Ou lettre ouverte à ... moi-même... et à toutes celles et ceux qui sont concernés.
Ce n'est pas des 250 000 emplois perdus en France, chiffre record depuis la seconde guerre mondiale dont je veux parler, ni des péripéties de bienveillants donateurs de partis politiques en cette période estivale.
Non, c'est de la répression vis-à -vis des usagers de drogues et des saisies de stupéfiants qui plafonnent toutes deux au baromètre de notre État. Et de fait de la prohibition induite par la loi de 1970 dont nous fêterons le 40è anniversaire en fin d'année.
Ces saisies, vous en avez tous entendu parler, vous en entendez tous parler. Quelle que soit la région, nul n'est épargné à l'heure actuelle en France. Le sud, le nord, l'est, l'ouest, le centre, peu importe. Si je devais relater les informations qui me parviennent officiellement dans les "Actualités", j'y passerais des heures. Si je devais relayer ce que j'ai ouï dire, y compris dans les dépêches locales, j'y passerais des journées.
15 kg de
cannabis par-ci, 10 kg de
cocaïne par-là , 10 kg d'
héroïne ailleurs, j'en passe et des meilleures... Nul doute que le bilan de ces saisies, celles se chiffrant en tonnes étant d'un tout autre registre, sera un bilan positif pour le gouvernement et son satisfecit. Certes.
Un kg de stupéfiant saisi correspondrait à 10 kg de produit consommé. D'accord, admettons. Mais dans l'urgence, sur le terrain, que croyez-vous Mesdames et Messieurs les politiques qu'il se passe ? Dans l'immédiat, une saisie locale, régionale perturbe considérablement les habitudes, le quotidien, la santé mentale et physique des usagers ; les contacts s'éteignent avec les portables, le silence radio s'installe, l'isolement et le vide restent à combler quand il ne s'agit pas de survie.
La prise en charge, alors, ne peut aller au delà de ce que vous voulez bien lui accorder. Et quand bien même, tournez-le à votre façon, mais des addictions il en existe et en existera probablement toujours. Et des usagers aussi.
Mais, moi, humble acteur de la
réduction des risques, qu'est-ce que je vois ?
Je vois des usagers, insérés, pas insérés, avec ou sans traitement de
substitution aux
opiacés, dépendants ou non dépendants, festifs, occasionnels, peu importe, qui se rabattent. Et se rabattent sur quoi ? Qui se rabattent sur le pire. Dans les pires conditions. Sur des produits coupés, frelatés, le tout dans l'urgence, avec les conséquences que nous n'ignorons plus.
Ce que je constate, c'est une augmentation des dérives ; un marché noir des traitements de
substitution qui présente alors un réel danger, des usagers qui compensent par l'usage d'autres produits tout aussi stupéfiants, même s'ils ne sont pas toujours classifiés de même par la pharmacopée. Substances qui provoquent tout autant de dommages, sinon plus.
Prenons l'épopée de la
méphédrone ! Le
time-out français bienveillant de l'OFDT. Pour reconnaître au final que d'autres produits similaires sont d'ors et déjà fabriqués, en vente sur internet et feront, sans nul doute, l'objet des mêmes décisions après concertations ministérielles avec les Autorités de la Santé.
Que dire du
cannabis thérapeutique ? Je préfère me taire sur un sujet qui concerne des patients souffrant de pathologies lourdes, où seuls le soulagement et la survie aussi bien morale et physique ne dépendent que d'une plante créée par la nature. Où est l'humanité dans tout ça ? Où est la compassion ?
Vous n'aimez pas l'
héroïne, la
cocaïne, les
amphétamines, le
cannabis... Mais que pensez-vous qu'il se passe au bout de la chaîne ? Ce n'est pas du grossiste ou de la marchandise interceptés dont je parle mais de l'usager, de l'être humain et du citoyen à part entière.
Des dégâts ; des dégâts humains qui n'ont pas de prix, moralement, socialement, physiquement et qui coûtent bien plus cher à la société que ce peuvent rapporter les saisies dont vous êtes heureux de nous livrer les scores.
Des dégâts auxquels vous ne donnez ni les moyens ni les possibilités de répondre.
Pour reprendre une phrase d'un autre auteur, et acteur de la
réduction des risques, lue en ouverture des Etats Généraux des Usagers de Substances licites et illicites (EGUS) en novembre 2009 à Paris,
"La prohibition des drogues n'est pas la solution. Légiférez [Mesdames et] Messieurs les politiques, en écoutant la parole des citoyens français que nous sommes."Pensez que la drogue, que les drogues ne s'arrêtent pas à l'
héroïne, à la
cocaïne, au
cannabis... Toute substance peut être considérée comme une drogue. Certaines, vendues ou délivrées sous la bienveillance d'un praticien peuvent se révéler bien plus dangereuses qu'un produit de bonne qualité s'il n'était pas soumis à des persécutions flamboyantes, certes, mais néfastes.
Merci de m'avoir lu et d'essayer de me comprendre.
Alain W.