J’habitais à Pantin (93) et achetais dans mon quartier. Sur les murs des cages d’escalier où j’attendais (une minute) ma poudre, on lisait «Hoche nique la Courti».
Rivalités de cités.
Hoche, c’est pour la station de métro de la ligne 5, auch de hoche…
Cette cité surplombe le Leclerc, et les jeunes traînent dans la rue du Pré St Gervais, ou j’habitais.
Dans cette rue, on vend surtout du
shit, enfin, à cet endroit.
Cages d’escalier, ou dans les cabines des taxi-phones sri-lankais. Ils les envoyaient chier, quand ils osaient protester, combien de fois j’y ai sniffé un trait, «désolé ça répond pas».
Les Indiens ont débarqué et raflé tous les commerces. Jalousie des locaux, de la troisième génération, devant ces nouveaux entrepreneurs.
Un jour, à midi, je marche sur le trottoir face à l’épicerie, quand deux jeunes, cassent la vitre du SUV du patron, et s’emparent de la caisse (pas la voiture, la recette). Ils partent en courant, dans les parkings sous-terrain de la résidence HLM. Le proprio les course, et moi aussi, bêtement.
Si j’avais fait quoi que ce soit, je l’aurais payé. Les «guendous» (sic) de Ceylan ont manifesté contre une insécurité, qu’ils sont les seuls à subir.
Et c’est pas terrible là-bas, je me suis fait avoir par de faux dealers, qui me connaissent, et arrangé parfois par le frère de celui qui m’avait arnaqué!
Quand tu es du coin, on te repère, et si tu prends de la
coke, encore plus. Il n’y en a pas beaucoup, le vendeur vient avec des dizaines de grammes, et le détaillant sert les clients.
Un jour, une équipe s’est mise à venir chercher les acheteurs, pour les amener à la cité d’en face. Et, depuis, c’est là que ça se passe.
C’était bien fait, une grille sépare clients et vendeurs. De la bonne
beuh, c’était leur produit d’appel.
Quand la
coke est arrivée, cela ne se passait pas dans la rue. Les mecs, quand mon fournisseur arrêtait (il y a eu des footballers dealers et tout ce qu’on peut imaginer, des mecs qui veulent se payer une caisse, leur conso, ou de vrais pro), un autre se présentait à moi directement. Oui, «je peux te faire des bons prix», après les carottes, et faux plans, j’ai eu droit à un prix, le même que le vendeur d’avant. Ils savaient que je ne prenais pas que le samedi soir…Me livraient des chromes de 5g, en yoyo, à l’hosto!
Je ne payais pas le prix des mecs du 16 (70-90) mais 50, et surtout, j’ai eu la possibilité de me faire avancer». 2000E, mais au détail, on ne peut tout avoir. J’aurais pu ne jamais rembourser, mais je suis trop «parole donnée».
Alors qu’eux n’hésitent pas à me servir super bien 10 fois et me la faire à l’envers après. La dernière fois que j’ai vu, par hasard (tu parles) ce Rédouane, fort sympathique, je lui dis bonjour, ça fait longtemps, des cadavres ont coulé dans le canal, en trois ans…
Je demande s’il est toujours dans le biz. Il faisait travailler des mômes, qui n’y connaissaient rien. Mais ponctuels et polis. Un jour son petit (c’est comme ça qu’on dit : "j’t’envoie mon p’tit" n’avait rien, et il a tenté de faire ça tout seul, s’est fait refiler de la 100% plâtre, et je n’ai pas vérifié, si la qualité variait c’en était, d’habitude. D’où le fait de ne pas commander au livreur, mais au dispatcheur. Une voiture, puis deux etc...Quand on a des clients ça va très vite.
Beaucoup ne se font jamais sauter.
Là il est seul, rien sur lui. Je lui demande un gramme, un vrai, et il part trente secondes. Je lui fais confiance, il demande les sous. Là je lui rappelle qu’il me doit deux cents euros (compensés cependant par les cadeaux d’avant) et que je vais partir sans payer. Il est d’accord, et croit pouvoir se réjouir. Le meilleur client, qui a payé ma golf est revenu. Mais non.
