"Jade Aérogare" Partie 1 



Un de mes prochains livre : Jade Aérogare.

Le quotidien de Jade, 30 ans, écrivaine, toxico, mégalo, parano. Mon alter égo féminin.

Fini d'écrire en aout 2022.


Coordonnées effacées








JADE AÉROGARE





À tous.tes les tordu.es qui prendraient du plaisir à lire un truc aussi glauque.
Aux masochistes des trans-mots.
Aux psycho-prouts.
Aux neuro-zarbis aux architectes de la divergence.
Aux Aéro-décalés.
Aux Aéro-Aéro-Aéro.
À ceux qui aiment les gares et les transitions.
À toutes les Jade de trop.
Aux Jade indésirables indésirées.
À celles qui plombent l’ambiance alourdissent l’atmosphère.
Aux mal à l’aise qui mettent mal à l’aise.
Aux irrespirables.
Aux indigestes.
Et surtout mâchez-bien.






-1 La putain d’carte d’identité


Prénom : Jade

Nom : XFXHXinetteBiatch

Sexe : F si tu préfères

Genre : … ?

Age : 30 ans mais qui s’en branle ?

Nationalité : favorable aux territoires comme géographies d’attache. La nation est un garo sur son biceps elle refuse de planter l’aiguille.

Date de naissance : 16.10.1992 - jour où un Palestinien est mort en Israël dans sa cellule après une grève de la faim. Peut-être y-a-t-il eu transmutation d’âme. Jade est juive pro-pal, qui a un problème ?

Adresse : 17 rue de tu t’la fermes y’en a qui gueulent ici !

Choixpeau magique : Segment shlag de Serdaigle mission mettre les bons élèves à la 8.6.

Orientation sexuelle : il manque deux S à la question. Au moins deux.

Diagnostic du psychiatre : dépression latente et chronique qui se manifeste par une toxicomanie nomade qui tente de conjurer cette dépression.

Nourriture exclusive : fast-food junk-food porn-food. Elle préfèrerait être vegan les vegans sont tellement éthiques.

Éthique : sa gueule sa gueule sa gueule. Mais aussi l’autre, la séparation, les trajectoires qui éclaboussent. Se jeter dans le torrent de la ville ou dans les larmes de la rivière. Éthique solitaire éthique solidaire. Éthique singulière éthique barbare.

Taille : trop grande. Trop, de toutes façons. Grande maigre Jade XFXHXinetteBiatch se remarque au dessus des corps. Elle fait peur aux hommes.

Poids : plume dans l’encrier. Phrases crochet du droit phrases uppercut phrases K.O. au premier round.

Signes distinctifs : Aucun. Elle essaye de se fondre dans la masse, autant que faire se peut avec les cernes avec les dents jaunes avec le teint cireux. Aucun tatouage, nourriture pour la police.

Signature : allons tous nous faire niquer, nous narvalos cosmiques !

Jade est trop grande trop maigre trop shlag trop brune trop cernée trop avachie trop courbée trop à l’ouest trop inadaptée trop ratatinée ratatinée ratatinée trop camée.
Jade écrit.
Jade griffonne le début d’un nouveau livre :

La porte s’ouvre et je me prends le monde en pleine gueule.

Comme : mes fesses s’ouvrent et je prends Sofiane en plein fondement.

L’escort a chaud dans mon petit appartement.

Comme : le monde est brûlant dans mon crâne.

Tout chauffe. Tout boue. Tout excède.

Il fait 40 degrés Celsius et le ciel suce des pénis interstellaires.

Inter-actifs. Inter-passifs.

Tout s’encule.

Comme : J’en fais un peu trop.

Je m’affiche.
Ma gueule en poster dans la chambre d’un ado en manque de sensations fortes.
Ma gueule ostentatoire dans les miroirs des dépressifs.
Ma gueule sur les panneaux au bord de la route, fléchée dans toutes les directions.
Ma gueule ma gueule ma gueule.
La porte s’ouvre et je me prends le monde en pleine gueule.
Comme : la porte s’ouvre et je me prends le monde en pleine gueule.




0

Se tromper de graduation sur la seringue d’une fraction de millilitre.

Se tromper d’heure sur la montre d’une fraction de minute.

Se tromper de degré sur la météo d’un seul putain de degré.

Jade sur le camping a peur des chiffres. Elle a aussi peur des regards des suspicions qui pèsent sur elle. Elle sent monter la parano. Elle l’identifie la reconnait entre mille sentiments surgie du passé comme un zombie d’une tombe. Le plus dur est fait. Le plus dur avec la paranoïa c’est de l’identifier. Alors on n’est plus totalement à côté du réel même si le processus psychique continue. Il faut dormir Jade le sait. Il faut prendre le neuroleptique prendre la direction de la tente. Elle a peur de dormir peur qu’on l’attaque dans son sommeil. Les Autres sont menaces les Autres sont milices armées. Ils veulent la voir au sol ils veulent la voir agoniser. La police l’écoute sur son téléphone. La famille qui tient le camping ne veut que son argent et la méprise. Partout des regards se posent sur elle. Les paroles des Autres sont chargées de sous-entendus. Dans les ombres des phrases se dissimulent des accusations. Non, non, c’est la parano qui pense ça. C’est le G ! Le putain de G ! La dernière fois, c’était pendant le sevrage de G ! Jade sur le camping a peur des chiffres.

Jade fait monter la pression.

1.2  1.4  1.5.

Elle atteint sa limite elle atteint le palier du Hole. Bientôt elle partira dans les vapes. Le sommeil le départ pour le K.O. cosmique.

Il fait chaud il fait super chaud.

38 39 40 degrés Celsius - le ciel suce TMTC - !

La paranoïa est une des faces cachées de la mégalomanie. Tout tourne en orbite autour de Jade elle est un centre de gravité. Le monde est un miroir le monde entier pense à elle. Le soleil brille pour son cul aplati la lune se lève pour son cul inadapté. Les étoiles sont concentrées sur sa libido. Sa libido est à plat elle le revendique. Pas une once de désir dans son cerveau dépressif. Qui a un problème ? Qui veut d’une fille qui bande de toutes façons ? Elle peut bien crever toute seule elle n’est pas au goût du jour. Trop grande pour les mecs trop shlag pour leurs représentations. Elle n’a pas porté une jupe depuis le collège. Adidas en bas débardeur en haut : restes de son passage dans la Camaraderie. Elle se la joue dans le camping pour conjurer la parano. Au coin des toilettes elle s’allume une clope. Elle défie les regards accusateurs. Qui a un problème ? Elle est en fragilité en grande fragilité. Elle se maintient sur la corde fine tendue au dessus du vide psychotique.

Le G redescend avec la montre comme un sursis probatoire.

Jade va pouvoir aller se coucher mais avant elle a besoin qu’on la rassure elle a besoin de son entourage. Elle dégaine son téléphone.

« Allo papa j’suis parano.
Écrivaine mégalo.
Ça va pas du tout.
Ça va pas du tout.
Ça va pas du tout. »

C’est fou ce qu’elle demande. Qui demanderait une attention pareille ? Elle envahit les Autres avec ses problèmes elle se châtie de les envahir. Elle se déteste pour ça. En monologue des heures durant dans ses textes dans ses appels. Son rapport aux Autres est hautement toxique. Les Autres n’arrivent pas à apparaître dans les pages de Jade. Il faudrait faire preuve d’un peu plus d’imagination. Disserter sur soi-même ça va un temps il faudrait le dépasser. Elle ne dépasse rien elle se complaît toujours plus. Toujours plus toujours plus. Toujours se donner des raisons se donner des excuses. Maintenir le déni.

