis se résorbent en sept à dix jours. Les principales manifestations sont une irritabilité, une anxiété, une tension physique importante ainsi qu’une baisse de l’humeur et de l’appétit.

Enfin, il y a la *« défonce »* qui efface d’un coup toute pensée douloureuse. Généralement, cela nécessite des prises importantes. Le cannabis peut ainsi mettre à distance les problèmes psychologiques sous-jacents. Arrêter la consommation devient alors synonyme de retour au réel et donc de la souffrance.

##Pharmacocinétique et dosages biologiques

Le principe actif du cannabis est depuis longtemps identifié, il s’agit du delta9 tétrahydroxycannabinol ou Δ 9THC. Après inhalation, 15 % à 50 % du Δ 9THC présent dans la fumée est absorbé et passe dans le flux sanguin. Cette absorption est rapide et les concentrations sanguines maximales sont obtenues 7 à 10 minutes après le début de l’inhalation. Très lipophile, le THC se distribue dans tous les tissus riches en lipides. On en retrouve ainsi en grande quantité dans le cerveau. De par le caractère lipophile et le volume de distribution très important, les effets psychiques du cannabis se prolongent bien au-delà de la baisse de la concentration sanguine *(phénomène de relargage)*. L’élimination des cannabinoïdes s’effectue par des voies digestives rénales et sudorales. En raison de sa forte fixation tissulaire, le Δ 9THC est éliminé lentement dans les urines. On en retrouve de 7 à 14 jours après la dernière prise chez les consommateurs occasionnels et de 7 à 21 jours chez les consommateurs réguliers *(Reynaud, Benyamina, 2009)*.

L’analyse sanguine permet de doser les différentes formes psychoactives ou non du cannabis et d’effectuer une analyse quantitative. Elle peut donner une estimation du temps écoulé entre la dernière consommation et le moment du prélèvement. Cependant, même si les concentrations sanguines de THC sont souvent accompagnées d’effets physiques et psychiques, il n’a pu être démontré de façon formelle qu’il existait une corrélation étroite entre concentration sanguine et intensité des troubles comportementaux. Ceci est sans doute dû aux grandes variations interindividuelles et à la tolérance qui s’installe chez les consommateurs réguliers. Le dosage dans les urines permet un dépistage rapide d’une consommation de cannabis, mais il n’en détecte qu’une forme non psychoactive et ne permet pas de préjuger du temps écoulé entre le moment de la consommation et celui du recueil des urines. Le dosage dans la salive, en raison de la présence de la forme active, constitue un test non invasif permettant de mettre en évidence l’usage récent. Il est utilisé par lors des contrôles routiers en première intention, avant confirmation par un test sanguin. Régulièrement, des *« autotests »* sont proposés dans le commerce, dans une logique souvent confuse *(Couteron, Chappard, 2014)*.

Dernière modification par Échec Scolaire (13 février 2023 à  09:12)

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Échec Scolaire homme
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Deuxième partie:

Cannabis et addiction [2/2] : effets neuropsychiques à court et long terme et liens avec les pathologies psychiatriques



**Ce texte est issu de l'ouvrage d'Alain Morel et de Pierre Chappard, Addictologie, paru en 2019, et plus précisément du chapitre 14 intitulé "Cannabis et addiction"**

#Les effets neuropsychiques de la consommation de cannabis

La période périnatale et l’enfance sont des périodes cruciales pour le développement cérébral, mais celui-ci se poursuit bien au-delà, pendant l’adolescence et jusqu’à 25-30 ans *(Trezza et al., 2008 ; Malone et coll., 2010)*. Le cortex préfrontal dorso-latéral est particulièrement concerné par cette maturation. Cette région contrôle plusieurs fonctions, comme la mémoire à court terme, le contrôle cognitif et le raisonnement qui vont considérablement évoluer au cours de l’adolescence (Satterthwaite et coll., 2013). La consommation de cannabis à cet âge interfère donc inévitablement avec la maturation du cerveau.

