Soirée kétamine et macchabée
(cherchez l’erreur ?)
Trigger Warning : mort
Disclaimer : Ceci n'est pas un Trip Report, c'est plutôt une tranche de vie, d'une situation très spéciale qu'il m'est arrivé très récemment. Cependant j'y décris les effets de la kétamine sur moi et mes amis, vaguement.
Hier soir, j’organisais une petite soirée kétamine avec quelques de mes amis et mon copain. Nous n’étions que quatre à toucher à notre petit gramme de ké, les trois autres sont restés à la weed. Pour mon copain, c’était la toute première fois à la kétamine, les deux autres y sont habitués, mais plutôt des consommateurs occasionnels et quant à moi j’en ai consommé deux ou trois fois dans ma vie.
Plus tôt dans l’après-midi, en faisant le ménage, je suis sortie sur mon balcon et j’ai été interpelée par la présence d’une ambulance et d’une voiture de police, toutes deux garées dans ma rue, juste en face. Je n’ai jamais vu de voiture de police dans ma rue et cela fait un an et quelques mois que j’habite mon appartement. C’est une petite rue, pas un gros boulevard, donc ma curiosité fut piquée.
En début de soirée, mes amis arrivent petit à petit. Tous me disent la même chose en arrivant, même après 21h : il y a une voiture de flics qui reste garée en bas en face de chez moi. Mes amis se plaignaient aussi d’une odeur nauséabonde dans les escaliers. Je leur ai confirmé que ces derniers temps ça puait un peu dans les escaliers, oui, mais bon, on ne s’affole pas plus, chez moi tout va bien, ça doit être quelqu’un qui a laissé traîner ses poubelles en partant en vacances. La voiture de police me stresse un peu plus, quant à elle mais je me dis que dans mon malheur j’ai bien fait de commander ma ké en livraison à domicile la semaine précédente et non pas le soir même comme je fais habituellement lors des soirées avec prod qui se déroulent chez moi. Un ami me rassure en me disant qu’on est pas dans la rue, ils ne peuvent pas fouiller mon appartement comme ça, j’ai de toute façon vraiment pas grand chose de répréhensible et je ne suis pas intéressante pour eux : on est juste des jeunes en soirée dans un domicile privé, on ne fait de mal à personne, on est pas impliqués dans de la vente de stups, la musique n’est même pas si forte que ça. Je reste préoccupée par la présence de la voiture de police, mais je laisse la soirée se poursuivre.
Mes amis et moi sommes du genre à parler fort, mon copain, un de mes amis et moi-même ayant un TDAH (Trouble Déficitaire de l’Attention avec Hyperactivité) avec l’hyperactivité très présente, nous avons du mal à réguler notre flux et notre volume de parole, sans parler des loghorrées verbales (vomir des paroles, parler de tout de rien sans fin et sans trop contrôler, surtout dans le stress ou dans l’euphorie), nous parlions de sujets sensibles un peu fort sur le balcon en face de la voiture de flics, bien que nous soyons en quatrième étage, à partir de là, j’ai essayé d’être super vigilante. A chaque fois qu’un de mes potes parlait un peu trop fort que ce soit de théories sur les champignons hallucinogènes ou de la dernière fois qu’ils ont consommé de la cocaïne, je flippais, je suis une fille de nature très anxieuse. Mais tout allait bien, j’essayais de me rassurer en me disant qu’on est pas super intéressants pour eux, on est pas dealers, on a pas 10 grammes sur nous et on embête personne, comme m’avait rassuré mon ami plus tôt, de plus ils sont dans leur voiture, vitres fermées, et on est pas si proches du nez-de-chaussée. J’inspire, j’expire, ça va aller.
On commence à préparer nos traces de ké, toujours avec la carte vitale, simple tradition plutôt ironique que nous avons. Ma meilleure amie, qui s’en occupe travaille la matière, déjà en paillettes pas trop grossières, déjà cuisinée, plutôt propre. Je découpe pendant ce temps les pailles de chacun : tout est enfin prêt. On prend tous notre première trace, on laisse la dernière un peu plus petite (à sa demande) pour mon copain qui découvre cette substance et c’est parti.
