J'ai un taf qui me plaît et qui paye, j'ai un
doc qui me prescrit le
TSO qui va bien, et je n'ai jamais eu de stock aussi important de benzo que je n'ai aujourd'hui :
alprazolam,
diazepam, en veux-tu en voilà.
Alors, il est où le problème?Je me revois descendre encore endormi les 7 étages de la cage d'escalier à 3h du mat pour aller pisser dehors parce que, même sans domicile, j'ai ma dignité. Une fois soulagé (contre l'arbre le plus proche), je tape le code de l'immeuble pour rentrer non pas chez moi, mais dans mon sac de couchage. La précarité de la situation m'est alors presque devenue normale.
Je me revois traverser la ville avec toute ma vie sur le dos et dans des sacs en plastiques, pour aller crécher chez un pote le temps qu'il voudra bien.
Je me revois m'oublier dans les lignes de
speed et d'
héro comme si la vie n'avait plus d'importance.
Je me revois cacher mon collègue de galère le temps qu'il fasse sa pikouze de sken en pleine rue.
Je me revois ressentir cette tristesse mélangée à la colère contre tout le monde, l'envie que tout explose, avant que moi-même j'implose.
Je me revoie encore dans cette galère qui date d'il y a deux ans ; la chance a tournée mais bizarrement, je crois qu'une partie de moi y est restée... là-bas dans la galère.
Aujourd'hui j'ai un pincement quand j'entends un collègue plaisanter en disant "vazy on dirait un clochard!". J'ai juste envie de lui coller mon poing dans la gueule. Pourtant je ne vis pas dans un milieu de bourge, je suis même plutôt dans un milieu "ouvrier", mais je suis à des années-lumières de là où j'étais il y a deux ans.
Ce doit être le mal du pays.