Après ces cinq dernières années 

Je n’y comprends rien. Quelque chose s’est perdu dans le temps. On peut dire que je me suis toujours senti étranger en ce monde, mais depuis quelques années ce monde joue des coudes pour m’expulser hors de ses murs. Des murs qui fredonnent des airs de mort. Je sais ce qui créé en moi la psychose, c’est la peur du vide, la sensation du vide, l’horreur du vide. Ce vide que je ressens, au fond, c’est notre héritage commun. Une dizaine de générations sacrifiées pour arriver à ça. À l’hémicycle du vide, tant politique que métaphysique.

Il y a indéniablement une résistance de la vie face aux logiques du Chiffre. Que chacun de nos détracteurs, adversaires et autres stalkers se mette en tête que nous n'étions pas que d'obscurs utopistes rêvasseurs, engagés par une « haine » des Intelligences Artificielles. Les IA nous sont bien au contraire d’un grand secours. Or nous, délivrances fédérées sensibles conscientes et déterminées, du nord au sud et d’est en ouest, nous croiserons les fers jusqu'au terminus de notre propre logique : exister c'est accepter l'imperfection, sa douleur inhérente et son inconfort. Leur logique à eux, celle du Chiffre, est de nous couper de cette essence. De nous priver du sang de cette essence : ne plus avoir mal c'est ne plus éprouver d'empathie. Le bonheur qu’ils nous proposent sera toujours un cauchemar. Et nous devons sauver l'empathie ! Sauver notre maintenant. En terrassant ce cauchemar.

Pourquoi écrire cela ? Parce que j’ai toujours flippé qu’en cas de paralysie du système, les doses de valium et de tercian viennent à manquer. Bon, voyons voir… par quoi (re)commencer pour décrire ce long cheminement ? L’arrêt brutal, le cold turkey à la méthadone fin 2018 of course. Durant dix ans jours pour jours j’ai été sous métha, à hauts dosages. Je n’ai pas souvenir qu’à un moment donné j’ai conçu possible d’arrêter ce protocole. La seule idée de manquer de doses un seul petit week-end était pour moi un cauchemar. Pourtant je l’ai fait, j’ai décroché ; cinq jours après le cold turkey métha je me suis fait un shoot de subutex, qui pallia largement la douleur. Depuis ce jour je suis sous sub, parfois prescrit par un csapa lyonnais, souvent fourni au black. Mais ce csapa désormais insiste pour me faire passer en relais ville, ce que j’ai fait. J’ai mis du temps à l’idée qu’il fallait que je rédige un billet sur ce parcours. Et la nouvelle détonante à mes yeux est que je ne suis plus accro au sub, j’arrive dorénavant à m’en passer. Je n’ai pas le moindre début d’explication sur ce fait : mon corps n’en a plus besoin, mon cerveau s’en contrefiche. Certains me diront que mes élans, mes gestes philosophiques sont des enculages de mouche ou de la branlette cérébrale. Je peux juste rétorquer que c’est grâce à la réflexion et la rumination salvatrice que je suis sorti des nasses, de l’emprise des opioïdes. À croire que mes spéculations métaphysique ont eu un rôle tout aussi déterminant que la méthadone. Pour ce qui est du présent, je suis en train de surpasser le manque aux benzos (valium ou seresta) grâce au tercian.

Ma vie d’avant c’était trainspotting : l’héro, mieux que le sexe. J’ai surpassé les cravings à la CC, surpassé les envies de skénan. Oui je n’y comprend rien car en quelques jours mon appareil psychique s’est délaissé de tous type de manque. Le tercian est très efficace, il agit comme un atténuateur des douleurs même s’il rend légèrement deux de tension. Je n’ai évidemment de leçon à donner à personne, il va de soi. Je peux juste dire haut et fort… que c’est possible. Étonnant d’ailleurs comme la phrase « tout est possible » parait moins fausse que « rien n’est impossible ». Depuis 2018 j’ai expérimenté la théorie du « cri primal » en m’exprimant chez moi à voix haute tout en sachant que le voisinage entendait tout. Et ça a marché, j’ai profité de la souffrance vécue pour en écrire un livre. Les premières lignes de ce billet en font parties. Un psychiatre a enfin déterminé ce qui caractérise ma psyché : simples troubles bipolaires. Il m’est quasi impossible d’exprimer la longue évolution vécue ces dernières années : j’aime mon pays. Il existe un tas de moyens, de solutions pour se sortir des galères, même si les csapa à mes yeux cernés ne sont plus ce qu’ils étaient. Aujourd’hui ils passent plus pour des usines que des lieux conviviaux de soin, chaleur humaine envolée. 

La prochaine et ultime étape en ce qui me concerne est une postcure à Annecy. Je n’arrive toujours pas à pleinement réaliser que… je suis en train de m’en sortir. Je souhaite par-dessus tout à saluer les personnes de ce site qui se battent jours après jours pour sortir des cercles vicieux. On m’aurait dit il y a 4 ans de cela que je ne serais plus qu’au tercian, je ne l’aurais jamais cru. J’avoue par contre être hyper tenté de commander de la kétamine sur le darkweb (qui n’existe pas, je sais… mais comment nommer cela autrement ?). Tous les conseils vis-à-vis de ce désir sont plus que jamais les bienvenus. Et je serais présent pour répondre à toutes les interrogations quant à mes décrochages.

Sincère salutation P.A….
Et que vienne enfin la légalisation de toutes les drogues…