Le G est redescendu avec la montre comme un sursis probatoire.

La parano est redescendue avec l’écriture comme un exutoire salutaire.

Jade peut aller se coucher mais avant elle a besoin d’une autre limite elle a besoin de se faire encore une frayeur. Celle quotidienne d’avoir peur de se glisser dans la tente. Que la journée s’arrête que la vie s’arrête. Elle ne pense plus explicitement qu’on pourrait l’attaquer dans son sommeil. Mais son sommeil est menace son sommeil est milice armée. Il est noué de pièges complexes de cauchemars de ruptures. La grande rupture.

Demain il faudra renaître pour devenir autre chose. Se décentrer parler d’un lieu parler d’une chose.

D’autre chose que Jade.

D’une main elle pianote :

« Le premier jour du début du commencement des prémisses de l’amont de l’éclosion du
bé.à-ba de l’amorce de la naissance du berceau de l’essai de la porte d’entrée ?
Fracassage de la porte d’entrée !
Je viens cambrioler ma vie.
 »


1


C’est l’histoire d’un texte qui commence au téléphone.

« Allo allo ici la galère ici Jade ici le trop plein de choses. »

Jade zone dans le camping comme un mec de cité sacoche en travers du buste pleine de drogues jogging vissé aux jambes Adidas rose fluo dans vos regards et gare au loup. Elle est bourrée et pas seulement. Elle a tout mélangé. Elle mélange tout. Les complicités les hostilités le travail les loisirs. Le GHB la 3MMC. Les puissances des choses et ce qu’on peut en dire. Elle mélange tout. Quantité 1.4 sur l’équation interne les mathématiques de l’équilibre.

Substances-déséquilibres.

Jade zone dans le camping comme un clochard sur la rive gauche. Jade a chaud Jade toussote. Elle a fumé ses dernières clopes. Vapeurs de clopinettes dans le nuage où l’âme s’abîme. Bim-bim-bim-bim ! Elle écrit un égo trip au bar du camping. Il lui reste un billet elle commande une pizza. Il faut manger elle le sait. Se forcer à manger. Miam-miam dans la barricade. Jade travaille son style. Les rapports au monde s’expriment dans le style. Elle rythme elle image elle ponctue. Ponctuation saturée ponctuation trop rare. Disparition de la virgule. Elle alterne les points et la suspension… Jade pense aux points virgules. Aux putains de points virgules. Trop difficiles à maîtriser trop soutenus pour elle. Elle Jade 30 ans les yeux embués trop d’émotions trop de saturation. Elle a aimé ce stage d’écriture. Son rapport à l’écriture s’est transformé. Avant elle ne savait pas lire. Elle a appris à lire. Appris à lire à 30 ans. Il faut bien un début à tout. Elle a appris à ponctuer elle a compris la force des exclamations ! Elle s’exclame à tout bout de champ qu’elle est en manque qu’elle est en rade ! Elle n’a plus assez de ci plus assez de ça. Il manque toujours quelque chose elle n’est jamais rassasiée. Plus de phrases plus de GHB plus de jours sans fins. Elle a soif. Elle a soif. Elle a soif. Elle a appris le ternaire comme 3 dans les sinus. Elle sniffe sa relation au déni dans les toilettes du camping. Elle campe sur ses positions : elle ira jusqu’au bout. Le déni la caractérise comme un sur-lignage de caractère. De police de caractère. C’est Times maintenant sur son MacBook Pro. C’est son seul objet de valeur son seul trésor au milieu du manque. Elle l’aime elle le caresse. Ses doigts se baladent sur le clavier comme ils aiment se balader sur une fille. Sur elle-même le soir dans l’intimité de l’exhibition. Apple ces bâtards ont bien fait les choses. Elle ne quitte plus l’écran des yeux ça l’obsède ça la fascine. Elle a aimé ce stage d’écriture et les visages qui l’ont composé. Anne. Mercedes. Marie-Françoise. Des femmes en puissance des femmes qui se développent. Développent leur style. Petites mamies magnifiques Jade s’en veut elle les a choqué elle était l’altérité dans ce groupe. Elle a parlé de psychiatrie d’hôpital de Jade. Elle a trop parlé de Jade comme d’habitude. Elle est bloquée à la première personne elle est bloquée à moi ma vie mon style je t’enmerde. Jade zone dans le camping mégalo-parano.


Jade s’excentre elle prend un peu de recul et d’une main elle pianote :

« À moitié à poil sur une méridienne… »

 L’ÎLE EST ENTOURÉE D’UN OCÉAN DE PLASTIQUE

LE PLASTIQUE DEVIENT LA MATIÈRE DES VISAGES

LES VISAGES NE DISENT PLUS RIEN

LE RIEN QUI TE NIQUE TA MÈRE

PUTAIN

NIQUE TA MÈRE

NIQUE TON PÈRE LE GIGOLO

ON EST PAYÉS POUR S’EXHIBER

L’ARGENT A L’ODEUR DE MON CUL

MON CUL EN ORBITE AUTOUR DU SOLEIL 




















2


Les Cévennes lui sont restées inaccessibles même quand Jade marchait le matin à l’aurore crypto-solaire et encore ténébreuse dans le brouillard des rêves dans le brouillage des rêves. Elle ne sait pas voir les choses elle ne sait pas en parler. Les objets les arbres les lieux les Autres cette putain de nature cosmique. C’est en dehors d’elle. Comme : le monde est lointain pour les métropolitains dans le bitume. Pas de maison pas d’abri. Livrés au gré de la ville à ses tumultes à ses torsastions de rythme. On pourrait lui rétorquer : « Et les montagnes ? Il y a tellement de planète ! Pourquoi la folie des mégalomanie de vouloir aller si investir ? On n’a pas mieux à faire fonds marins ? Et les massifs de choses qu’on ignore sur notre grandeurs ? Quelle est cette loin ? Et les milliards qu’il faudrait avec toute la misère du monde ? »  On pourrait lui rétorquer : « Les petits mondes sont partout. Ceux que je fréquente en s’enfuir... Devenir hors-pieds dans le commun. Tous les milieux puent la mort particulier peut-être. Il faut idéologie tout en gardant les » Il y a toutes ces choses qu’on pourrait lui rétorquer.

Jade zone dans le camping comme une shlag de la vie. Elle n’a plus de thunes plus d’internet sur son téléphone pas de lumière pour la nuit elle dort à même le sol. Le soir elle a besoin de présence elle ne supporte pas la solitude. Elle passe ton temps au téléphone comme une désespérée de l’affection. Elle a besoin qu’on la considère.

« Allo allo ici la galère ici Jade ici le trop plein de choses. »

Elle est bourrée et pas seulement. La soirée s’accélère. Une bière de trop un coup de fil de trop elle perd le fil. Elle trouve la rivière. Putain la rivière était à dix mètres de sa tente elle ne l’avait pas vu depuis une semaine. Symptomatique de son manque d’attention. Il fait nuit elle s’y aventure sa copine au bout du fil. Au bord d’un Nile de basse fréquence elle s’accidente vers l’eau. Elle ne voit pas elle ne voit rien. Tout est sombre tout est compliqué. Elle titube dans l’ivresse elle titube. Une descente rapide une marche brutale dans la terre et les cailloux la fait trébucher. Elle s’effondre dans la roche. BAM ! Elle se fait mal au genou ça saigne surement sa copine au bout du fil.