Pour ma meilleure amie et moi, la ké monte assez vite, je me sens légère, je plane, j’ai du mal à me déplacer dans l’appartement, je tourne au ralenti et mes mouvements sont mal coordonnés, ça fait rire la galerie. Je sens que mon corps et mon esprit se séparent en quelque sorte, je ne suis pas très coordonnée dans mes mouvements, je fais n’importe quoi n’importe où et je n’ai aucune concentration, mon trouble de l’attention en sueur. Je danse sur de la hardtek comme si je faisais un cours de tai-chi : ça n’a strictement aucun sens, mais je suis dans ma bulle, dans mon monde, je me laisse porter, tout me semble si calme, si paisible dans ma tête. Le goût chimique désagréable en gorge de la ké me dérange moins que lors de mes premières prises de kétamine, c’est rassurant. Mon copain, me voyant monter, me dit d’abord qu’il ne sent rien, ou du moins pas grand chose et à peine il prononce la phrase : « C’est en combien de temps que c’est sensé monter ? Je sens pas grand chose… » que son visage change, il se détend et enchaîne aussitôt en disant : « Ah…Je vois, en fait, c’est en train de monter pour moi aussi… ». On s’enlace et c’est si agréable de s’enlacer de la sorte sous les effets de la kétamine, on reste collés l’un à l’autre quelques minutes avant que ma meilleure amie ne me dise comme à son habitude : « Oh, je suis pas là pour tenir la chandelle, moi ! ». On rigole un peu, et on finit par se poser sur mon lit double à quatre, nous, les quatres fantastiques sous kétamine. Mon amie nous balance des phrases comme « Je suis dans l'océan » ou bien « Je vois une anguille qui passe les gars ! », elle nous fait mourir de rire, je sais que la ké lui a toujours fait autant effet, mais ça m'avait manqué de voir ça. Elle nous raconte des trucs sans aucun sens, j'ai vaguement enregistré une partie de son monologue sur mon téléphone, où elle explique qu'elle doit prendre au petit matin un taxi pour San Francisco à la gare routière car elle a rendez-vous pour boire un café avec Britney Spears, un moment qui restera dans les annales, pour le coup, on n'oubliera jamais ses mots.
Nous parlons à nouveau de sujets "touchy" sur le balcon, sans vraiment y faire attention, et je repense à la présence de la voiture de flics : je stresse à nouveau et je me demande : « Que vont-ils faire ? ». Je stresse juste un peu et je planque le tube fermé avec la ké qu’il nous reste dans ma trousse à maquillage. C’est peut-être une cachette grillée d’avance ou un geste ridicule, un peu parano, mais ça me rassurait de prendre cette précaution, n’étant pas sûre à 100% des risques. En soi, mon copain et moi n’avons pas fumé de weed ce soir (et on fume assez rarement, je parle d’une fois comme ça tous les 2-3 mois) et mon appartement ne sent pas l’herbe, ceux qui fument le font dehors, et l’odeur s’estompe rapidement il n’y a qu’un pétard à al fois et nous sommes plusieurs balcons à mon étage. S’ils veulent nous tester, je serai au moins négative à ça. Je ne sais pas s’ils dégainent des test qui détectent la ké dans ce genre de cas, mais c’est moins flagrant que l’herbe ? Je m’emmêle les pinceaux et je me pose des questions qui ne tiennent même pas la route, la ké ne m’aide pas.
A plusieurs moments, en allant dans les pièces de l’appartement placées proches de la porte d’entrée, je sentais une odeur nauséabonde. Je me demandais si quelqu’un était malade, avait la diarrhée ou autre. On mettait du désodorisant en spray pour intérieur plusieurs fois dans l’appartement, en insistant bien sur les pièces proches de l’entrée, heureusement, la pièce à vivre et la chambre sont séparées des pièces de l’entrée par une porte, ce qui nous laissait dans la zone la plus respirable, tout de même. Deux de mes amis me font remarquer que ça ressemble à de l’odeur de charogne, moi qui n’y ai jamais été spécialement confrontée, je les écoute, car je ne reconnaissais clairement pas l’odeur, mais au moins ça se rapprochait à mes yeux d’une odeur de poubelle, de pourriture, de moisi et pas uniquement. Je me contente de fermer la porte de mon salon et d’ouvrir grand toutes mes fenêtres, ça reste respirable.
Un peu plus d’une heure après la prise de la première trace, on ne pense pas plus que ça à l’odeur qu’on masque de temps en temps au spray, je regarde les autres et je leur demande s’ils ne veulent pas une autre petite traçounette pour la route, mon copain me dit que ce qu’il a pris lui suffit, mon amie est complètement ailleurs et me fait signe que ça sera pas la peine non plus, il reste alors notre autre ami qui est carrément chaud pour me suivre.
