Dépistage des stupéfiants en entreprise : une nouvelle obligation

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mikykeupon homme
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Yann Bisiou, maître de conférences en droit privé et sciences criminelles au sein du laboratoire CORHIS de l'université Paul Valéry Montpellier 3 revient sur la décision du Conseil d'Etat du 5 décpembre 2016 qui autorise les employeurs à  procéder eux-mêmes à  des tests salivaire. Il en décrypte les enjeux - de taille - pour les DRH.

C’est un cadeau empoisonné que le Conseil d’État vient de faire aux DRH en permettant, par une décision du 5 décembre 2016, les tests de dépistage des stupéfiants en entreprise.
Une simple faculté ou une obligation ?

D’abord cette faculté donnée aux entreprises a tout d’une injonction puisque le Conseil d’État vise l’obligation générale de sécurité de l’employeur. Sur ce fondement, la doctrine souligne que "le pouvoir de contrôle de l’employeur tend à  se transformer en obligation de contrôle" (1). Le Conseil d’État considérant maintenant que les tests ne portent pas une atteinte disproportionnée aux droits des personnes et aux libertés par rapport à  l’obligation de sécurité de l’employeur, les entreprises auront tout intérêt à  prévoir cette mesure dans leur règlement intérieur. C’est particulièrement le cas dans les secteurs où la prévalence de l’usage de stupéfiants est forte, comme le secteur de la construction et celui des services avec les activités récréatives, la restauration et l’hébergement (2).

Encore faut-il que l’entreprise formalise la procédure de test en commençant par définir les postes qui présentent un risque particulier. Les tests systématiques à  l’embauche, par exemple, sont considérés comme discriminatoires par le Comité Consultatif National d’Éthique (CCNE) (3). Seuls les emplois présentant un risque particulier justifient le dépistage, que ce soit en droit français ou devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme (4) ; le Conseil d’État ne revient pas sur cette appréciation.

Le dépistage doit donc être ciblé et là  une nouvelle difficulté apparaît. Faute de liste réglementaire, l’entreprise devra définir les postes concernés en associant le CHSCT qui peut demander la nomination d’un expert (5). La discussion risque d’être âpre d’autant que les injonctions sont contradictoires. Pour contourner les réserves du Conseil National de l’Ordre des médecins qui considérait que le médecin du travail n’avait pas à  pratiquer les tests (6) le Conseil d’État indique qu’il s’agit d’une mesure technique qui peut être réalisée par un supérieur hiérarchique astreint au secret professionnel. Une exigence difficilement compatible avec les recommandations du CCNE qui prévoient la présence d’un témoin !
Contre-expertise

Et le DRH n’est pas au bout de ses peines. En cas de résultat positif, le salarié est en droit d’exiger une contre-expertise à  la charge de l’entreprise. Surtout, le manque de fiabilité des tests, l’absence de lien entre le résultat et l’aptitude au travail ainsi que les incertitudes sur la plage de détection rendent l’appréciation des conséquences disciplinaires difficiles. Si la durée de détection ne dépasse pas 24 heures en général, certaines études évoquent des durées allant jusqu’à  une semaine (7). Le dépistage peut donc révéler une consommation qui n’affecte pas l’aptitude d’un salarié ou une consommation qui relève de la vie privée. Quelles seront, par exemple, les conséquences attachées à  un dépistage pour un salarié ayant pris un antalgique contenant de la codéine ou bénéficiant d’un traitement de substitution aux opiacés ? Comme le notait, non sans humour, le rapporteur public devant la cour administrative d’appel dans la même affaire, les consommateurs réguliers "seraient peut-être plus aptes sous emprise qu'en situation de manque... " (8). L’entreprise pourra certes, invoquer un "trouble objectif" justifiant un licenciement non disciplinaire, mais la procédure ne sera pas sans risque, les conduites addictives pouvant avoir un lien avec les conditions de travail.

