Drogue: des opérations à un rythme inédit en région parisienne suscitent des tensions...
© AFP | 18.06.10 | 13h50
Près de 1.200 opérations de police ont été menées depuis le début de l'année, au rythme inédit de huit par jour, à Paris et en proche banlieue, dans une "guerre aux trafiquants" qui suscite des tensions et dont l'effet est encore difficile à cerner.
La préfecture de police de Paris (PP), chargée de la sécurité du Grand Paris (la capitale et la petite couronne) depuis septembre 2009, a annoncé début juin avoir mené 1186 opérations dans le cadre d'un "plan de lutte contre les stupéfiants" affiché comme une "priorité".
Des sources policières ont indiqué que ce "rythme soutenu" et "jamais atteint" obéit "à une volonté politique". Il pourrait se traduire par des manifestations de violences s'il perdure, ont fait valoir des policiers du renseignement citant des tensions dans certains quartiers "orchestrées par les trafiquants".
"Il y a un seuil et un prix à payer", a surenchéri un policier. Animé par la police judiciaire parisienne, ce plan est "pragmatique" et a "déstabilisé" les trafiquants, a déclaré à l'AFP le directeur de la PJ, Christian Flaesch. Même s'il est "tôt pour en tirer des conclusions, nous sommes sur la bonne voie", estime-t-il.
Le plan est né, selon lui, quand le préfet de police de Paris Michel Gaudin, un proche de Nicolas Sarkozy, en fonction depuis 2007, a relevé que les élus parisiens "ne lui parlaient que de drogue". Rassemblant l'ensemble de ses services, il a fait dresser la liste des points de fixation afin d'y harceler dealers et trafiquants, en misant sur les commissariats locaux. Des réunions ont lieu tous les mois et il est veillé à ce que les suspects arrêtés puis condamnés "exécutent leurs peines", selon M. Flaesch.
Le plan est ensuite étendu à la proche banlieue, relayé par les politiques, ministre de l'Intérieur en tête. Notamment à Tremblay-en-France, dans le "9-3", quand une vaste opération de drogue est lancée fin avril, le jour d'un reportage télévisé sur l'économie souterraine, déclenchant des violences. Un préfet de choc, Christian Lambert, envoyé en Seine-Saint-Denis par le chef de l'Etat, martèle le message: "la guerre est déclenchée contre les trafiquants, nous n'avons pas peur de nous faire caillasser".
Le plan, dit M. Flaesch, est un "travail en profondeur qui prend en compte le patrimoine des trafiquants". Preuve d'efficacité, selon lui : les guetteurs embauchés par les trafiquants "font monter les prix de leur rémunérations" car "c'est plus dangereux". Selon d'autres sources policières, le prix de la drogue a augmenté et des points de fixation ont disparu, notamment dans la capitale, "dérangeant les habitudes des clients". Sur le terrain, les réactions sont nuancées. Une source policière, dans les Hauts-de-Seine, indique que ces opérations "génèrent beaucoup de désordre" car "dans certaines cités le trafic de stupéfiants représente une véritable économie". "Les habitants nous remercient" mais "assécher complètement un deal est compliqué", selon cette source. "Ce qu'il faut, quand une opération anti-drogue a lieu, c'est rester présent sur le terrain. Il faut éteindre l'incendie, mais aussi les petites flammèches".
Un responsable associatif de Nanterre déplore la "médiatisation" de ces opérations "peu efficaces". Malgré un récent coup de filet, "le trafic continue", dit-il sous couvert de l'anonymat. "On voit cette activité policière mais cela ne change pas grand-chose", renchérit Stéphane Gatignon, maire (Verts) de Sevran, un des points noirs du trafic de drogue dans le 93. "Des groupes peuvent être déstabilisés mais globalement le trafic ne l'est pas" et, dit-il, il peut "y avoir des tensions" en raison de l'argent brassé.
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