« Allo allo ici douleur ici Jade ici c’est quoi cette merde il manquait plus que ça. »

Elle a cassé son téléphone brisé l’écran qui affiche des couleurs bizarres. Foutue elle est foutue. Elle réalise la merde il manquait plus que ça. Putain elle ne pourra pas se réveiller. Elle a rendez-vous le lendemain à six heures avec Anne qui l’emmènera à vingt minutes du village où il n’y a rien dans un autre village à peine plus peuplé. De là elle aura un bus qui l’emmènera à Nîmes en une heure et demie. Puis un train pour Paname. Elle est dans le trou du cul des Cévennes dans la cuvette d’une vallée. Claustrophobie. Il n’y a que des arbres partout elle ne voit rien il n’y a aucun point de vue. C’est comme la ville en vert un peu moins bruyant un peu moins frénétique mais tout aussi dense tout aussi touffu. Elle voudrait déserter. Sans téléphone aucune chance de se réveiller. Aucune chance de rien. Elle décide de ne pas dormir. D’affronter la longueur de la nuit jusqu’à Anne jusqu’à la voiture. Elle arpente le camping à la recherche de réconfort. « C’est comme ça. » lui a dit Léo son ancien amoureux. « Tu as voulu l’aventure, c’est très bien ce qui t’arrive, tu sors de ta zone de confort. » J’t’enmerde putain tu captes rien. Elle n’a plus de thunes plus d’internet sur son téléphone pas de lumière pour la nuit elle dort à même le sol. Elle s’approche du bar du camping essaye de se rapprocher de la famille qui le gère. La famille est froide avec Jade depuis le premier jour. Jade fait tâche. Le jeune lui dit : « Attends une seconde bouge pas d’ici. » puis disparait dans l’arrière salle. Vingt piges à tout casser n’importe quel videur de boite lui demanderait sa carte d’identité. « Non jeune homme ce sera pas possible. » Il en a surement l’habitude. Il revient. « Oui, ok, ce sera possible. Branche ton ordi sur la terrasse tu peux y passer la nuit. » Remerciements. Elle se branche. Ouvre son logiciel de traitement de texte… Écrit :

« C’est l’histoire d’un texte qui commence au téléphone. »

Puis bloquée. Trop défoncée trop maladroite. Elle tente des mots mais ils ne disent rien. Elle efface. Recommence et efface. Sniff encore. Glou-glou-glou. Il fait nuit noir à présent et d’un coup elle entend la foudre. Le ciel se déchire comme : il manquait plus que ça. Elle court à son emplacement pour réunir en titubant ses affaires. Sac à dos tapis de sol duvet et sac de bouffe… Putain le sac de bouffe a été pillé par les bêtes. Charcuterie croquée en vrac sur le sol humide. La pluie domine l’ambiance sonore la pluie traverse les vêtements de Jade. Heureusement ! Heureusement qu’elle avait replié sa tente en avance ayant prévu de passer la nuit à la belle étoile ! Elle n’aurait jamais pu la remonter sous l’orage. Heureusement qu’elle n’a pas avalé le neuroleptique qui l’aurait endormie elle se serait réveillée sous la flotte ! Jade ramasse toutes ses affaires dans une contorsion alambiquée. Ça marche. Elle marche. Encore. Pour l’instant. Ça fonctionne. L’organisme fonctionne. Un pas après l’autre elle se traine dans le camping jusqu’à la terrasse du bar qui sera son abri provisoire. Elle pose son cul. Elle transpire allume une clope avec les poumons bien ouverts et respire un peu. Il est 1h du mat plus que 5h30 à tenir. Anne viendra la libérer Jade a confiance en elle. Que faire pendant 5h ? On ne peut pas écrire tout le temps. L’espace d’un instant elle rêve d’une histoire romanesque : écrire un livre en une nuit dans la galère la plus totale. Ça ferait une belle histoire. Le problème c’est que…

« C’est l’histoire d’un texte qui commence au téléphone. 

Allo allo ici la galère ici Jade ici le trop plein de choses. »

Elle a deux phrases. Elle les trouve bonnes elle les trouve à propos. Mais ce ne sont que deux petites phrases. Comment exprimer l’ampleur de la solitude qu’elle ressent à ce moment là ? Elle n’a plus vraiment l’habitude. Quand elle était plus jeune elle en a vécu mille des histoires comme ça. Elle les affrontait avec bravoure. Aujourd’hui ratatinée elle ratatine elle ratatine. Un peu de confort ne lui ferait pas de mal.

Jade change ses plans.

Écrire trop compliqué. Un bon vieux porno ne lui ferait pas de mal. À peine y a-t-elle pensé qu’elle sent déjà qu’elle mouille d’une façon surprenante tant sa libido se disperse ces temps-ci. Le porno il y a eu des périodes où elle trouvait ça violent normatif et hyper centré sur le plaisir des mecs. Et puis avec le temps elle a découvert des catégories cachées sur les sites mainstreams. Elle a appris à aimer les fantasmes japonais de langues et de salives, les scènes lesbiennes BDSM et même les bukkakes hétéros. Cette nuit Jade est d’humeur BDSM. Elle commence à se toucher. Au milieu de la terrasse du bar dont les lumières sont éteintes. C’est une intimité ouverte qui ne la gêne pas qui ne la gêne plus.  Elle respire une grande quantité de poppers et le désir se déchaîne. Elle frotte son clitoris à deux doigts espace un peu ses lèvres… Elle lance une vidéo où deux dominas maltraitent une fille allongée par terre. L’une blonde l’autre brune. Elles s’embrassent. Se disputent à propos de la propriété de l’esclave. Se mettent d’accord pour la partager. La soumise est accroupie dans une cage. Elle est belle elle a des lèvres sensuelles. La blonde ouvre la cage… Première claque dans sa tête. Elle l’insulte en anglais Jade ne comprend pas tout mais les intonations suffisent à l’exciter. « Suck my fucking toes ! » La soumise prend le pied de la brune dans la bouche elle l’ouvre grand ambiance gorge profonde. Elle avale. Puis lèche la voute plantaire doucement sensuellement… La petite se retrouve à quatre pattes… Elle se prend un God ceinture dans l’anus… Jade accélère ses mouvements… Elle voudrait être une chienne aux pieds de ces maîtresses… Jade sur le camping a la main dans son pantalon… Le G et la 3 s’épousent…

« Allo allo ici plaisir exorbitant ici Jade ici on est au max au milieu du minimum. »

D’une main elle pianote :


« J’aurai soixante ans comme j’en ai eu seize,
La sieste n’endormira pas mes instincts amoureux.
La puberté dure toute la trajectoire.
La vie c’est des poils qui dépassent et coagulent.
Dreadlocks du devenir.
 »



3


« Mademoiselle ?! Mademoiselle ?! Vous êtes là ? Vous êtes avec nous ? »

Jade ouvre les yeux se relève en sursaut. Paname par la vitre. Elle est à Paname. Trois pompiers sont autour d’elle.