La décision du Conseil d’Etat devrait donc inciter les DRH à  se saisir d’urgence du problème des conduites addictives dans l’entreprise. Les tests de dépistage pourront faire partie des mesures retenues, mais ils devraient s’inscrire, dans l’intérêt de l’entreprise comme dans celui des salariés, dans un cadre plus global de prévention des addictions aux drogues licites et illicites (9).

Sources : http://www.editions-legislatives.fr/con … 9employeur
(1) Lise Casaux Labrunée, Vie privée des salariés et vie de l’entreprise, Rev. Droit Social, 2012, p. 331.
(2) Christophe Palle, Synthèse de la revue de littérature sur les consommations de substances psychoactives en milieu professionnel, OFDT, Note 2015-05, oct. 2015, p. 4.
(3) Comité National Consultatif d’Éthique, avis n°15 du 16 octobre 1989.
(4) Jean Mouly et Jean-Pierre Marguénaud, L'alcool et la drogue dans les éprouvettes de la CEDH : vie privée du salarié et principe de proportionnalité, D. 2005, p. 36.
(5) Laurence Pécaut-Rivolier, CHSCT, Expertise. Dépistage de produits stupéfiants, sous Cass. Soc., 8 fév. 2012, Droit Social 2012, p. 431.
(6) Lettre du président de l’Ordre National des Médecins, 3 sept. 2012 ; CAA de Versailles, 12 avril 2016,  n° 14VE02796.
(7) Andà¥s HT1, Krabseth HM, Enger A, Marcussen BN, Haneborg AM, Christophersen AS, Vindenes V, à˜iestad EL., Detection time for THC in oral fluid after frequent cannabis smoking, Ther Drug Monit. 2014 Dec ; 36(6):808-14.
(8) Samuel Deliancourt, La question des tests salivaires imposés par l’employeur, RFDA 2016, p. 167.
(9) Christian Lenoir, Prévenir, au travail, les conduites addictives, Revue de droit du travail 2016, p. 318.

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Ratafa homme
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Inscrit le 13 Mar 2017
37 messages
Salut,

"Obliger" de parler un peut de moi pour répondre...

J ai était gérant d'une société dans le bâtiment pendant 15 ans et aussi formateur en chantier école en réinsertion.

Je connais bien le problème des "gars défoncés" sur le chantier et de plus j 'en faisait évidement parti...

Le problème est  la responsabilité pénal du dirigeant d'entreprise en cas d'accident grave ou de décès.

Ca a commencé il y a peux prêt il y a 7 ans avec le "document unique des préventions des risques"
On a du pondre un "cahier" en expliquant quelles étaient les risques a chaque poste de travail et évidement quelle moyen de sécurité on mettaient en place pour les contrer (facile pour les grosses structures, évidement plus difficile pour mes petites et moyennes qui représente la plus grosse partie des employeur de BTP). Ca n 'a pas était fait pour défendre le salarié, non non ça a était fait pour pouvoir mettre en cause l 'employeur afin de lui faire payer des indemnités et augmenter ces cotisations au différentes caisses. Dans le "fond" c'est très bien, ça a quand même fait baisser le taux d'accidents grave et de mortalité (ça reste le secteur d'activité ou il a le plus de décès);

Et depuis environs 3 ans ou "nous" a sensibilisé au problèmes des stupéfiants....sensibilisé pour moi non responsabilisé oui !!!Même topo mais avec le risque "défonce"

Pour faire simple, le responsable est sencé refusé l'accès a son poste de travail a un salarié "défoncé" (alcool cana etc ...).mais il est aussi interdit de le renvoyer chez lui dans cet état (si il a un accident sur la route du retour ça sera de la faute de l'employeur).Il faut qu'il reste dans les locaux jusqu'a c e qu'on vienne le chercher ou qu'il "redescende".Et évidement il doit avoir des "preuves" de "l'état" du salarié sinon procédure, prudhomme etc ....

Quand il y a un accident grave ou mortel la famille se retourne toujours contre l'employeur, si il y a alcool et ou drogue dans le sang on demande a l'employeur pourquoi il la laisser prendre son poste .

