Blogs » Mosstique » 
 

Patient expert ? Quand tu parviens à mieux savoir que les pros 



Hello People !

Pensez-vous faire partis de ces personnes ayant un vécu, ou vivant l'univers de l'addiction, et d'en connaître de manière significative, considérablement plus de choses concernant les spécificités des produits, us et coutumes, lois, RDR, schémas récurrents de comorbidités et/ou aspect social relatif à des profils "type"* et autre ?

J'ai eu cette remarque de plusieurs professionnels de santé/Acteur RDR/Usagers ( Addicto, CAARUD et je m'interroge, ne me considérant pas tellement de la sorte.
Simplement que j'aime à être curieux, comprendre les choses et leurs phénomènes, et éviter de dires des conneries sur tout et rien.

Si ça parle à quelqu'un ...?

One Love !

Catégorie : En passant - 01 juillet 2024 à  14:10

#Patient Expert RDR connaissance



Commentaires
#1 Posté par : pierre 01 juillet 2024 à  14:28
Attention, Les « patients experts », c’est une marque hospitalière. Pour nous ce sont les pantins de l’addictologie médicale, qui répètent bien sagement ce que les médecins leur ont appris.

il faut avoir arrêté au moins deux ans les consos pour prétendre avoir le titre de « patient expert ». Comme si l’arrêt était l’alpha et l’oméga de l’accompagnement de l’addiction. Comme si tu ne pouvais pas utiliser tes savoirs experientiels si tu continues à consommer. C’est quand même une certaine représentation de la personne consommatrice, à qui on retire des compétences parce qu’elle consomme…
Reputation de ce commentaire
 
Tristement vrai. Les puds experts ne sont pas pris au sérieux. Ah quoi bon?
 
« Patients experts » mais qui ne consomment plus. Histoire d’être vite dépassé…

 
#2 Posté par : pierre 01 juillet 2024 à  18:08
J’ai pas mal travaillé sur le sujet du savoirs experientiel et de la pair aidance. Je te livre mes recherches et réflexions :

Les pairs aidant, ou usagers pairs sont censés faire de leur expérience d’usage, de l’addiction, du système de soins….une aide pour les autres PUD.

Mais c’est pas parce que tu as une expérience de l’usage que tu peux aider tes pairs. Quand tu as l’expérience, il faut en faire un savoir experientiel, et ensuite il faut faire de ce savoir une aide !  Tout ça n’est pas innée.  Ce doit s’apprendre et se discuter entre pairs.

De plus je me méfie beaucoup de cette nouvelle mode des « pairs aidant ». On profite qu’ils n’ont pas de diplôme pour les engager à moindre frais dans les structures addictos et leur faire faire des tâches que les Éducateurs ne veulent pas faire. Par exemple, en les employant à l’accueil des csapa ou caarud…. Alors que l’accueil est une tâche des plus compliqués de ces structures…. Les pairs-aidant c’est souvent le sous prolétariat de l’addictologie  !


Et enfin il y a la question de l’injustice épistemique qui touchent ces pairs aidant : l’injustice épistemique c’est l’impossibilité pour les pairs aidant à imposer leur point de vue et cadre de pensée, car leur savoir experientiel est meprisé par les pro de l’addicto. Autrement dit c’est la capacité des soignants à imposer leur savoir medical aux pairs aidant. Ce qui fait que dans beaucoup de structures, les pairs aidant ont arrêté d’utiliser leur savoir et répètent  comme des perroquets le savoir medical des soignants. Ils ne sont plus que des passeurs d’informations médicales…

En ajout, on peut dire que Psychoactif est un lieu de résistance épistemique ! Un lieu où le savoir experientiel prime sur le savoir medicale, et se monte parfois contre le savoir medical pour échapper aux fourches caudines de la medicalisation : par exemple nous avons inventé le terme « usage alternatif de la substitution » alors que les médecins parle de mesusage et stigmatisent ceux qui ne prennent pas leur substitution comme il faudrait !
Reputation de ce commentaire
 
L'ordre médical veut récupérer la pair aidance pour légitimer son pouvoir. PTX.
 
Point de vue intéressant merci ! /Gastox
 
Vive la résistance! Sreconnor
 
Merci !!! J’en prends note, je me dirige vers le DU de médiateur pair
 
Merci pour ton retour d'expérience (kaneda)

 
#3 Posté par : Kalei 01 juillet 2024 à  18:33
Salut .