« Vous êtes réveillée ? Vous avez consommé de la drogue ? »

Pompiers veut rapidement dire flics. Elle a dix grammes de dope dans sa sacoche. Tout sauf le comico ce serait horrible ce serait le pire. Réflexe de survie.

Non pas du tout ! 
Ça fait cinq minutes qu’on essaye de vous réveiller le train est vide. Est-ce que vous avez bu de l’alcool ? 
Oui oui voilà ! J’ai bu trop d’alcool et je n’ai pas dormi cette nuit. Il faut que j’y aille ! »

Les pompiers lui font signer une décharge qui stipule qu’elle refuse d’être prise en charge. Jade sort du train désorientée. Black out total. Comment est-elle arrivée là ? C’est bien ici qu’elle voulait venir mais elle ne se souvient pas du trajet. Elle se souvient d’une rousse trop maigre aux pieds d’une blonde et d’une brune. Pas de bus pas de car sur le trajet. Seulement des bribes d’échanges à bout de souffle avec des visages inconnus. Le nord est au sud et l’est à l’ouest. Tout penche un peu vers l’ouest. La vue se trouble les passants semblent doubles. Jade a besoin de pisser mais c’est payant dans la gare. Et puis merde elle n’en n’est plus là elle va pas le jouer à l’éthique. C’est une défaite politique elle met un euro dans la main du monsieur des toilettes. Elle n’arrive pas à pisser… C’est la 3MMC elle connaît par coeur. L’urine sort par gouttelettes l’urine sort sans ce soulagement total qu’on est en droit d’attendre d’un pipi. C’est laborieux. Elle souffle. Ok ok elle est à Paname. Des flics dans la gare des flics partout. Jade sacoche en travers du buste pleine de drogues jogging vissé aux jambes Adidas rose fluo dans vos regards et gare au loup. Qui est la proie qui est la cible ? Il faut vite qu’elle rentre chez elle tout planquer se reposer. Oui elle a besoin de repos. Dans le train ce n’était pas du sommeil plutôt quelque chose de l’ordre du comas du G-Hole quelque chose du corps-qui-ne-suit-plus. Il faudrait manger ça l’écœure. Boire de l’eau ! Putain ! Boire de l’eau ! Elle sort sa bouteille chaude et l’engloutit à moitié. Ok ok elle est à Paname. Elle regarde ses affaires… Tout semble être là. Elle fouille ses poches… Merde son téléphone ! Elle a oublié son téléphone dans le train !

Flash d’un coup du labyrinthe de sa mémoire : elle est aux toilettes dans le train et étale trop de poudre sur le téléphone. Obligée de couper sa trace en deux. Elle en sniffe une et repose son téléphone avec l’autre ligne au dessus de sa place en wagon sur le porte bagage. Les pompiers ! Les pompiers qui l’ont réveillé ! Ils n’ont même pas cramé !

Jade court à toute allure en arrière. Elle a cassé son tel mais doit récupérer sa carte sim. Elle monte dans le wagon, récupère la trace sur le téléphone, la souffle dans le couloir et met son bigot dans la poche.

Elle démarre.

Titube.

Le métro en pleine gueule le métro qui désoriente. Des couloirs des embranchements auxquels il faut être attentif. Elle se perd. Traîne un lourd sac à dos, un deuxième plus petit et une grande tente 2 secondes Quechua. Son pantalon tombe. Elle essaye de le redresser mais elle est trop maigre. Elle a tellement maigri. Le dernier cran de sa ceinture lui laisse les fesses à l’air ambiance 2010 Sexion d’assaut dans les oreilles. 2022 il est temps d’apprendre à tenir son fute au dessus de son cul inadapté. Elle titube dans les couloirs… Parvient à porte des lilas dans un équilibre précaire. Elle ouvre la porte de l’appartement. Humm… nid douillet nid d’amour. Réconfort au bout du compte. Elle fait chauffer l’eau pour les pâtes, qu’elle mangera au sel et à l’huile. Se sert 1.3 de G pour terminer en beauté. C’est la fin de son flacon il va falloir en racheter. Ou ne pas en racheter si elle arrive à entendre raison. Elle est déraisonnable elle a besoin de sa raison. De celle qui lui dit où est le réel ou est le délire.

Jade appelle Sofia sa Sofia de toujours. Rendez-vous dans quelques heures pour débriefer-planifier.

Jade mange une fourchette de pates.

Jade s’écroule à nouveau assise sur le canapé du salon. Un comas plus qu’un sommeil mais c’est le corps qui décide on ne peut pas faire contre lui. En tout cas pas totalement.

Le corps a toujours le dernier mot. 

D’une main fébrile elle pianote :


"Que reste-t-il du corps ?
Abimé par les substances-déséquilibrantes.
Les membres sont bousillés.
Les organes endommagés.
Il reste les vapeurs d’une morphologie qui fut ardente.
Ressucitons le corps ! 
»


4


Sofia arrive chez Jade avec ce regard qui la caractérise : à moitié inquiet à moitié méfiant. Est-ce que Jade va l’attaquer est-ce que Jade va s’attaquer elle-même ?

Elles sont meilleures amies depuis le collège ou plutôt l’absence de collège. Déscolarisées fumaient des joints sniffaient du détergent trainaient dans des parkings dans des caves des histoires à vous faire tressaillir d’humiliations adolescentes de violences de règlements de comptes à base de ceintures quelques flingues qui traînent.

Alliées.

Elles ont eu une histoire d’amour qui a mis du temps à arriver une histoire où finalement Jade a fait sa XFXHXinetteBiatch en la trompant avec d’autres corps. Sofia a eu mal Sofia en garde quelques séquelles. Il n’y avait pas de contrat d’amour libre. Quelques années plus tard et des explications qui n’en finissent jamais, elles se sont rapprochées. Sofia a pardonné Sofia est au top avec Jade. Sofia garde toujours dans un coin de sa tête que ça pourrait repartir entre elles mais ne s’autorise pas vraiment à y croire. Jade virevolte Jade fait des partouzes Jade s’Aérogare. S’égare. Toujours dans l’excès ça envahit Sofia qui s’inquiète en permanence. En même temps elle n’est pas une infirmière. Sofia sait poser les distances quand le lien ou l’angoisse se font trop envahissants. Aujourd’hui elles se manquent elles sont heureuses de se retrouver.

« Faut que tu arrêtes le GHB tu déconnes tu prends trop de risques. Balance ce que t’as. »

Injonction trop dure geste impossible. Jeter de la drogue pour Jade c’est comme se séparer d’une jambe. Une amputation.

« Je finis ce que j’ai et je te promets que j’en rachète pas. Je vais m’en tenir à la 3. »

Jade avale, en plus des 50 milligrammes de Loxapac quotidiens qu’elle prend pour dormir - un puissant neuroleptique - 600 milligrammes de Quetiapine - un super puissant neuroleptique - qui vont la faire dormir longtemps très longtemps elle le sait. Elle n’a pas dormi depuis si longtemps. Seulement des comas des G-Holes des K.O. cosmiques.

Elle s’allonge enfin dans un lit.