Trés trés difficile a gérer, d'un coté pas le "droit" de dépister et d'un autre responsabilité si pas fait!!

Il y a maintenant très souvent sur les gros chantiers( Eiffage Bouygues etc ...) des test salivaires "automatiques" fait évidement au faciès ...

Jamais encore rien vu en PME ou social ( chantier réinsertion etc ...) jusqu'au jour ou il y aura un bon procès avec jurisprudence.

Enfin pour dire que tous cela n 'est pas facile a gérer dans dans le "milieux" que je connais.
Je recherche les fiches support que j avais a ce sujet et je les posterais.

Ratafa

Je n ai pas a me faire de mal lorsque je souffre, a me punir lorsque j 'échoue.
Dans ces moments , je mérite au contraire attention et réconfort , comme tous les humains.

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prescripteur homme
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Oui, c'est le même débat que pour la conduite automobile.
Il y a les personnes qui veulent sanctionner la conduite sous emprise, donc avec des manifestations évoquant l'emprise, ce qui est logique. Pour l'alcool c'est "qui a conduit sous l''emprise d'une intoxication éthylique"

Malheureusement pour "la" drogue (sic) , le législateur s'est contenté d'un "qui a consommé".

La même "dynamique" a évidemment inspiré la législation du travail. Qui a consommé est "forcément" inapte. Et on ne se donne même pas la peine de définir l'inaptitude.
Or, les progrès de l'analyse font qu'on peut dépister une consommation des jours voire des mois après (cheveux).


Je pense que pour la conduite comme pour le travail , une piste de militantisme devrait etre de demander qu'on fasse d'abord la preuve de l'inaptitude AVANT de chercher à  l'expliquer.
A l'heure de l'électronique et des jeux vidéos, il serait très facile de concevoir, fabriquer et vendre à  bas prix (une console de jeux trafiquée ferait l'affaire) un dispositif permettant de mesurer la précision et la rapidité de la réponse gestuelle (des mesures répétées étant faciles à  réaliser), donnant donc une base objective à  la revendication "d'emprise", qu'elle soit alcoolique, liée à  des drogues illégales ou, ne l'oublions pas, liée au manque de sommeil, à  la prise de psychotropes légaux ou à  d'autres maladies.
Et il serait relativement facile de permettre à  chacun de réaliser le test (par exemple sur une appli de téléphone mobile) pour vérifier par exemple son aptitude à  conduire. Je pense même que c'est réalisable par des membres ou sympathisants de PA à  vertu de démonstration de faisabilité contre les pouvoirs publics.
voir une idée des tests (mais ça date d'une technologie ancienne !! des versions électroniques modernes pourraient etre conçues. Et évidemment il faudrait en selectionner quelques unes seulement pour une application sur le terrain)
http://www.f2smhstaps.ups-tlse.fr/tp/fi … 0-2011.pdf

L'important est que cela serait dans la doctrine PA, "quand on vous montre la drogue, regardez la personne", variante du classique "quand le sage montre la lune, l'idiot regarde le doigt".

Amicalement

S'il n'y a pas de solution, il n'y a pas de problème. Devise Shadok (et stoicienne)

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Ratafa homme
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37 messages
Salut,

Oui et non ..

Je suis entièrement d'accord avec toi et ok pour la "vabiliarité" mais avec une consommation a très faible dose et si les "dégâts" pouvant être engendrer ne concerne "que" le consommateur, chacun est "libre" de se mettre en danger a la limite. Mais lorsque que ca peut créer des "problèmes" a autruis que ce soit sur la route ou sur un chantier ( corporelle et ou décès de "l'autre" ) je suis beaucoup plus "timides". Y compris pour les psychotropes légaux.

Pour ma part c est du vécu, oui qui a consommé une ou des drogues légal ou non( au delà  d'une toute petite dose) est inapte et dangereux sur un chantier pour lui et les autres, et je pense la même chose pour la conduite.