Je pointerai également le problème des pud qui pensent être bien informés et qui depuis des années reproduisent des comportement à risque pensant à cause de légendes urbaines où comportements d’amis plus anciens qu’il savent que ceci ou cela se fait comme ci ou ça .
De ce fait un “ancien” avec du savoir par ailleurs juste, peut quand même indiqué à tort à un autre usager qui le prends pour un sachant un comportement ou une façon de faire pensant bien faire mais qui en réalité désinforme l’usager .

Ils y a des gens qui ont un savoir certain. Mais certains, bien que de bonne fois, ont un faux savoir. Il faut toujours s’informer à partir de plusieurs sources pour éviter le problème de “ lui il sait je lui fait confiance” à tort .
Et je terminerai en disant qu’il ne faut pas oublier que soit même, on a des limites et on peut se tromper tout en étant certain de ce que l’on transmet .
Toujours douter et ne pas croire savoir.
Reputation de ce commentaire
 
Oui pour continuellement (se) remettre en question & rester ouvert/Gastox

 
#4 Posté par : CaptainCrox' 02 juillet 2024 à  07:29

Kalei a écrit

Je soutiens ce que tu dis ici. Un usager qui aide un autre usager, je n'ai rien contre dans l'idée mais quand je vois le nombre de personnes qui répètent des légendes urbaines, ou sont persuadés que leur expérience est universelle et qu'ils détiennent la vérité, cela peut être dangereux. D'où la règle de psychoactif de parler en "je".

Ca me fait penser à ça : https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Dunning-Kruger
Quand quelqu'un s'est renseigné sur un sujet pense être devenu expert et se fait des certitudes puis il se rend compte qu'en fait... il n'a appris qu'une infime partie de ce qu'il y a à savoir.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Dunning-Kruger#/media/Fichier:2019-06-19_effet_dunning_kruger.png

Concernant les patients experts, en Suisse, là où je suis, c'est une toute autre approche. Moi, je l'ai vécu comme un réel partage d'expériences, sans jugement aucun. Des fois les patients, osent plus facilement avouer à un autre patient (j'aime pas le terme expert)  certaines choses dont ils ont honte (ils ne devraient pass) et le patient expert peut créer un pont entre les pros de la santé et le patient. Cela implique par contre que le médecin respecte les patients et que le cadre thérapeutique soit défini en accord avec le patient et le médecin et pas juste le médecin.

Ici, le côté patient expert a plus un rôle de soutien, un peu à l'image des "sponsors" chez les narcs anonymes (je simplifie énormément les choses). Il arrive aussi que des médecins, lors de conférences, demandent à des patients de venir témoigner pour que les médecins découvrent le côté "patient" et éviter justement de produire des médecins qui ne comprennent pas les usagers et pensent mieux savoir. De nos jours, certains futurs médecins recoivent des séminaires d'anciens usagers, d'usagers actuels, etc.

Je crois comprendre que ce n'est pas la même notion partout pour le terme patient expert.

Quel que soit le savoir que l'on acquiert de par nos expériences ou nos lectures, il ne faut pas oublier que chaque cas est unique et que ce qui marche pour l'un ne marchera pas forcément avec quelqu'un d'autre. Je pense que c'est normal en tant qu'usager de se renseigner comme tu le fais, tu veux comprendre ce que tu prends dans ton corps, c'est une forme de respect de ton corps: tu prends des choses et tu veux quand même le faire de manière sûre - RDR.

Par contre si c'est comme dit Pierre servir de perroquet a la réception d'un centre ambulatoire, c'est inutile car c'est à l'accueil que les nouveux patients vont avoir besoin d'une vraie écoute professionnelle et pas se faire lire un discours par un patient.


 
#5 Posté par : psychodi 02 juillet 2024 à  13:40
un lien qui en parle : https://www.academie-medecine.fr/wp-con … ENIERE.pdf