Deux jours dans le brouillard… Flashs du labyrinthe de sa mémoire reconstructions rétrospectives… Elle essaye de se lever… Tombe par terre… Les draps sont un océan de douceur… Sofia veille à côté… Sofia essaye aussi de dormir… Jade la gêne elle n’arrête pas de se lever… Allers-retours dans la cuisine… Pourquoi est-elle ici ?… Pourquoi là ?… Elle fume une clope… Essaye d’ouvrir les yeux prend une trace de 3… La Quetiapine la tabasse… Elle dort deux jours dans les vapes… Parenthèses d’essais d’ouvrir les yeux de se le lever mais la Quetiapine la tabasse…

Jade émerge.

« Putain merci Sofia merci d’avoir été là. J’en aurais racheté sinon. Putain c’est trop bien la vie sans GHB j’avais oublié ! »

Jade est joyeuse Jade se sent libérée. Elle ne se méfie pas de son excès d’enthousiasme. Elle retrouve l’effet de la 3MMC, qui avait disparu sous l’effet du G. Petit nuage de dynamite. Stimulée et relaxée, il faut qu’elle écrive. Jade doit écrire c’est une urgence c’est vital. Elle ouvre son Macbook pro et d’une main elle pianote :


« L’aube.
La quintessence
. »




5


Jade ne fait plus partie d’une bande.

Il y a en a eu quelques unes toutes plus foireuses les unes que les autres. Ou alors Jade les a  fait foiré. Des déserteurs des égoïstes des histoires de cul qui ont tout compliqué. Solitaire solidaire. Elle s’accroupie auprès d’un homme que tout le monde regarde mourir ou que personne ne regarde et lui retourne sa couverture de survie pour le protéger de la chaleur. Jade ne fait plus partie d’une bande.

Elle fait partie d’une meute.

Ahoouuu ! Jade sacoche en travers du buste pleine de drogues jogging vissé aux jambes Adidas rose fluo dans vos regards et gare au loup ! Les loups se reconnaissent ceux qui ont faim ceux qui ont soif. Ne pensent qu’à dévorer ce qu’il reste du gros tas de merde translucide qui gis encore sur nos continents. No futur c’est clair et puis No past non plus. Plus d’histoires plus de racines. Comme tous ses amis Jade est désherbée. Comme une plante qu’on veut bien droite et dont on coupe les poils alentour. La société hétéro-normative est un sécateur. Elle fait partie d’une meute dont elle reconnait les visages. Dont elle connaît les usages. Les visages tuméfiés les sourires forcés. Les dents jaunies par le tabac les ongles trop longs les oreilles crades. Tiens ça fait longtemps qu’elle ne s’est pas lavé les oreilles. Ni les dents d’ailleurs. Elle fait partie de la meute des psycho-prouts des dépressifs anonymes qui saturent cette ville névrosée. Rosée au petit matin complètement cramée fin de journée peau trop blanche sous cheveux noirs. Elle fait partie de la meute des difformes des déformés des mutilés des non-merci-pas-aujourd’hui ou au contraire bien-volontiers de la meute des mains qui tremblent. Elle en est fière elle le semble. Elle veut écrire pour nous. Faire exister un ensemble. Mais elle reste prisonnière d’elle-même dans son studio-chambre.

Jade sort.

Jade a besoin d’un mauvais sort.

Elle marche droit dans Paname sans direction particulière. Fait une halte à porte de la Villette pour goûter la galette du quartier ce fameux truc qui rendrait accro à la première taff. Comme à chaque fois avec le crack elle est super déçue. Le modou lui sort le petit paquet d’aluminium caché entre ses dents et l’intérieur de sa joue en cas de contrôle de keufs en cas de devoir tout avaler - les modous les vendeurs de crack ont l’espérance de vie la plus basse de France - et lui donne un doseur. Jade ne sait pas doser elle laisse faire. Ils sont installés dans le creux d’un chantier en plein air où des ouvriers charbonnent en pleine journée. Il lui met le doseur dans les mains casse le cailloux en deux pose une moitié sur la pipe. Jade fume. Comme elle s’y attendait très petite stimulation dopaminergique comme la coke avec le goût en moins. Décidément ni la coke ni le crack ne sont faits pour elle. Elle y aura mis du sien pourtant ! À baser sa C toute seule dans son appartement à l’ammoniaque c’était déjà mieux. Parce qu’ici à porte de Vilette tout est hostile. Les autres crackers qui commencent à la dévisager en tant que jeune femme encore envisageable - c’est que les visages disparaissent derrière le non-retour. Les autres crackers qui veulent son caillou parce qu’elle n’a pas de mec avec elle. Et surtout surtout les flics qui débarquent comme ils débarquent tout le temps et soudain voiture banalisée six rangers aussitôt prêts à tirer LBD-40 dans les mains de chaque côté du peloton gazeuse familiale au centre. Un flic pose même sa main sur son gun au cas où. Dispersion immédiate : modous et crackers savent où sont les planques. On fait signe à Jade de rejoindre un groupe. « Viens mimi on te f’ra pas d’mal. » Elle hésite une seconde puis panique en voyant les flics arriver. Tout sauf le comico le comico ce serait horrible ce serait le pire.

Elle s’aventure dans le 19ème un hall d’immeuble squatté. Une autre fille est là elle se fait appeler Carmen. Elle est jeune noire et belle un décolleté plongeant. C’est surement pour la prostitution se dit Jade la néophyte. Carmen n’en n’a rien à foutre elle aime jouer de sa féminité et du regard sexualisant qu’on pose sur elle. Oui je suis une salope mon loulou viens donner tes thunes à Carmen. Et elle joue comme ça avec le désir des hommes leur tire des sommes monumentales. Elle dit à Jade pouvoir se faire 1000e par jour. Jade ravale sa salive. À 1000e par jour elle serait tranquille avec la 3. Plus toujours à gratter vingt euros par ci vingt euros par là en attendant son RSA. Ce putain de RSA qu’elle investit immédiatement en 3MMC et puis elle mange des pâtes au sel. Ou ne mange pas certains jours. « Par quel site tu passes ? » Demande Jade. « LadyXena, c’est vraiment le top, si tu mets des photos un peu sexy tu vas recevoir des centaines de sms par jours - prends un deuxième téléphone - les mecs ont grave la dalle. Mais il y a quelques trucs à mettre en place. Déjà tu ne réponds qu’aux messages de ceux qui t’inspirent le plus confiance qui sont les plus attentionnés et n’envoient pas genre juste : tu suces ? Ensuite quand t’as commencé à parler avec un type que tu le sens bien tu lui demandes des photos de lui. Il ne faut pas qu’il te rebute quoi ! Il faut se mettre d’accord sur les pratiques en amont se fixer des limites que le gars se mette pas à te pisser dessus sans prévenir si tu n’es pas consentante. Et puis tu demandes toujours l’argent en début de séance avant tout acte sexuel. Si il blablate ou tergiverse bye bye ciao t’as mille clients en attente. »

Jade a mille idées Jade a envie de s’exhiber. D’une main elle pianote :


« Oser être une femme qui écrit.
Sans écrire sur la femme qui écrit.
Qu’on ne me parle pas de femme mais de ce que j’écris.
Comme un homme comme une chienne comme une Aliène j’écris.
Lisez bien.
J’écris. 
»




6


Jade est seule dans la maison de Baba près de Tours. Baba est le meilleur ami de son éditeur Anselm. Anselm bosse dans une imprimerie à côté de Tours où il travaille sur le premier livre de Jade qu’elle a écrit deux ans auparavant : « Dégueuler ». Il l’a invité pour assister au processus d’impression et la laisse seule la journée. Jade se dit qu’elle écrit qu’elle crée en fait surtout se drogue elle multiplie les vers et les verres déguste chaque minute de vie que lui accorde son destin. Une mouche lui entre dans l’oreille. Elle se débat la fait sortir. Oust ! Saloperie. Jade est seule dans la cuisine le soir les Anglais sont allés se coucher Anselm se lève tôt demain. Elle a proposé de la 3 aux Anglais ne voulait pas être seule dans son délire mais raté ils sont cleans elle sniffera seule cette semaine.