Ratafa

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prescripteur homme
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Le problème c'est que les nouveaux modes d'analyse dépistent une consommation très longtemps après la prise.
Donc si on ne fait rien, de nombreux consommateurs risquent de se trouver condamnés, alors qu'ils ont totalement récupéré.
Mais ce que je propose n'est PAS de laisser conduire et/ou travailler des consommateurs inaptes mais de se fonder essentiellement sur leur inaptitude et pas sur leur consommation.
Amicalement.

S'il n'y a pas de solution, il n'y a pas de problème. Devise Shadok (et stoicienne)

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CoachMigui homme
Cyber TechnoChamane amateur
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Très bonne idée Prescripteur ! Ca serait plus logique que la législation actuelle, mais bon on sait que c'est pas la première priorité des legislateurs big_smile

Si tu médites et que le diable arrive, fais méditer le diable.
Gurdjieff

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Ratafa homme
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37 messages
Re,

J ai bien saisi Prescripteur, je sais bien que tu es la pour "faire du bien " et "nous" défendre et on n'a evidement pas a "payer" pour un produit encore présent dans les test et plus sur notre "comportement".

Mais je ne comprend pas :"mais de se fonder essentiellement sur leur inaptitude et pas sur leur consommation". Tu peut developer stp

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prescripteur homme
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Inscrit le 22 Feb 2008
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Bonjour,
Actuellement la législation sur consommation et conduite ne dit pas comme pour l'alcool "quiconque a conduit sous l'emprise d'un état alcoolique" mais quiconque conduit et a consommé des produits illicites".
Pour l'alcool il y a donc notion d'emprise (ce que j'appelle "inaptitude" due à  l'ivresse)  qui justifie la prévention ou même la répression. Alors que pour les produits illicites il n'y a que la consommation, donc il n'est pas nécessaire de montrer que la personne était dangereuse ou inapte à  conduire, le simple fait d'avoir consommé suffit à  condamner lourdement.

Au début de la répression de l'alcool au volant il y avait avec la prise de sang un examen médical à  remplir, pour apprécier les signes de l'ébriété. mais comme l'ébriété est assez bien corrélée à  l'alcoolémie cet examen est devenu mal rempli par beaucoup de médecins,  puis  considéré comme non fiable par la justice.
Mais pour le cannabis notamment et d'autres produits il n'existe pas de corrélation fiable  entre le taux sanguin et l'effet sur la personne. On aurait donc du re-introduire l'examen "d'ébriété". Mais en fait les députés (sous Sarko) ont préféré assimiler toute consommation de produits illégaux à  une inaptitude condamnable. En fait, le député à  l'origine de cette Loi inique a dit "de toutes façons ce sont des drogues illégales".

Pour le travail, malheureusement, on est en train de suivre la même voie, la simple preuve d'une consommation (récente ou moins récente) justifiant des sanctions pouvant aller jusqu'au licenciement.

En fait, sous couvert d'un souci légitime de sécurité en matière de conduite ou de poste à  risque on fait en fait la répression aveugle de toute consommation illégale. Ce qui est donc injuste.

Mais c'est aussi inefficace, en matière de sécurité, puisque l'inaptitude à  la conduite peut provenir de bien d'autres causes, manque de sommeil, gueule de bois, maladie, médicaments  etc..

Ma proposition est donc de mesurer plutot l'inaptitude présumée à  la conduite (ou au poste à  risque) selon des résultats à  des tests psychométriques "électroniques" simplifiés  et standardisés (l'équivalent sur smartphone ou sur console de' la marche sur la ligne blanche) et d'interdire la conduite ou le  poste à  risque si la personne a des indices psychométriques altérés, quelles qu'en soient les causes. Et de ne pas condamner des usagers de substances légales ou illégale qui, après consommation, ont pris le temps de revenir à  leur état normal d'aptitude avant de prendre le volant ou le travail.        Ce serait à  la  fois plus juste et plus efficace !!

Amicalement

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