No more tears on my face 

Hey

Peut-être ai-je été toutes ces années trop abstrait, hermétique, parfois très (trop) solennel, parfois véritable bouffon ingénu, enfermé dans ma bulle de sons et d’images : grâce soit rendue aux drogues psychédéliques de tous types : ce sont précisément grâce à elles que je ne suis pas, que ne serais jamais quelqu’un de manipulable, la puissance de l’esprit, frères et sœurs ! L’esprit est grand ! Cette puissance qui peut basculer dans les croyances les plus WTF, mais qui par le biais d’une magie fait comprendre que NON : « c’est ton cerveau man, c’est ton cerveau qui peut te leurrer… n’ai confiance qu’en tes sens et laisse cette magie s’opérer d’elle-même. Le monde est une forêt vierge qu’il s’agit d’explorer, il n’y a rien à croire, aucune persuasion possible, rien auquel s’identifier, il n’y a juste qu’à IMAGINER. »

Mais ce sont des abstractions que moi-même je n’ai jamais réussi ni à saisir ni à réellement comprendre. Je montais dans les tours pour déverser des dialogues avec moi-même, je postais des ziques non-stop, estimant que la mélodie explique/exprime bien mieux que les mots, ce qui bouillonnait en moi : un volcan dans mes veines, un esprit torrentiel... Que le mauvais sort m’épargne : je crois ces derniers mois que ce torrent est en train de m’emporter. Je n’ai jamais compris les psys qui ne supportaient pas que je parle des enjeux politiques de notre temps présent : bien qu’ils savaient très bien que "nous sommes façonnés" par les technostructures et les politiques menées. J’étais censé parler « de moi », de mes souvenirs, de mes traumas, de mes fantasmes, de mon rapport hyper complexe avec les drogues, mais j’ai toujours dévié le sujet, mon sujet, mon « moi » par des critiques acerbes envers le monde qui m’entourait. J’ai pourtant toujours affirmé que je ne « comprends rien et que je n’y comprendrais jamais rien », PIRE : que je ne sais pas que je ne sais pas, que ce que je croyais connaitre et savoir s’est souvent révélé faux et que je n’ai jamais eu besoin de quelqu’un pour me le faire remarquer. Je n’avais pas à me déconstruire, car j’ai la ferme intuition que ne me suis jamais réellement « construit » en tant que « sujet ». Ma chute a commencée au collège : je n’y voyais qu’un enclos auquel il fallait s’échapper. Je voulais apprendre et comprendre le monde par moi-même, sans sbires de l’état (je ne parle pas là des profs...) pour me contraindre à retenir des leçons dont je n'avais pas, en ces heures précises, réellement besoin. « Le temple du savoir » ? Rajoutons : « le temple du savoir "programmé" ». Pauvre petit anarchiste individualiste, qu’espérais-tu vivre par la suite ? P’tit garçon indocile… rebelle à trois-sous, vas-tu te transformer en âne ?

J’ai presque toujours été dans l’erreur, incapable de louvoyer dans les vagues du post-post-modernisme et du techno-féodalisme naissant. En tant qu’hétéro cisgenre, blanc et gauchiste convaincu - et qu’il vienne ! « Le temps dont on s’éprenne » ! - (De gauche depuis toujours : ayant été élevé dans un milieu pavillonnaire hyper réac, mes frères et moi nous nous sommes évidemment révolté contre cela : équation logique, une famille athée peut voir ses rejetons évoluer dans une sphère religieuse, une famille religieuse peut souvent voir ses rejetons évoluer dans une sphère athéiste), et je le dis : j’aime cette époque, car j’abhorre le passé, mon passé, tout le passé : ouais ok il y a au compteur une bonne centaine de regrets et presque autant de remords, mais cette révolution silencieuse qui se déroule sous nos yeux, cette révolution des minorités qui baisse le froc des « dominants », des « dominateurs », des complexés en mal de célébrité - disons-le - des hypocrites patentés dissimulant au mieux leurs jeux suspects, fait face à une contre-révolution hyper violente, un ressac réactionnaire qui en d’autres temps, a évidemment toujours existé, mais a inéluctablement toujours échoué. Ils-elles espèrent établir une restauration du vieux monde, mais si l’Histoire a un sens et se révèle en boussole claire et concise, ces mules de réacs en rûte failliront : l’Histoire ne retient pas l’aura des bourreaux, elle ne retient en mémoire que les résistants qui affluent pour achever le vieux monde aux abois, qui refuse de mettre ses deux pieds dans la tombe.

Dans cette révolution silencieuse j’y inclue l’autosupport des P.U.D. Le mot révolution est-il trop fort ? Rien de moins sûr. Le temps des barricades est finito, la structure même de nos villes ne peut plus s’y prêter. L’individu post-moderne est fragmenté, les agitateurs sont déprimés, on peut soutenir une cause mais ne rien faire pour lui donner plus de puissance. Nous, les derniers hommes, les plus tardifs, les pucerons d’arbustes vivant le plus longtemps, sommes trop préoccupés : les multiples défis du quotidien, dans la forêt de métal et de béton armé, nous détournent de la vie telle qu’elle pourrait être : une fête illimitée pour toutes et tous, un monde libéré de ses chaines, une unique et seule communauté, la communauté des poussières d’étoiles : une teuf illimitée. « Reste en haut que des démons en costumes cendrés ». Je ne consomme plus de drogues, car j’ai désormais peur des interactions qui pourraient s’avérer négatives : quétiapine et MDMA par exemple… mais je resterais, seulement pour le principe, un fervent défenseur de ce site, qui m’a offert un grand champ expressif : tous les visuels créés, tous les textes, toutes mes opinions pseudo-politiques, n'auraient pas été les mêmes si je n’avais pas nagé dans la magie des perceptions modifiées, que ce soit le L.S.D, les champis ou la kétamine. OUI, je le redis, c’est par le biais de ces perceptions modifiées que je suis in fine devenu quelqu’un d’impossible à manipuler. Et oui, je le redis encore : l'Esprit est grand.

No more tears on my face, my friend, je deviens aussi dur que la pierre et aussi doux qu’un homme ailé. J’ai fait le tour de cette dimension terrestre, et pour cela, rien que pour cela, je ne regrette rien, nada. J’attends comme beaucoup de monde que la mort me frôle, j’attends comme beaucoup de monde… le niveau de conscience suivant. La magie des substances existe. Mais n’est pas chaman qui veut : apprenons seulement à connaitre et discerner nos limites…

Merci à ceux et celles qui ont pris le temps de me lire…






(6.4IS (visuels réalisés avec des bouts de ficelles ^^) > éditions des Ponts de l'Europe)