Les effets cérébraux du cannabis sont liés à l’action du Δ-9-THC sur des récepteurs spécifiques, les cannabinoïdes. En l’absence d’une consommation de cannabis, ces récepteurs sont stimulés par des neurotransmetteurs endogènes : les endocannabinoïdes. Ces récepteurs sont particulièrement concentrés dans l’hippocampe, le cervelet, le cortex frontal, le striatum, les ganglions de la base et l’amygdale *(Haring et al., 2012)*. En les stimulants massivement, la consommation de cannabis perturbe particulièrement les fonctions cognitives, l’apprentissage et la mémoire, la perception de l’environnement, les motivations, la coordination motrice et la sensibilité douloureuse.

##À court terme

###Effets immédiats et bénéfices ressentis

Les effets immédiats du cannabis apparaissent en général de 15 à 20 minutes après inhalation et entre 4 à 6 heures en cas de prise orale. Chez les consommateurs réguliers, ces effets apparaissent de façon plus retardée. Le cannabis a principalement une action neuro-modulatrice, c’est-à-dire que les effets ressentis après une prise sont très variables et dépendent étroitement des ressentis personnels au moment de la consommation.

Classiquement, l’usager va ressentir deux types de phénomènes. D’une part un sentiment de relaxation au cours duquel il va être légèrement confus et psychologiquement séparé de son environnement. D’autre part une modification de toutes les sensations. Les travaux ennuyeux et sans intérêt semblent se dérouler plus vite, la musique et les images sont perçues de façon plus aiguë. Il existe aussi un sentiment de compréhension intérieure intense qui, pour certains, donne une impression de forte créativité. Mais, comme pour l’alcool, la relecture à jeun des productions artistiques composées sous l’emprise du produit offrent parfois quelques déconvenues. Charles Baudelaire en a fait une remarquable description.

Les variétés de cannabis les plus puissantes peuvent provoquer des étourdissements, une excitation avec une augmentation de la vivacité, des distorsions majeures des perceptions du temps, de la couleur et des sons. Des doses très fortes peuvent même produire des hallucinations cénesthésiques et visuelles.

Il n’a jamais été décrit de surdose mortelle, le THC n’ayant aucune action sur le tronc cérébral pouvant entraîner de détresse respiratoire. Les surdoses *(que les jeunes usagers appellent souvent bad trip)* se manifestent essentiellement par un malaise avec des nausées et des vomissements. Certaines personnes vont ressentir une anxiété, voire une véritable attaque de panique. D’autres réactions, plus rares, incluent un vécu paranoïde, une dysphorie, une dépersonnalisation avec déréalisation. Ces effets sont en règle générale spontanément résolutifs sans intervention extérieure. En cas de symptômes persistant au-delà de 24 heures après la fin de l’intoxication, un diagnostic psychiatrique est à évoquer.

###Cannabis et conduite automobile

Les études réalisées sur les troubles du comportement sous l’emprise du produit et notamment les effets sur la conduite automobile ont fait l’objet d’une méta-analyse en 2018 *(Cannabis and driving, EMCDDA, mai 2018)*. Des études montrent que les personnes sous l’emprise du cannabis ont des performances cognitives et psychomotrices moindres lors des tests réalisés avec des simulateurs de conduite. Ces altérations de performance seraient plus faibles que celles rencontrées avec l’alcool, elles dureraient plus longtemps, seraient non perçues par le sujet malgré la persistance des déficits lors des tests. Si le risque d’accident sous l’emprise de l’alcool est multiplié par six, le risque sous cannabis a été estimé à 2.

Cependant, il existe des différences importantes selon la dose ingérée, la prise récente et les capacités de l’individu. Une chose reste acquise, le THC chez certaines personnes altère la conduite, de surcroît il potentialise les effets de l’alcool, des barbituriques, de la caféine et des amphétamines *(l’étude SAM en 2005 cite un accroissement de facteur 15 du risque routier en cas d’association cannabis et alcool)*. L’association du cannabis et du MDMA *(ecstasy)* rendrait la conduite automobile quasi impossible. Le rapport de l’EMCDDA recommande des contrôles fondés non seulement sur des tests biologiques, mais aussi sur des tests cognitifs et psychomoteurs.