Par contre la qualité était beaucoup mieux, j’en fus étonné et je n’ai même pas tout consommé. Ca mettais dans un état fébrile, et euphorique, à condition de ne pas être dans un RER bondé.
Mon frère, lui, vit à Aubervilliers, quartier Casanova, de l’autre côté du cimetière parisien de Pantin (énorme), une zone industrielle et puis la frontière avec Pantin. En marge de la commune, toujours à Pantin, mais face à Auber’, se trouve la
Courtilière.
Un quartier à l’allure futuriste du passé. Architecture originale, et pourtant, squatté, parfois, par un plan.
Les plans vont et viennent, s’ouvrent et se ferment.
Au départ il n’y avait que des minots vendant, dehors, près de la poste (il y a tout pas loin), du
shit.
Et un plan a été mis en place, sûrement après la fin d’un autre.
La première fois que j’y viens, je demande à un dealer de
shit pour de la
coke. Il m’envoie au bâtiment C.
J’entre dans la cité en voiture, il y a des blocs de béton, et tout ce qui peut empêcher, ou ralentir la police.
Outre les gosses qui guettent, c’est au portier et surtout au «physionomiste» que l’on reconnaît le hall.
Quand il te connaissent ils te laissent passer, et le portier, qui te voit à travers la vitre, ouvre.
En suite on est guidé, et près des ascenseurs, avec les résidents qui passent. Les gars sont masqués, cagoulés. Mais je les reconnais.
Et je suis tombé sur le moment «formation». Un homme de mon age, le boss, briefe ses charbonneurs (j’ai jamais entendu ce mot autre part que chez les caves, les rappeurs et les vantards, mais c’est moi qui connaît mal…je dis «travailler»).
Il leur explique la distance et le positionnement, assez loin du client et le soce assez prêt pour intervenir. Mais ce sont deux poids plume, qui volent avec une claque. On s’en fout, c’est pas la guerre, mais du commerce. Illégal, donc faut pas traîner. Le chef leur dit comment faire vite, tout en étant pas agressif. Mais commercial.
Comme c’est le début, il n’y a pas assez de clients. A chaque nouveau client amené je touche 20e de
beuh.
Un soir, justement, le plan commence à 17-18 heures, pas du tout mes horaires. Moi, c’est le matin, début d’après midi. Le soir c’est rare, donc il vaut mieux connaître son quartier, plutôt que d’aller loin, chargé.
Mon pote et moi allons là-bas, il trouve ça malsain avec les cagoules, il ne fait que par téléphone.
Je prends «de la bonne
coke» selon lui. J’en mets trop, tout, OD, arrêt cardiaque m’a dit celui qui m’a sauvé la vie. Parfois je regrette de ne pas être mort ce jour-là. L’OD était très douloureuse, un cauchemar. Et la suite, un cauchemar dont on ne sort que pour se réveiller, dans un autre mauvais rêve.
La
coke était coupée, très forte, mais avec un goût, dans la tête, c’est dur à décrire.
Quand j’avais une autre poudre, je m’abstenais pour celle-ci. Plus un plan est rapide, plus je suis tenté et moins regardant.
Un fix, maintenant!
En suite, il y a les mecs qui te voient arriver en avance, et te proposent. Mais c’est aléatoire.
Je nettoyais ma voiture sur le parking de la cité, entre deux mécaniciens au black (il y en a partout dans le 93), et ceux qui, comme moi, vivent dans leur voiture.
Je me retrouve à discuter avec un autre quadra, habitant.
Très sympa, vif, il m’explique (sans que n’aborde ce sujet) comment fonctionne un plan (je n’ai pas abordé le sujet, ni de prêt, ni de loin, curieux).