Alerte ! Panique à bord ! La 3MMC c’est presque fini pénurie en Europe ! La Hollande et l’Espagne l’ont rendue illégale il est devenu très dur de s’en procurer. Avant c’était facile ça coutait que dalle 15e le gramme si tu en prenais beaucoup livrés chez toi ou dans un point relai près de chez toi. C’était à l’époque où seuls les gays connaissaient. C’est devenu un sujet de santé publique quand les hétéros ont commencé à tomber dedans. Pas touche aux hétéros les dealos ! Maintenant les sites envoient des cristaux non-identifiés. U.F.O. pour cosmonautes intrépides. Les dealers qui disent vendre de la 3MMC sont des baratineurs Jade le sait. Il n’y a que de la merde qui tourne en France. Elle a un dernier plan qui fonctionne à Paris il a des stocks jusqu’en 2023. Elle avait fait ses courses avant de partir à Tours mais les réserves s’amenuisent. Elle doit trouver une solution. La 3MMC fait partie de la famille des cathinones groupe de drogues dérivées de la plante khat d’Afrique de l’est. Le clear web l’internet normal par opposition au darknet propose toute une série de sites marchands qui vendent ces molécules en ligne parce qu’encore légales dans certains pays d’Europe. Elles ont toutes des noms barbares et des descriptions alléchantes. Jade cherche un substitut. Elle cherche son prochain poison. Dans l’idéal quelque chose qui lui permette de fonctionner et d’écrire de ne pas tomber dans la dépression sans la rendre folle ni la tuer trop vite. Tour d’horizon de ce qui se présente à elle :

3CMC : « Il provoque une intense stimulation surtout axée dopamine/sérotonine, peu de présence de noradrénaline. On a donc des effets stimulants assez forts, sans trop d'anxiété, avec un effet sérotoninergique très fort qui pourrait ressembler à celui de la MDMA mais en moins puissant. »

4MEC : « La 4-MEC est utilisée pour ses effets stimulants, entactogènes (elle favorise le contact) et empathogènes (elle augmente l'empathie). Elle procure un sentiment d'euphorie : sensation d'énergie, atténuation de la sensation de fatigue, besoin incontrôlable de parler, sensation d'être plus proche des autres. »

2MMC : « Donne une sensation chaleureuse, heureuse et détendue. Malgré cela, vous êtes toujours raisonnablement vif et vous savez ce que vous faites. »

4MMC : « Les effets recherchés sont l'euphorie, l'amélioration des sens (plus grande sensibilité aux sons par exemple), la sensation d'énergie (stimulation) et la sociabilité (favorise les contacts). »

3MMA : témoignage d’un utilisateur : « Aux fans de speed, stimulants, amphetamines, le 3-MMA est carrément cool. Je découvre une molécule puissante, qui forcément produit des effets types amphetamine (speed, meth) mais aussi une pointe de phénidate (methylphenidate). Donc récréatif et fonctionnel efficace, je compare à la méthamphétamine en plus soft, avec une action sérotoninergique pas négligeable. La dopamine est massivement poussée. »

Jade bave Jade fait du lèche vitrine. Elle voudrait tout tester tout est à essayer dans ces galeries de pierres précieuses. Promesses de douceurs de voyages et d’ailleurs. Elle ne peut pas fonctionner sans rien enfin c’est ce dont elle réussi à se persuader. Il lui faut quelque chose une béquille un soutien une substance-équilibre. Sinon c’est l’inertie la dépression la page blanche. L’horreur. Elle sent que ça ne va plus que le corps est faible et l’esprit dispersé. Elle ne peut écrire que de courts poèmes. Rien ne s’installe dans la durée le monde est nouveau chaque jour. Chaque matin les mains qui tremblent les doigts qui ne visent pas les bonnes touches sur le clavier. Chaque soir l’angoisse d’aller se coucher de la descente de la fin du monde. Elle déteste dodo. Et elle sent que ça ne va pas aller en s’arrangeant. Plus les années passent plus elle a envie de se défoncer. Trop longtemps elle s’est fait avoir par la coke drogue de merde drogue narcissique à stimulation minimale drogue à ras de terre pour individus psycho-compatibilisants. Maintenant que s’ouvre à elle le monde des NDS - nouvelles drogues de synthèse - elle a un appétit dévorant. Elle veut s’essayer à d’autres dissociatifs que la kétamine. Le PCP le 3-MeO PCP le 2FDCK. Elle veut s’essayer à d’autres psychédéliques que les champignons et le LSD. Le 2-CB le 1-P-ETH-LAD. Les phénéthylamines les lysergamides les tryptamines benzofuranes arylcyclohexylamines diaryléthylamines pipérazines amphétamines cathinones pyrrolidines et pyrrolidinophénones… Et toutes les autres catégories. Chacune de celles-ci comportant des dizaines de molécules. Jade est une aventurière de la chimie de la composition inorganique des corps et de l’organisme que les substances composent. La 5-MeO-DMT ! La putain de 5-MeO-DMT ! L’expérience divine absolue le voyage vers les mondes célestes le petit caillou intergalactique ! Elle veut tout essayer. Et elle sent que ça ne va pas aller en s’arrangeant. Plus les années passent plus elle a envie de se défoncer. Jade bave Jade fait du lèche-vitrine.

Jade commande dix grammes de 3CMC à livrer chez Baba.

D’une main elle pianote :


« Toujours plus haut que Elon Musk,
Alpiniste de l’âme Titan neuro-cosmique !
Fonctionner butiner graviter se hisser traverser avaler zigzaguer.
Vive 2022 vive la légalité !
J’ai hâte de devenir qui je suis déjà je le sais. 
»


7


Jade a écrit un premier livre.

Jade l’a appelé « Dégueuler ». Après une overdose à l’héroïne il y a deux ans elle avait  temporairement perdu l’usage de ses deux reins. Elle avait été dialysée branchée à des grosses machines. Passage en réanimation. Réanimation progressive des organes. Elle avait pris des notes sur l’hôpital sur son désir pour les infirmières. Quelques conneries pseudo-poétiques sur les drogues et surtout sur elle-même mégalo à la troisième personne.