##À long terme

Une méta-analyse a été faite par l’académie américaine de science et de médecine analysant plus de 10 000 articles de la littérature scientifiques *(National Academy of Science, Engineering and Medecine, 2017)* a mis en lumière les faits suivants.

###Les troubles physiques

Chez l’adulte, ils seraient avant tout d’ordre pulmonaire et lié au fait de fumer. Ce qui entraînerait une augmentation des bronchites chroniques. Le risque cancérigène pulmonaire existe et serait fonction de la dose ingérée et de l’association avec le tabac. Chez le tout jeune enfant, l’ingestion accidentelle de cannabis peut entraîner la mort par overdose.

###Les troubles cognitifs

Chez l’adolescent, l’usage régulier de cannabis entraîne des troubles cognitifs et un risque de désinvestissement plus ou moins global de ses activités sociales, familiales et scolaires. Des études ont montré l’influence particulièrement néfaste de la consommation durant cette période de l’adolescence où le cerveau est encore en phase de maturation. Ceci est particulièrement vrai pour des fortes consommations de cannabis avant 15 ans *(Arseneault, 2002)*. Les perturbations concernent avant tout la mémoire dite *« à court terme »*, les autres fonctions étant conservées *(NHTSA, 2000)*.

La plupart des auteurs estiment que cette altération est réversible. Cependant, une récente étude de cohorte a démontré qu’une consommation régulière et prolongée de cannabis, amorcée à l’adolescence, peut entraîner une altération des performances intellectuelles, qui se traduit par une baisse du quotient intellectuel *(QI)* à l’âge adulte, ainsi que des perturbations cognitives que partiellement réversibles *(troubles de mémoire, pertes d’attention) (Meier, 2012)*. Outre ce résultat qui mérite d’être confirmé par des études complémentaires, la précocité de l’expérimentation apparaît très nettement dans la littérature épidémiologique comme un facteur prédictif négatif important et un facteur de risque majeur de basculement ultérieur dans un usage problématique *(Beck, 2008)*. Cela est particulièrement vrai pour les consommations de cannabis déjà installées avant 15 ans. Chez l’adulte, les effets de la consommation sont moins marqués, posant la question d’un possible traitement différencié de son usage.

###Syndrome *« a-motivationnel »*

Certains usagers vont développer un syndrome qui comporte un apragmatisme avec perte d’intérêt, une anhédonie *(perte de la sensation de plaisir)*, une intolérance aux frustrations et un ralentissement psychique. Il concerne spécifiquement les consommateurs chroniques. Plusieurs mécanismes ont été évoqués. De par ses effets anxiolytiques, surtout lorsqu’il est utilisé chez des sujets ne présentant pas d’anxiété pathologique, le cannabis annihile tout stress. Or celui-ci est un moteur fondamental dans la poursuite des activités, scolaires ou autres, nécessitant un investissement important. De plus, le THC a une action sur les zones du cerveau dites des circuits de récompenses. Elles sont activées lors de la survenue d’une stimulation *« satisfaisante »* dans le cadre d’une activité professionnelle, extraprofessionnelle et/ou relationnelle.

Cela pousse le sujet à rechercher la poursuite de ces activités gratifiantes. Lorsque ce circuit est activé de façon artificielle par une drogue, la personne va se détourner de ces activités au profit de la seule reprise du produit. La dépression, primaire ou induite, va aggraver ce syndrome a-motivationnel. On le retrouve fréquemment chez les adolescents dépressifs, même chez les non-consommateurs, tant la dimension de passivité défensive peut apparaître au premier plan chez des sujets dont les assises narcissiques sont fragiles.

###Relation à l’entourage

L’altération des relations avec l’entourage et en particulier, à l’adolescence, avec les parents, est une autre conséquence. De par les effets antistress, l’adolescent se trouve dans une « bulle », peu réceptif aux remarques, désinvestissant progressivement toute activité. La nécessité de trouver des fonds, parfois par des moyens illicites, va aussi aggraver le climat familial. Concernant l’argent de poche, les parents sont face à un dilemme. Ou bien ils le suppriment, au risque de faire plonger l’adolescent dans la délinquance pour faire face aux dépenses liées à la consommation, ou bien ils le maintiennent et ils peuvent se sentir *« complices »* de la prise de cannabis.