Que ça se loue, se vend. Qu’en partant en vacances on peur toucher des milliers d’euros (soi disant 50 000 par jour, même en CA j’y crois pas, pas là).
Mais au fur et à mesure qu’il parle, je me rend compte que c’est lui
le gros boss!
Il ressemble à Rédouane Faïd.
Un type charmant. En partant je me fais arrêter par la BAC.
Ca doit avoir un lien avec le malin..
Je donne direct la
beuh que je garde pour ça. Coopératif le gars!
Puis, je ne cache pas le stéri, mais il y a plein de blanc sur ma cuillère.
Et là, le préjugé me sauve, «c’est du sub’», ce n’est pas une vraie question, mais je dis oui!
Le keuf est fier de son analyse, expert d’Auber’. Le contredire, c’est le faire passer pour un con devant les collègues et c’est pas bon. Un flic a toujours raison, c’est à toi de le guider, pour que cette raison, ne porte sur pas ce que tu veux cacher. Si tu dis rien ils vont chercher.
Les pompiers et policiers sont encore nombreux à ne pas savoir qu’on injecte la C et que c’est aussi dangereux que l’héro. Avec laquelle je n’ai jamais fait d’OD.
Ils m’embarquent et me passent les menottes (pour 4g de
beuh). Arrivés au comico, ils m’attachent au banc. Ils vont me fouiller, et j’ai quatre grammes de poudre dans le slip et les chaussures…Et plus dans la voiture.
Ca fait la troisième fois, au moins, que je parle de commissariat sur le blog...Prohibition.
Ils reviennent et disent «tu seras convoqué». Comme j’ai été coopératif, on me reconduit à mon véhicule. Alors que d’autres ont un test de stup’ et les conséquences, je reprends la route.
Je leur demande pourquoi moi, et pas les dealers?
«On a pas le temps, quand on arrive ils le savent» (surtout avec les ralentisseurs et guetteurs), donc ils s’en prennent à la clientèle, je ne venais même pas pécho ce coup-ci.
Les mecs finissent par donner leur numéro, et prendre le tien. C’est trop, car je dois demander à chaque appel, de que quartier il est. Steve? D'où, Pantin, Aulnay quelle cité?
Ce plan là, était donc un terrain de
cannabis et de
cocaïne. Pas d’héroïne, pour ça il fallait voir avec Lanimal, un bon dealer d’Aubervilliers. On ne vend plus comme avant, à Jules Vallès, par un trou dans le mur, les clients sont mal vus. Les regards hostiles des jeunes, prouvent que la minorité n’est pas représentative de la cité. Et de loin.
Donc on est discret. Parfois une nouvelle équipe (là ce sont des darons) s’installe. Mais les autres finissent par te rencontrer à l’extérieur, dans un parc. Par contre, la qualité a failli me tuer...C’est la seule
héroïne qui me faisait, encore, décoller
C’est le seul endroit où je trouvais de la blanche. Je sais que certains n’ont consommé que ça. A Paris récemment, mais certains préfèrent la marron, plus
speed,
caféine. Je n’ai connu ça qu’à la fin (à part à Barcelone).
Je suis repassé à la Courtillière, plus rien. Jules Vallès, sans contact, tu peux attendre longtemps.
Les courtilières. Carrefour, ce terrain est bien placé, et je suis sûr que cela va, a déjà, recommencé.
L’appel des billets. Si j’étais à leur place, je ferais pareil.
Pour finir, le quartier ne mérite pas la réputation, sulfureuse et stigmatisante, qu’on lui attribue.
On peut certainement, avec les mêmes lieux, raconter cent histoires différentes.
Non loin de là, se trouve le Centre thérapeutique Résidentiel (CTR) d’Aubervilliers.
Sur ce sujet, le moins qu’on puisse dire, est qu’il y a dichotomie!
Je n’oublie pas Bois l’Abbé, en cours. Je ne me rappelle jamais comment on met la photo avec le titre! C'est bête, on le voit pas le billet. Enfin si vous êtes là, c'est déjà ça!