« Jade a 30 ans soi-disant. Mais elle en a toujours eu 16. 16, comme 1664 blanche arôme citron d’un coup hépatite aigue direction chambre 214 de l’hôpital André Grégoire à Montreuil. On la branche à des machines. Des grosses machines. Elle a peur. L’hôpital lui fait peur. Elle a toujours eu peur. Eu peur du trop plein. Du trop plein de médicaments, du trop plein de funambulisme, du trop plein d’elle-même. Elle sature. Saturation inconstante. Pouls qui accélère, descelération du coeur. Corps en salle d’attente qui veulent prendre des nouvelles, mais elle indisponible jusqu’à nouvelles nouvelles. 
Jade a des accidents, de la même façon qu’elle accidente le monde. Boom-Boom sur l’autoroute, un vrai concert de musique automobile. Elle a appris à conduire sur les routes de la frénésie. Frénétique manque de confiance, elle n’attend plus le prince charmant...
Jade a avoué ses fautes comme un chrétien qui se sent coupable. Pas le dimanche matin mais le samedi soir au temple des excès à l’heure du ça suffit elle le sait mais elle est déterminée à saboter sa vie. À saboter sa vie. À saboter sa vie. Ça vit la dedans elle le sait, mais elle est déterminée à saboter sa vie.
Jade tremble son existence telle une toupie en roue libre. Elle arbore tout les aspects d’une véritable humaine, mais si vous la connaissiez, vous sauriez qu’elle est animale. Animal irresponsable, comptable de ses échecs. Elle tient les comptes et les chèques, quand il s’agit du business. Elle a dealé un peu, vendu des armes en Afrique comme Rimbaud, a voulu vivre aussi vite et aussi brillamment que Lautréamont.
Jade met en poèmes sa vie quand elle le peut quand elle y parvient. Quand les astres s’alignent et qu’opère cette magie secrète et indicible. Elle coucherait avec le Diable pour quelques notes de piano. Do ré mi fa sol la si do dans un solfège infernal. Une grammaire insoutenable, un égo trip invraisemblable ! Elle a tellement envie d’écrire qu’elle en devient intenable. Intenable insortable. Qui sortirait avec quelqu’un qui est là pour le trahir dans ses textes ?
Jade est avec les textes comme un sage avec un revolver. Elle ne pas quoi en faire. Ce n’est jamais son truc jamais l’heure jamais l’endroit. Parfois si au contraire, les textes viennent comme les guêpes à Valleraugue, c’est à dire sans se faire prier. Ils envahissent la tente verte et toutes les couleurs changent. Passent de violets disproportionnés à des oranges déraisonnables. L’orage est toujours en sursis dans les pages de Jade.
Jade pleure au pied des arbres en particulier auprès des saules qui ont commencé sans elle à chialer. Elle chiale avec talent, tourne à ses fins son malheur. Toutes ses faiblesse sont des forces. Comme : il est nécessaire de s’agrandir. De tout amplifier. De faire de chaque chose immodérée l’occasion d’un surf sur une vague. Sur le tsunami terrible qui l’attend après minuit, quand les citoyens se couchent et que débute sa petite apocalypse.
Jade est narcissique et peut faire l’effet d’un miroir sur pattes. Elle voudrait qu’on comprenne qu’elle cherche en elle-même les autres, ce qu’il y a de commun dans les enjeux qui sont les siens. Elle est névrosée. Un bon sujet de psychanalyse. Elle voudrait être unique aux yeux de son psychiatre, qu’il la considère comme un cas à part. Elle se singularise volontiers tout en subissant son isolement, pareille à un marin qui aime la mer mais regrette de laisser seul son amour si souvent.
Telle une funambule qui marche entre elle-même et les autres, Jade s’intéresse aussi à son prochain, à son distinct, à son étranger. Elle s’intéresse aux récits et aux histoires de ses séparés. Aux séparés en tant que récits, en tant qu’histoires, et si elle le peut, en tant que tels, comme le « poids de l’existence » dont parle Déborah Lévy. Elle a la curiosité des auteurs, de ceux qui osent s’aventurer dans le périple des mots. Les mots sont une bouée de sauvetage dans une mer qui bouillonne.
Jade fait des ellipses comme certains changent de chemise. Il est 16h15 à Valleraugue. L’heure de recracher Jade comme elle s’est avalée. Empoisonnée elle-même dans un fichier  beaucoup trop long beaucoup trop bavard.
Jade est bavarde comme un philosophe de comptoir.
Jade est au comptoir des mots, du supplice et des vices.
Jade ne savait pas qu’il faudrait dire tout ça.
Mais il a fallu le dire. Comme : toutes les montées amènent à des descentes.
Jade veut encore fumer, encore écrire encore toussoter.
Mais il est l’heure d’en finir avec les bavardages.
Tout ce que je voulais dire c’est : Jade est encore vivante.
Je vous le dis faites attention à vos fesses : Jade est encore vivante. »





8

Nombriliquement nombrilique, bienvenue au Nombrilistan !
Jade se méprise en se relisant. Quelle complaisance quel romantisme quelle naïveté. Elle est fière de sa plume de l’énergie qui s’en dégage mais le sens la bouscule elle ne sait plus où se mettre. Putain c’est fini elle a signé un contrat c’est foutu pour son cul aplati ! Maintenant « Dégueuler » est à l’imprimerie et qui voudra savoir saura que Jade pète plus haut que son trou de balle. Trou de balle scato-porno-exhibo-mégalo-pharmaceutique. Elle entretien cette figure ridicule de l’artiste excessive qui fait « de chaque chose immodérée l’occasion d’un surf sur une vague… » Au moins elle n’est pas un mec c’est déjà ça. Elle n’est ni Gainsbourg ni Kurt Cobain. Elle ne se vit pas non plus comme Amy Winehouse. Elle a dépassé les 27 ans elle ne fait pas partie du club.
C’est un petit texte qui avait rencontré par hasard les éditions « Abords » - auparavant revue littéraire sous-titrée « revue littéraire à l’abordage » désormais également maison d’édition. Dans une soirée Jade avait fait la rencontre d’Esther. Elles avaient parlé écriture. Esther écrivait beaucoup depuis longtemps. Jade trouvait Esther mignonne et elle avait voulu la séduire. Elle lui avait envoyé par mail « Dégueuler » sans s’attendre à rien de particulier sinon qu’Esther soit charmée par son texte. Esther l’avait rappelé une semaine plus tard : « Je bosse pour une maison d’édition je kifferais publier ton texte je vais en parler au comité de lecture. » Ça s’était fait comme ça.
Et puis voilà deux ans plus tard alors que l’été n’en fini plus le premier livre de Jade va enfin sortir début septembre. « Dégueuler » est en train d’être imprimé à deux milles exemplaires. C’est vraiment bien pour un premier livre a-t-on dit à Jade.

L’été est chaud l’été déborde. Il brûle tous les jours c’est une tempête permanente. Les drogues remuent la raison Jade est perturbée par tant de chaleur. Elle divague. Elle attend que son livre sorte de l’usine sorte de l’imprimerie. Le tenir dans ses mains qu’il soit en chair et en os. Et en sang. Commencer le travail d’envoi aux journalistes le long parcours de promotion qui s’annonce. Si l’été s’éternise et sa consommation ne réduit pas elle ne voit pas comment elle en sera capable. Tituber dans la maison seule le soir c’est une chose. Tituber dans une librairie en devant faire une présentation du bouquin en est une autre. Il va falloir qu’elle se calme il va falloir qu’elle se résonne. Prioriser « Dégueuler » avant toute chose. Dans la maison de Baba elle est fracassée en permanence. Isolée des autres dans sa tête. Difficultés à communiquer. Comment dire le chaos comment dire la cacophonie qui l’habitent ? La consommation isole et solitaire elle travaille. Écrit tous les jours ce nouveau journal. Envisage une seconde publication mais qui lirait un truc pareil ? C’est sans trait d’esprit sans sous-entendu sans clin d’oeil. Seule. Comment communiquer avec un lecteur ? Elle a l’impression que seule la saisie à vif des évènements suffirait à produire l’émotion nécessaire. Elle écrit en plein pendant l’orage en plein pendant l’orgasme. Ce sont des photographies de sa vie qui s’alignent en chapitres. Est-ce que ça donnera un livre ? Elle en doute. Elle essayera quand même demandera des avis extérieurs. Au moins elle a Anselm il lui dira si elle délire ou pas.