je cite un passage

"2. Terminologie : patient expert ou patient partenaire ?
Le terme « patient expert » fait référence à une personne atteinte d'une maladie chronique qui a acquis une expertise dans la gestion de sa maladie au fil du temps. Ce concept est désigné par diverses expressions, telles que patient partenaire, patient engagé, patient concerné...
L'utilisation de plusieurs termes pour désigner un concept nécessite une réflexion pour en clarifier le sens : en effet, le choix d'un terme doit favoriser la communication avec les parties prenantes et le grand public.
Le rapport préconise l'utilisation du terme « patient partenaire » pour unifier la dénomination. Cette décision découle de plusieurs arguments, notamment la difficulté de définir l'expertise, le risque d'opposer l'expertise du patient à celle des professionnels de santé et la restriction du terme « patient expert » par rapport à la diversité des rôles des patients dans le système de santé.
Enfin le terme « patient partenaire » est parfaitement en ligne avec le concept de médecine participative qui reflète l’évolution moderne de la médecine, en harmonie avec les transformations de la société.
3. Le savoir des patients
Le concept même de patient partenaire implique fondamentalement la prise en compte du fait que les patients atteints de maladie chronique acquièrent un savoir, souvent qualifié de « savoir profane », pour le distinguer du savoir des professionnels de santé. Ce savoir est multiforme, pouvant être décrit en termes de savoirs expérientiels, implicites et explicites, de savoirs « situés
ou positionnés » dans le cadre d’un savoir collectif ; il a des aspects à la fois théoriques, pratiques et techniques. Chacun de ces types de savoirs donne au patient un pouvoir sous forme de capacités qui lui permettent d’agir sur lui-même, de s’adapter, d’interagir avec les autres, de générer des ressources, des idées et des connaissances nouvelles (5). Ainsi, c’est grâce à ces
savoirs que la personne ayant une maladie chronique peut, de patient, être passif à qui les événements arrivent, devenir agent, être actif par qui les événements arrivent. Il devient acteur et même auteur, à la fois dans son traitement et dans l’organisation du système de soins."


ce qui est discutable de MON point de vue...bin c'est l'idée qu'une "addiction" soit une "maladie chronique"...et que le monde médical continue de toute façon de parler de "savoir profane" (versus le "savoir sacré" des médecins ?? haha la bonne blague...sacrés docteurs...)

 
#6 Posté par : Hemoropioid 03 juillet 2024 à  03:32
Bonjour, ça fait un bail que j'ai pas laissé un petit message ici

Pour ma part je suis suivi en CSAPA pour addiction tramadol (et prises occaz d'autres prods) et ils avaient très peu de connaissances sur le trama , ils considéraient ça comme un opioïde normale alors que personnellement c'est le rush de seroto qui m'a fait "sombré" dans le trama, et non l'effet opioïde auquel on s'attend.
(Par exemple je suis pas vraiment fan de la codéine)

Mais l'addicto qui me suit est très ouverte et a prit le temps de m'écouter par rapport à ça, tout en me posant des questions sur comment on le ressens etc.

En revanche il y a beaucoup plus longtemps quand je commençais à détourner le Tramadol mais que j'en avais encore besoin pour des douleurs,je devais refaire une ordo et mon doc n'étant pas la j'ai du aller voir un autre qui m'a dit "Faites attention parce qu'au dessus du Tramadol c'est durogesic hein!"

J'ai fais mine de ne rien savoir mais à cette époque la je savais déjà qu'entre le tramadol et le fentanyl il y a d'autres options.

 
#7 Posté par : Frontkickkk 03 juillet 2024 à  23:37
Salut, oui carrément ça me parle a fond, je bosse en CAARUD depuis maintenant quasiment 2 ans, auparavant, un an avant mon embauche j'ai pu bosser pour l'Ofdt en tant qu'usager de drogue. Je bossais dans le social déjà depuis quelques années et j'ai passé un diplôme d'éducateur spé en parallèle notamment pour avoir un diplôme et un salaire plus important... Mais je suis usager de drogue depuis mes 15 ans, ayant connu des substitutions différentes, des suivis médicaux en csapa, le jugement et la stigmatisation lié a mes usages et mes manières de consommer, la zone, et les skwats en partie. Différents aspects qui me rattache a un lien commun avec les personnes que je peux croiser, accueillir, accompagner et conseiller au taf..
J'ai été embauché a la fois pour mon expérience professionnelle que personnelle, mais ai très mal vécu le fait d'être le seul consommateur dans l'équipe, qui plus est caché par ma cheffe qui a octroyé ce côté là de mon vécu, ça a pu me mettre en difficulté a pleins de moments, revoir des vieux potes que je ne croisais plus (pour des bonnes raisons), en croiser régulièrement lors du travail, et que le travail déborde sur le quotidien.. parler de drogue toute la journée m'a aussi fait me remettre dans l'héro, que j'avais quitte y a quelques années, et la substitution (même si c'était un ensemble de paramètres). Et en même temps ça a facilité des accroches auprès de nouvelles personnes que j'ai pu croisé ou connaître dans ma vie, ou pas d ailleurs, amené un regard autres et des paroles liés a mes connaissances des produits et de vécus communs aux gens. En tout cas pour certaines personnes.
Depuis peu un autre usager a été embauché, c'est qui plus est un vieux pote d'une confiance absolue, je parle de cela car c'est un point a souligner, le fait de ne pas être seul, et ne pas se sentir seul, ne pas être que la caution tox de l'équipe et de l'institution. Ces mêmes institutions qui ne gèrent pas la question des consos au travail, qui les dénigre, qui les interdisent, tout en se ventant de pratiques innovantes (qui ne le sont pas, le terme travailleur pair est un effet de mode), ces mêmes institutions qui demandent a embaucher des gens abstinent, ou qui se trompe complétement de personnes en embauchant des pairs (qui ne sont pas pairs des gens qu'ils accompagnent), tellement ils sont loin et fantasme pour certains de savoir ce qu'est la question de l'usage de drogue (je parle du secteur de l'hébergement plutôt la). Et du coup ils mettent en difficulté, et le pair embauché, et les gens accompagnés. Souvent quand il y a un problème institutionnelle et/ou en équipe, c'est le/la pair.e qui prend en premier.. je parle en connaissance de cause quand, etant comme pair du secteur de l'addicto/Rdr. Ayant travaillé dans différentes équipe dans le secteur de l'hébergement avec des pair.es et ayant beaucoup d'ami.es proches qui font ces tafs la maintenant, j'ai pu vivre de pres, de loin, les dynamiques d'équipe et institutionnelles liés a la question d'embauche de pair.
Comme l'a dit Pierre, l'expérience ne fait pas tout, comme le diplôme d'ailleurs, apprendre a écouter, accompagner, être présent avec les gens, ca s'apprend. C'est un côté a ne pas négliger je pense.

