Je ne pense pas que le modèle du 
cannabis social club puisse être un modèle réaliste de régulation du 
cannabis en Suisse et cela pour plusieurs raisons:
D'abord, les membres du club devront être inscrits sur une liste de fumeur et beaucoup ne voudront pas y apparaÎtre (comme le relevait un article de la RTS du 11 novembre, pas besoin de conduire sous l'effet d'une substance psychoactive pour perdre son permis:http://www.rts.ch/…/7244931-perdre-son-permis-sans-conduire…).
En Suisse, le 
cannabis consommé est majoritairement cultivé localement et il est plutôt de bonne qualité. Il y a de grosses productions, mais il y a aussi une multitude de petits cultivateurs, de sorte que de nombreux fumeurs ont un ami cultivateur ou cultivent eux-même du 
cannabis pour leur usage personnel et en vendent éventuellement le surplus. En court, les usagers de 
cannabis suisses ont déjà  en très grande partie accès à  un 
cannabis de très bonne qualité et à  des prix raisonnables (souvent des prix d'amis). Alors pourquoi s'inscriraient-ils dans un 
cannabis club, pour avoir une quantité limitée de 
cannabis de moins bonne qualité, au même prix ou à  un prix supérieur que ce qu'ils ont l'habitude de trouver?
Ceux qui prétendent que si on régule le 
cannabis de manière à  n'autoriser que des variétés à  plus faible concentration en 
THC les gens s'y habitueront et cesseront de se fournir au marché noir prennent souvent comme exemple la fin de la prohibition de l'
alcool aux Etats-Unis. Ils remarquent très justement qu'avec la fin de la prohibition, on a pu réduire le taux d'
alcool des boissons alcoolisées (alcool à  90 ° ou 
alcool frelaté). C'est vrai, et ces produits étaient très dangereux, surtout l'
alcool frelaté qui pouvait contenir une grande part de méthanol. 
Cependant, d'une part, si les 
alcools à  90 ° ont été interdits à  la consommation et que le taux d'
alcool des boissons alcoolisées a tout de même été fortement réduit (autour de 45 °-50 °, mais on peut tout de même acheter de l'
alcool fin à  près de 90 ° en magasin, vendu pour fabriquer des liqueurs et autres préparations), on a pas interdit les 
alcools forts. On peut boire de la bière dès 16 ans et de l'
alcool fort dès 18 ans. La consommation d'un 
cannabis extrêmement riche en 
THC reste beaucoup moins risquée pour la santé de l'usager que celle d'
alcool. On pourrait donc très raisonnablement autoriser la vente de "foin" (cannabis à  faible teneur en 
THC) aux mineurs de 16 ans (dont certains auront déjà  commencé à  fumer 1 ou 2 ans auparavant et auront acheté leur 
cannabis au marché noir) et le 
cannabis à  forte teneur en 
THC aux personnes majeures.
Il faut ajouter que l'hystérie actuelle concernant les variétés "à  forte teneur en 
THC" qui seraient quelque chose de nouveau et de totalement différent que ce que fumaient les gens dans les années 1980 (par exemple) est largement infondée: n'oublions pas que dans les années 1980 on savait déjà  faire de l'huile (hash oil) très concentrée en 
THC et qu'il n'était pas exceptionnel d'en fumer. En plus, quand on fume du foin, on a tendance à  fumer beaucoup plus et des 
joints beaucoup plus gros, ou des bongs (ceux qui ont connu la "cannabioland" acquiesceront). Il y a quand même un risque, celui de favoriser le déclenchement d'une psychose chez certaines personnes plus sensibles que d'autres. C'est bien d'avoir aussi accès à  des variétés dont le ratio entre le taux de 
THC et le taux de 
CBD est équilibré car le 
CBD réduit les risques de psychose. Mais l'offre doit être complète.
La consommation excessive de 
THC comporte des risques, mais ces risques sont minimes à  côtés de ceux qui sont liés à  une consommation excessive d'
alcool qui peut mener à  la mort de l'usager, ce qui n'est pas le cas avec le 
cannabis même le plus concentré en 
THC.
On parle de mettre en oeuvre des politiques des drogues fondées non pas sur la morale mais sur des données tangibles. Mais d'une certaine manière, le 
cannabis social club est un vestige d'une morale dépassée selon laquelle tirer un profit du 
cannabis, c'est mal. Objectivement, au regard des risques respectifs de l'
alcool et du 
cannabis pour la santé de l'usager, le 
cannabis devrait être régulé moins sévèrement que l'
alcool. C'est de la pure logique. A mon avis, si l'on se fonde sur les données tangibles et pas sur la morale, c'est à  cette conclusion que l'on devrait arriver.
La production suisse existe déjà . Il y a des gros producteurs mais il y a aussi une myriade de petits producteurs. Les uns et les autres ne vont pas disparaÎtre si un 
cannabis social club apparaÎt, et encore moins si le 
cannabis que l'on peut s'y procurer est de moins bonne qualité (pour le fumeur). La production suisse n'est pas violente. Hormis le fait qu'ils pratiquent une activité illégale, on ne peut pas dire qu'il s'agisse de grands criminels. La solution la plus raisonnable si l'on veut réguler le marché du 
cannabis en Suisse, serait de leur permettre de pratiquer légalement leur activité en étant soumis à  certaines règles et en taxant leurs produits.
Je ne parle pas de libéralisme: je parle de soumettre les producteurs existants et les futurs vendeurs à  des règles (afficher la teneur en 
THC, 
CBD, fertilisants, etc., âges auxquels on peut se procurer le 
cannabis, obligation de mettre à  disposition du matériel de prévention et de 
réduction des risques, ...) et je parle aussi de taxer le 
cannabis et d'allouer une part égale de ces taxes à  chaque pilier de notre politique des drogues (actuellement, le pilier de la répression mobilise 70% du budget).
Certains défenseurs du modèle du 
cannabis social club ont dit regretter l'époque où il y avait des magasins qui vendaient du 
cannabis dans plusieurs villes suisses (fin des années 1990, début des années 2000) parce que maintenant il y a plus de 
cannabis vendu dans la rue et parfois par les mêmes personnes qui vendent de la 
coke ou autres substances psychoactives.
Le modèle des magasins fonctionnait donc relativement bien. Pourquoi ne pas le remettre en place, tout en l'affinant, en le régulant? Cela me semble être la solution la plus raisonnable. A mon avis, c'est très utopique de penser que le modèle du 
cannabis social club puisse être une RÉELLE alternative au marché noir.