La réponse honnête 

La réponse honnête, c’est celle que Théo a le moins de chances d’entendre. Parce qu’il a été prouvé qu’elle aggravait les symptômes. Qu’elle était iatrogène, en langage barbare.

« Oui, vous êtes schizophrène »
Le médecin tend l’ordonnance, passe la carte vitale et raccompagne Théo à la porte, puis lui serre la main, après lui avoir bien précisé qu’il fallait qu’il continue son traitement.

Que sait Théo de la schizophrénie ? Pas grand-chose. Il a déjà vu Shining et le type à la hache qui essaye de tuer sa femme dans le labyrinthe. Il a bien eu des hallucinations aussi, non ? Il risque de faire du mal aux siens.
Il y a aussi Roger, le père de Jeannot, le voisin d’un certain âge. On lui a raconté qu’il était devenu fou et que depuis il était enfermé quelque part, chez les fous.

Puis, de retour à la maison, il se renseigne. Il va sur Doctissimo. Il apprend que c’est une maladie à vie, qu’on doit prendre un traitement en continu, comme celui qu’il prend et qui l’empêche de réfléchir. Qu’on fait souvent des allers retours entre chez soi et l’hp. Qu’une écrasante majorité de malades ne travaille pas, que beaucoup n’ont pas de vie de famille. Que certains vivent à la rue parce que leur famille leur a tourné le dos. Que ce n’est pas que le traitement qui l’empêche de réfléchir, que la maladie esquinte le cerveau. Qu’il va pouvoir dire adieu à son permis de conduire.

Il existe un nombre non négligeables de Théos qui finissent étonnamment encastrés sur un platane dans une ligne droite par un grand soleil.