Maître Caballero porte la procédure devant la Cour de cassationmercredi 12.01.2011, 14:00
© | Antoine Da Silva |
http://www.lavenirdelartois.fr/actualit … 7727.shtmlLe gérant de la société Noza distribution, Stephen Chojnacki, se présentait une deuxième fois devant les juges après un premier renvoi en date du 27 juillet.
La semaine dernière, il n'aura pas su encore une fois si lui et sa société seront condamnés pour provocation à l'usage illicite ou au trafic de stupéfiant. Il est reproché à ce trentenaire et à Noza distribution d'avoir mis en vente divers produits à l'usage ambigu et sur lesquels figuraient une feuille de
cannabis. Aujourd'hui, on ne traitera pas le fond du dossier. Les avocats du prévenu, maîtres Squillaci et Caballero, vont attaquer la procédure.
Francis Caballero est un véritable cauchemar pour tous les parquets de France. Cet ancien professeur de droit de l'université Paris X est également président du Mouvement de
légalisation contrôlée de la drogue. Un ponte dans le milieu judiciaire, et la star du barreau va viser juste et soulever deux questions prioritaires de constitutionnalité.
Un problème de définition :
La première s'attaque aux termes utilisés lors de la prévention. Pour l'avocat parisien, citant une jurisprudence, « le conseil constitutionnel exige que le législateur définisse les incriminations pénales en des termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire ».
La définition de stupéfiant poserait problème. Il cite son ouvrage le Droit de la drogue : « il n'existe aucune définition légale susceptible de guider l'autorité administrative ». Il reproche au législateur de ne pas avoir précisé, par un texte de loi, les effets de ces stupéfiants. « Leurs effets sont très variables, autant dire que présenter des substances comme ayant les mêmes effets que les stupéfiants ne veut strictement rien dire. » Il demande au tribunal de saisir la Cour de cassation de la question prioritaire suivante : « Les articles du Code de santé publique en ce qu'ils ne définissent pas la notion de stupéfiants sont-ils conformes à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 qui exigent que la loi détermine les crimes et délits qui leur sont applicables en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire ? »
Atteinte à la liberté d'expression ?
La deuxième attaque concerne « la présentation sous un jour favorable des plantes classées comme stupéfiants ». L'avocat parisien et son confrère lillois s'interrogent sur cette notion qui porterait une attente « non nécessaire et disproportionnée » à la liberté d'expression et de communication. « La présentation favorable de stupéfiants, on peut y mettre tout et n'importe quoi » s'emporte Francis Caballero. Il cite pêle-mêle la série télévisée
Weeds mettant en scène une mère de famille cultivatrice et dealeuse de
cannabis, des couvertures de magazine présentant des dossiers favorables à une
dépénalisation, des jaquettes de CD, le blason d'une commune ayant vécu du chanvre... « La feuille n'encourage pas, elle est esthétique, elle fait vendre » plaide l'avocat de la société incriminé.
Afin de laisser la Cour de cassation étudier ses deux questions, le tribunal d'Arras a décidé de renvoyer l'affaire au 7 juin prochain.
Antoine DA SILVA