Il me demande si je veux apprendre travailler la matière et faire les lignes, je rigole et je luis dis que je suis totalement partante pour apprendre. Il me guide, me dit ce que je dois faire, me conseille sur le geste et me félicite à la fin d’avoir fait ça comme une pro dans l’état où j’étais. Bon, c’est pas super compliqué en soi et quand on veut vraiment sa trace de ké, on trouve toujours un moyen de la travailler avec brio, je pense. Je découpe de nouvelles pailles, on prend notre trace, et on trinque à la boisson énergisante : et c’est reparti pour une montée. Pour de la ké achetée 30 euros le gramme, c’est la plus forte en effets à laquelle j’ai goûté, ça fait plaisir, mon pote, plus fin connaisseur que moi me confirme que ma ké est pas mal, je suis contente. Petit à petit, l’odeur gagnait la pièce à vivre et s’intensifiait, on se planquait tous sur le balcon, et j’insistais à nouveau sur le spray désodorisant. Je sais que le concept de ce genre de spray c’est de masquer une odeur en en rajoutant une par dessus, je sais que ça ne sentait pas la rose pour autant, mais la charogne à la rose, un juste milieu déjà un peu mieux.
Cela fait une heure d’écoulée à nouveau depuis la trace précédente, les autres sont bien, je vois qu’ils n’ont veulent pas plus, alors sur un coup de tête un peu ridicule, je prends discrètement le tube où est conservé la ké, je découpe une paille et je prends un plateau propre dans ma cuisine que je camoufle sans soucis. Je prétexte avoir envie d’aller aux toilettes pour me faire une trace en catimini. Je sais, c’est pas ouf comme comportement, mis tout s’est bien fini. J’ai versé une quantité infime de ké sur mon plateau, j’ai travaillé ça comme on venait de m’apprendre un peu plus tôt et hop : droit dans le naseau. Ça n’a pas vraiment relancé de montée, juste un peu poursuivi les effets, mais j’étais bien et c’était tout de même amusant. Ça m’a conforté dans l’idée que la ké pour moi ça resterait une trace ou deux à l’occasion, c’est bien, c’est sympa, mais ça suffit.
Nous avons finalement avons vu arriver en bas de chez moi un véhicule de la morgue vers deux heures du matin : il n’y plus aucun doute, ils viennent enlever un cadavre dans mon immeuble. On les a vu sortir un brancard, on les a entendu rentrer dans le bâtiment et ressortir avec le même brancard couvert d’un tissu blanc. C’était un peu badant en un sens, mais surtout, quel horrible hasard : je n’ai pas trop été présente chez moi durant tout l’été, j’ai pas mal vadrouillé à droite à gauche, mais quand je rentrais passer un jour ou deux à mon domicile, il est vrai que dans les escaliers, depuis deux ou trois semaines, je sentais une odeur de poubelle, de pourriture de loin, mais pas aussi forte. Je ne savais pas d’où elle venait, bien que ce n’était clairement pas de chez moi. Je ne me posais pas de questions, je me disais quelqu’un finira bien par s’en plaindre. La police est partie juste après la voiture de la morgue. C’était donc carrément un macchabée et non pas quelqu’un parti en vacances qui aurait oublié ses poubelles ou un truc à la con. Et par quel hasard, le jour où je rentre, le jour où j’invite mes amis faire une soirée chez moi, un jour où je suis sous kétamine, ils viendraient récupérer le corps ? Au moins les flics étaient pas là pour nous, mais ça a clairement créé une ambiance assez lourde et macabre. Sérieusement, j’ai plus balisé à cause de la présence des flics que pour le cadavre.
Mes amis ne cessaient de me demander si j’allais réussir à dormir sereinement en me disait qu’il y avait eu un cadavre dans mon immeuble, même carrément probablement dans mes voisins, mais je suis restée assez pragmatique et mon copain aussi : il ne s’est rien passé dans mon appartement et surtout le cadavre n’était pas là, et puis c’est sûrement une personne âgée décédée comme ça, pas forcément un meurtre ou un truc si terrible. Mes condoléances à la famille et tout mon respect au défunt, mais la vie continue, j’ai aéré mon logis toute la nuit et l’odeur a disparu. Le lendemain, nous nous sommes réveillés comme des fleurs avec mon copain et on s’est dit à quel point la situation de la veille avait été cocasse, mais sacrément drôle : un souvenir gravé à jamais dans nos mémoires.
Catégorie : Tranche de vie - 27 août 2023 à 19:42
#kétamine #soirée
1