Désolé je me mélange un peu les pinceaux, c'est un sujet qui me touche qui est indissociable de mon identité professionnelle et personnelle. Car je suis usager de drogue, usager de service d addicto et de Rdr, et travailleur social, différentes choses s'imbriquent pour moi. Je déplore aussi peut être le manque d'accompagnement propose, lors d'une prise de poste car ça vient bouger pleins de choses. C'est important de ne pas se sentir seul, et de ne pas l'être en fait tout court... Je l'ai été pour le coup plutôt... Avec une quipe pas très bienveillante.

En tout cas ça peut être un métier passionnant, enrichissant et valorisant suivant ton lieu d'intervention, ton équipe, tes liens avec les usagers, le moment de ta vie. Et l'accompagnement des pairs par des pairs est essentiel et profondément pertinent.
Je vais pas continuer mon roman sur ce sujet..

Amicalement
Reputation de ce commentaire
 
Texte mis dans les morceaux choisis de Psychoactif. (pierre)

 
#8 Posté par : pierre 07 juillet 2024 à  21:03

Frontkickkk a écrit

Depuis peu un autre usager a été embauché, c'est qui plus est un vieux pote d'une confiance absolue, je parle de cela car c'est un point a souligner, le fait de ne pas être seul, et ne pas se sentir seul, ne pas être que la caution tox de l'équipe et de l'institution.

C'est tres important dans l'embauche des pairs-aidant. Ne pas être seul, être plusieurs meme, pour ne pas se faire écraser par l'institution et avoir du pouvoir face aux autres pros.

Je vous donne une définition que je trouve pertinente du savoir expérientiel :

le savoir expérientiel est généralement identifié par le matériau indispensable à sa production – l’expérience –, il se caractérise pourtant par une élaboration syncrétique mobilisant tout à la fois le vécu personnel, la réflexion sur le témoignage et l’avis de pairs, l’observation de situations similaires ou connexes, les résultats de raisonnements analytiques, l’appropriation d’autres contenus (éventuellement scientifiques), (Gardien 2017)

Cette définition replace le savoir expérientiel, qui est beaucoup plus que l'expérience.  C'est ce que nous faisons sur PA. Il y a le savoir issu de l'expérience qui est raconté, et nous apportons d'autres témoignages similaires, nous discutons ce savoir entre pairs, nous apportons des éléments scientifiques.... ce qui permet une réflexivité et une réélaboration de son propre savoir.

Par ailleurs, il y a des chercheurs qui ont inventé un terme : la pairjectivité. Le savoir pairjectif, c'est le savoir expérientiel reconnu par l'ensemble d'une communauté (ici PA). C'est tres loin du savoir expérientiel du PUD seul dans son coin.

Sur PA, c'est par exemple le savoir autour du darkweb ou de la dose à prendre pour atteindre tel effet.... le savoir pairjectif est extrémement vaste. Pratiquement tout le psychowiki est du savoir pairjectif !


Remonter

Pied de page des forums