Peut-on réduire les risques liés à la consommation de cannabis ?Publié le 17 mars 2017Source : Englund A. Can we make
cannabis safer? The Lancet 2017
Malgré les lois prohibitives sur la possession et la consommation de
cannabis mises en place dans les années soixante, la consommation de
cannabis a augmenté dans la plupart des régions du monde, suggérant que les lois n’ont que peu ou pas d’effet sur la consommation et l’abus de
cannabis. Un certain nombre de pays commencent à libéraliser la législation sur le
cannabis, soit en légalisant la vente de
cannabis pour un usage récréatif soit en réduisant ou en abrogeant les sanctions pour la possession ou l’usage de
cannabis.
Il est peu probable que ces changements en vue de la
légalisation du
cannabis à usage médical ou récréatif diminuent le nombre de consommateurs de
cannabis. Cependant ces mesures pourraient faciliter la mise en place d’une politique de
réduction des risques liés à la consommation de
cannabis.
Le
cannabis est composé de nombreux cannabinoïdes dont les deux plus abondant sont le δ-9-tétrahydrocannabinol (THC) et le
cannabidiol (souvent connu sous le nom de
CBD). Le
THC et le
CBD sont produit par la plante dans différentes proportions à partir du même précurseur le cannabigerol. Au cours des quatre dernières décennies, la puissance du
cannabis (qui correspond au pourcentage de
THC) a en moyenne doublé dans le monde alors que les concentrations de
CBD sont restées faibles ou absentes de la plupart des préparations de
cannabis.
Il devient essentiel, devant les changements de législation du
cannabis, que les chercheurs, les cliniciens et les responsables politiques explorent de nouveaux moyens pour réduire les risques liés au
cannabis.
Premièrement, il est nécessaire de mettre l’accent sur la consommation conjointe de
tabac et de
cannabis et des effets nocifs qu’elle entraine, en particulier en Europe où le
cannabis est fréquemment fumé avec du
tabac. L’utilisation d’autres moyens de consommation, tel qu’un
vaporisateur, pourrait permettre de réduire la consommation de
tabac ainsi que les effets nocifs de la combustion.
Deuxièmement, il est nécessaire de mieux comprendre les dommages causés par les différentes variétés de
cannabis ayant des puissances de
THC différentes. Certains pays ont mis en place une réglementation avec une concentration maximum de
THC autorisé à 15 %. Cela pourrait être bénéfique, cependant cette réglementation n’est pas fondée sur une connaissance scientifique des risques posés par des puissances de
THC supérieures à cette limite. La taxation basée sur la teneur en
THC peut être une approche alternative pour réduire l’usage des formes les plus puissantes de
cannabis, bien que des études soient nécessaires pour évaluer son effet. De nouvelles études sont nécessaires pour aider les chercheurs à calculer les doses cumulées d’exposition aux cannabinoïdes et ainsi estimer de façon plus précise les dommages liés à la consommation de
cannabis. De plus ces informations pourraient contribuer à la mise en place de lignes directrices sur l’utilisation du
cannabis, comme cela a été fait pour l’alcool.
Pour terminer, et peut être le plus important, une meilleure connaissance du ratio
THC /
CBD est nécessaire. Les données disponibles suggèrent que le
CBD a un effet protecteur contre bon nombre des effets nocifs du
THC, bien que la dose relative de
CBD nécessaire pour compenser les effets négatifs du
THC soit inconnue. L’établissement d’un rapport
CBD /
THC « sûr » pourrait être utilisé comme stratégie de
réduction des risques. De plus, le
CBD ne semble pas altérer l’effet recherché ou plaisant du
THC, ce qui est important car toute tentative de réduire les effets nocifs du
cannabis serait très probablement inefficace si elle réduisait l’effet plaisant du
cannabis.
Avec l’évolution rapide de la législation concernant le
cannabis, la demande de
réduction des risques liés au
cannabis n’a jamais été aussi grande, et il devient urgent de faire de nouvelles études (expérimentales et observationnelles) pour éclairer les décisions politiques.
Dr Aude FLORENT
Source :
http://www.addictauvergne.fr/reduire-risques-cannabis/