Hello la communauté,
J’ai disparu des ondes radar pendant trois semaines. La raison ? J’ai poursuivi une cure « maison », sans drogue, (quasi) sans
alcool, évitant toute tentation en me mettant au vert. Même de ce forum – pourtant ma catharsis et une source de plaisir, d’information et même d’amitiés – je devais m’écarter, le temps d’aller mieux.
Faire une pause (puisqu’il n’a jamais été question d’arrêt définitif, chose encore inconcevable), c’était devenu vital. Ces 3 derniers mois, ma consommation de drogues avait explosé – notamment celle de
3-MMC. Enchainer deux jours sans
3-MMC, kéta ou
MXE relevait de l’exploit. La
3-MMC a beau être relativement douce (ainsi que ses effets néfastes, même quand on en abuse), cette petite salope avait fini par m’accrocher. J’en prenais dans tous les contextes : festif, sexe, pro, seul tout comme un rat mort devant BFM Business ou RMC. Qu’importe où se situait le soleil dans le ciel, je consommais. Le matin, l’aprem, le soir, plusieurs jours à la suite (jusqu’à 6 jours in a raw), etc. Cette surconsommation s’accompagnait également d’un usage de plus en plus fréquent et massif de
cannabis et d’etizolam nécessaires pour me calmer. Et je n’évoque pas les autres drogues comme la kéta, la
md et la
MXE que je prenais de façon quasi hebdomadaire, voire davantage encore.
Je maigrissais, je mentais, je paraissais. Surchargé de travail comme jamais je ne l’ai été auparavant, face à des responsabilités de plus en plus lourdes à assumer, rongé par l’envie de bien faire et la peur de l’échec, je ne croyais trouver mon salut que dans mes « échappées chimiques ». Certes, la
3-MMC est un carburant redoutablement efficace dans un contexte de travail effréné. Elle aide à se lever, donne de l’énergie, accroit la concentration et facilite le contact et les échanges, mais ça ne dure pas indéfiniment.
L’accoutumance est très rapide, et les doses toujours plus grandes pour des effets devenant presque neutres, à l’instar d’un stimulant strictement fonctionnel.
Certes aussi, les sensations de déprime les jours suivants sont bien plus supportables qu’avec de la
md, de la
méthylone, de la
méphédrone et même la
cocaïne, mais consommée presque tous les jours (entre 0,5 et 1g/j), elle affecte néanmoins les humeurs. D’un naturel plutôt jovial, cette drogue était en train de chambouler mon équilibre. Les jours sans, je ressentais de plein fouet cette déprime qui pourtant n’avait pas vraiment lieu d’être. Broyant du noir, je n’étais plus apte à rien sinon à fumer des
joints dans l’espoir que cela me redonne un petit peu de quiétude, ce qui bien sûr me donnait l’effet inverse.
D’un point de vu professionnel, la situation était alarmante, car étant mon propre chef, une journée où je ne suis pas dans le coup, c’est une journée perdue.
Vous m’avez peut-être vu écrire sur ce forum que j’étais un drogué heureux. C’était vrai et ça le reste aujourd’hui. Mais j’ai dépassé les bornes et la question devenait alors de savoir si je saurais être un non-drogué heureux.
A plusieurs reprises du haut de mes 27 ans et de mes 10 ans de conso, j’ai fait des pauses, le plus souvent courtes (1 à 2 semaines max, plusieurs mois sans
bédo). Les pauses sont très utiles non seulement pour faire le point sur sa dépendance, mais aussi pour recentrer sur ce qui est essentiel dans la vie : la famille, les amours, les amis, le travail…
Pour ce faire, j’employais toujours la même stratégie (payante pour moi) :
1ère phase : déconnexion totale, se sevrer radicalement dans un environnent qui ne m’est pas familier
2ème phase : continuité du
sevrage (si possible sous supervision d’une personne bienveillante), mais cette fois-ci dans une environnement connu (dans lequel on a eu habitude de consommer)
3ème phase : retour chez soi, dans son univers, face à ses tentations et tenir bon le plus longtemps possible.
Cela faisait déjà plusieurs semaines que le lumineux rouge du danger immédiat clignotait dans ma petite tête et que je me préparais à faire ce « quelque chose » qui allait enfin me permettre de remonter la pente. J’avais échafaudé plusieurs plans : la cure classique en maison spécialisée, prendre mon bâton de pèlerin et chausser mes quechua pour bouffer les bitume des jours durant, louer une baraque paumée dans la montagne et m’y cloitrer, prendre le maquis, etc.
Il y a quatre semaines, j’ai eu la chance de pouvoir me dégager une semaine de repos. Il me fallait saisir cette chance. Sur les conseils de ma mère (mon garde-fou, mon baromètre), je décidais de partir en retraite dans un monastère, celui-là même où j’avais passé deux semaines pour réviser avant les concours quand j’étais en classe prépa. Par chance, des chambres étaient encore disponibles. Un coup de téléphone le vendredi et j’étais accepté pour le lundi d’après.
