Je parcours ce forum pour la énième fois et je m’arrête sur un post qui me déclenche une réflexion: pourquoi consommer des prods ?
j’ai consommé pour faire le vide, pour brouiller mes émotions, les étouffer sous des douches de molécules. Pour avoir l’illusion d’être connectée aux autres, moi qui me sentait si différente et en décalage avec ce qu’on appellerait la norme. Pour moi les difficultés de l’existence étaient écrasantes. Mes pensées, mes émotions, un vrai chantier. Je me suis appliquée à me bâillonner. Je maintenais ma personnalité assise dans un coin.
Je ne ressentais jamais le sentiment de colère, ou alors, retourné contre moi même sans même savoir ce que c’était. Je subissais par contre les accès colériques des autres en me forçant à sourire et rester. Étouffée la tristesse. Ne restait plus que l’acte auquel je m’accrochais. Cercle vicieux, ce vide provoquait le besoin de sentir, une sensation forte.
Aujourd’hui après plusieurs années d’abstinence, mes émotions émergent. La colère, difficile à gérer au départ, qui met une claque à l’autre ou le blessé. Je me rends compte qu’elle est la source de mon envie de me battre pour moi et pour les gens. C’est le lit du militantisme, qui est sa version civilisée. Sans colère j’étais vulnérable, prête à laisser l’autre piétiner ma dignité et se comporter avec injustice. Éduquée au silence.
Puis j’ai ressenti de la tristesse au moment de quitter les gens. Je me suis attachée, j’ai laissé mon cœur les aimer profondément, dans leur singularité. J’ai accepté d’être touchée, je me suis sentie coupable lorsque par mes mots j’ai trop brutalisé.
J’ai retrouvé le plaisir de l’échange. Le plaisir d’écouter une copine me parler
ke soir au téléphone. Je ferme les yeux, parfois je vois des formes et des couleurs. La voix d’E., est une grande fleur rose et indigo lumineuse.
La voix de mon compagnon sonne comme de la musique… lorsqu’il joue de la guitare mon corps se réveille, se laisse aller aux mouvements.
Je redécouvre ma voix et les résonateurs dans mon propre corps. Ventre, poitrine.
J’accepte de désirer d’autres personnes sans passer à l’acte. Comme ce matin quand un joli couple s’est assis en face de moi dans le bus. Elle, grande, brune et filiforme, et lui, cheveux gris, yeux bleus aux mains larges. J’écoute les Guns and roses et je ferme les yeux. Mon sang bat dans mes veines au même rythme, ma respiration s’accélère. Le désir est la… et si…?
Je sens le bonheur de planter mes yeux dans ceux de quelqu’un, une main sur mon épaule, admirer une barbe bien entretenue, laisser poindre l’envie, juste l’envie… embrasser goulûment ces lèvres qui me parlent, comme par reconnaissance.
Offrir mon corps aux regards sans le donner, sans l’exhiber, et le chérir, retrouver l’amour pour soi, son corps de femme. Et se pardonner d’avoir parfois du désir pour les femmes.
Ne plus se priver de l’essentiel…vivre