Cette dégradation relationnelle peut faire suite à une période plus ou moins longue de déni des proches ou, à l’inverse, d’une suspicion persécutrice compromettant dans un cas comme dans l’autre les tentatives du jeune de parler de la réalité de sa consommation *(Phan, Couteron, 2005)*. Certaines attitudes de l’entourage vis-à-vis de cette consommation vont avoir une influence sur le risque de pérennisation de la conduite. On rencontre alors plusieurs cas de figure qui vont de parents qui consomment avec leur enfant à ceux qui vont le chasser du domicile.

#Les liens avec les pathologies psychiatriques

Parmi les abuseurs ou les dépendants du cannabis, il existe une fréquence importante de pathologies psychiatriques *(Huerre, Marty, 2004)* et les personnes présentant des troubles de l’humeur ou des désordres psychotiques, ont une grande fréquence d’abus ou de dépendance à cette substance. Certains patients dépressifs et anxieux ont rapporté que le cannabis atténuait leurs symptômes tandis que d’autres usagers fument du haschisch pour calmer colère ou ennui. L’influence de la consommation de cannabis sur l’évolution des troubles psychiques est péjorative.

L’usage *« auto thérapeutique »* est probablement favorisé par le sentiment de se sentir mieux grâce à la désinhibition suscitée par le produit. Mais le cannabis diminue l’efficacité des traitements psychotropes et notamment des neuroleptiques, il aggrave le risque de rechutes d’accès aigus chez des psychotiques. Sont aussi problématiques les risques de rupture de prise en charge pour des adolescents quand leur consommation fait déborder les limites de tolérance de l’institution qui les accueille. La qualité des liens entre les parents et l’institution, et le positionnement des parents vis-à-vis des transgressions du cadre thérapeutique peuvent influencer grandement l’évolution de la prise en charge.

###Risque schizophrénique et facteur de vulnérabilité

Chez les patients schizophrènes, le rapport à la prise de cannabis est complexe. Dans les périodes de décompensation délirante, le THC va calmer les angoisses qui sont souvent majeures. Dans les phases déficitaires, certains vont l’utiliser pour retrouver des sensations qui, même délirantes, valent mieux que le grand vide.

Toutefois, le cannabis aggrave le processus dissociatif de la schizophrénie, les rechutes à court terme et à long terme sont plus fréquentes, la resocialisation est moindre et l’observance plus faible. Le risque encouru du fait du retard d’accès aux soins est également relevé.

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**Études sur la consommation de cannabis et l’apparition de la schizophrénie**

Quatre études récentes ont été menées pour étudier si une consommation de cannabis à l’adolescence était un facteur de mauvais pronostic sur l’apparition d’une schizophrénie à l’âge adulte. Une étude suédoise, portant sur une cohorte de cinquante mille conscrits suivis prospectivement sur 27 ans montre une corrélation entre consommation de cannabis avant 18 ans et apparition d’une schizophrénie à l’âge adulte, l’importance de la consommation semble être un facteur aggravant.

Une étude néo-zélandaise insiste sur les risques d’une consommation précoce avant 15 ans. Des études de suivi de cohortes britannique et hollandaise, en éliminant le plus de variables confondantes possible *(groupe social, ethnie, antécédents parentaux…)*, viennent appuyer l’hypothèse d’une corrélation entre consommation de cannabis à l’adolescence et développement d’une schizophrénie à l’âge adulte *(Arseneault, 2004)*.

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Le risque d’apparition de la schizophrénie et de psychose chez les fumeurs réguliers de cannabis est aujourd’hui le plus documenté, contrairement au risque de dépression qui lui n’a pas été confirmé. La variabilité et la difficulté du diagnostic de schizophrénie ont rendu l’interprétation des résultats scientifiques difficiles. Aujourd’hui, des études de prévalence de la schizophrénie réalisées en Finlande, au Danemark et aux États Unis montrent une augmentation récente du nombre de nouveau cas.