D’une main elle pianote :



Confusion paranoïa mégalomanie intensités abrutissement.
Toujours trouver les mots qui vibrent.
Mais qui pourra vibrer qui n’a pas connu la danse du funambule ?
Circassienne endurante au cirque enduré.
Si il y a une porte de sortie ce sont mes phrases mes pages.




9

Jade se fait lécher la chatte par Manu pendant qu’elle prend des notes.

« Y’a pas Dieu dans mon clito,
Pas de totems fétiches vaginaux.
Les matins menstruels les matins monstrueux,
Je me touche quand même la chatte embuée. »


Manu est alcoolique il boit trop il se branle trop. Jade est à côté de lui cogite qu’elle aime quand même les zizis malgré tout. Malgré son glissement vers les femmes avec qui tout est plus simple. Elle se souvient qu’elle aime aussi les hommes qu’elle aime Manu qui se branle en la regardant comme un fou. Il a les yeux exorbités. Son sexe est minuscule il se perd au creux de sa main. Jade le prend dans la sienne. Elle aime ce contact chaud et lubrifié. Elle branle Manu. Manu exulte. Elle accélère. Il hurle. Il est sur le point de jouir et Jade a un instinct cruel : au moment paroxystique de ses petits cris ridicules elle lâche son sexe seul dressé en l’air. Elle lui saisit les mains pour l’empêcher de s’en emparer. Manu crache son sperme tout seul sans contact.
Il remercie.
Manu aime la Tribe old school. 160 bpm de kicks qui rebondissent frénétiquement. « La meilleure chose qui lui soit arrivée ». « Une puissance qui sort du sol qui vient te chercher dans les entrailles. » Beaucoup de mots pour boom-boom-boom-boom. Jade bouge son cul en pointe le squelette de son postérieur. Manu miaule comme un chat prit au piège le piège baigne dans son sperme. Boom-boom-boom-boom c’est sans arrêt c’est sans pause. Musique sans début sans fin musique sans veille sans lendemain. Manu mixe en free party en teuf en tawa. Ce soir il va ambiancer une foule une fête qu’il organise avec ses potes. Un mur de son des lumières stroboscopiques un acide et c’est parti. « Alleeeeeez » crie la horde de morts-vivants au DJ. Manu enchaîne les disques transitions impeccables. Montées drops plateaux. Boom-boom-boom-boom. On n’arrête pas un peuple qui danse on n’arrête pas un peuple frénétique. Jour nuit jour nuit jour nuit. Les animaux fuient la terre est retournée. Manu règne la tribu suit. La Tribe est reine dans cette tempête. Embarquée sur cette mer électronique Jade se déchaîne. La transe l’hypnose l’exaltation. Un taz une goutte de G une trace blanche non-identifiée. Elle enchaîne dose sur dose et son dos est fatigué. Ses jambes commencent à trembler. Fatigue de l’organisme. Elle monte dans une voiture qui la ramène à la gare au bout du RER. Dans le wagon elle stresse descente de multiples choses. Quelques visuels qui continuent douze heures après l’acide. Elle a fait l’erreur de tirer sur un joint. Les regards des Autres sont chargés de menaces. La parano revient. Plus jamais elle n’ira en free party plus jamais autant de drogues plus jamais la Tribe plus jamais Manu… Elle finit par s’endormir…
Jade écrasée sur la banquette les chaussures pleines de boue et debout les dormeurs il faut boom-boom-boom-boom dans la vie Tribe old-school dans vos oreilles fatiguées.

D’une main endormie elle pianote :


« Je ne suis pas dupe des j’ai-déjà.
Déjà-fait-déjà-ressenti-déjà-parcouru.
On n’a jamais fini d’arpenter les courbures de l’espace.
Les hommes d’expérience sont des enfants pleurnichards.
Les artistes maudits des gosses de riches.
On n’a jamais déjà-vécu.
Tout est toujours devant
. »

Catégorie : Carnet de bord - 14 mai 2023 à  15:15

##3mmc #@Gbl #@Ghb ##Jade

Reputation de ce commentaire
 
Coordonnées en clair en haut du texte !
 
Glauque. Feldup en aurait à redire... Nils



Commentaires
#1 Posté par : Nils1984 15 mai 2023 à  18:54
Un talent indéniable, indiscutable. Ça prend à la gorge, c'est simplement atroce, comme une agression impromptue, venue te mordre de nulle-part. Mais si j'étais "puceau" au niveaux des drogues, prêt à me renseigner à ces sujets, j'aurais comme une sensation de pur dégout, de quoi m'éloigner le plus loin possible de ce monde. J'ai lu ce texte deux fois, et je ne ressens qu'une chose : malaise. "Tu fous tout le monde mal à l'aise avec tes conneries" disait une pote. Faire du trash c'est bien beau, c'est inscrit dans l'air du temps, c'est du nihilisme à l'état pur. Et le nihilisme est ce qu'il faut blâmer le + au monde, c'est mon point de vue minime vis-à-vis de cette expérience de lecture, qui ne peut laisser (j'en conviens) personne indifférents-indifférentes. Mais y'a un truc qui se cache derrière ce texte, et ne sont pas les "chants de Maldoror" qui veulent. Et c'est précisément cette chose informe, informelle, qui se planque derrière ce texte qui m'inquiète (d'où mon champi rouge, peut-être le premier que je donne après 5 ans de présence sur ce site). Je vais te dire clairement ce que j'en pense, c'est que perso je n'ai pas besoin de ça. Le monde est suffisamment hardcore pour en + s'infliger pareille indigestion littéraire. "Reniez vos utopies, jouez les langues de putes, on peut même remplacer chaque mot par une insulte" scandait un groupe de métal français. Pourquoi je dis que c'est simplement "atroce" ? Parce que c'est la vie retranscrite que des dizaines de personnes autour de moi ont connu. Et ça me fout les jetons de relire ces parcours sous la forme d'un récit pour petits bourgeois. Plus c'est trash mieux ça marchera ? Tout comme broyer des poissons rouges dans des mixers ? Personnellement, j'ai besoin d'autres choses. Besoin de lumière et d'horizons libres. Mais rendre à l'auteur ce qui appartient à l'auteur, ton style est incroyable et prenant. Mais le style ne suffit plus. Il nous faut autre chose, il nous faut en ces temps troublés et incertains autre chose qu'un plan indéfini sur des "backrooms". Il nous faut une porte de secours. Et, un tant soit peu, beaucoup, beaucoup de raison de croire qu'au lieu de regarder la mort chaque jour yeux dans les yeux, on y verra la vie. Dans tout ce qu'elle a de plus impérissable et de sacrée...

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