J’avais trouvé la solution idéale pour ma phase 1. J’ai pris le train le dimanche soir, laissant à ma copine mon tel, mon ordi et ma
weed. Je n’avais pris avec moi que les livres de mon adolescence (ceux qui me font du bien), des stylos et du papier, mes runnings, 3
etizolam (pour mes 3 premières nuits) et 2 paquets de cloppes et plein de petites chaffouineries sucrées ;-). Ces 10 jours (car j’ai demandé à pouvoir resté 3 jours de plus) m’ont fait un bien fou. Me replonger dans la lecture, l’écriture, me « ré imprégner » de la noble mélodie des alexandrins de Corneille et leurs souffles épiques. Me replonger dans Maupassant, Zola, Camus, Zweig fut une renaissance pour moi. Réveil 6h45, petit dej avec les frères dont la sincère dévotion et l’humanisme décuplaient mon courage et forcaient mon admiration, 1H de jogging dans les bois, lecture, aide à la cuisine, au jardinage, au ménage, déjeuner frugal, lecture encore, puis de nouveau un jogging pour finir sur des discussions passionnantes à la lumière des cierges, encore de la lecture, telle était mon hygiène de vie.
Certes, les 2 premières nuits furent un peu agitées (c’est la manque du
bédo), mais au matin du 3ème jour, j’étais frais comme un gardon, motivé à bloc et enthousiaste. En somme, je renaissais. La veille de mon dernier jour, j’ai demandé à rester plus longtemps. M’ayant sans doute trouvé de bonne volonté, ils ont accepté de me garder jusqu’au mercredi et j’ai alors du commencer à piocher dans leur bibliothèque pour combler mes heures « perdues ». Plus encore qu’une aide au
sevrage, ces 10 jours m’ont permit de relativiser mon travail, faire une pause salvatrice et hiérarchiser mes impératifs à court/moyen terme.
C’est ensuite chez mes parents que je suis allé, en banlieue parisienne. Mêmes objectifs, mais cette fois-ci, j’avais le téléphone, internet et le souvenir tenace de mes mauvaises habitudes. Là encore, l’isolement, le sport et la lecture furent déterminants. 5 cig par jour, 10km de footing et du squash, telles étaient mes devenues mes drogues. La complicité bienveillante de ma mère et de mon petit frère fut également décisive.
Le lundi suivant (soit 14 jours après mon arrêt total), une autre opportunité de changer d’air allait m’aider à grignoter quelques jours de sobriété supplémentaire : un voyage professionnel à Moscou de 4 jours. Dépaysement et choc des cultures garantis dans cette mégalopole où l’on ne peut s’empêcher à chaque coin de rue de songer au passé. De mémoire de moscovite, il n’avait jamais fait aussi beau un début du mois de mars… 10°C, une température optimale.
Pour la première fois depuis des années, je n’avais rien pris avec moi dans l’avion. Nulle crainte non plus de se voir céder aux proposition d’un dealer de rue, car je n’en ai pas vu un seul. Le
cannabis n’est pas vraiment populaire dans ces contrées lointaines. A propos, je n’ai pas vu de désomorphine non plus.
Okay, le soir, j’enquillais shots de vodka Beluga, mais pas de drogues.
Je suis rentré samedi dernier à Paris. J’étais effrayé à l’idée de sortir et de revoir mes amis, car je savais que ça impliquerait que j’y retouche. Ma crainte était fondée : une fois avec mes amis, ma volonté n’a pas duré 20 min.
3-MMC pour commencer la soirée,
MDMA une fois en club,
kétamine en after, le tout accompagné de pléthore de
joints. Au moment de rentrer chez moi, j’ai pécho un 20 balles de
weed pour m’aider à mieux rouiller mes films et séries du dimanche. Comme le disait un frère quand j’étais au monastère, « ite missa est » (la messe est dite) j’avais retrouvé mes mauvaises habitudes.
Depuis, je pense avoir déjà repris mon rythme de croisière niveau
bédo. Je n’ai pas commandé de
3-MMC, je bénéficie donc encore d’un petit sursis. Pire encore, j’ai reçu avant-hier 250mL de
GBL (un achat compulsif qui datait de 3 semaines, quand fonsdé H24 à la
3-MMC, je me disais qu’un bon vieux coup de
GBL valait mieux que 3
etizolam et 10€ de
weed). Je n’y ai pas encore touché, mais l’envie me démange.
Voilà ce que je voulais partager avec vous. Je suis de retour parmi vous, je vais mieux, je tiens bon, j’espère flancher le plus tard possible et même si je devais rechuter, je ferais tout pour limiter la casse, rester un drogué heureux, libre de se camer mais pas prisonnier de la drogue.
L’Alchimiste