Il est clair que le risque dépend de la fragilité initiale de l’individu. Certains adolescents, pour des raisons que l’on ignore développeront une bouffée délirante spontanément résolutive à l’âge adulte. Dans ces situations, la consommation de cannabis les fera basculer dans un processus chronique et irréversible.

###Le risque de dépendance

La dépendance est une entité complexe qui dépend de facteurs biologiques, personnels et environnementaux. Le syndrome de sevrage, décrit au début des années 2000, a été confirmé par de nombreuses *(Levin et al., 2010)*. Il est caractérisé principalement par des troubles du sommeil, une irritabilité, une humeur dysphorique et un craving. Il est cependant loin d’être systématique chez tous les consommateurs chroniques.

D’autres facteurs favorisent la dépendance au cannabis comme :
* la précocité de la consommation est prédictive de dépendance ultérieure comme l’ont montré plusieurs études longitudinales *(Ehlers et al., 2010)* ;
* la pression des pairs, l’existence de difficultés scolaires et l’existence de comportements délinquants, *(Van den Bree et al., 2005)* ;
* l’existence de maltraitances ou d’abus sexuels dans l’enfance ;
* des facteurs sociaux et économiques ;
* les effets subjectifs positifs ressentis lors des premières prises *(« se sentir content », « se sentir relaxé », « rire »…)*.

La dépendance au cannabis n’est pas seulement due au produit, mais dépend aussi de facteurs personnels et environnementaux.

#Conclusion

Le cannabis occupe une place particulière parmi les substances psychoactives. Banalisé pour les uns, diabolisé pour les autres, il a fallu du temps pour évaluer sa dangerosité et la réponse à adopter. Si l’on s’interroge sur les notions de drogue, de poison et de médicament, il apparaît que toute substance pharmacologiquement active peut appartenir à plusieurs de ces catégories. Il n’y a pas de *« bons »* produits d’un côté et de *« mauvais »* produits de l’autre.

Pour le cannabis, il existerait une très grande variabilité individuelle, et le risque serait avant tout lié à l’âge. Ainsi, pour certains adolescents, le cannabis consommé de façon chronique va altérer leur parcours scolaire, familial, sanitaire et personnel, occasionnant une véritable perte de chance pour leur avenir, pour d’autres l’utilisant occasionnellement, les plus nombreux, il ne sera qu’un support d’expérimentation passagère.

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Yero homme
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Hello,

Quelques petites remarques sur ce texte, et des doutes donc du coup si vous avez des infos plus précises, je prends.

"Les feuilles et tiges de marihuana séchées forment une herbe" alors moi perso, c'est ce que je balance, je préfère les fleurs.

"Il n’a jamais été décrit de surdose mortelle"
"Chez le tout jeune enfant, l’ingestion accidentelle de cannabis peut entraîner la mort par overdose." du coup je sais pas trop quoi penser, même si je pencherais plus pour la première affirmation ?

"Si le risque d’accident sous l’emprise de l’alcool est multiplié par six, le risque sous cannabis a été estimé à 2. " c'est pas si sûr, je crois que c'est une étude en labo, mais dans le réel ça semble donner ça :
https://www.newsweed.fr/canada-legalisa … utomobile/

"Des techniques de génie génétique produisent des plants si riches en THC que des cristaux apparaissent à la surface des feuilles, les consommateurs les appellent cristal skunk. Ces cristaux peuvent ensuite être recueillis à froid pour former l’ice skunk" C'est quoi l'ice skunk, c'est pas juste du shit ? Et pis on obtient des fleurs bien chargées en trichomes sans passer par l'OGM non ?

Et sinon, j'écrase toujours un peu ma larme quand la vapo est absente de ce genre de publication, même si ça ne vise pas l'exhaustivité, c'est dommage de passer à coté, et notamment du micro dosage qui devient un truc important aussi.

Voilà. C'était pas que pour râler, merci du partage.

Bonne semaine

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